Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 24-OFP-045

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :

  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes;
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle;
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne;
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête;
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi;
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :

  • des renseignements qui révèlent des
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet

En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins;
  • des renseignements sur le lieu de l’incident;
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES au sujet de la décharge d’une arme à feu policière contre un homme de 39 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES[1]

Le 30 janvier 2024, à 6 h 29, le Service de police régional de Peel (SPRP) a signalé ce qui suit à l’UES.

Le 30 janvier 2024, vers 14 h 32, on a signalé au SPRP qu’il y avait une personne en situation de crise dans le secteur de la rue Port Est, à Mississauga. Des agents du SPRP, y compris des membres de l’Unité tactique et de secours (UTS), se sont rendus sur les lieux et ont vu un homme se couper la gorge avec un morceau de vitre. Un pistolet à impulsion électrique (PIE) a été déchargé pour empêcher l’homme de se faire du mal, mais en vain. Une arme ARWEN (Anti-riot Weapon Enfield) a également été déchargée, après quoi l’homme s’est effondré et a été arrêté. Après son arrestation, les agents ont constaté que l’homme avait des coupures au cou et aux genoux. Il a été transporté à l’hôpital général de Mississauga et y a été admis en vertu de la Loi sur la santé mentale.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 31 janvier 2024 à 8 h 44

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 31 janvier 2024 à 8 h 47

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des

sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Personne concernée (« plaignant ») :

Homme de 39 ans, a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

Le plaignant a participé à une entrevue le 2 février 2024.

Témoin civil (TC)

TC A participé à une entrevue

Le témoin civil a participé à une entrevue le 2 février 2024.

Agent impliqué (AI)

AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué; ses notes ont été reçues et examinées

Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue

AT no 2 A participé à une entrevue

AT no 3 A participé à une entrevue

AT no 4 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à des entrevues entre le 7 février 2024 et le 16 février 2024.

Éléments de preuve

Les lieux

Les événements en question se sont déroulés sur le balcon d’un logement résidentiel situé dans un immeuble du secteur de la rue Port Est, à Mississauga, et autour de ce balcon.

Éléments de preuve matériels

Le 31 janvier 2024, l’UES a recueilli les éléments de preuve suivants auprès du SPRP :

  • Grenade Flash Bang de Combined Tactical Systems, modèle mini bang 7290M (2)
  • Douille d’ARWEN (déchargée), modèle AR-1
  • Douille d’ARWEN (déchargée), modèle AR-1[2]

Figure 1 — L’ARWEN

Figure 1 — L’ARWEN

Figure 2 — Les douilles d’ARWEN

Figure 2 — Les douilles d’ARWEN

Éléments de preuve médico-légaux

Données sur le déploiement du PIE de l’AI[3]

Le PIE de l’AI était un Taser 7.

Le PIE a été armé à 16 h 45 min 34 s[4], le 30 janvier 2024.

À 16 h 45 min 36 s, l’agent a appuyé sur la détente. La première cartouche a été déployée et de l’électricité a été déchargée pendant 3,793 secondes.

Données sur le déploiement du PIE de l’AT no 1

Le PIE de l’AT no 1 était un Taser 7.

Le PIE a été armé à 16 h 45 min 56 s.

À 16 h 45 min 59 s, l’AT no 1 a appuyé sur la détente. La première cartouche a été déployée et de l’électricité a été déchargée pendant 5,058 secondes.

Données sur le déploiement du PIE de l’AT no 4

Le PIE de l’AT no 4 était un Taser 7.

Le PIE a été armé à 16 h 45 min 42 s et la détente a été actionnée. La première cartouche a été déployée et de l’électricité a été déchargée pendant 1,815 seconde.

À 16 h 45 min 47 s, la deuxième cartouche a été déployée et de l’électricité a été déchargée pendant 5,073 secondes.

À 16 h 45 min 54 s, le bouton de l’arc droit a été enfoncé et de l’électricité a été déchargée pendant 6,867 secondes.

À 16 h 46 min 1 s, le bouton de l’arc droit a été enfoncé et de l’électricité a été déchargée pendant 16,436 secondes.

À 16 h 46 min 18 s et, de nouveau, à 16 h 46 min 30 s, le bouton de l’arc droit a été enfoncé et de l’électricité a été déchargée pendant 9,492 secondes et 6,082 secondes, respectivement.

Le bouton de l’arc droit a été actionné à 16 h 46 min 31 s, puis de nouveau à 16 h 46 min 37 s, et de l’électricité a été déchargée une fois pendant 4,975 secondes. À 16 h 46 min 47 s, le bouton de l’arc droit a été enfoncé, puis, de nouveau, à 16 h 47 min 1 s, et de l’électricité a été déchargée pendant 4,963 secondes et 4,965 secondes, respectivement.

Données sur le déploiement du PIE de l’AT no 3

Le PIE de l’AT no 3 était un Taser 7.

Le PIE a été armé à 16 h 46 min 22 s et la détente a été actionnée. La première cartouche a été déployée et de l’électricité a été déchargée pendant 3,819 secondes.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[5]

Vidéo captée par la caméra d’intervention de l’AI

Vers 15 h 20, le 30 janvier 2024, l’AT no 4 et l’AT no 2 tentent de communiquer avec le plaignant à travers la porte de son appartement. Ils tentent d’utiliser une clé passe-partout pour ouvrir la porte, mais sans succès.

À 15 h 28, l’audio de la caméra d’intervention est désactivée et les agents surveillent, sur un téléphone cellulaire, les images provenant du drone de l’unité de soutien aérien (USA).

À 16 h 39, l’audio est réactivé.

À 16 h 45, l’AT no 4 force la porte de l’appartement. L’AT no 2 entre et l’AI le suit avec un ARWEN en main. Le plaignant se trouve sur le balcon. L’AI tire trois rondes d’ARWEN sur le plaignant en succession rapide. Quatre agents de l’UTS se précipitent vers le plaignant sur le balcon alors que l’AI reste sur le seuil de la porte-patio. Les agents de l’UTS disent : [Traduction] « Ouvrez votre main! Ouvrez votre main! » Plusieurs PIE sont déchargés. Le plaignant crie à l’aide et gémit de douleur.

À 16 h 47, le plaignant est menotté derrière le dos et un ambulancier paramédical lui administre un sédatif. L’AI informe l’ambulancier que l’ARWEN a atteint le plaignant au milieu de son corps.

À 16 h 54, le plaignant est installé sur une civière-chaise. L’AI récupère deux cartouches d’ARWEN et retourne à son véhicule de police.

Vidéo captée par la caméra d’intervention de l’AT no 3

Le 30 janvier 2024, vers 15 h 32, l’AT no 3 marche dans le couloir en direction de l’appartement du plaignant. Sur un téléphone cellulaire, il regarde les images provenant d’un drone de l’USA et voit le plaignant se couper le cou et se donner des coups au cou avec un morceau de vitre.

Vidéo captée par la caméra d’intervention de l’AT no 2

À 15 h 20, l’AT no 2 est à la porte de l’appartement.

L’AT no 2 entre dans l’appartement, ouvre la porte-patio, puis l’AI décharge son ARWEN. On entend le bruit des dispositifs de distraction qui ont été déployés. L’AT 2 sort sur le balcon. Le plaignant se trouve contre la balustrade. Trois PIE sont déchargés à plusieurs reprises en mode sonde et en mode paralysant. Le plaignant tombe au sol, en gémissant de douleur, alors que les décharges de PIE continuent, et l’AI met son pied sur sa tête, son visage et son épaule. L’AT no 2 tente d’agripper le bras gauche du plaignant et d’ouvrir son poing. Les agents de l’UTS luttent avec le plaignant pour parvenir à maîtriser son bras droit.

À 16 h 47, les mains du plaignant sont menottées derrière son dos.

Vidéo captée par la caméra d’intervention de l’agent no 1

Le 30 janvier 2024, à 15 h 43, l’agent no 1 marche dans le couloir, passe devant l’appartement du plaignant, se rend dans une cage d’escalier et monte l’escalier.

À 16 h 44, l’agent no 1 se tient sur la balustrade d’un balcon, prêt à descendre en rappel sur le balcon de l’appartement du plaignant. L’agent no 2 et l’agent no 3 sont également sur la balustrade avec lui.

À 16 h 45, on entend deux fortes détonations et un dispositif de distraction est lancé sur le balcon du plaignant. Plusieurs voix ordonnent au plaignant de se mettre au sol.

À 16 h 46, l’agent no 1 descend en rappel jusqu’au balcon du plaignant. Sur le balcon, il y a une chaise en feu. Il éteint le feu et lance la chaise en bas. L’agent no 1 se tient à l’écart pendant que les agents de l’UTS arrêtent le plaignant, que l’on ne peut voir, car des agents de l’UTS bloquent la vue.

À 16 h 47, le plaignant est en garde à vue.

Vidéo captée par la caméra d’intervention de l’agent no 3

Dans les images, l’agent no 3 se trouve sur le balcon au-dessus de l’appartement du plaignant. Il est muni d’un dispositif de rappel et tient un dispositif de distraction dans sa main droite. Il se trouve entre l’agent no 2 et l’agent no 1. À 16 h 45, l’agent no 3 déploie un dispositif de distraction sur le balcon du plaignant, puis l’agent no 1 fait de même, et on entend des détonations.

À 16 h 46, on entend des bruits de lutte et l’agent no 3 descend en rappel jusqu’au balcon du plaignant. Des PIE sont déchargés continuellement pendant une soixantaine de secondes et on entend le plaignant crier de douleur.

À 16 h 48, l’agent no 3 met le pied sur le balcon du plaignant. Un ambulancier paramédical examine le plaignant.

Vidéo captée par la caméra d’intervention de l’agent no 2

L’agent no 2 reste sur la balustrade du balcon situé au-dessus de l’appartement du plaignant. Il ne descend pas en rappel sur le balcon du plaignant.

Vidéo captée par la caméra d’intervention de l’agent no 4

L’enregistrement de la caméra d’intervention de l’agent no 4 débute le 30 janvier 2024, à 15 h 12 min 34 s.

L’agent no 4 est présent lorsqu’un travailleur d’intervention en cas de crise tente de parler au plaignant. Il se rend à un autre étage lorsque les agents de l’UTS entrent dans l’appartement du plaignant.

Vidéo captée par la caméra d’intervention de l’AT no 1

À 16 h 39, l’AI discute du plan de match. L’AT no 2 assurera la « couverture létale », l’AI portera l’ARWEN, l’AT no 4 forcera la porte et l’AT no 1 se tiendra prêt à fournir une couverture létale ou à décharger son PIE.

Sur le balcon, l’AT no 1 décharge son PIE sur le plaignant. Il passe son PIE à l’AI, puis lutte avec le plaignant pour tenter d’agripper son bras droit et le sortir de sous son corps.

Images captées par téléphone cellulaire

À 14 h 49, le 30 janvier 2024, on voit le plaignant marcher d’un bord à l’autre sur le balcon en tenant la balustrade à deux mains.

À 16 h 43, des agents de l’UTS descendent en rappel depuis le balcon situé au-dessus de celui du plaignant. Le plaignant semble sursauter lorsqu’un dispositif de distraction est déployé sur le balcon. Un agent de l’UTS apparaît sur le balcon et un deuxième dispositif de distraction est déployé. Une lutte s’ensuit entre plusieurs agents de l’UTS et le plaignant, et deux agents de l’UTS descendent en rappel jusqu’au balcon du plaignant.

Images captées par un drone du SPRP

Le premier enregistrement commence à 15 h 42 min 3 s, le 30 janvier 2024. Le plaignant marche sur le balcon, en tenant des débris, et ouvre et ferme la porte-patio.

À 15 h 47, le plaignant tient un morceau de vitre dans sa main. Il apporte ensuite une chaise sur le balcon.

Le deuxième enregistrement commence à 15 h 58 min 13 s. Le plaignant ouvre et ferme la porte-patio et, à 16 h 2, il crie à l’aide.

Le troisième enregistrement commence à 16 h 15 min 20 s. Le plaignant s’assoit sur le balcon et entreprend de se couper au cou avec un morceau de vitre. Les agents de l’UTS se trouvent sur un balcon au-dessus de lui.

Le quatrième enregistrement commence à 16 h 31 min 29 s. On voit le plaignant se couper le cou et se donner des coups au cou avec différents morceaux de vitre. Son cou est ensanglanté.

Le cinquième enregistrement, qui commence à 16 h 38 min 40 s, est la vue de « l’opérateur ». Le plaignant s’assoit sur une chaise et se coupe et se donne des coups au cou à plusieurs reprises avec un morceau de vitre. Trois agents de l’UTS — l’agent no 3, l’agent no 2 et l’agent no 1 — descendent en rappel depuis un balcon situé au-dessus de l’appartement du plaignant.

À 16 h 45, le plaignant s’approche de la porte-patio et un agent de l’UTS ouvre la porte depuis l’intérieur de l’appartement. La vitre de la porte-patio éclate et le plaignant se déplace sur le côté gauche du balcon. Deux dispositifs de distraction sont déployés et une chaise prend feu. L’AT no 2, l’AT no 3 et l’AT no 4 s’approchent du plaignant et le portent au sol sur le balcon. Plusieurs agents de l’UTS tentent de maîtriser le plaignant et deux agents de l’UTS descendent en rappel sur le balcon du plaignant. La chaise en feu est jetée en bas.

À 16 h 56, le plaignant est amené à l’intérieur de l’appartement.

Documents obtenus auprès du service de police

Sur demande, l’UES a obtenu les documents suivants auprès du SPRP entre le 31 janvier 2024 et le 7 mai 2024 :

  • Notes — agent 3, agent 1, AI, l’AT 1, agent 2, AT 2, AT 3 et AT 4
  • Images des caméras d’intervention — AT 4, AT 3, agent 1, AT 2, agent 2, agent 3, agent 4 et AI
  • Rapport sur les détails de l’incident
  • Historique de l’interaction locale — le plaignant
  • Liste des agents qui sont intervenus
  • Rapport — renseignements sur la personne — le plaignant
  • Rapport d’incident
  • Politique — négociations en situation de crise
  • Politique — santé mentale
  • Données sur le déploiement des PIE — AT 4, AT 1 et AI
  • Enregistrements de communications
  • Images captées par le drone de l’USA

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a obtenu les éléments suivants auprès d’autres sources entre le 2 février 2024 et le 16 février 2024 :

  • Dossiers médicaux du plaignant, fournis par l’Hôpital de Mississauga, Trillium Health Partners
  • Images captées par téléphone cellulaire

Description de l’incident

La preuve recueillie par l’UES, laquelle comprend des entrevues avec le plaignant, des témoins de la police et des témoins civils, ainsi que des enregistrements vidéo qui ont capté différentes parties de l’incident, dresse le portrait suivant des événements. Comme la loi l’y autorise, l’AI n’a pas consenti à participer à une entrevue avec l’UES. Il a cependant autorisé la transmission de ses notes.

Dans l’après-midi du 30 janvier 2024, des agents du SPRP ont été dépêchés à un appartement situé dans le secteur de la rue Port Est, à Mississauga. La police avait reçu un appel signalant une perturbation impliquant le résident de l’appartement — le plaignant. Le plaignant criait et était très agité. Il criait que des policiers se trouvaient chez lui avec des chiens et, à quelques reprises, on l’a vu se tenir à l’extérieur de la balustrade de son balcon, comme s’il était sur le point de sauter.

Des agents en uniforme sont arrivés sur les lieux en premier, suivis de peu par des agents de l’UTS, entre 15 h et 15 h 30. Depuis l’extérieur de la porte de l’appartement du plaignant et depuis le sol, les agents ont tenté de communiquer avec le plaignant, en vain. Il n’y avait aucun doute que les facultés mentales du plaignant étaient altérées et qu’il avait perdu pied avec la réalité.

Le plaignant, qui avait ingéré de la cocaïne et d’autres drogues, était dans un état de psychose induite par la drogue. Il craignait que les agents de police lui fassent du mal et avait barricadé sa porte d’entrée pour les empêcher d’entrer. À un moment donné, il a saisi un morceau de vitre et s’en est servi pour entreprendre de se couper le cou. C’est à ce moment que la police a décidé de forcer la porte de l’appartement afin de l’appréhender en vertu de la Loi sur la santé mentale.

Le plan était que les agents de l’UTS allaient forcer la porte d’entrée et pénétrer dans l’appartement pendant que trois autres agents de l’UTS allaient descendre en rappel sur le balcon du plaignant. Une fois les agents en place, le signal a été donné, vers 16 h 45. L’AT no 4 a forcé la porte d’entrée et les agents, menés par l’AT no 2, sont entrés dans l’appartement. L’AI se trouvait derrière l’AT no 2, tandis que le plaignant se trouvait sur le balcon et faisait face à son appartement. L’AI a déchargé son ARWEN à trois reprises et a atteint le plaignant au torse. À peu près au même moment, des agents ont lancé des dispositifs de distraction sur le balcon et sont descendus en rappel. Plusieurs PIE ont été déchargés peu après. Une lutte s’est engagée entre les agents et le plaignant. Après une brève lutte, les agents sont parvenus à amener les mains du plaignant derrière son dos et à le menotter.

Le plaignant a été transporté à l’hôpital où l’on a constaté qu’il n’avait subi aucune blessure grave.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel — Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :

a) soit à titre de particulier;

b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public;

c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public;

d) soit en raison de ses fonctions,

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Article 17 de la Loi sur la santé mentale — intervention de l’agent de police

17. Si un agent de police a des motifs raisonnables et probables de croire qu’une personne agit ou a agi d’une façon désordonnée et qu’il a des motifs valables de croire que cette personne :

a) soit a menacé ou tenté de s’infliger des lésions corporelles ou menace ou tente de le faire;

b) soit s’est comportée ou se comporte avec violence envers une autre personne ou de manière à lui faire craindre qu’elle lui causera des lésions corporelles;

c) soit a fait ou fait preuve de son incapacité de prendre soin d’elle-même,

et qu’en plus, il est d’avis que cette personne souffre, selon toute apparence, d’un trouble mental d’une nature ou d’un caractère qui aura probablement l’une des conséquences suivantes :

d) elle s’infligera des lésions corporelles graves;

e) elle infligera des lésions corporelles graves à une autre personne;

f) elle subira un affaiblissement physique grave,

et qu’il serait dangereux d’agir selon les termes de l’article 16, il peut amener sous garde cette personne dans un lieu approprié afin qu’elle soit examinée par un médecin.

Analyse et décision du directeur

Le 30 janvier 2024, le SPRP a informé l’UES que l’un de ses agents avait, plus tôt ce jour?là, déchargé un ARWEN sur un homme — le plaignant — au cours de son arrestation. L’UES a ouvert une enquête et a déterminé que l’AI était l’agent impliqué dans cette affaire. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation de la preuve, je n’ai aucun motif raisonnable de croire que l’AI a commis une infraction criminelle en lien avec l’utilisation de l’ARWEN.

Comme le prévoit le paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents de police sont à l’abri de toute responsabilité criminelle pour l’usage de la force dans l’exercice de leurs fonctions, pourvu que cette force soit raisonnablement nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou permis de faire.

L’AI et ses collègues de l’UTS étaient fondés à pénétrer dans l’appartement du plaignant et à chercher à l’appréhender en vertu de l’article 17 de la Loi sur la santé mentale. Le plaignant souffrait de troubles mentaux à ce moment-là et représentait clairement un danger imminent pour lui-même, compte tenu de son comportement sur le balcon et de son épisode d’automutilation avec la vitre.

Je suis également convaincu que l’AI a seulement utilisé la force raisonnablement nécessaire pour arrêter le plaignant, sans plus. Le plaignant se trouvait sur le balcon et la balustrade était à portée de main. Les agents devaient l’incapaciter temporairement le plus rapidement possible pour éviter qu’il ait l’occasion de sauter. C’est exactement pourquoi l’agent a déchargé son ARWEN, dont les projectiles ont atteint le plaignant. En effet, l’AI et ses collègues sont parvenus, en utilisant l’ARWEN et d’autres moyens[6], à placer le plaignant en garde à vue sans lui infliger des blessures graves.

Pour les motifs qui précèdent, je conclus qu’il n’y a pas lieu de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.

Date : 29 mai 2024

Approuvé électroniquement par

Joseph Martino

Directeur

Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) À moins d’indication contraire, les renseignements fournis dans cette section reflètent les renseignements fournis à l’UES au moment de la notification et ne reflètent pas nécessairement les faits constatés par l’UES dans le cadre de son enquête. [Retour au texte]
  • 2) L’AI a déchargé trois cartouches d’ARWEN, mais seules deux cartouches ont été retrouvées par la SPRP sur les lieux. [Retour au texte]
  • 3) L’AI a déployé son PIE après avoir déchargé son ARWEN. [Retour au texte]
  • 4) L’heure provient de l’horloge interne de l’arme et n’est pas nécessairement synchronisée avec l’heure réelle. [Retour au texte]
  • 5) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués, comme le prévoit le paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les principaux éléments des documents sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]
  • 6) Les décharges de PIE n’étaient pas au cœur de l’enquête de l’UES. Cela dit, étant donné les exigences du moment, notamment la présence du plaignant sur le balcon, le fait qu’il était possiblement en possession d’un morceau de vitre qu’il venait d’utiliser pour se couper, et la résistance opposée par le plaignant une fois que les agents sont entrés en contact avec lui physiquement, l’utilisation de PIE par plusieurs agents ne m’appert pas excessive puisqu’il était manifestement impératif de placer le plaignant en sécurité le plus rapidement possible. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.