Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 21-TFP-429

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la décharge d’une arme à feu par la police sur un homme de 33 ans (plaignant).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 30 décembre 2021, à 14 h 24, le Service de police de Toronto a avisé l’UES qu’un agent avait tiré avec son arme à feu sur une personne, soit le plaignant.

Le Service de police de Toronto a signalé que, le 30 décembre 2021, à 11 h 28, des agents de son service avaient répondu à un appel de détournement de véhicule dans le secteur des avenues Danforth et Thyra. Le suspect [maintenant identifié comme le plaignant] et la voiture avaient disparu à leur arrivée. Vers 11 h 50, la voiture a été signalée comme abandonnée près de Kingston Road et de l’avenue Midland. Lorsque les agents ont voulu inspecter le véhicule, le plaignant s’est approché et a sauté sur la voiture de police. Il a refusé d’obéir aux ordres de la police et il s’est montré agressif. Les agents ont déployé une arme à feu comportant un faible risque de mortalité, mais ils ont raté le plaignant. Par la suite, ils ont réussi à l’appréhender après avoir utilisé une arme à impulsions.

Le plaignant a alors été conduit à l’Hôpital Michael Garron, où il a été soumis à un examen en vertu de la Loi sur la santé mentale. Il n’a subi aucune blessure grave. Le personnel de l’hôpital a signalé qu’il avait trouvé des traces de méthamphétamine sur le bout des sondes d’arme à impulsions.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : Le 31 décembre 2021, à 6 h 27

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : Le 31 décembre 2021, à 9 h 47

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 4
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Personne concernée (« plaignant ») :

Homme de 33 ans; a refusé de participer à une entrevue


Témoins civils

TC no 1 A participé à une entrevue
TC no 2 A participé à une entrevue
TC no 3 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à une entrevue le 7 janvier 2022.

Agent impliqué

AI A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées.

L’agent impliqué a participé à une entrevue entre le 31 décembre 2021 et le 5 janvier 2022.


Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue
AT no 3 A participé à une entrevue
AT no 4 A participé à une entrevue
AT no 5 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à une entrevue le 7 janvier 2022.


Éléments de preuve

Les lieux

Le 30 décembre 2021, à 14 h 49, l’enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES est arrivé sur les lieux, à l’intersection de Kingston Road et de l’avenue Midland.

Dans les voies en direction ouest de Kingston Road, à l’ouest de l’intersection, se trouvait une voiture du Service de police de Toronto, une Ford Taurus. Le véhicule était doté de feux d’urgence et d’une sirène qui n’étaient pas activés à son arrivée. La voiture de police était orientée vers l’ouest, dans le milieu de la route. Il y avait des traces de chaussures sur le toit, qui était cabossé sur des surfaces importantes, et les gyrophares avaient aussi été endommagés.

Plus à l’ouest de l’intersection entre Kingston Road et l’avenue Sandown se trouvait un véhicule, prétendument été utilisé par le plaignant, avant son altercation avec les agents.


Figure 1 – Traces de chaussures sur le toit de la voiture de police de l’AT no 5

Figure 1 – Traces de chaussures sur le toit de la voiture de police de l’AT no 5


Figure 2 – Arme à feu comportant un faible risque de mortalité de l’AI

Figure 2 – Arme à feu comportant un faible risque de mortalité de l’AI


Figure 3 – Arme à impulsions de l’AT no 1

Figure 3 – Arme à impulsions de l’AT no 1

Éléments de preuve matériels

Les éléments de preuve recueillis sur les lieux de l’incident sont les suivants :
1 – Projectile « Super Sock »
2 – Cartouche d’arme à impulsions déployée
3 – Porte de cartouche d’arme à impulsions
4 – Identification anti-criminel d’arme à impulsions
5 – Idenfification anti-criminel d’arme à impulsions
6 – Porte de cartouche d’arme à impulsions
7 – Douille d’arme à feu « Super Sock »

Éléments de preuves médicolégaux


Données téléchargées de l’arme à impulsions de l’AT no 1

Un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES a obtenu l’arme à impulsions Taser X2 de l’AT no 1. Une baie était vide et l’autre contenait une cartouche inutilisée. Un rapport hors ligne de l’arme à impulsions a été téléchargé. Voici le résumé des événements survenus durant l’incident.

7958 – Armement – Le cran de sécurité a été retiré et l’arme a été allumée. Les cartouches 1 et 2 étaient prêtes au déploiement.

7959 – Déploiement – La détente a été enfoncée pendant cinq secondes, après l’armement. La cartouche 1 a été déployée pendant cinq secondes, pendant que la cartouche 2 demeurait prête au déploiement.

7960 – Déploiement – La détente a été enfoncée pendant 11 secondes, après le premier déploiement, la cartouche 1 demeurant déployée et la cartouche 2 toujours prête pour le déploiement.

7961 – Déploiement – La détente a été enfoncée pendant six secondes après le deuxième déploiement, la cartouche 1 demeurant déployée et la cartouche 2 toujours prête pour le déploiement.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [1]


Enregistrement d’une caméra d’intervention

Le 3 janvier 2022, l’UES a reçu du Service de police de Toronto l’enregistrement d’une caméra d’intervention. L’enregistrement en couleur comportait la date et l’heure ainsi que le son. Aucune image de la décharge contre le plaignant de l’arme à feu comportant un faible risque de mortalité n’a été captée.


Caméra d’intervention de l’AT no 4

Le 30 décembre 2021, entre environ 11 h 36 min 30 s et 11 h 37 min 0 s, le plaignant était assis au milieu de l’intersection, menotté les mains derrière le dos, et il était en compagnie de cinq agents. Il avait deux sondes d’arme à impulsions logées dans la poitrine.

Entre 11 h 37 min 36 s et 11 h 38 min 20 s à peu près, le plaignant a dit : [Traduction] « J’en ai assez, Monsieur. Je ne suis pas armé. Remettez-moi debout, Monsieur l’agent. Puis, il a ajouté : [Traduction] C’est toi qui m’as fait faire ça, maman. Tu n’es pas… » Le plaignant a continué à crier en disant ceci : [Traduction] « C’est toi qui m’as fait faire tout ça… Je suis prêt à retourner voir ma mère. Je vais faire tout ce que me dit maman. Ma mère est morte. Je suis en train de la tuer. Si vous me faites cela… c’est fini pour toujours. Ma grosse pelote. Je vais te retrouver. »

Entre 11 h 40 min 30 s et 11 h 40 min 56 s environ, le plaignant a dit ceci : [Traduction] « Vous mettez trop de pression sur mes… » en parlant aux deux agents, qui avaient les mains sur ses épaules. L’agent no 1 [2] s’est présenté et il a demandé au plaignant s’il était blessé. Le plaignant a répondu que non. Le même agent a aussi demandé au plaignant s’il avait consommé de la drogue et ce dernier lui a répondu : [Traduction] « Mon gars, je viens juste de recevoir une décharge de taser. »

Caméra d’intervention de l’AT no 1

Le 30 décembre 2021, entre 11 h 45 min 4 s et 11 h 48 min 4 s à peu près, le plaignant a été installé sur la banquette arrière du côté passager d’une voiture de police. L’agent no 1 a avisé le plaignant qu’il était en état d’arrestation pour vol qualifié et vol de véhicule.

Vers 11 h 55 min 28 s, en cherchant le projectile déployé, l’agent no 1 a demandé à l’AI si elle avait atteint le plaignant et celle-ci a répondu : [Traduction] « Je ne crois pas. »

Vers 12 h 4 min 50 s, un homme s’est approché de l’agent no 1 pour faire une déclaration à titre de témoin. Il a donné une description du comportement qu’avait eu le plaignant avant l’arrivée des agents.

Caméra d’intervention de l’agent no 1 [3]

Le 30 décembre 2021, à 11 h 44 min 10 s, l’agent no 2 a fait une brève entrevue avec un témoin civil.


Enregistrement d’une caméra de surveillance de la pharmacie Rexall

Le 18 janvier 2022, le Service de police de Toronto a remis à l’UES l’enregistrement d’une caméra de surveillance d’une pharmacie Rexall. Cet enregistrement était en couleur et comportait des indications de la date et de l’heure, mais il n’y avait pas de son. Voici un résumé de ce qu’on pouvait voir.

Le 30 décembre 2021, à 11 h 23 min 5 s, le plaignant est entré dans la pharmacie et il a poussé plusieurs articles d’un étalage par terre.

À 11 h 23 min 46 s, le plaignant a élancé son poing droit fermé en direction d’un client, qui venait de s’éloigner de la porte de sortie, et il a potentiellement atteint le bras gauche de ce client.


Enregistrement de la caméra de sécurité d’une résidence

Le 30 décembre 2021, l’UES a obtenu l’enregistrement d’une caméra de sécurité d’une résidence montrant des images de l’incident. Voici un résumé de ce qu’on pouvait voir.

Entre 12 h 33 min 56 s et 12 h 34 min 16 s, l’AT no 5 est arrivé à l’intersection. Le plaignant a immédiatement tourné pour se rendre à pied jusqu’à la voiture de police de l’AT no 5 en traversant l’intersection. Il s’est rendu à la porte du côté conducteur de la voiture de police de l’agent no 5, puis il est passé devant la voiture et s’est dirigé vers l’ouest sur Kingston Road. L’AT no 5 a tourné sur Kingston Road, vers l’ouest, pour suivre le plaignant lentement à distance.

Entre environ 12 h 34 min 34 s et 12 h 34 min 42 s, le plaignant s’est retourné, s’est mis à courir vers la voiture de l’AT no 5 et a sauté sur le capot. Il a ensuite sauté sur le toit avant de retourner sur le capot, puis par terre, devant la voiture de police. Le plaignant s’est ensuite mis à marcher vers l’ouest sur Kingston Road, dans les voies en direction ouest. L’AT no 5 l’a suivi lentement dans sa voiture de police.

Vers 12 h 35 min 3 s, le plaignant a dépassé en courant la voiture de l’AT no 5, et il était suivi de l’AI et de l’AT no 1.

Entre à peu près 12 h 35 min 9 s et 12 h 35 min 12 s, le plaignant a cessé de courir et s’est retourné face aux agents. L’AT no 2 est arrivé de l’est et il a heurté le plaignant par-derrière avec son pare-chocs avant. Le plaignant a été poussé, mais n’est pas tombé au sol.

Entre environ 12 h 35 min 16 s et 12 h 35 min 23 s, le plaignant a été touché par l’AT no 1, qui avait tiré dessus avec son arme à impulsions, et il est tombé au sol près de la porte du côté conducteur de la voiture de police de l’AT no 2. L’AI, l’AT no 2 et l’AT no 5 ont tenté de maîtriser le plaignant, qui a réussi à se dégager.

Entre 12 h 35 min 35 s et 12 h 35 min 45 s, le plaignant a reçu une autre décharge d’arme à impulsions et est tombé au sol. L’AT no 2, l’AI et l’AT no 5 l’ont tenu par terre. L’AT no 3 est arrivé à l’intersection, est sorti de sa voiture de police et a aidé à maîtriser le plaignant.


Enregistrement de la caméra interne de la voiture de police de l’AT no 5

Le 12 janvier 2022, l’UES a obtenu, du Service de police de Toronto, l’enregistrement de la caméra interne de la voiture conduite par l’AT no 5. Les images ont été captées le 30 décembre 2021, et les dates et heures indiquées dans l’enregistrement étaient erronées. Il n’y avait pas de son.

À 16 h 33 min 45 s, l’AT no 5 est arrivé à l’entrée nord-ouest de l’intersection entre Kingston Road et l’avenue Midland. Le plaignant s’est dirigé à pied vers la voiture de police de l’AT no 5. Il a levé les deux mains de chaque côté en pointant les index pour simuler un pistolet pointé sur l’AT no 5. Il a fait ce mouvement à deux reprises, puis il s’est approché de la voiture de l’AT no 5, du côté conducteur.

À 16 h 34 min 22 s, le plaignant s’est retourné et a couru en direction de la voiture de police de l’AT no 5, il a sauté sur le capot, puis sur le toit. Il a ensuite sauté du toit du véhicule pour passer devant. Puis, il s’est dirigé vers l’ouest et l’AT no 5 l’a suivi lentement.

À 16 h 34 min 30 s, l’AI est arrivée. Elle est sortie de sa voiture de police en tenant des deux mains une arme à feu comportant un faible risque de mortalité et s’est approchée du plaignant pour l’empêcher de continuer à avancer. Elle a levé son arme pour la pointer sur le plaignant.

À 16 h 34 min 43 s, l’AT no 1 est arrivé et s’est stationné derrière la voiture de l’AI. Il est sorti de son véhicule et s’est approché du plaignant par la gauche, derrière l’AI.
À 16 h 34 min 48 s, l’AI a tiré une fois avec son arme à feu comportant un faible risque de mortalité. Elle a suivi le plaignant en courant du côté droit de la voiture de police de l’AT no 5, tandis que l’AT no 1 suivait en courant du côté gauche du véhicule avec son arme à impulsions dans la main droite.


Enregistrement de la caméra interne de la voiture de police de l’AT no 2

Le 12 janvier 2022, l’UES a obtenu du Service de police de Toronto l’enregistrement de la caméra interne de la voiture de police de l’AI. Les images avaient été captées le 30 décembre 2021 et les dates et heures indiquées n’étaient pas bonnes. Il n’y avait pas de son.

À 16 h 34 min 58 s, l’AT no 2 est arrivé à l’intersection de Kingston Road et de l’avenue Midland. L’AT no 1 s’est dirigé du côté gauche du plaignant en levant, dans sa main droite, une arme à impulsions pointée vers le plaignant. L’AI a marché vers le plaignant, du côté droit, avec les deux mains levées à la hauteur des épaules tenant une arme à feu comportant un faible risque de mortalité pointée sur le plaignant. L’AT no 2 a heurté le plaignant par-derrière, avec le devant de sa voiture de police. Le plaignant a été poussé légèrement, puis s’est déplacé vers la gauche et est ainsi sorti du champ de la caméra.


Enregistrement de la caméra interne de la voiture de police de l’AI

Le 12 janvier 2022, l’UES a obtenu du Service de police de Toronto l’enregistrement de la caméra interne de la voiture de police de l’AT no 2. Les images avaient été captées le 30 décembre 2021, entre 11 h 31 min 19 s et 12 h 1 min 18 s et elles étaient accompagnées de son.

À 11 h 34 min 26 s, l’AI est parvenue à l’intersection entre Kingston Road et l’avenue Midland. Le plaignant se trouvait alors sur le toit de la voiture de police de l’AT no 5. Il est sauté en bas pour se retrouver devant le véhicule. Il s’est alors mis à marcher vers l’ouest, tandis que l’AT no 5 le suivait lentement dans son véhicule de police. L’AI est sortie de sa voiture de police et a crié : [Traduction] « Arrêtez, arrêtez, arrêtez, arrêtez (paroles inaudibles). »

À 11 h 34 min 48 s, un coup d’arme à feu a retenti. L’AI et l’AT no 5 ainsi que le plaignant étaient hors du champ de la caméra, vers la gauche. Le plaignant s’est mis à courir pour traverser l’intersection entre l’avenue Midland et Kingston Road et l’AI ainsi que l’AT no 1 le poursuivaient à pied. L’AT no 1 avait dans sa main droite une arme à impulsions. L’AI tenait quant à elle des deux mains une arme à feu comportant un faible risque de mortalité.

À 11 h 34 min 57 s, le plaignant s’est retourné une fois au milieu de l’intersection pour faire face à l’AI et à l’AT no 1. L’AI pointait son arme à feu comportant un faible risque de mortalité vers le plaignant. Elle lui a dit : [Traduction] « Lâche-le. Lâche-le. L’AT no 2 est entré dans l’intersection en voiture. On entendait l’AI et d’autres agents donner des ordres au plaignant. [4]

À 11 h 35 min 14 s, le plaignant s’est dégagé des agents, qui tentaient de le maîtriser. L’AT no 1 a déployé son arme à impulsions, et le plaignant est tombé au sol. L’AT no 2, l’AI et l’AT no 5 ont réussi à immobiliser le plaignant.

À 11 h 35 min 34 s, l’AT no 3 est sorti de sa voiture de police et est allé prêter main-forte aux autres agents. Le plaignant hurlait et grommelait. À un certain stade, il a dit : [Traduction] « Je n’arrive pas à respirer. » L’AI a alors riposté : [Traduction] « Tais-toi. Tu vas très bien. »

À 11 h 36 min 27 s, l’AT no 4 a attaché les jambes du plaignant. Celui-ci a continué de crier et de parler fort en disant : [Traduction] « Je vous déteste. Vous m’avez obligé. J’ai rien foutu. Remettez-moi debout. »


Enregistrements de communications

Le 31 janvier 2022, l’UES a obtenu du Service de police de Toronto des enregistrements de communications, y compris un enregistrement de communications par téléphone et par radio, en relation avec l’incident. Voici un résumé des renseignements pertinents tirés des enregistrements.

Vers 11 h 33 min 55 s, l’AT no 5 a dit à la radio : [Traduction] « Le gars est en train d’approcher de ma voiture en ce moment… Au coin de Kingston et de Midland Road. Il donne des coups de pied sur ma voiture… Il marche maintenant vers l’ouest sur Kingston Road et il enlève sa veste… Il vient de sauter sur ma voiture… S’il y a quelqu’un avec un taser, ce serait utile. »

Vers 11 h 34 min 55 s, l’AT no 1 que des agents avec une arme à impulsions et une arme à feu comportant un faible risque de mortalité approchaient.

Vers 11 h 35 min 12 s, l’AT no 1 a signalé que l’arme à impulsions avait été déployée.

Vers 11 h 35 min 36 s, l’AT no 1 a dit : « Les unités peuvent ralentir… Intersection entre Kingston et l’avenue Midland. En plein milieu. »

Vers 11 h 39 min 6 s, l’AT no 1 a dit : [Traduction] « À signaler que [numéro d’insigne] a déployé une arme à impulsions et que [numéro d’insigne de l’AI] a aussi tiré un coup avec une arme à feu comportant un faible risque de mortalité.

Documents obtenus du service de police

L’UES a examiné les éléments et documents suivants que lui a remis, à sa demande, le Service de police de Toronto entre le 31 décembre 2021 et le 31 janvier 2022 :
  • l’enregistrement vidéo d’une caméra de surveillance de la pharmacie Rexall;
  • des enregistrements de caméra d’intervention;
  • des enregistrements de communications;
  • un courriel du Service de police de Toronto concernant un enregistrement vidéo fait par le TC no 1;
  • le rapport d’incident général;
  • le rapport des détails de l’événement;
  • un enregistrement de caméra interne de véhicule;
  • la liste des agents concernés;
  • les notes de l’AT no 1;
  • les notes de l’AI;
  • les notes de l’AT no 4;
  • les notes de l’AT no 5;
  • les notes de l’AT no 2;
  • les notes de l’AT no 3;
  • la procédure relative aux arrestations;
  • la procédure relative à l’utilisation de la force;
  • la procédure relative à l’utilisation d’armes à feu comportant un faible risque de mortalité;
  • la procédure relative à l’utilisation d’armes à impulsions;
  • des photos des lieux;

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a obtenu et examiné les documents et éléments suivants remis par d’autres sources entre le 31 décembre 2021 et le 9 janvier 2022 :
  • le rapport d’appel d’ambulance et le résumé détaillé de l’incident des services d’urgence de Toronto;
  • les enregistrements sur téléphone cellulaire faits par deux témoins civils;
  • l’enregistrement d’une caméra de surveillance à un immeuble près du lieu de l’incident.

Description de l’incident

Le déroulement des événements pertinents ressort clairement des éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment des enregistrements vidéo ayant capté des images d’une bonne partie des événements.

Dans la matinée du 30 décembre 2021, de nombreux agents en uniforme du Service de police de Toronto, y compris l’AI, sont arrivés à l’intersection de Kingston Road et de l’avenue Midland. Ils répondaient à des signalements de plusieurs actes criminels, y compris un vol et des voies de fait, commis dans la matinée par un homme qui s’était faufilé dans le secteur.

À son arrivée à l’intersection de l’avenue Midland, en direction sud, l’AT no 5 était le premier agent sur les lieux dans sa voiture de police identifiée. Il a aperçu un homme qui correspondait à la description du suspect, soit le plaignant, qui était au milieu de l’intersection. Voyant la voiture de police, le plaignant s’en est approché et à donné des coups de pied sur la portière du conducteur. L’AT no 5 a demandé de l’aide par radio, en précisant de faire venir un agent armé d’une arme à impulsions, puis il s’est mis à suivre lentement le plaignant, qui se dirigeait à pied vers l’ouest dans les voies en direction ouest. À peine quelques secondes plus tard, le plaignant s’est retourné et a couru en direction de la voiture de police pour sauter sur le capot, puis sur le toit, puis redescendre sur le capot, avant de sauter sur la chaussée, devant le véhicule.

L'AI a entendu l’appel demandant des renforts et elle s’est rendue sur les lieux en direction est sur Kingston Road. Elle s’est approchée et a immobilisé sa voiture de police dans la voie réservée aux virages à gauche. Peu après, l’AT no 1 est aussi arrivé. Il a stationné son véhicule juste derrière celui de l’AI. Celle-ci est sortie de sa voiture de police en tenant une arme à feu comportant un faible risque de mortalité et elle a confronté le plaignant. À ce stade, le plaignant marchait vers l’ouest torse nu en s’éloignant de la voiture de police de l’AT no 5, dans les voies en direction ouest de Kingston Road, à l’ouest de l’intersection. Il a fait quelques pas en direction de l’AI, puis s’est mis à courir vers l’est en s’éloignant d’elle, le long du côté passager de la voiture de l’AT no 5. L’AI a tiré un coup de feu en direction du plaignant, à une distance de quelques mètres, mais elle a raté la cible.

Le plaignant a continué sa course vers l’est en direction de l’intersection, avec à sa suite l’AI et l’AT no 1, qui tenait une arme à impulsions. Il s’est arrêté juste avant le passage pour piétons qui délimitait l’extrémité ouest de l’intersection, puis il s’est retourné vers les agents. Il a alors été heurté par-derrière par l’avant de la voiture de police conduite par l’AT no 2, qui arrivait du nord et avait fait un virage vers l’ouest à l’intersection. Avec l’impact, le plaignant a été poussé vers l’avant sur une courte distance, il s’est redressé et a ensuite contourné le coin de la voiture du côté conducteur de l’AT no 2. Quelques instants plus tard, l’AT no 1 avait son arme à impulsions levée en direction du plaignant et il l’a déployée à une distance d’environ un mètre.

Les sondes se sont fixées au plaignant et il est tombé à la renverse sur la chaussée. L’AI et l’AT no 2 ont lutté avec le plaignant sur le sol, mais ce dernier a réussi à se relever et à se dégager. L’AT no 1 a déchargé son arme une deuxième fois et le plaignant est alors tombé à genoux au milieu de l’intersection. L’AI, l’AT no 2 et l’AT no 5 se sont approchés du plaignant et l’ont plaqué au sol, avec l’aide d’un autre agent qui venait d’arriver. Ils l’ont ensuite attaché, après avoir lutté avec lui un moment.

Le plaignant n’a subi aucune blessure grave.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Article 17 de la Loi sur la santé mentale -- Intervention de l’agent de police

17 Si un agent de police a des motifs raisonnables et probables de croire qu’une personne agit ou a agi d’une façon désordonnée et qu’il a des motifs valables de croire que cette personne :
a) soit a menacé ou tenté de s’infliger des lésions corporelles ou menace ou tente de le faire
b) soit s’est comportée ou se comporte avec violence envers une autre personne ou de manière à lui faire craindre qu’elle lui causera des lésions corporelles
c) soit a fait ou fait preuve de son incapacité de prendre soin d’elle-même
et qu’en plus, il est d’avis que cette personne souffre, selon toute apparence, d’un trouble mental d’une nature ou d’un caractère qui aura probablement l’une des conséquences suivantes :
a) elle s’infligera des lésions corporelles graves
b) elle infligera des lésions corporelles graves à une autre personne
c) elle subira un affaiblissement physique grave
et qu’il serait dangereux d’agir selon les termes de l’article 16, il peut amener sous garde cette personne dans un lieu approprié afin qu’elle soit examinée par un médecin.

Analyse et décision du directeur

Le plaignant a été la cible d’une décharge d’arme à feu comportant un faible risque de mortalité déployée par une agente du Service de police de Toronto le 30 décembre 2021. L’agente en question, soit l’AI, a été désignée comme agent impliqué pour les besoins de l’enquête de l’UES. Cette enquête est maintenant conclue. D’après mon évaluation des éléments de preuve, il n’existe pas de motifs raisonnables de croire que l’AI a commis une infraction criminelle en relation avec l’incident.

En vertu du paragraphe 25(1) du Code criminel, des agents ne peuvent être reconnus coupables d’avoir fait usage de la force dans l’exercice de leurs fonctions, à condition que cette force soit raisonnablement nécessaire pour accomplir quelque chose que la loi les oblige ou les autorise à faire.

Le plaignant se trouvait au centre d’une intersection achalandée et il parlait et agissait de manière incohérente, se mettant ainsi lui-même et les personnes à proximité en danger par son comportement. Dans les circonstances, j’ai la conviction que l’arrestation du plaignant par la police était légale conformément à l’article 17 de la Loi sur la santé mentale.

J’ai également la conviction que l’AI avait des motifs légitimes de faire feu sur le plaignant avec son arme à feu comportant un faible risque de mortalité. En effet, ce dernier n’avait alors pas toute sa tête et il n’avait pas l’intention ni la capacité de cesser son comportement hostile et combattif. Il avait donné des coups de pied sur la voiture de police de l’AT no 5, puis était sauté sur le capot et avait frappé du pied à plusieurs reprises, avant de redescendre. Il avait un comportement agressif au travers des voitures qui circulaient, semblant ne pas se soucier des dangers que représentait la circulation automobile autour de lui. Au vu du dossier, comme elle se trouvait en présence d’un individu très agité ne donnant aucunement l’impression de se calmer ou de vouloir se rendre à la police, je ne peux raisonnablement conclure que l’AI a outrepassé ses pouvoirs en déchargeant son arme. Bien qu’elle ait raté la cible, l’utilisation de l’arme offrait la possibilité de neutraliser immédiatement le plaignant, qui se montrait menaçant, en demeurant à une distance sécuritaire de lui dans les circonstances, compte tenu de l’urgence de la situation. Après la décharge, le plaignant a continué de perturber la paix au milieu de la route et a fini par être maîtrisé grâce à l’utilisation d’une arme à impulsions par l’AT no 1 [5].

En définitive, comme il n’existe pas de motifs raisonnables de croire que l’AI s’est comportée autrement qu’en toute légalité pendant la durée complète de l’interaction avec le plaignant, il n’y a pas lieu de porter des accusations contre l’agente dans cette affaire, et le dossier est clos.


Date : 27 avril 2022


Signature électronique

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les enregistrements contiennent des renseignements personnels confidentiels qui ne peuvent être divulgués, conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les renseignements utiles pour l’enquête sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]
  • 2) L’agent no 1 n’a pas été désigné. [Retour au texte]
  • 3) L’agent no 2 n’a pas été désigné. [Retour au texte]
  • 4) La caméra interne de la voiture de police n’a pas capté d’images de l’AT no 2 en train de heurter le plaignant avec sa voiture de police ni du premier déploiement d’arme à impulsions, parce qu’un grand panneau sur le terre-plein obstruait la vue. [Retour au texte]
  • 5) Même si cela dépasse l’objet de l’enquête de l’UES, je suis aussi d’avis que les décharges d’arme à impulsions par l’AT no 1 étaient légalement justifiées en bonne partie pour les mêmes raisons. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.