Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 23-OCI-267

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 33 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES [1]

Le 14 juillet 2023, à 5 h 18, la Police régionale de Peel (PRY) a contacté l’UES et donné les renseignements suivants.

Le 13 juillet 2023, vers 22 h 18, un chauffeur-livreur Uber a arrêté son véhicule, un Toyota Venza, dans le stationnement d’un restaurant de Richmond Hill pour y ramasser des aliments. Il est sorti de son véhicule en laissant le moteur tourner. Le plaignant a sauté dans le Venza et s’est enfui. Le chauffeur Uber a appelé la PRY et a mentionné que le Venza était équipé d’un dispositif de repérage. La PRY a utilisé plusieurs véhicules de police banalisés et l’hélicoptère Air2 pour suivre le Venza jusqu’à une station-service à Schomberg. Lorsque le Venza a quitté la station-service, un dispositif de dégonflage des pneus avait été déployé et le Venza s’est éloigné avec deux pneus crevés. Le Venza s’est finalement écrasé dans un fossé de la rue Dufferin, à environ 100 mètres au sud de Davis Drive. Les agents de la PRY ont appréhendé le plaignant, puis ont constaté qu’il avait été blessé au visage. Les services médicaux d’urgence (SMU) ont été appelés sur les lieux et ont conduit le plaignant au Centre régional de santé Southlake (Hôpital Southlake), où il a été déterminé qu’il avait une fracture nasale.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 14 juillet 2023 à 9 h 17

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 14 juillet 2023 à 13 h 35

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés 1

Nombre de spécialistes de la reconstitution des collisions assignés : 0

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 33 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

Le plaignant a participé à une entrevue les 14 et 27 juillet 2023.

Agents impliqués (AI)

AI no 1 A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à communiquer se notes, comme la loi l’y autorisait en tant qu’agent impliqué.
AI no 2 A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à communiquer se notes, comme la loi l’y autorisait en tant qu’agent impliqué.

Les agents impliqués ont participé à une entrevue le 14 août 2023.

Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue
AT no 3 A participé à une entrevue
AT no 4 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à une entrevue entre le 27 juillet et le 14 août 2022.

Éléments de preuve

Les lieux

La collision et l’arrestation subséquente du plaignant ont eu lieu sur la rue Dufferin, juste au sud de Davis Drive.

Le véhicule volé impliqué dans la collision – un Toyota Venza – a été remorqué chez Elliott’s Towing, au 20440, Highway 11, à Holland Landing. Le 14 juillet 2023, un spécialiste des sciences judiciaires de l’UES s’est rendu chez Elliott’s Towing pour examiner le véhicule et prendre des photos.

Tous les pneus avaient été retirés, à l’exception du pneu avant gauche. Il y avait des débris de verre à l’intérieur du véhicule provenant des vitres avant brisées. Tous les coussins gonflables latéraux avaient été déployés. Il y avait de la saleté et des débris végétaux dans les tuyaux d’échappement; le rétroviseur avant gauche et le panneau latéral gauche étaient endommagés.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [2]

Hélicoptère de la PRY – Air2 – Séquence vidéo

La vidéo de l’Air2 commence à 21 h 06 min 30 s avec une vue aérienne d’une route rurale dans une zone très boisée.

Vers 21 h 17 min 32 s, on peut voir un véhicule rouler vers l’ouest sur Highway 9, juste après 10 th Sideroad.

Vers 21 h 18 min 9 s, on détermine que le véhicule est un Toyota Venza noir.

Vers 21 h 20 min 9 s, Air2 annonce qu’ils vont repérer le trajet du véhicule. Il est noté que le véhicule roule toujours vers l’ouest sur Highway 9, à une vitesse variant de 80 à 100 km/h.

Vers 21 h 23 min 22 s, le véhicule vire à droite sur Highway 50 et se dirige vers le nord à une vitesse de 80 à 90 km/h.

Vers 21 h 24 min 19 s, le véhicule dépasse d’autres véhicules à 140 km/h.

Vers 21 h 27 min 54 s, le véhicule brûle le feu rouge à County Road 50 et tourne à gauche pour se diriger vers l’ouest.

Vers 21 h 34 min 33 s, le véhicule fait demi-tour et se dirige vers l’est sur Highway 89.

Vers 21 h 39 min 20 s, le véhicule tourne à gauche, en direction nord sur la rue King Sud.

Vers 21 h 39 min 50 s, le véhicule roule vers l’est sur Highway 89 [qui est la rue Victoria Est à cet endroit].

Vers 21 h 45 min 10 s, le véhicule fait demi-tour vers l’ouest sur la rue Victoria Est/Highway 89.

Vers 21 h 46 min 15 s, le véhicule tourne à gauche sur Tottenham Road puis rapidement à droite pour entrer dans une station-service, où il s’arrête aux pompes à essence. La portière du conducteur s’ouvre, mais le conducteur ne sort pas du véhicule.

Vers 21 h 47 min 37 s, le véhicule tourne à droite à la sortie du stationnement de la station-service, puis coupe la route à une camionnette.

Vers 21 h 48 min 8 s, le véhicule est de retour sur la rue Victoria/Highway 89 en direction est.

Vers 21 h 57 min 54 s, le véhicule roule vers le sud sur l’autoroute 400 à une vitesse variant de 100 à 160 km/h.

Vers 22 h 07 min 14 s, le véhicule sort de l’autoroute 400 pour se diriger vers Highway 9.

Vers 22 h 09 min, le véhicule fait demi-tour et continue vers l’ouest sur Highway 9.

Vers 22 h 09 min 23 s, un dispositif de dégonflage des pneus a été déployé avec succès; après avoir roulé dessus, le véhicule continue vers l’ouest sur une certaine distance avant d’effectuer un demi-tour pour se diriger vers l’est.

Vers 22 h 13 min 6 s, beaucoup de débris et de chaleur se dégagent du véhicule, qui roule à environ 90 km/h.

Vers 22 h 15 min 1 s, le véhicule tourne vers le sud sur la rue Dufferin.

Vers 22 h 16 min 22 s, le conducteur perd le contrôle du véhicule qui s’écrase dans un fossé sur le côté droit de la route.

Vers 22 h 16 min 35 s, des agents sortent de leur véhicule et s’approchent du véhicule dans le fossé.

Vers 22 h 16 min 52 s, il y a une lutte du côté conducteur du véhicule.

Vers 22 h 16 min 57 s, on observe des coups de poing.

Vers 22 h 17 min 33 s, les agents menottent le suspect.

Vers 22 h 18 min 1 s, les agents escortent le suspect, qui est menotté, jusqu’au bord de la route.

La vidéo prend fin à 22 h 20 min 6 s.

Enregistrements des communications

À environ 0 min 19 s du début de l’enregistrement, quelqu’un dit qu’un Toyota Venza noir se dirige vers le nord sur l’autoroute 400 en provenance de Major MacKenzie.

0 min 53 s : il est noté que des unités se dirigent vers l’emplacement mentionné.

1 min 15 s : le véhicule se dirige vers le nord sur l’autoroute 400, à la hauteur de Lloydtown/Aurora Road.

2 min 26 s : il est mentionné que l’Air2 n’a pas encore repéré le véhicule volé.

4 min : le véhicule est sur Lloydtown-Aurora Road.

4 min 14 s : le véhicule est à l’ouest de Highway 27.

4 min 57 s : le véhicule suspect est repéré à sa sortie de la station-service Esso, après avoir fait le plein. Il se dirige vers l’ouest.

21 min 21 s : un homme est sous garde à Davis et Dufferin. Une ambulance est demandée.

Éléments obtenus auprès du service de police

Sur demande, la PRY a remis à l’UES les éléments et documents suivants entre le 18 et le 25 juillet 2023 :
  • Rapport de collision de véhicule automobile;
  • Enregistrements des communications;
  • Historique de l’appel;
  • Rapport initial de l’agent;
  • Notes de l’AT no 1;
  • Notes de l’AT no 4;
  • Notes de l’AT no 2;
  • Notes de l’AT no 3;
  • Séquence vidéo – Air2 de la PRY.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a obtenu les dossiers suivants auprès d’autres sources entre le 18 et 20 juillet 2023 :
  • Rapport d’ambulance – Services paramédicaux de la région de York;
  • Dossier médical du plaignant (Hôpital Southlake).

Description de l’incident

La séquence d’événements suivante découle des éléments de preuve recueillis par l’UES, dont les entrevues avec le plaignant et avec les deux agents impliqués et une vidéo qui montre certaines parties de l’incident.
Dans la soirée du 13 juillet 2023, la PRY a reçu un appel au 9-1-1 signalant qu’un véhicule venait d’être volé. Un chauffeur-livreur d’Uber appelait pour signaler que son Toyota Venza venait d’être volé dans le stationnement du centre commercial du 10909, rue Yonge, à Richmond Hill.
 
Des agents en civil du Bureau des enquêtes criminelles, dont l’AI no 1 et l’AI no 2, se sont mobilisés pour localiser le véhicule volé. Ils étaient assistés dans leur recherche par le dispositif de repérage du véhicule volé et par l’hélicoptère de la PRY, l’Air2.
 
Le plaignant s’était emparé du Toyota dans le stationnement du centre commercial. Pendant les 90 minutes qui ont suivi, le plaignant s’est livré à une conduite dangereuse incluant des excès de vitesse, des manœuvres erratiques et le non-respect de feux rouges. Vers la fin de sa mésaventure, alors qu’il roulait vers l’ouest sur Highway 9, à l’est de l’autoroute 400, le plaignant est passé sur un dispositif de dégonflage des pneus qui avait été déployé par l’AI no 1. Avec au moins un pneu du Toyota crevé, le plaignant a continué sur une certaine distance puis a fait un demi-tour pour se diriger vers l’est sur Highway 9.

L’AI no 2 suivait le Toyota vers l’est en direction de la rue Dufferin, où il a tourné à droite pour se diriger vers le sud. L’agente a tenté de se placer devant le véhicule pour essayer de le forcer à s’arrêter, manœuvre que le plaignant a bloquée. L’AI no 2 a continué de suivre le Toyota de près et l’a vu perdre le contrôle et s’écraser dans le fossé ouest. Il était alors 22 h 16.

L’AI no 2 s’est approchée du plaignant. Elle a tiré le plaignant du Toyota et s’est rapidement trouvée en pleine altercation. Le plaignant lui a asséné des coups de poing et l’a poussée, et les deux sont tombés sur le sol. Comme le plaignant continuait de la frapper, l’AI no 2 a répliqué en donnant plusieurs coups de poing à la jambe du plaignant.
 
L’AI no 1 s’est joint à la lutte et a donné plusieurs coups de poing aux fesses du plaignant. Peu après, grâce à l’intervention d’agents supplémentaires et à d’autres coups de poing, les agents ont contrôlé les bras du plaignant et l’ont menotté dans le dos.

Le plaignant a été ensuite conduit directement à l’hôpital où on lui a diagnostiqué une fracture du nez.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Articles 219 et 221 du Code criminel -- Négligence criminelle causant des lésions corporelles

219 (1) est coupable d’une négligence criminelle quiconque :
a) soit en faisant quelque chose;
b) soit en omettant de faire quelque chose qui est de son devoir d’accomplir, montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.
(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.

221 Quiconque, par négligence criminelle, cause des lésions corporelles à autrui est coupable : 
a) soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de dix ans; 
b) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.

Analyse et décision du directeur

Le 13 juillet 2023, le plaignant a été grièvement blessé lors de son arrestation par des agents du SPT, ou peu avant. Deux agents ont été désignés en tant qu’agents impliqués (AI no 1 et AI no 2) dans l’enquête de l’UES qui a suivi. L’enquête est maintenant terminée. Après avoir évalué les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que les agents impliqués aient commis une infraction criminelle en lien la blessure du plaignant.

En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les agents de police sont exonérés de toute responsabilité criminelle pour le recours à la force dans l’exécution de leurs fonctions, à condition que cette force soit raisonnablement nécessaire à l’accomplissement d’un acte qu’ils sont tenus ou autorisés à faire en vertu de la loi.

L’AI no 1 et l’AI no 2 étaient en droit de chercher à arrêter le plaignant pour le placer sous garde. Ils avaient des raisons de croire qu’il avait volé un véhicule automobile et qu’il le conduisait dangereusement.
En ce qui concerne la force utilisée par les agents pour procéder à l’arrestation du plaignant, je suis convaincu qu’elle était légalement justifiée. Le plaignant est sorti du Toyota et a immédiatement commencé à se battre contre les agents, les frappant, les poussant et leur donnant des coups de pied. L’AI no 1 et l’AI no 2 avaient le droit de riposter pour se protéger et pour maîtriser le plaignant afin de le placer sous garde. Leur recours à des coups de poing pour contrer la résistance du plaignant semble une réponse proportionnée dans les circonstances. Il en va de même, à mon avis, pour ce qui semble avoir été des coups de poing supplémentaires assénés par un autre agent au haut du corps du plaignant.
 
Une autre question se pose, à savoir si l’utilisation du dispositif de dégonflage des pneus par l’AI no 1 restait dans les limites du droit criminel. L’infraction à prendre en considération en l’espèce est la négligence criminelle causant des lésions corporelles, une infraction visée par l’article 221 du Code criminel. Cette infraction correspond aux cas graves de négligence, qui démontrent un mépris déréglé ou téméraire pour la vie ou la sécurité d’autrui. La culpabilité serait fondée, en partie, sur la conclusion que la conduite constituait un écart marqué et important par rapport à la norme de prudence qu’une personne raisonnable aurait exercée dans les circonstances. En l’espèce, il faut donc déterminer si l’AI no 1 a fait preuve d’un manque de prudence qui a causé la blessure du plaignant, ou y a contribué, et si ce manque était suffisamment flagrant pour entraîner une sanction pénale. À mon avis, ce n’est pas le cas.

L’utilisation du dispositif de dégonflage des pneus comportait certains risques pour la sécurité publique. Quand l’AI no 1 l’a déployé devant le Toyota, il y avait un certain nombre d’autres automobilistes dans la direction opposée qui auraient pu être en danger si le plaignant avait fait une embardée pour éviter le dispositif ou avait rapidement perdu le contrôle du Toyota à cause d’un pneu crevé. La crevaison du ou des pneus a également contribué à la perte de contrôle du plaignant sur les lieux de l’accident. Il faut toutefois noter qu’il avait eu amplement le temps d’arrêter le Toyota en toute sécurité avant de se retrouver dans le fossé. Il aurait été dangereux de laisser le plaignant continuer sa route. Pendant plus d’une heure, le plaignant avait mis la vie de tiers en danger par sa conduite imprudente et rien n’indiquait qu’il était sur le point de s’arrêter. Je suis convaincu que confronté à une décision difficile, l’AI no 1 a pris une décision raisonnable. Même s’il y avait quelques véhicules sur la route, la circulation était légère ou modérée, compte tenu de l’heure de la journée. Le dispositif, s’il fonctionnait comme prévu, entraînerait une déflation contrôlée du ou des pneus et c’est précisément ce qui s’est passé.

En conséquence, bien que j’accepte que le plaignant ait subi sa blessure lors de l’altercation qui a marqué son arrestation ou lorsque le véhicule s’est écrasé dans le fossé, il n’y a aucun motif raisonnable de croire que cette blessure soit attribuable à une conduite illégale de la part des agents. Le dossier est clos.


Date : 10 novembre 2023

Approuvé par voie électronique par


Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les renseignements contenus dans cette section reflètent les informations reçues par l’UES au moment de la notification et ne reflètent pas nécessairement les conclusions de fait de l’UES à la suite de son enquête. [Retour au texte]
  • 2) Les éléments de preuve suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties pertinentes des enregistrements sont résumées ci-après. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.