Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 23-OFP-031

Attention :

Cette page affiche un contenu graphique pouvant choquer, offenser et déranger.

Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la décharge d’une arme à feu par la police sur un homme de 43 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES [1]

Le 30 janvier 2023, vers 8 h 21, le Service de police régional de Halton (SPRH) a communiqué à l’UES les renseignements suivants.

Le 30 janvier 2023, des agents du SPRH ont été appelés à se rendre à un appartement de la rue Bronte Sud, à Milton, où ils ont eu une interaction avec le plaignant. Au cours de l’incident, l’agent impliqué (AI) no 1 a déchargé un projectile en sachet avec son fusil de service, et l’AI no 2 a déchargé une arme anti-émeute ENfield (ARWEN).

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 30 janvier 2023 à 9 h 29

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 30 janvier 2023 à 11 h

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 3

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 43 ans, a participé à une entrevue

Le plaignant a participé à une entrevue le 6 février 2023.

Témoins civils (TC)

TC no 1 A participé à une entrevue
TC no 2 A participé à une entrevue
TC no 3 A participé à une entrevue
TC no 4 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à une entrevue entre le 30 janvier et le 11 février 2023.

Agents impliqués

AI no 1 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué; ses notes ont été reçues et examinées
AI no 2 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué; ses notes ont été reçues et examinées

Agents témoins (AT)

AT no 1 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées.
AT no 2 A participé à une entrevue
AT no 3 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées.
AT no 4 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées.
AT no 5 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées.
AT no 6 A participé à une entrevue
AT no 7 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à une entrevue entre le 3 et le 13 février 2023.

Éléments de preuve

Les lieux

L’interaction entre la police et le plaignant a eu lieu dans un appartement de la rue Bronte Sud, à Milton.

Les endroits d’intérêt pour l’UES comprenaient le seuil de la porte et l’intérieur de l’appartement. La porte et son cadre étaient endommagés autour de la poignée et de la serrure, ainsi qu’au coin supérieur de la charnière. Le réfrigérateur avait été éloigné du mur. Dans l’entrée et dans la cuisine, il avait du verre brisé et des débris par terre, dont des disques d’identification anticriminels (AFID) et des sondes d’arme à impulsions. Il y avait aussi par terre deux petits couteaux de cuisine à manche noir. Un marteau à griffes et une hachette de couvreur ont été trouvés dans l’appartement.

Figure 1 – ARWEN
Figure 1 – ARWEN

Figure 2 – ARWEN projectile
Figure 2 – Projectile d’ARWEN


Figure 3 – Less-lethal shotgun
Figure 3 – Fusil à létalité atténuée


Figure 4 – Less-lethal bean bag cartridge
Figure 4 – Projectile en sachet de fusil à létalité atténuée

Éléments de preuve matériels

Les objets recueillis sur les lieux sont répertoriés dans le tableau ci-dessous.

No de l’objet

Description

001

Porte de cartouche d’arme à impulsions

002

Disque en plastique blanc

003

Plastique noir et argenté

004

Disque en plastique

005

Sonde d’arme à impulsions

006

Étui de cartouche d’ARWEN

007

Étui de cartouche d’ARWEN

008

Étui de cartouche d’ARWEN

009

Cartouche d’arme à impulsions

010

Cartouche d’arme à impulsions

011

Cartouche d’arme à impulsions

012

Projectile d’ARWEN

013

Projectile d’ARWEN

014

Projectile d’ARWEN

015

Sonde et fils d’arme à impulsions

016

Sonde d’arme à impulsions

017

Sonde et fils d’arme à impulsions

018

Fil d’arme à impulsions

019

AFIDs d’arme à impulsions

Éléments de preuves médicolégaux

Données téléchargées de l’arme à impulsions de l’AT no 7

Selon ces données, l’arme à impulsions de l’AT no 7 a été déchargée à 6 h 01 min 11 s pendant trois secondes. Elle a ensuite été déchargée à 7 h 20 min 51 s, 7 h 20 min 58 s et 7 h 23 min 11 s, pendant six, cinq et huit secondes respectivement. [2]

Données téléchargées de l’arme à impulsions de l’agent no 1

Selon ces données, l’arme à impulsions de l’agent no 1 a été déchargée à 7 h 21 min 43 s, 7 h 21 min 56 s et 7 h 22 min 8 s pendant cinq, onze et onze secondes, respectivement.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [3]

Appel au 9-1-1

À 25 secondes du début de l’enregistrement, le TC no 1 appelle le 9-1-1 et dit que le plaignant a consommé « de la coke ou du crack ». Il est très agité, il crie et il frappe des objets à l’intérieur de son appartement. Le répartiteur dit au TC no 1 que des agents de police vont se rendre sur les lieux dès que possible, et lui demande de rappeler le 9-1-1 si la situation s’aggrave.

Communications radio

À 36 secondes du début de l’enregistrement, le répartiteur annonce la réception d’un appel concernant un résident d’un appartement de la rue Bronte Sud, à Milton. La personne qui a appelé [maintenant connu comme étant le TC no 1] a signalé que le plaignant criait et frappait des objets dans son appartement. Il a décrit le plaignant comme était un homme de 30 à 43 ans, qui résidait seul dans l’appartement et qu’on croyait être sous « crack », car il était connu pour consommer de la drogue.

On annonce que le plaignant est « positif » pour possession d’armes à feu, restrictions concernant des armes à feu et menaces.

À une minute et 10 secondes du début de l’enregistrement, le répartiteur dit que le plaignant est dans le corridor de l’immeuble et qu’il brise des objets.

À deux minutes et 11 secondes du début de l’enregistrement, l’AT no 2 dit que le plaignant s’est enfermé dans son appartement et hurle. Les agents du SPRH tentent de parler au plaignant à travers la porte. L’AT no 2 dit qu’il y a des motifs d’appréhender le plaignant en vertu de la Loi sur la santé mentale et demande la présence d’un agent muni d’un bouclier.

À deux minutes et 46 secondes du début de l’enregistrement, un agent de police [maintenant connu comme étant l’agent no 2] dit qu’ils tentent de communiquer avec le plaignant, mais qu’il est très agité.

À trois minutes et 26 secondes du début de l’enregistrement, l’agent no 2 annonce qu’on a informé le plaignant qu’il y a des motifs de l’appréhender en vertu de la Loi sur la santé mentale, et que la police est autorisée à l’appréhender. Cependant, le plaignant refuse de sortir de l’appartement et a qualifié les agents de « faux policiers ». Le plaignant est apparemment dans un état maniaque. Il s’est barricadé dans son appartement. L’équipe qui va procéder à son arrestation est dans le corridor avec un plan d’action immédiat si le plaignant se rend de son plein gré et un plan pour entrer de force s’il refuse de se rendre.

Les agents sont inquiets pour la sécurité des résidents de l’immeuble, parce que le plaignant a utilisé quelque chose pour frapper la porte depuis l’intérieur de l’appartement.
À huit minutes et 11 secondes du début de l’enregistrement, on demande que les services médicaux d’urgence viennent sur les lieux. Un agent dit au répartiteur qu’ils tentent toujours de communiquer avec le plaignant, sans obtenir de véritable réponse de sa part.

À dix minutes et sept secondes du début de l’enregistrement, le plaignant continue d’affirmer que les agents sont des imposteurs et refuse de coopérer. Il menace de tuer les agents. Un agent [maintenant connu comme étant l’AT no 1] dit que le plaignant est brièvement sorti de son appartement avec un tournevis en main. Un fusil à létalité atténuée a été déployé, mais le projectile n’a pas atteint plaignant.

Le plaignant menace de couper les agents et dit qu’on ne le prendra pas vivant.

Les agents annoncent qu’ils vont forcer la porte au moindre signe que le plaignant s’est tué ou va se faire du mal.

À 15 minutes et 48 secondes du début de l’enregistrement, il est signalé qu’un « HQ99 » prendra le commandement de l’incident avec pour mission d’appréhender en toute sécurité le plaignant, qui souffre d’une crise de santé mentale. Un plan d’action est établi : si le plaignant franchit le seuil de la porte, on l’appréhendera avec le moins de force possible. Le plaignant affirme qu’il a une hache, avec laquelle il frappe des objets, et qu’il a l’intention de s’en servir sur les agents. Le plaignant verse de l’eau sur le sol et affirme avoir piégé la porte avec de l’eau, de l’électricité et du métal.

À 22 minutes et 10 secondes du début de l’enregistrement, l’AT no 5 et l’AT no 7 tentent de communiquer avec le plaignant. Un « plan d’action délibéré » pour arrêter le plaignant est annoncé. L’unité de sauvetage tactique (UST) dit que des appareils électroniques de reconnaissance ont été déployés dans l’appartement et qu’on a repéré plusieurs couteaux sur le plancher de la cuisine. Le plaignant a saisi l’appareil et s’est dirigé vers l’équipe de l’UST.

À 27 minutes et huit secondes du début de l’enregistrement, l’UST annonce qu’un contact a été établi avec le plaignant et qu’une arme à impulsions a été déployée. On a pu dialoguer avec le plaignant, mais il est devenu plus agité. Le plaignant s’est retiré dans la chambre à coucher et a refusé d’obtempérer aux instructions de sortir et de montrer les mains, qu’il garde dans le dos. Les agents de l’UST n’entrent pas immédiatement dans la chambre parce qu’ils ne peuvent pas voir une des mains du plaignant ni ce qu’il tient. La main gauche du plaignant saigne. Il cache quelque chose dans son dos.

À 29 minutes et 45 secondes du début de l’enregistrement, l’UST annonce que le plaignant menace de tuer au moins deux agents de police. Il menace d’utiliser une arme à feu contre les agents de l’UST. Le sergent de l’UST dit de continuer à négocier avec le plaignant.

À 30 minutes et 59 secondes du début de l’enregistrement, l’UST annonce que le plaignant semble tenir une arme dans la main droite et qu’il a dit qu’il tenait une arme de poing, tout en gardant sa main en position basse, prêt à tirer.

À 31 minutes et 47 secondes du début de l’enregistrement, l’UST annonce que le plaignant a du sang sur les deux mains, mais qu’ils ne voient toujours pas ce qu’il tient. Le sergent de l’UST demande l’origine de la blessure, et les agents de l’UST répondent qu’ils n’ont pas causé la blessure.

À 32 minutes et 39 secondes du début de l’enregistrement, l’UST demande la permission de procéder à l’arrestation. Le plaignant menace de les tuer. Le sergent de l’UST dit de poursuivre les négociations.

À 33 minutes et 25 secondes du début de l’enregistrement, il est signalé que le plaignant a demandé à être abattu et a également déclaré qu’il tirerait sur les agents de l’UST. Il a dit qu’il s’était coupé en brisant un miroir.

À 34 minutes et 46 secondes du début de l’enregistrement, l’UST annonce que le plaignant a les mains vides. Une ARWEN a été déployée, mais le plaignant continue de résister à son arrestation. Peu après, on annonce que le plaignant est sous garde, mais les agents sont toujours en train de le menotter.

À 35 minutes et 33 secondes du début de l’enregistrement, l’UST annonce que le plaignant est menotté et qu’on le fait sortir de l’appartement pour retirer les sondes de l’arme à impulsions qui l’ont atteint. On conduit le plaignant à l’Hôpital du district de Milton.

Éléments obtenus auprès du service de police

Sur demande, le SPRH a remis à l’UES les éléments et documents suivants entre le 30 janvier et le 21 février 2023 :
  • Historique de l’appel;
  • Notes de l’AT no 3;
  • Notes de l’AT no 4;
  • Notes de l’AT no 2;
  • Notes de l’AT no 5;
  • Notes de l’AT no 1;
  • Notes de l’AI no 2;
  • Notes de l’AT no 7;
  • Notes de l’AT no 6;
  • Notes de l’AI no 1;
  • Rapports d’incident et rapports supplémentaires;
  • Rapport sur les scènes de crime;
  • Rapport supplémentaire – biens matériels;
  • Enregistrements des communications;
  • Données d’arme à impulsions;
  • Photographies d’identité;
  • Dossiers de formation.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a examiné les éléments suivants obtenus auprès d’autres sources :
  • Séquence vidéo fournie par le TC no 1.

Description de l’incident

Les éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment les entrevues avec le plaignant et avec des agents présents sur les lieux au moment des événements en question, ont permis d’établir le scénario suivant. Comme c’était leur droit, les deux agents impliqués ont refusé de participer à une entrevue avec l’UES. Ils ont toutefois autorisé la communication de leurs notes sur l’incident.

Le 30 janvier 2023, peu après 1 h du matin, le SPRH a reçu un appel au 9-1-1 au sujet de troubles dans un appartement de la rue Bronte Sud, à Milton. Le TC no 1 avait appelé pour signaler que le plaignant criait et donnait des coups dans son appartement. Des agents de police ont été dépêchés sur les lieux.

Plusieurs agents de patrouille du SPRH sont arrivés en premier à l’adresse. Le plaignant les a accueillis à l’extérieur de son appartement. Il était très belliqueux, criait et les accusait de ne pas être de vrais policiers, après quoi il est retourné dans son appartement en fermant la porte derrière lui. Les agents ont tenté de communiquer avec le plaignant à travers la porte, sans succès. Le plaignant est resté très agité et criait des grossièretés. Il a menacé de tuer les agents et a averti qu’on ne le prendrait pas vivant. Les agents ont décidé d’arrêter le plaignant dès qu’il ouvrirait sa porte et franchirait le seuil.

Vers 2 h 30 du matin, le plaignant a ouvert sa porte. Il tenait un tournevis au-dessus de sa tête. L’AI no 1 a visé et a tiré sur lui avec une arme à létalité atténuée. Le projectile – un sachet de billes – a raté le plaignant, mais a heurté le cadre de la porte. Le plaignant a battu en retraite dans son appartement, a fermé la porte et a continué de menacer les agents depuis l’intérieur. À un moment donné, il a dit qu’il était armé d’une hache.

Les agents de l’UST sont arrivés dans le corridor et ont pris le relais des agents en uniforme vers 5 heures du matin. Ils ont tenté à leur tour de communiquer avec le plaignant depuis le corridor, sans grand succès. Vers 5 h 50, il a été décidé qu’on forcerait la porte de l’appartement et tenterait de poursuivre les négociations depuis le seuil.

L’AT no 7 a utilisé un outil pour ouvrir la porte. Le plaignant avait placé un réfrigérateur contre la porte à l’intérieur. Les agents ont envoyé une caméra télécommandée dans l’appartement pour déterminer où se trouvait le plaignant. Ce dernier est sorti d’une chambre au fond de l’appartement et s’est précipité vers la porte où se trouvaient les agents. Comme le plaignant ignorait leur ordre de cesser d’avancer, l’AT no 7 a déployé son arme à impulsions dont les sondes ont atteint le plaignant. Le plaignant a cessé d’avancer, puis a reculé jusqu’à la porte de la chambre. De là, il a dit qu’il avait une arme à feu et qu’il allait tuer les agents.

Vers 7 h 20, le plaignant est retourné dans sa chambre, ce qui a incité les agents de l’UTS à avancer vers la porte ouverte de la chambre. Dans les instants qui ont suivi, alors que le plaignant était assis sur une commode, l’AI no 2 a tiré trois fois sur lui avec son ARWEN. Un projectile a atteint le plaignant, qui a sauté de la commode et traversé la pièce en courant. L’AT no 7 l’a plaqué à terre à l’aide d’un bouclier balistique.

Une lutte s’est ensuivie entre l’AT no 7 et le plaignant, qui a parfois tiré sur les vêtements de l’agent au niveau de son pistolet. L’AT no 7 et l’agent no 1 ont déployé leurs armes à impulsions et l’AT no 7 a asséné une série de coups de poing au plaignant, qui a ensuite été menotté dans le dos.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le 30 janvier 2023, le SPRH a communiqué avec l’UES pour signaler que deux de leurs agents avaient déployé leurs armes à feu à létalité atténuée au cours d’une interaction avec un homme – le plaignant – plus tôt dans la journée. L’UES a ouvert une enquête et désigné deux agents impliqués (AI no 1 et AI no 2). L’enquête est maintenant terminée. Après avoir évalué les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que les agents impliqués aient commis une infraction criminelle en lien avec la décharge de leurs armes.

En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les agents de police sont exonérés de toute responsabilité criminelle pour le recours à la force dans l’exécution de leurs fonctions, à condition que cette force soit raisonnablement nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou autorisé de faire en vertu de la loi.

Je suis convaincu que la présence des agents était légale et qu’ils exerçaient leurs fonctions lorsqu’ils ont cherché à arrêter le plaignant. Au moment de la première décharge d’arme à feu – le fusil à létalité atténuée utilisé par l’AI no 1 – le plaignant avait menacé de tuer les agents qui étaient devant sa porte et avait un comportement très maniaque et irrationnel. Son arrestation était sans aucun doute justifiée en vertu du Code criminel et de la Loi sur la santé mentale.

Je suis aussi convaincu que les deux décharges d’armes à feu à létalité atténuée étaient légalement justifiées. [4] En ce qui concerne l’utilisation, par l’AI no 1, du fusil à létalité atténuée avec projectiles en sachets, l’agent réagissait à ce moment-là à la présence du plaignant qui était instable et violent et tenait un tournevis en l’air. Comme le plaignant se comportait de façon menaçante, je ne peux pas reprocher à l’agent d’avoir utilisé son arme pour tenter de l’immobiliser temporairement à distance. Si le projectile avait atteint le plaignant, cela aurait peut-être permis aux agents de l’arrêter à ce moment-là sans causer de blessures graves ni nécessiter un autre recours à la force. Je suis aussi d’avis que les décharges d’ARWEN par l’AI no 2 sont défendables pour essentiellement les mêmes raisons. En effet, à ce moment-là, le plaignant avait donné aux agents des raisons de croire qu’il était en possession d’une arme à feu. Dans tout cela, il convient de noter que les agents avaient tenté de désamorcer la situation par le dialogue avant de recourir à leurs armes. Malheureusement, le plaignant n’était pas sain d’esprit à ce moment-là et était incapable de répondre de la même manière.

Pour les raisons qui précèdent, il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI no 1 et l’AI no 2 se soient comportés autrement que légalement tout au long de leur interaction avec le plaignant. Il n’y a donc aucune raison de porter des accusations criminelles dans cette affaire.

Date : 30 mai 2023

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les renseignements contenus dans cette section reflètent les informations reçues par l'UES au moment de la notification et ne reflètent pas nécessairement les conclusions de fait de l'UES à la suite de son enquête. [Retour au texte]
  • 2) Les heures indiquées sont celles de l'horloge interne des armes à impulsions et ne sont pas nécessairement synchronisées entre elles ou avec l'heure réelle. [Retour au texte]
  • 3) Les éléments de preuve suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties importantes de ces éléments de preuve sont résumées ci-après. [Retour au texte]
  • 4) Même si cela ne fait pas l'objet de l'enquête de l'UES, il semblerait que les autres formes de recours à la force, à savoir les décharges d'armes à impulsions par l'AT no 7 et l'agent no 1, et les frappes avec la main de l'AT no 7, étaient également légalement justifiées étant donné la résistance du plaignant et les exigences de la situation, notamment la possibilité que le plaignant ait une arme à feu. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.