Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 22-TCI-223

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 46 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 1er septembre 2022, à 7 h 6, le Service de police de Toronto (SPT) a avisé l’UES de la blessure subie par le plaignant.

Le SPT a signalé que le 31 août 2022, à 14 h 27, des agents du SPT ont arrêté le plaignant pour agression. Il a ensuite été emmené à l’Hôpital général de Toronto, où l’on a constaté qu’il avait une fracture de l’os nasal.
 

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 1er septembre 2022 à 7 h 48

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 1er septembre 2022 à 8 h 5

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 6
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1
 

Personne concernée (« plaignant ») :

Homme de 46 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés.

Le plaignant a participé à une entrevue le 1er septembre 2022.


Témoins civils

TC no 1 A participé à une entrevue
TC no 2 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à des entrevues entre le 19 et le 29 septembre 2022.
 

Agents impliqués

AI A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées.

L’agent impliqué a participé à une entrevue le 14 septembre 2022.

Agents témoins

AT A participé à une entrevue

L’agent témoin a participé à une entrevue le 12 septembre 2022.

[Remarque : Un agent témoin est un agent ou une agente (agent de police, agent spécial employé par la Commission des parcs du Niagara ou agent de la paix du Service de sécurité de l’Assemblée législative) qui, de l’avis du directeur de l’UES, est en cause dans l’incident faisant l’objet de l’enquête, sans toutefois être un agent impliqué à l’égard de l’incident.

À la demande de l’UES, les agents témoins ont l’obligation légale, en vertu de la Loi sur l’UES, de participer à une entrevue avec les enquêteurs de l’UES et de répondre à toutes leurs questions, dans la mesure où elles sont raisonnables. L’UES a aussi le droit d’obtenir une copie de leurs notes.]

Éléments de preuve

Les lieux

L’interaction entre le plaignant et les agents s’est produite dans le couloir à l’extérieur de l’appartement du plaignant. Les lieux n’ont pas été examinés.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [1]

L’UES a cherché et obtenu des enregistrements vidéo pertinents, qui sont décrits ci dessous.
  • Enregistrement vidéo du bureau de la gestionnaire de l’établissement.


Enregistrement vidéo du bureau de la gestionnaire de l’établissement capté pendant la rencontre avec le plaignant

Voici un résumé des extraits pertinents.

Le 31 août 2022, le TC no 1 est assis derrière le bureau de la gestionnaire de l’établissement. La gestionnaire est assise à sa gauche. Le plaignant est assis directement en face du TC no 1. Il semble que le plaignant et le TC no 1 discutent.

À 14 h 33 min 13 s, le TC no 1 se lève de sa chaise et fait un pas vers la gauche, se plaçant à gauche du bureau, tout en étirant le bras gauche et en pointant du doigt le plaignant, qui s’est levé de sa chaise. Le TC no 1 empêche le plaignant de contourner le bureau et d’aller vers la gestionnaire de l’établissement. Le TC no 1 et le plaignant sont debout l’un en face de l’autre, du côté gauche du bureau.

Le plaignant tente de saisir le bras droit du TC no 1 avec sa main droite. Le TC no 1 repousse le plaignant, et la gestionnaire se lève. Le TC no 1 pousse le plaignant vers l’entrée, et une lutte s’ensuit. Le plaignant agrippe le TC no 1 par le cou et le pousse vers l’arrière; le TC no 1 tombe. La gestionnaire de l’établissement semble avoir un téléphone dans les mains. Lorsque le TC no 1 tente de se lever, le plaignant lui donne quatre coups de son poing droit au côté droit du visage.

Le TC no 1 tente de saisir le cou du plaignant, et la gestionnaire contourne le bureau et tente d’aider le TC no 1 en agrippant le coude gauche du plaignant. Le TC no 1 tient une lampe de poche noire dans sa main droite et tente de frapper le plaignant avec celle-ci. Le plaignant pousse le TC no 1 dans les chaises qui sont à côté du bureau. Le TC no 1 tombe par terre. Le TC no 1 se relève, puis le plaignant sort du bureau de la gestionnaire. La gestionnaire prend le téléphone et fait un appel.


Appel au SPT par l’intermédiaire du 9-1-1

À 14 h 25 min 10 s, la gestionnaire de l’établissement appelle le 9-1-1 pour demander que la police et les services médicaux d’urgence se présentent sur les lieux. On la transfère à une répartitrice des services médicaux d’urgence, et elle demande à ce que les services se présentent à l’établissement – une résidence pour personnes souffrant de problèmes de santé mentale. Elle explique qu’il y a eu une agression physique dans son bureau et demande que les services médicaux d’urgence se présentent dès que possible. Elle dit que le patient est dans son bureau.

La gestionnaire dit que le TC no 1, le propriétaire de l’établissement, était dans le bureau et a subi une agression très violente de la part de l’un des résidents [on sait maintenant qu’il s’agit du plaignant]. La répartitrice tente de poser des questions, mais la gestionnaire l’interrompt constamment. La répartitrice semble contrariée et demande à la gestionnaire d’écouter ses questions.

On entend en arrière-plan un homme [on croit qu’il s’agit du TC no 1] dire « hé, c’est quoi son problème? Nous avons besoin de la police et d’une ambulance tout de suite ». La gestionnaire dit qu’elle est avec le TC no 1 et donne l’âge de celui-ci. Elle dit qu’il est conscient et qu’il respire. Elle affirme que le résident qui a agressé le TC no 1 est le plaignant, et elle dit croire que celui-ci est retourné à son logement, mais qu’elle n’en est pas certaine. La gestionnaire dit à la répartitrice qu’ils ont besoin de la police « le plus vite possible ». La répartitrice demande si le plaignant peut être armé, et la gestionnaire dit qu’il a une lampe de poche. Elle confirme qu’il n’y a pas de saignement important.

La répartitrice de la police demande où est allé le plaignant. La gestionnaire répond qu’elle n’en est pas certaine, mais qu’elle croit qu’il est retourné dans son logement. Elle donne le nom et l’âge de celui-ci.

La gestionnaire de l’établissement dit que selon elle, le plaignant n’était pas sous l’influence de la drogue ou de l’alcool.


Enregistrements vidéo captés par les caméras corporelles – l’AI et l’AT

Voici un résumé des enregistrements.

L’enregistrement commence à 15 h 28; on voit un homme franchir le seuil d’une porte. Il a les cheveux noirs et porte un t-shirt blanc et un pantalon bleu foncé. L’homme emmène l’AI et l’AT à un couloir menant à une terrasse sur le toit; la porte donnant sur la terrasse est ouverte. L’AI sort pour se rendre sur la terrasse et observe les lieux. L’AT fait demi-tour et ne va pas sur la terrasse.

À 15 h 29, la fonction audio de la caméra corporelle de l’AI s’active. L’AI regarde par une porte-fenêtre qui donne sur une petite chambre à coucher, et on l’entend dire « il n’est pas là ». On voit la réflexion de l’AT dans la porte-fenêtre – il est à l’extérieur, à côté de l’AI. On entend l’AT dire qu’il va frapper à la porte.

On entend frapper à une porte, et on entend l’AI dire « oui, il est là ». Un homme [on sait maintenant qu’il s’agit du plaignant] apparaît. Il regarde l’AI à travers la porte-fenêtre tandis qu’il s’approche de la porte de son appartement. L’AI dit « il n’a rien dans les mains ».

On entend l’AT dire « bonjour monsieur, Police de Toronto. Nous allons procéder à votre arrestation pour agression à l’endroit d’un membre de la direction. Veuillez vous retourner et placer vos mains derrière votre dos ». L’AI entre dans le couloir tandis que l’AT parle au plaignant. L’AT ouvre la porte en la poussant avec sa main gauche, et le plaignant se retourne et place ses mains derrière son dos. On entend l’AI demander au plaignant par quel nom il préfère s’identifier.

L’AT tient ses menottes dans sa main droite et saisit la main gauche du plaignant avec sa main gauche. Lorsque l’AT tente de le menotter, le plaignant se dégage et se retourne pour faire face à l’AT. On entend l’AT dire « qu’est-ce que vous faites? Mettez vos mains derrière votre dos ». Le plaignant répond « non, arrêtez de faire semblant », en tendant le bras et le doigt vers l’AT. On voit l’AT ranger ses menottes. Le plaignant crie « sortez d’ici ». L’AI dit le nom du plaignant d’une voix calme. Le plaignant crie « la ferme, va te faire foutre! ».

Le plaignant tente de fermer la porte, mais l’AT l’en empêche. Le plaignant pousse l’AT. L’AT agrippe les poignets du plaignant. L’AT est près du seuil de la porte; l’AI est dans le couloir. L’AI dit encore une fois le nom du plaignant. On entend le plaignant dire à l’AT qu’il est un fou et un imposteur. Tandis que la lutte se poursuit, on entend le plaignant lancer des jurons à l’endroit de l’AT et de l’AI. Il traite l’AT d’idiot, de tas de merde costumé et de clown.

Vers 15 h 30, on voit le gant noir de l’AI agripper l’avant-bras gauche du plaignant. Peu après, les agents portent le plaignant au sol, couché sur le ventre. Les deux mains gantées de l’AI tiennent le poignet gauche du plaignant. La tête du plaignant est tournée vers l’AI. On l’entend dire « attends, attends ». L’AI répond calmement « d’accord ». L’AT sort ses menottes avec sa main droite et retient le poignet droit du plaignant avec sa main gauche. On entend le plaignant dire « tu vas voir qui mène, espèce de [insulte à caractère racial]. Espèce de [insulte à caractère racial], espèce de [insulte à caractère racial] ». L’AT place un bracelet des menottes autour du poignet droit du plaignant, derrière son dos. On entend l’AI dire au plaignant de relaxer. Le plaignant demande ensuite « qui a payé ton uniforme, qui a payé ton uniforme? ». L’AI a de la difficulté à placer le bras gauche du plaignant derrière son dos. On entend l’AT dire « tends-nous ta main », et le plaignant répondre « va te faire foutre ». L’AT répète sa demande, et le plaignant dit à répétition « va te faire foutre, va te faire foutre, va te faire foutre ». L’AT donne quatre coups avec son genou droit à l’arrière des cuisses du plaignant. L’AI a de la difficulté à dégager le bras gauche du plaignant, qui est sous le torse de celui-ci. L’AT tient toujours le poignet droit du plaignant dans sa main gauche. L’AT et l’AI répètent leurs ordres à l’endroit du plaignant, mais sans succès.

Vers 15 h 32, la jambe droite de l’AI est sur le côté gauche du plaignant, et son genou droit est plié et placé sur la région du bas de la tête et du cou du plaignant. Elle tente toujours de contrôler la main gauche du plaignant. L’AT crie « tends-nous tes mains ». Le plaignant répond « hé, le débutant, abandonne, abandonne, lâche-moi. Laisse tomber. Je vais tuer ta famille ». L’AI allonge sa matraque et s’en sert pour tenter de sortir la main gauche du plaignant de sous son torse. Il crie « hé le débutant, tu ne peux pas me menotter! Lève-toi! Lève-toi! Appelez l’armée, ils sont tous en état d’arrestation! Tuez-les tous ». L’AI, qui tente toujours de déloger la main du plaignant, place son genou droit sur la tête du plaignant et son genou gauche au milieu de son dos. Elle tente de prendre le contrôle de la main gauche du plaignant avec sa matraque. Elle enlève son genou gauche du dos du plaignant et place son pied à droite de l’épaule de celui-ci. Elle place son genou gauche près de l’épaule gauche du plaignant; elle tente de lever celui-ci, puis donne un coup de genou au plaignant près de son épaule droite et dit « arrête, donne-moi ton bras, donne-moi ton bras ». Le plaignant crie « ils m’ont donné un coup de genou au visage, ils m’ont donné un coup de genou au visage! Elle m’a donné un coup de genou au visage ». L’AI tente toujours de déloger le bras gauche du plaignant et continue de lui demander de coopérer. Le plaignant crie « vous êtes filmés, regardez vers le haut, regardez, vous êtes filmés, vous êtes filmés, vous êtes filmés ».

À 15 h 35, l’AI réussit à prendre le contrôle du bras gauche du plaignant; elle approche le poignet gauche, et l’AT le menotte. L’AT retient le plaignant avec son poignet droit et son coude gauche et dit « ton nez est cassé, hein? Espèce d’idiot ». On voit une petite quantité de sang sur le plancher. On entend l’AI dire « on va t’appeler une ambulance ».

Le plaignant commence à crier « tuez-les », puis continue de crier. On peut voir du sang dans la narine gauche du plaignant.

L’AI sort sur la terrasse et cherche la manière la plus sécuritaire d’emmener le plaignant en bas de l’escalier. Lorsqu’elle est dehors, on entend l’AI demander par radio une ambulance et une unité supplémentaire. On entend toujours le plaignant crier dans le couloir. L’AT semble avoir placé son genou droit sur la cuisse droite du plaignant et sa main droite au milieu du dos de celui-ci. On voit une flaque de sang sur le plancher, à gauche de la tête du plaignant.

On entend l’AI dire par radio à quel étage les agents se trouvent. Quelques instants plus tard, deux autres agents du SPT arrivent. Elle dit à ces deux agents qu’il a été difficile de menotter le plaignant et qu’ils ont besoin d’aide pour le transporter en bas de l’escalier.

L’AT demande au plaignant s’il veut marcher, et celui-ci répond « non, va te faire foutre ». L’AT commence à attacher les jambes du plaignant ensemble.

Le plaignant décide ensuite de descendre l’escalier en marchant, tout en lançant des jurons aux agents. L’AI suit derrière le plaignant.

Documents obtenus du service de police

Sur demande, l’UES a reçu les éléments suivants de la part du SPT entre le 1er septembre 2022 et le 5 octobre 2022 :
  • enregistrements vidéo captés par la caméra corporelle de l’AI;
  • enregistrements vidéo captés par la caméra corporelle de l’AT;
  • procédure – arrestation;
  • procédure – usage de la force;
  • notes de l’AI;
  • notes de l’AT;
  • rapport d’incident. 

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a obtenu les éléments suivants auprès d’autres sources et les a examinés :
  • dossiers médicaux du plaignant provenant de l’Hôpital général de Toronto.

Description de l’incident

Il est possible d’établir clairement les principaux événements qui se sont produits au moyen des éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment des enregistrements vidéo qui montrent l’incident.

Dans l’après-midi du 31 août 2022, le SPT a reçu un appel par l’intermédiaire du 9-1-1 concernant une agression. L’appelante – la gestionnaire d’un établissement – a appelé pour signaler qu’un résident de l’établissement dont elle était gestionnaire – le plaignant – venait d’attaquer le propriétaire de l’établissement – le TC no 1. Des agents ont été dépêchés sur les lieux pour prendre connaissance de la situation.

L’AI et l’AT sont arrivés sur les lieux et ont discuté avec la gestionnaire et le TC no 1. Ils ont également regardé un enregistrement vidéo de l’altercation, qui s’est produite dans le bureau de la gestionnaire de l’établissement. Constatant qu’il y avait des motifs de procéder à l’arrestation du plaignant, les agents se sont rendus au logement de celui-ci, situé au dernier étage de l’immeuble, pour le mettre sous garde.

Le plaignant a répondu lorsque l’AT a frappé à sa porte, et il s’est retourné et a placé ses mains derrière son dos lorsqu’on l’a informé qu’il était en état d’arrestation. Après quelques instants, alors que l’AT tentait de le menotter, le plaignant s’est retourné pour faire face à l’agent. Il a demandé aux agents de s’en aller, puis il a tenté de fermer la porte. Lorsque l’AT l’a empêché de fermer la porte, le plaignant l’a poussé. Depuis le seuil de la porte, l’AT a agrippé les bras du plaignant, puis est entré dans la résidence pour pousser le plaignant hors de celle-ci par la porte. L’AI s’est jointe à l’altercation, et le plaignant a été porté au sol dans le couloir étroit.
 
Le plaignant était couché sur le ventre dans le couloir, et les agents ont eu de la difficulté à le menotter. L’AT a réussi à placer un bracelet des menottes autour du poignet droit du plaignant, mais les agents ont eu de la difficulté à agripper son bras gauche, puisque le plaignant le gardait fermement sous son torse. L’AT a donné quatre coups de genou à l’arrière des cuisses du plaignant, et l’AI a frappé le derrière de la tête du plaignant avec son genou droit, la tête du plaignant heurtant le plancher. Environ deux minutes et demie après avoir porté le plaignant au sol, les agents ont enfin pu prendre le contrôle des deux bras du plaignant et le menotter, les mains derrière le dos.

Après son arrestation, on a emmené le plaignant à l’hôpital, où l’on a déterminé qu’il a subi une fracture du nez.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le plaignant a subi une blessure grave lors de son arrestation par les agents du SPT le 31 août 2022. L’un des agents ayant procédé à l’arrestation – l’AI – a été désigné comme étant l’agent impliqué aux fins de l’enquête de l’UES. L’enquête est maintenant terminée. Après avoir examiné les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI a commis une infraction criminelle relativement à l’arrestation et à la blessure du plaignant.

Aux termes du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents de police sont à l’abri de toute responsabilité criminelle pour l’usage de la force dans l’exercice de leurs fonctions, pourvu que cette force soit, sur la base d’un jugement raisonnable, nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou permis de faire.

Je suis convaincu qu’au moment où l’altercation a commencé, l’AI et l’AT procédaient à l’arrestation légitime du plaignant. Compte tenu de ce que les agents savaient de l’altercation entre le plaignant et le TC no 1, après avoir regardé l’enregistrement vidéo de l’incident et réalisé des entrevues, ils avaient des motifs de croire que le plaignant était effectivement l’agresseur dans cet incident.

Je suis également convaincu que les agents n’ont pas eu recours à plus de force que nécessaire pour procéder à l’arrestation du plaignant. Après avoir d’abord semblé collaborer, le plaignant est rapidement devenu combatif. Il a dégagé ses bras de l’emprise de l’AT, puis a poussé l’agent lorsque celui-ci a tenté de l’empêcher de fermer la porte. À ce moment-là, le plaignant avait été placé en état d’arrestation, et l’AT, qui a rapidement été rejoint par l’AI, était en droit de reprendre le contrôle du plaignant lorsque celui-ci s’est dégagé et a tenté de fermer la porte. Compte tenu de ce que les agents savaient de la violence du plaignant à l’égard du TC no 1 ainsi que de son agressivité à ce moment-là, il semble que de porter le plaignant au sol dans le couloir était une tactique raisonnable. La manœuvre a été accomplie d’une manière contrôlée et a permis de placer le plaignant dans une position dans laquelle les agents étaient davantage en mesure de gérer sa résistance. Au sol, le plaignant s’est vivement débattu. Les quatre coups de genou donnés par l’AT n’ont pas aidé les agents à dégager le bras gauche du plaignant. Même le coup de genou donné par l’AI derrière la tête du plaignant, qui semble avoir causé sa blessure, n’a pas atténué la résistance du plaignant. Ce n’est qu’environ 50 secondes plus tard que les agents, avec l’aide de la matraque de l’AI, qu’elle a utilisée pour dégager le bras gauche du plaignant, ont réussi à maîtriser le plaignant et à le menotter.

En conclusion, même si je reconnais que le plaignant a subi sa fracture au nez lorsque son visage a frappé le sol en raison d’un coup de genou donné par l’AI, il n’y a aucun motif raisonnable de croire que la blessure est attribuable à un acte illégal commis par l’un ou l’autre des agents ayant procédé à l’arrestation du plaignant. Ainsi, il n’y a aucun motif de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.


Date : 30 décembre 2022

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les enregistrements en question contiennent des renseignements personnels de nature délicate et ne sont donc pas divulgués, aux termes du paragraphe 34(2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties importantes de ces enregistrements sont résumées ci-dessous. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.