Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 22-OCI-039

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 34 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 11 février 2022, à 3 h 42, la Police régionale de Peel (PRP) a communiqué avec l’UES et donné les informations suivantes.

Le 10 février 2022, à 22 h 05, des agents ont remarqué un véhicule qui roulait de façon erratique à l’intersection de Brickstone Mews et d’Arbutus Way, à Mississauga. Une vérification de la plaque d’immatriculation a révélé qu’il s’agissait d’un véhicule volé. Les agents ont perdu de vue le véhicule et ont commencé à le rechercher dans le secteur.

Ils l’ont trouvé dans un stationnement souterrain au 4011 Brickstone Mews. Quand les agents se sont approchés du véhicule, le plaignant en est sorti et s’est enfui. Les agents l’ont poursuivi à pied. Les agents ont déployé une arme à impulsions à deux reprises dans le garage souterrain.

Le plaignant est tombé, s’est relevé, puis a continué à courir sur Burnhamthorpe Road. Il est de nouveau tombé sur la chaussée de Burnhamthorpe Road où les agents l’ont arrêté.

Comme il se plaignait d’avoir mal, il a été emmené à l’Hôpital Credit Valley (HCV), où on lui a diagnostiqué une fracture de la cheville.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 11 février 2022 à 4 h 28

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 11 février 2022 à 5 h 25

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 34 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

Le plaignant a participé à une entrevue le 11 février 2022.

Agent impliqué (AI)

AI A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées

L’agent impliqué a participé à une entrevue le 2 mars 2022.

Agents témoins (AT)

AT no 1 Notes examinées; entrevue jugée non nécessaire
AT no 2 A participé à une entrevue

L’agent témoin a participé à une entrevue le 11 février 2022.

Éléments de preuve

Les lieux

Le 11 février 2022, à 7 h 20, l’enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES s’est rendu au niveau de stationnement P1 du 4011 Brickstone Mews. Des disques d’identification anti-criminels (AFID), un fil, une sonde et des portes de cartouche d’arme à impulsions, une casquette de baseball et un téléphone cellulaire étaient visibles depuis le niveau de stationnement jusqu’à un couloir menant au niveau supérieur, le long du couloir puis dans un escalier menant à une porte de sortie débouchant sur Burnhamthorpe Road.

Une porte coupe-feu métallique ouverte séparait les zones un et deux. Il y avait une caméra de sécurité en forme de dôme sur le plafond de la zone 2 (près de la porte coupe-feu métallique entre les zones 1 et 2). Les deux zones étaient bien éclairées. Le sol en béton était peint en gris et les murs en blocs de béton étaient peints en blanc. Les murs de l’escalier était doté de mains courantes. Le nez des marches était rainuré. La porte métallique de l’issue de secours au bas de l’escalier (zone deux) débouchait sur Burnhamthorpe Road.

Une Honda HRV était garée dans une zone sécurisée. Une agente de la PRP gardait ce véhicule. Sur la banquette arrière de sa voiture de police, il y avait des outils et des trousses d’outils.

La Honda était couverte d’une couche de saleté. Son toit ouvrant était partiellement ouvert. Un coupe-boulons, un ordinateur portable/tablette et des câbles se trouvaient sur le siège du passager avant. Sur le siège arrière du véhicule, il y avait une mallette du genre porte-documents de sécurité partiellement ouverte et une boîte Cuisinart. Le démarreur ne semblait pas avoir été altéré.

L’enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES a examiné les lieux et pris des photographies et des mesures pour dessiner un schéma à des fins d’analyse judiciaire. Les étiquettes, les sondes, les fils et les portes de cartouches de l’arme à impulsions ont été récupérés. L’UES a obtenu des séquences vidéo de la caméra de sécurité.


Figure 1 - Fil et sonde d’arme à impulsions sur les lieux

Schéma des lieux

Éléments de preuve matériels

L’enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES a examiné une arme à impulsions de modèle X2. Cette arme contenait deux cartouches vides auxquelles des morceaux de fil cassé étaient attachés. L’enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES a saisi les deux cartouches tirées de l’arme à impulsions.

L’enquêteur a activé l’arme à impulsions et effectué un tir à vide pour établir une référence. Un rapport a été créé. L’arme à impulsions et sa pile ont été ensuite rendues à la PRP.


Figure 2 – Arme à impulsions et deux cartouches

Éléments de preuves médicolégaux

Rapport sur l’arme à impulsions

L’enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES a examiné le rapport de l’arme à impulsions créé le 11 février 2022. Ce rapport indiquait ce qui suit :

Le 10 février 2022, à 22 h 08 min 28 s, l’arme à impulsions a été déclenchée et la cartouche no 1 a été déployée pendant cinq secondes. [1]
Le 10 février 2022, à 22 h 08 min 31 s, l’arme à impulsions a été déclenchée et la cartouche no 2 a été déployée pendant deux secondes.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [2]

Enregistrements des communications

Le 15 février 2022, la PRP a remis à l’UES les enregistrements des communications radio et téléphoniques. Ce qui suit est un résumé des communications pertinentes.

Transmissions radio

À 22 h 05 min 31 s, l’AI signale qu’une voiture volée l’a dépassé sur Brickstone Mews en direction sud vers Burnhamthorpe Road puis est entrée dans le garage souterrain du complexe résidentiel du 4011 Brickstone Mews. Il communique le numéro de la plaque d’immatriculation et un répartiteur confirme que le véhicule est répertorié comme étant « volé ». L’AT no 2 est également avisé de l’appel.

À 22 h 07 min 20 s, l’AI dit qu’il a engagé une poursuite à pied vers l’ouest, sur le côté sud de Burnhamthorpe Road, à l’intersection de Brickstone Mews. L’AT no 2 est en route pour le rejoindre.

À 22 h 08 min 10 s, l’AI et l’AT no 2 annoncent qu’ils ont un homme – le plaignant – sous garde à Burnhamthorpe Road et Parkside Village Drive.

Communications téléphoniques

Tous les enregistrements téléphoniques provenaient d’agents de police qui communiquaient avec le service de répartition de la PRP pour des tâches administratives.
 

Vidéo d’une caméra de sécurité

Le 11 février 2022, l’UES a obtenu des séquences vidéo et des photographies du complexe résidentiel situé au 4011 Brickstone Mews à Mississauga. Les vidéos n’avaient pas de fonction audio.

Vers 22 h 03 min 38 s, un véhicule conduit par le plaignant entre dans le complexe résidentiel par la rampe d’accès menant au premier niveau du garage souterrain.

De 22 h 04 min 5 s 22 h 04 min 36 s environ, le plaignant gare son véhicule sur une place du premier niveau de stationnement. Un véhicule banalisé de la PRP conduit par l’AI et un véhicule portant les inscriptions de la PRP conduit par l’AT no 1 s’engagent sur la rampe menant au premier niveau du garage souterrain. L’AI et l’AT no 1 garent leurs véhicules de police au premier niveau du garage souterrain et sortent de leurs véhicules. Le plaignant se précipite dans la cage d’escalier qui se trouve à droite de son véhicule au premier niveau de stationnement, suivi de l’AI.

Vers 22 h 04 min 40 s, l’AT no 1 entre dans la cage d’escalier.

À une heure indéterminée, le plaignant entre dans un couloir menant à l’issue de secours du côté sud du bâtiment. L’AI le suit; il tient une arme à impulsions dégainée dans la main droite. L’AI décharge l’arme à impulsions au moment où le plaignant ouvre la porte coupe-feu menant au couloir. Cette décharge n’a aucun effet. Le plaignant tourne vers la droite et court vers la porte de l’issue de secours. L’AI le suit et décharge son arme à impulsions une deuxième fois juste au moment où le plaignant atteint un escalier menant à la porte. L’escalier a environ 18 marches. Le plaignant saute du haut de l’escalier et atterrit environ huit marches plus bas, puis tombe sur le palier inférieur en atterrissant sur sa jambe gauche. Il se relève immédiatement et sort par la porte de l’issue de secours. L’AI descend l’escalier et sort à son tour par la porte de l’issue de secours.

Vidéo de la caméra corporelle portée par l’AI

Le 14 février 2022, l’UES a obtenu la séquence vidéo de la caméra corporelle de l’AI. La séquence a été enregistrée le 10 février 2022, à partir de 22 h 06 min 16 s, et dure 38 minutes et 50 secondes. En voici un résumé :

De 22 h 06 min 38 s à 22 h 06 min 54 s environ, l’AI sort de son véhicule de police et commence à courir dans le garage souterrain du 4011 Brickstone Mews. L’AI entre dans une cage d’escalier et commence à monter l’escalier en courant derrière le plaignant.

De 22 h 06 min 57 s à 22 h 07 min 3 s environ, l’AI crie [traduction] : « Vous êtes en état d’arrestation, arrêtez ». L’AS monte deux autres volées d’escaliers et dit [traduction] : « Arrête. Je vais te taser », tout en dégainant son arme à impulsions. Il continue de courir, l’arme dans la main droite.

De 22 h 07 min 8 s à 22 h 07 min 11 s environ, l’Ai entre dans le couloir et décharge son arme à impulsions au moment où le plaignant sort par une porte coupe-feu intérieure. Cette décharge n’a aucun effet. L’AI décharge son arme à impulsions une deuxième fois alors que le plaignant se trouve en haut d’un escalier menant à une porte de sortie coupe-feu débouchant sur l’extérieur. Le plaignant émet un bruit puis saute une volée de marches vers le bas et atterrit à côté de la porte.

De 22 h 07 min 14 s à 22 h 07 min 20 s environ, le plaignant se relève et sort par la porte de sortie sur Burnhamthorpe Road. L’AI continue de le suivre vers l’ouest dans les voies de circulation ouest sur Burnhamthorpe Road. L’AI dit par radio [traduction] : « Dans une poursuite à pied sur Brickstone, vers l’ouest. » Le plaignant traverse le terre-plein central, s’engage en courant dans les voies en direction est de Burnhamthorpe Road et continue vers l’ouest dans la voie en bordure.

De 22 h 07 min 27 s à 22 h 07 min 33 s environ, l’AI crie au plaignant de s’arrêter, tout en continuant de courir.

De 22 h 07 min 45 s à 22 h 07 min 52 s environ, l’AI dit au répartiteur qu’il se trouve du côté sud de Burnhamthorpe en direction de l’édifice Ovation City. Il crie de nouveau au plaignant de s’arrêter. Le plaignant tourne vers le nord et court vers la voie de virage à gauche des voies en direction est de Burnhamthorpe Road, et tombe à plat ventre. Le plaignant se tourne sur le côté droit. L’AI le saisit par l’épaule gauche et le bras gauche et lui dit de se mettre à plat ventre et de lui tendre les mains.

Entre 22 h 08 min 5 s et 22 h 08 min 26 s environ, l’AT no 2 arrive et gare son véhicule dans la voie de gauche en direction ouest de Burnhamthorpe Road. L’AI tire la main droite du plaignant dans son dos tandis que l’AT no 2 pose son genou gauche sur l’épaule du plaignant en poussant son visage vers le sol. L’AI dit par radio qu’il a l’homme sous contrôle. Il le menotte dans le dos et le relève en position assise.

Vers 22 h 08 min 53 s, l’AI dit au plaignant qu’il est en état d’arrestation pour possession d’une voiture volée.

De 22 h 09 min 14 s à 22 h 16 min 35 s environ, les agents escortent le plaignant jusqu’au côté conducteur du véhicule de l’AT no 2. Le plaignant est fouillé, examiné pour trouver les sondes de l’arme à impulsions, puis reconduit dans le véhicule dans le garage souterrain.

Vers 22 h 18 min 5 s, quand il sort du véhicule de police, le plaignant dit qu’il a mal à la cheville. L’AI lui dit [traduction] : « Tu as mal à la cheville? Tu ne devrais pas courir si tu ne veux pas avoir mal à la cheville ».

De 22 h 18 min 52 s à 22 h 19 min 6 s environ, le plaignant se dirige sans aide vers le véhicule de police de l’AI et s’assoit sur le siège arrière côté passager. L’AI demande à l’AT no 1 de le rejoindre à l’hôpital.

Vidéo de la caméra corporelle de l’AT no 2

Le 14 février 2022, l’UES a obtenu la séquence vidéo de la caméra corporelle de l’AT no 2. La séquence a été enregistrée le 10 février 2022, à partir de 22 h 08 min 24 s, et dure 5 minutes et 12 secondes.

De 22 h 08 min 24 s à 22 h 08 min 55 s environ, l’AT no 2 est debout à côté de l’AI et du plaignant sur la chaussée de Burnhamthorpe Road, dans la voie de gauche en direction est. L’AI menotte le plaignant et le relève en position assise. L’AI dit [traduction] : « Bon, on se relève maintenant ». L’AT no 2 ajoute : « Quittez la chaussée avant de vous faire écraser ».

De 22 h 09 min 10 s à 22 h 09 min 56 s environ, l’AT no 2 et l’AI saisissent le plaignant chacun par un bras pour l’aider à se mettre debout et l’escortent jusqu’au véhicule de police de l’AT no 2. L’AI commence à fouiller les poches du manteau du plaignant et lui dit [traduction] : « Putain mec, tu m’as fait courir. Il y a quelque chose que je devrais savoir? Allez, parle, c’est quoi ça? Pas d’aiguilles? C’est quoi ton nom, j’ai oublié ». L’AI sort un sac en plastique de la poche du plaignant et lui dit qu’il est aussi en état d’arrestation pour possession d’une substance contrôlée.

De 22 h 11 min 19 s à 22 h 11 min 33 s environ, l’AT no 2 commence à fouiller les vêtements du plaignant à la recherche des sondes à impulsions. Il en trouve une dans la jambe du pantalon et une dans le dos du manteau. Le plaignant dit : « Quelque chose m’a frappé dans le dos ». L’AI et l’AT no 2 vérifient qu’aucune sonde n’a pénétré dans la peau du plaignant. L’AT no 2 retire les sondes du dos du manteau et de la jambe gauche du pantalon du plaignant.

Vers 22 h 12 min 1 s, le plaignant est placé sur le siège arrière, côté passager, du véhicule de police de l’AT no 2. L’AI lui lit ses « droits à un avocat ».

Éléments obtenus auprès du service de police

Sur demande, la PRP a remis à l’UES les documents et éléments suivants entre le 11 et le 16 février 2022 :
  • Chronologie de l’incident;
  • Notes de l’AT no 1;
  • Notes de l’AT no 2;
  • Notes de l’AI;
  • Détails d’incident (x 2);
  • Rapport sur les détails d’une personne;
  • Enregistrements des communications;
  • Directive de la PRP — intervention en cas d’incident;
  • Directive de la PRP — Enquêtes criminelles;
  • Rapport d’incident du SPT (transmis par la PRP);
  • Dossier de formation sur le recours à la force de l’AI — arme à impulsions;
  • Vidéos de caméras corporelles.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a examiné les éléments suivants obtenus auprès d’autres sources :
  • Dossier médical — Hôpital de Mississauga;
  • Séquence vidéo de la caméra de sécurité du 4011 Brickstone Mews, Mississauga.

Description de l’incident

Les événements importants en question ressortent clairement des éléments de preuve recueillis par l’UES et peuvent être brièvement résumés comme suit. Ils ont été enregistrés par des caméras de sécurité et des caméras corporelles de la police.

Dans la soirée du 10 février 2022, le plaignant conduisait un véhicule Honda volé. Il est entré dans le garage souterrain de l’immeuble du 4011 Brickstone Mews,à Mississauga, suivi d’un véhicule banalisé de la PRP. L’agent de police – l’AI – patrouillait dans le secteur et en vérifiant la plaque d’immatriculation du véhicule avait appris que le véhicule avait été déclaré volé à Toronto.

Quand il a vu l’agent, le plaignant est sorti de son véhicule et s’est enfui en courant. Il a monté un escalier et a couru dans un couloir jusqu’à un autre escalier qui menait à la porte d’une issue de secours. Le plaignant a sauté plusieurs marches dans l’escalier et a atterri sur le palier devant la porte, après quoi il s’est relevé et est sorti sur Burnhamthorpe Road West.

L’AI était sorti sa voiture de patrouille dans le garage souterrain et s’était lancé à la poursuite du plaignant à pied. Il déployé son arme à impulsions deux fois, mais aucune de ces décharges n’a neutralisé le plaignant. Sur Burnhamthorpe Road West, l’agent a couru après le plaignant vers l’ouest sur la chaussée et l’a finalement rattrapé à une courte distance de la porte de sortie. Le plaignant avait subi une blessure en tentant de fuir la police, vraisemblablement en sautant et en tombant dans l’escalier, et a fini par s’arrêter dans la rue, incapable de continuer sa course.

Après son arrestation, le plaignant s’est plaint de douleurs au pied gauche. Il a été transporté à l’hôpital où on lui a diagnostiqué une fracture de la cheville gauche.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le 10 février 2022, le plaignant a subi une blessure grave lors de son arrestation par un agent de la PRP. Cet agent a été désigné comme étant l’agent impliqué (AI) aux fins de l’enquête de l’UES. L’enquête est maintenant terminée. Après avoir évalué le dossier de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI ait commis une infraction criminelle en lien avec l’arrestation et la blessure du plaignant.

En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les agents de police sont exonérés de toute responsabilité criminelle pour le recours à la force dans l’exécution de leurs fonctions, pour autant que cette force est raisonnablement nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou autorisé de faire en vertu de la loi.

Je suis convaincu qu’après avoir fait vérifier la plaque d’immatriculation du véhicule Honda conduit par le plaignant et appris qu’il s’agissait d’un véhicule déclaré volé, l’AI avait des motifs légitimes de chercher à arrêter le plaignant.

Je suis aussi convaincu que la force utilisée par l’AI pour faciliter l’arrestation du plaignant, à savoir deux décharges d’une arme à impulsions, était légalement justifiée. Même si ces deux décharges n’ont eu aucun effet sur le plaignant, puisqu’il semble que les sondes n’ont pas traversé ses vêtements et atteint sa peau, la tactique était raisonnable. Réalisant qu’il était suivi par un agent de police et sachant que l’agent avait un motif légal de l’arrêter, le plaignant était déterminé à s’évader. Dans les circonstances, lorsque le plaignant a refusé d’obéir à l’ordre de l’agent de s’arrêter, même après que ce dernier l’ait averti qui allait utiliser son arme à impulsions, l’agent était dans son droit de décharger l’arme. Si elle avait eu l’effet prévu, la décharge de l’arme à impulsions aurait immédiatement mis fin à la fuite du plaignant sans lui infliger directement de blessure grave. Il est un tant soit peu préoccupant que l’agent ait tiré la deuxième fois au moment où le plaignant approchait du haut d’un escalier. Une incapacité neuromusculaire complète causée par une arme à impulsions dans de tels cas peut entraîner une chute incontrôlable et causer ainsi des blessures graves. Cela dit, la situation était très dynamique et se déroulait très rapidement, et je ne suis pas convaincu que ce risque aurait été facilement reconnaissable sur le moment.

Pour les raisons qui précèdent, il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI se soit comporté autrement que légalement tout au long de son interaction avec le plaignant. Il n’y a donc pas lieu de déposer des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est donc clos.


Date : 10 juin 2022

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les heures sont dérivées de l’horloge interne de l’arme à impulsions, qui n’est pas nécessairement synchronisée avec l’heure réelle. [Retour au texte]
  • 2) Les éléments de preuve suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties importantes de ces éléments de preuve sont résumées ci-après. [Retour au texte]
  • 2) Les éléments de preuve suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties importantes de ces éléments de preuve sont résumées ci-après. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.