Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 21-OCD-023

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES au sujet de la mort d’un homme de 49 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 19 janvier 2021, à 22 h 51, le Service de police d’Ottawa (SPO) a avisé l’UES du décès du plaignant. D’après les informations fournies, le 19 janvier 2021, à 16 h 45, des agents du SPO se sont présentés à la résidence du plaignant, à Ottawa, pour exécuter un mandat de perquisition accordé en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Le plaignant a été arrêté, amené aux cellules centrales du SPO au 474, rue Elgin, et placé dans une cellule. Vers 21 h 30, le plaignant a été trouvé inconscient. Les services médicaux d’urgence (SMU) ont été dépêchés. Les SMU ont constaté qu’il n’avait plus de signes vitaux.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 20 janvier 2021 à 0 h 8

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 20 janvier 2021 à 2 h 30

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 2
 
Nombre d’enquêteurs spécialistes des
sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Personne concernée (« plaignant ») :

Homme de 49 ans, décédé

Témoins civils (TC)

TC no 1 N’a pas participé à une entrevue (impossible à localiser)
TC no 2 N’a pas participé à une entrevue (impossible à localiser)
TC no 3 N’a pas participé à une entrevue (proche parent)
TC no 4 N’a pas participé à une entrevue (proche parent)

Agents impliqués (AI)

AI no 1 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
AI no 2 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

Les agents impliqués ont participé à des entrevues entre le 21 janvier 2021 et le 1er février 2021.

Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue
AT no 3 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à des entrevues entre les 21 et 22 janvier 2021.

Témoins employés du service (TES)

TES no 1 A participé à une entrevue
TES no 2 A participé à une entrevue
TES no 3 A participé à une entrevue
TES no 4 A participé à une entrevue
TES no 5 A participé à une entrevue

Les témoins employés du service ont participé à des entrevues entre le 21 janvier 2021 et le 1er mars 2022.

Éléments de preuve

Les lieux

L’incident s’est produit dans une cellule du SPO au 474, rue Elgin, à Ottawa.

Le 20 janvier 2021, l’enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES s’est rendu sur les lieux. La cellule, les couloirs allant de l’entrée sécurisée, à l’aire de mise en détention et à la cellule ont été photographiés et filmés.

La cellule comprenait une toilette/lavabo combinés sur le mur du fond et un lit en béton sur le côté droit. Une caméra était fixée au mur où se trouvait la porte de la cellule et filmait l’intérieur de la cellule. Il y avait un boîtier de défibrillateur sur le sol, près de la porte.

Éléments de preuve matériels

Journal des contrôles du prisonnier — 19 janvier 2021

Le journal des contrôles effectués auprès du prisonnier pendant sa détention a été fourni à l’UES. En voici un résumé :
  • Vers 17 h 40, le plaignant est sorti de sa cellule pour appeler un avocat.
  • Vers 18 h 7, le TES no 1 est venu apporter un repas au plaignant. La mention suivante figurait dans le journal : [Traduction] « Observations : OK. »
  • Vers 18 h 19, le TES no 1 est venu vérifier comment se portait le plaignant. La mention suivante figurait dans le journal : [Traduction] « Observations : OK. »
  • Vers 18 h 53, le TES no 1 est venu vérifier comment se portait le plaignant. La mention suivante figurait dans le journal : [Traduction] « Observations : OK. »
  • Vers 19 h 35, le TES no 1 est venu vérifier comment se portait le plaignant. La mention suivante figurait dans le journal : [Traduction] « Observations : OK. »
  • Vers 20 h 12, le TES no 1 est venu vérifier comment se portait le plaignant. La mention suivante figurait dans le journal : [Traduction] « Observations : OK. »
  • Vers 20 h 46, le TES no 1 est venu vérifier comment se portait le plaignant. La mention suivante figurait dans le journal : [Traduction] « Observations : OK. »
  • Vers 21 h 11, le TES no 1 est venu vérifier comment se portait le plaignant. Le journal indique que le plaignant avait le teint gris et était confus, et que l’agent responsable (l’AI no 2) en avait été avisé.
  • Vers 21 h 50, le plaignant a été sorti de sa cellule.
  • Vers 21 h 50, le plaignant a été transporté à l’hôpital.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [1]

Enregistrements des communications

Le 19 janvier 2021, à 17 h 14, l’AT no 2 et l’AT no 3 se sont rendus à la résidence du plaignant pour l’amener à l’unité de détention centrale du SPO. Un mandat de perquisition pour stupéfiants venait d’être exécuté dans sa résidence. Ils sont arrivés à l’unité de détention centrale à 17 h 30.

Le 19 janvier 2021, à 21 h 27, le sergent responsable des détenus [maintenant connu comme étant l’AI no 2] a demandé que deux agents de police accompagnent une ambulance à l’hôpital.

À 21 h 31, des agents ont été appelés pour accompagner l’ambulance. Ils sont arrivés dans l’aire de détention à 21 h 40.

Vers 21 h 54, le plaignant a été transporté à l’Hôpital Civic d’Ottawa.
À 22 h 9, le centre de communication a été informé que le décès du plaignant avait été prononcé.

Vidéo du couloir menant à la cellule — 19 janvier 2021

La caméra qui filme le couloir est activée par le mouvement. Cependant, par moments, elle s’active même s’il n’y a initialement aucun mouvement devant la caméra. De l’autre côté du couloir, devant chaque cellule, une caméra est fixée au mur, à hauteur de porte, et filme l’intérieur de chaque cellule. Les caméras situées à l’intérieur des cellules sont activées par le mouvement, au moyen d’un bouton sur le mur. Les caméras du couloir et des cellules n’enregistrent pas l’audio.

Voici un résumé des enregistrements vidéo.

À 17 h 38 min 21 s, le TES no 1, accompagné d’un autre agent spécial, place le plaignant dans une cellule.

À 18 h 4 min 55 s, le TES no 1 amène de la nourriture au plaignant.

À 18 h 53, le plaignant est retiré de sa cellule.

À 19 h 14 min 30 s, le plaignant est renvoyé dans sa cellule, et un agent de police en civil se tient devant la porte de la cellule et parle avec le plaignant jusqu’à 19 h 15 min 13 s.

À 19 h 34 min 5 s, la vidéo redémarre et, à 19 h 34 min 22 s, le TES no 1 passe devant la porte de la cellule du plaignant.

De 19 h 35 min 30 s à 19 h 52 min 15 s, il n’y a pas d’enregistrement, car aucun mouvement n’a été détecté.

De 19 h 52 min 34 s à 19 h 53 min 43 s, un nettoyeur passe la vadrouille dans le couloir.

De 19 h 57 min 4 s à 20 h 45 min, rien n’a été enregistré.

À 20 h 45 min 30 s, le TES no 1 sort le plaignant de la cellule.

À 20 h 46 min 57 s, deux agents de police et un agent spécial placent un autre prisonnier dans une cellule attenante à celle du plaignant.

À 20 h 59 min 53 s, le TES no 1, accompagné du TES no 4, remet le plaignant dans sa cellule et, à 21 h 2 min 13 s, les deux agents spéciaux quittent le couloir.

À 21 h 3 min 16 s, le TES no 1 revient devant la cellule et repart à 21 h 8.

À 21 h 9, le TES no 1 revient devant la cellule et reste à l’extérieur jusqu’à 21 h 14 min 20 s, puis il entre dans la cellule.

À 21 h 14 min 27 s, le TES no 1 donne un coup de pied dans le mur situé de l’autre côté de la porte d’entrée de la cellule (l’enregistrement commence).

À 21 h 14 min 33 s, le TES no 4 arrive et entre dans la cellule.

Vidéos de l’entrée sécurisée, de l’aire de mise en détention et de la cellule — 19 janvier 2021

Voici un résumé des enregistrements vidéo.

À 17 h 25, un VUS du SPO bien identifié pénètre dans l’entrée sécurisée et deux agents de police de sexe masculin en uniforme [maintenant connus comme étant l’AT no 2 et l’AT no 3] en sortent.

À 17 h 33, le plaignant sort par la porte-passager arrière, sans assistance. Le plaignant est menotté derrière le dos. Il marche jusqu’à la porte menant à l’aire de mise en détention, sans assistance.

À 17 h 34, le plaignant est escorté dans l’aire de mise en détention. Dans l’enregistrement, on ne voit pas le sergent chargé de la mise en détention, l’AI no 2, mais on peut l’entendre. Le plaignant se tient debout, les mains derrière le dos. Le plaignant est vêtu d’un chandail foncé et de jeans bleus. Il porte un masque en raison de la COVID-19. Le plaignant ne semble pas blessé. L’AT no 2 informe l’AI no 2 des chefs d’accusation pesant contre le plaignant et l’avise que le plaignant a répondu « non » à toutes les questions d’arrestation standards.

À 17 h 38, le plaignant, accompagné de deux agents spéciaux, traverse le couloir sans assistance et entre dans une cellule.

À 21 h 14, un agent spécial [maintenant connu comme étant le TES no 1] se tient devant la porte de la cellule du plaignant. Le plaignant est allongé sur le dos sur le banc et ses pieds pendent dans les airs, en direction de la porte. La tête du plaignant fait face au mur du fond. Les jambes et les bras du plaignant se mettent à trembler, puis il semble se raidir.

À 21 h 14 min 20 s, le TES no 1 entre dans la cellule.

À 21 h 15 min 50 s, l’AI no 2 se tient à l’extérieur de la cellule du plaignant. Les jambes du plaignant tremblent toujours. Le plaignant est placé en position de récupération : allongé sur le côté gauche, face au mur.

À 21 h 16 min 10 s, le TES no 1 sort de la cellule [on sait maintenant qu’il est allé aider les SMU à entrer dans le bloc cellulaire]. Au même moment, le TES no 4 entre dans la cellule et prend la tête du plaignant. L’AI no 2, qui était entré dans la cellule, prend la jambe droite du plaignant. Dans cette portion de l’enregistrement, il est difficile de voir le plaignant, car les agents bloquent la vue.

À 21 h 19 min 10 s, les jambes du plaignant tremblent toujours.

À 21 h 20 min 5 s, le TES no 4 braque une lampe de poche sur la tête du plaignant.

À 21 h 21 min 30 s, les jambes du plaignant tremblent toujours.

À 21 h 23 min 25 s, deux ambulanciers paramédicaux arrivent à la porte de la cellule. À 21 h 23 min 33 s, un ambulancier paramédical amène un sac dans la cellule.

À 21 h 24 min 12 s, le TES no 4 pratique la RCP sur le plaignant.

À 21 h 25, il semble qu’un ambulancier paramédical utilise un défibrillateur sur le plaignant.

À 21 h 25 min 19 s, le TES no 4 pratique toujours la RCP sur le plaignant.

À 21 h 26 min 2 s, un ambulancier paramédical sort de la cellule et enfile une blouse, suivi d’un autre ambulancier paramédical.

À 21 h 28 min 17 s, le TES no 3 se tient à la porte de la cellule et, à 21 h 29 min 47 s, il prend la relève du TES no 4 et continue les efforts de RCP.

À 21 h 31 min 5 s, il semble qu’un ambulancier paramédical utilise de nouveau le défibrillateur, mais la vue est partiellement obstruée.

À 21 h 31 min 10 s, deux autres ambulanciers paramédicaux arrivent à la porte de la cellule.

À 21 h 31 min 40 s, le TES no 4 est sur le banc à côté des jambes du plaignant.

À 21 h 31 min 55 s, le TES no 4 prend la relève du TES no 3 et poursuit les efforts de RCP.

À 21 h 33, les ambulanciers paramédicaux transportent le plaignant hors de la cellule et sortent du champ de la caméra.

À 21 h 42, le plaignant est transporté sur une civière dans le couloir des cellules jusque dans le vestibule, puis dans un autre couloir. Un agent de police et des ambulanciers paramédicaux pratiquent la RCP sur le plaignant.

À 0 h 14, le 20 janvier 2021, la porte de la cellule du plaignant est fermée. On peut voir des déchets médicaux sur le banc et du ruban jaune de police sur la porte.

Enregistrements vidéo de la fouille du plaignant

Il y avait deux caméras dans le couloir que l’on appelle le « couloir de fouille ». Ce couloir relie l’aire de mise en détention à la porte du bloc cellulaire. Voici un résumé des enregistrements.

Caméra 1 du couloir de fouille
La caméra permet de voir l’aire de mise en détention, le couloir où la fouille a été effectuée et la porte qui mène au bloc cellulaire.
À 17 h 35 min 45 s, le plaignant entre dans le champ de vision de la caméra depuis l’aire de mise en détention, en compagnie du TES no 5. Le plaignant se comporte normalement et les interactions sont amicales. Le plaignant est menotté derrière le dos. On lui retire les menottes et le TES no 5 procède à une fouille par palpation et vérifie les poches du plaignant. Un détecteur de métal manuel est utilisé pour vérifier le corps du plaignant. Le plaignant enlève sa montre et on lui demande s’il a d’autres bijoux. Il répond qu’il ne le croyait pas. À un moment donné, un agent en uniforme montre des documents au plaignant. D’autres agents spéciaux sont présents et apparaissent dans le champ de la caméra à certains moments. Pendant la majeure partie de la fouille, on peut voir le plaignant partiellement seulement, au bas de l’écran.

Caméra 2 du couloir de fouille

Cette caméra offre une vue opposée du couloir de fouille — la caméra est située sur la porte qui mène au bloc cellulaire et offre une vue complète du couloir de fouille et de l’entrée de l’aire de mise en détention. Le TES no 5 procède à une fouille par palpation. Deux autres agents spéciaux sont présents, ainsi qu’un agent en uniforme. Le TES no 5 fouille les poches du plaignant et ses pieds. Un détecteur de métal est utilisé. Le plaignant se comporte de façon normale. Il s’est essuyé le front, comme s’il transpirait. La montre du plaignant est retirée. Cependant, aucune contrebande n’est trouvée et la fouille se déroule sans incident. La fouille prend fin à 17 h 38 min 2 s.

Documents obtenus du service de police

Sur demande, l’UES a obtenu les documents et éléments suivants auprès du SPO, entre le 20 janvier 2021 et le 2 mars 2021 :
  • Appel du système de répartition assistée par ordinateur (Système RAO) (mandat de saisie de stupéfiants)
  • Appel du Système RAO (urgence médicale)
  • Enregistrements de communications
  • Récit des événements — TES no 4
  • Récit des événements — AT no 2
  • Récit des événements — AT no 1
  • Récit des événements — TES no 3
  • Récit des événements — AT no 3
  • Récit des événements — TES no 1
  • Récit des événements — AI no 2
  • Récit des événements — AI no 1 (rapport de l’équipe tactique)
  • Récit des événements — AI no 1
  • Récit des événements — TES no 2
  • Notes — AT no 2
  • Notes — AT no 1
  • Notes — TES no 3
  • Notes — AT no 3
  • Notes — TES no 5
  • Notes — TES no 4
  • Notes — TES no 1
  • Notes — AI no 2
  • Notes — AI no 1
  • Notes — TES no 2
  • Horaire du bloc cellulaire central
  • Vidéo du bloc cellulaire
  • Vidéo de la fouille
  • Liste des agents impliqués
  • Photos — lieux et hôpital
  • Politique — Arrestation
  • Politique — Emploi de la force
  • Politique — Soins aux prisonniers et contrôle des prisonniers
  • Fiche de la mise en détention
  • Fiche de contrôle du prisonnier
  • Registres de formation — AI no 1

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a examiné les éléments et documents suivants remis par d’autres sources :
  • Documents des SMU — Service paramédic d’Ottawa, reçus le 10 février 2021
  • Rapport d’autopsie du Bureau du coroner en chef — reçu le 21 septembre 2021
  • Rapport préliminaire des résultats de l’autopsie réalisée par le Service de médecine légale de l’Ontario — reçu le 20 janvier 2021

Description de l’incident

Le scénario suivant se dégage de la preuve recueillie par l’UES, laquelle comprend des entrevues avec l’AI no 1 et l’AI no 2, et d’autres agents qui ont interagi avec le plaignant pendant qu’il était sous la garde de la police.

Le plaignant a été arrêté dans sa résidence à Ottawa. Les agents s’étaient présentés à sa résidence pour exécuter un mandat de perquisition décerné en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. L’AI no 1 a trouvé le plaignant dans le sous-sol de la maison et a procédé à son arrestation sans incident. Le plaignant a ensuite été remis entre les mains de l’AT no 2 et de l’AT no 3 pour l’amener au poste de police situé au 474, rue Elgin, à Ottawa.

Le plaignant a été placé dans une cellule vers 17 h 40. Entre 21 h 10 et 21 h 15, le TES no 1, qui était venu vérifier l’état du plaignant tout au long de la soirée, a trouvé le plaignant en état de détresse médicale. Il a avisé l’agent responsable — l’AI no 2 — lequel a demandé que des ambulanciers paramédicaux soient dépêchés au poste de police. Le TES no 1, l’AI no 2 et d’autres agents se sont rendus à la cellule du plaignant pour lui prodiguer les premiers soins — et pratiquer la RCP sur lui — en attendant l’arrivée des ambulanciers.

Les ambulanciers paramédicaux sont arrivés vers 21 h 25 et ont pris le relais des soins du plaignant vers 21 h 35. Le plaignant a été transporté en ambulance à l’hôpital, où son décès a été prononcé vers 22 h 4.

Cause du décès

Le pathologiste qui a pratiqué l’autopsie a attribué le décès du plaignant à une [Traduction] « toxicité aiguë due à la cocaïne ».

Dispositions législatives pertinentes

L’article 215 du Code criminel – Défaut de fournir les choses nécessaires à l’existence

215 (1) Toute personne est légalement tenue :

c) de fournir les choses nécessaires à l’existence d’une personne à sa charge, si cette personne est incapable, à la fois :
(i) par suite de détention, d’âge, de maladie, de troubles mentaux, ou pour une autre cause, de se soustraire à cette charge,
(ii) de pourvoir aux choses nécessaires à sa propre existence.

(2) Commet une infraction quiconque, ayant une obligation légale au sens du paragraphe (1), omet, sans excuse légitime, de remplir cette obligation, si :
b) à l’égard d’une obligation imposée par l’alinéa (1)c), l’omission de remplir l’obligation met en danger la vie de la personne envers laquelle cette obligation doit être remplie, ou cause, ou est de nature à causer, un tort permanent à la santé de cette personne.

Articles 219 et 220 du Code criminel -- Négligence criminelle causant la mort

219 (1) est coupable d’une négligence criminelle quiconque :
a) soit en faisant quelque chose;
b) soit en omettant de faire quelque chose qui est de son devoir d’accomplir, montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.
(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.

220 Quiconque, par négligence criminelle, cause la mort d’une autre personne est coupable d’un acte criminel passible :
a) s’il y a usage d’une arme à feu lors de la perpétration de l’infraction, de l’emprisonnement à perpétuité, la peine minimale étant de quatre ans;
b) dans les autres cas, de l’emprisonnement à perpétuité.

Analyse et décision du directeur

Le plaignant est décédé le 19 janvier 2021. Ce jour-là, il avait été mis en détention dans une cellule du SPO. Il a été trouvé en état de détresse médicale et transporté à l’hôpital où il est mort d’une surdose. L’UES a été avisé de l’incident, a lancé une enquête et a déterminé que l’AI no 1 et l’AI no 2 étaient les agents impliqués dans cette affaire. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation de la preuve, il n’y a aucun motif raisonnable de conclure que l’un ou l’autre des agents impliqués a commis une infraction criminelle en lien avec le décès du plaignant.

Les infractions possibles à l’étude dans cette affaire sont le défaut de fournir les choses nécessaires à l’existence et la négligence criminelle causant la mort, en contravention des articles 215 et 220 du Code criminel, respectivement. La première infraction repose, en partie, sur une conduite constituant un écart marqué par rapport au degré de diligence qu’une personne raisonnable aurait exercé dans les circonstances. La deuxième infraction est réservée aux cas plus graves de négligence où la conduite d’une personne témoigne d’une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui. Pour démontrer qu’une telle infraction a été commise, il faut démontrer que la conduite de la personne en cause constituait un écart marqué et important par rapport à la norme de diligence qui serait considérée comme raisonnable dans les mêmes circonstances. Dans l’affaire qui nous concerne, la question est de savoir si les agents impliqués ont manqué de diligence dans leur interaction avec le plaignant et si ce manque de diligence, le cas échéant, est suffisamment grave pour justifier l’imposition d’une sanction criminelle. À mon avis, cela n’est pas le cas.

La preuve ne permet pas de croire que l’arrestation et la mise en détention du plaignant par le SPO n’étaient pas fondées sur des motifs légitimes. Le plaignant a été arrêté par suite de l’exécution d’un mandat de validité apparente qui autorisait les agents à fouiller sa résidence pour y trouver des substances illicites et des accessoires destinés à la consommation de drogue.

De plus, il n’y a aucune preuve permettant de croire que, après sa mise en détention, le plaignant a reçu des soins inférieurs à la norme de la part de ses gardiens. Les registres indiquent qu’après sa mise en détention dans la cellule, une personne est venue vérifier son état environ toutes les demi-heures, un horaire qui semble raisonnable puisque le plaignant ne semblait pas avoir les facultés affaiblies et se portait bien lorsqu’il a été arrêté puis placé dans la cellule, et qu’il a nié avoir consommé de la drogue ou de l’alcool. En rétrospective, il semble que le plaignant ait commencé à afficher des signes de détresse peu après 21 h, lorsqu’un agent a constaté qu’il tremblait sur le banc de sa cellule. Ce comportement a attiré l’attention du TES no 1, lequel s’est rendu à la cellule du plaignant pour vérifier son état. Le TES no 1 a indiqué que le plaignant respirait de façon saccadée, mais que, puisqu’il dormait, il a conclu qu’il faisait un cauchemar et l’a laissé tranquille. Puisque le plaignant n’avait auparavant affiché aucun comportement déconcertant, je ne peux blâmer le TES no 1 d’en être venu à cette conclusion. Peu après, le TES no 1 est retourné vérifier l’état du plaignant, car il l’avait vu, sur le moniteur vidéo, s’asseoir et s’agiter. Cette fois, lorsqu’il a constaté que le plaignant était inconscient et que ses yeux étaient dans le vague et bougeaient rapidement, le TES no 1 a rapidement avisé l’AI no 2 qu’il y avait urgence médicale, et des agents ont fourni des soins médicaux au plaignant sans tarder. Cela étant dit, il convient de noter qu’il n’existe aucune preuve que le plaignant avait de la drogue dans sa cellule. Autrement dit, la drogue qui a entraîné sa mort et été consommée avant son arrestation.

Par conséquent, puisque je n’ai aucun motif raisonnable de croire que l’un ou l’autre des agents impliqués n’a pas fait preuve du degré de diligence que l’on pourrait attendre d’eux pendant le temps où le plaignant était sous la garde de la police, il n’y a pas lieu de porter des accusations criminelles dans cette affaire et l’affaire est close.


Date : 20 avril 2022

Approuvé électroniquement par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués, comme le prévoit le paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les principaux éléments des documents sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.