Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 21-TCI-383

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur les blessures graves qu’a subies un homme de 31 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 9 novembre 2021, le Service de police de Toronto (SPT) a informé l’UES d’une blessure subie par le plaignant.

Le SPT a signalé que le 9 novembre 2021, vers 13 h 15, des membres de la Brigade provinciale de recherche des fugitifs étaient à la recherche du plaignant, illégalement en fuite d’un centre correctionnel de Toronto. Les agents de police ont appelé l’occupant d’un appartement du 8e étage à une adresse sur le boulevard Humber à la recherche du plaignant, avant de se rendre à l’adresse. À leur arrivée, les agents de police ont remarqué qu’un homme sortait de l’appartement. Cet homme n’était pas la personne qu’ils recherchaient. Les agents de police ont parlé à l’occupante, la mère du plaignant et la témoin civile (TC), et ont fouillé l’appartement. Ils ont ensuite vérifié le balcon et ont aperçu le plaignant étendu sur le sol, huit étages plus bas. Les agents de police se sont donc rendus au rez-de-chaussée.

Un agent de police en uniforme est également arrivé au rez-de-chaussée et portait une caméra d’intervention qui a peut-être enregistrée les propos tenus par la TC.

Au moment du signalement, le plaignant était traité pour des blessures mettant sa vie en danger. Il avait subi une fracture du crâne et de multiples fractures osseuses, et était en train de subir une intervention chirurgicale au Sunnybrook Health Sciences Centre (SHSC).

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 11 septembre 2021 à 16 h 20

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 11 septembre 2021 à 16 h 50

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 4

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 31 ans; pas apte à participer à une entrevue pour des raisons médicales; ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

Témoin civile (TC)

TC A participé à une entrevue

La témoin civile a participé à une entrevue le 9 novembre 2021.

Agent impliqué (AI)

AI N’a pas consenti à participer à une entrevue, ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

Agents témoins (AT)

AT n° 1 A participé à une entrevue
AT n° 2 A participé à une entrevue
AT n° 3 A participé à une entrevue
AT n° 4 A participé à une entrevue
AT n° 5 A participé à une entrevue

Les AT ont participé à une entrevue entre le 10 novembre et le 10 décembre 2021.

Éléments de preuve

Les lieux

Trois lieux distincts ont été associés à l’incident. Des photographies ont été prises à chaque endroit examiné.

Premier lieu – Stationnement

Les lieux extérieurs se trouvaient dans le stationnement d’un immeuble d’habitation du boulevard Humber Sud, à Toronto, près d’une berline. Il n’y avait aucun signe d’impact indiquant que le plaignant était entré en contact avec le véhicule lorsqu’il est tombé. Près de la roue arrière du côté passager se trouvaient une paire de chaussures de course et une paire de chaussettes. À l’arrière du véhicule, plus près du mur de l’immeuble, se trouvait un T-shirt gris qui avait été découpé, ce qui indique une intervention des services médicaux d’urgence (SMU). À proximité se trouvait une tache colorée, qui semblait être du sang.

Deuxième lieu – Balcon de l’appartement du 7e étage situé en dessous de celui de la TC du 8e étage

Des objets personnels, n’appartenant pas à l’occupant de l’appartement du 7e étage, ont été trouvés sur le balcon. Le filet anti-oiseaux du balcon avait été déchiré.

Les preuves trouvées sur les lieux et le fait que cet appartement se trouvait directement en dessous de l’appartement de la TC laissent penser que le plaignant avait tenté de descendre de l’appartement du dessus et était tombé. Les biens comprenaient un téléphone portable, des feuilles de papier carbone, divers produits de chanvre, un petit couteau, une petite paire de ciseaux, un rouleau de ruban adhésif noir et un rouleau de pellicule plastique.

La balustrade du balcon mesurait un mètre de hauteur, et la distance mesurée entre le haut de cette balustrade et la zone d’impact située directement en dessous était de 18 mètres.

Troisième lieu – Appartement et balcon de l’appartement de la TC au 8e étage

Ni la porte d’entrée de l’appartement, ni celle du balcon ne présentaient des signes d’ouverture forcée. Le filet anti-oiseaux de ce balcon avait été déchiré, tout comme celui du balcon de l’appartement du 7e étage situé juste en dessous. La hauteur mesurée entre la balustrade et la zone d’impact était de 20,5 mètres. La distance mesurée entre la balustrade du balcon du 8e étage et le balcon du 7e étage était de deux mètres.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[1]

Communications radio du SPT et au service 9-1-1

Le 9 novembre 2021, à 11 h 47 min 52 s, l’AT n° 1 appelle le superviseur des communications du SPT pour l’informer que la Brigade provinciale de recherche des fugitifs allait mener une opération dans un immeuble du boulevard Humber.

À 13 h 16 min 8 s, l’AT n° 1 signale qu’une personne [connue maintenant comme étant le plaignant] a sauté du balcon situé au 8e étage d’un immeuble du boulevard Humber. Le plaignant est inconscient et ne respire pas. L’AT n° 1 demande que d’autres agents de police soient dépêchés sur les lieux.

À 13 h 16 min 13 s, le concierge du bâtiment appelle les services médicaux d’urgence. Il dit qu’il est sorti de l’immeuble et a trouvé le plaignant allongé sur le sol, avec probablement un bras cassé. Le plaignant respire. Il ne connait pas le plaignant et ne sait pas comment il s’est retrouvé dans cette situation. Pendant l’appel avec les services médicaux d’urgence, il précise que les agents de police viennent d’arriver à l’endroit où se trouve le plaignant.

À 13 h 18 min 22 s, l’AT n° 3 signale que le plaignant est conscient et respire. Une intervention urgente des services médicaux d’urgence est nécessaire. Le répartiteur demande confirmation que le plaignant a peut-être sauté du 8e étage de l’immeuble, les renseignements disponibles à ce sujet n’étant pas encore clairs. On confirme que des intervenants des services médicaux d’urgence se trouvent avec le plaignant et que des agents du SPT se rendraient d’urgence au SHSC.

Vidéo de l’immeuble d’habitation du boulevard Humber

L’UES a obtenu des images captées à l’aide des caméras de sécurité de l’immeuble d’habitation du boulevard Humber. Voici un résumé de l’enregistrement.

À 13 h 10 min 35 s, le plaignant tombe et atterrit dans le stationnement situé entre l’immeuble et une berline garée, face contre le sol.

À 13 h 15 min 45 s, un homme [connu maintenant comme étant le concierge de l’immeuble] traverse le stationnement et aperçoit le plaignant au sol. Il regarde vers le haut puis porte son téléphone portable à son oreille (on sait maintenant qu’il appelait le service 9-1-1).

À 13 h 18 min 3 s, l’AI, ainsi que les AT n° 1 et 3, traversent le stationnement en direction du plaignant. Les trois agents de police sont en civil. L’AT n° 3 utilise son téléphone portable [on sait maintenant qu’il appelait le répartiteur de la police et demandait que des agents en uniforme et une ambulance soit dépêchés sur place]. L’AT n° 1 est à genoux à côté du plaignant et lui prodigue les premiers soins. Un agent de police en uniforme [on sait maintenant qu’il s’agit de l’AT n° 1, portant une caméra d’intervention] court vers le plaignant. Des intervenants du Service d’incendie de Toronto arrivent et remplacent l’AT n° 1 pour prodiguer les premiers soins. Une ambulance arrive et le plaignant est installé sur une civière et placé dans l’ambulance, qui quitte ensuite les lieux.

Vidéo captée à l’aide de la caméra d’intervention - Agent n° 1 du SPT

L’UES a obtenu des images de l’incident captées à l’aide de la caméra d’intervention de l’agent n° 1. Voici un résumé de l’enregistrement.

À 13 h 20 min 49 s, l’agent n° 1 arrive dans le stationnement où se trouve le plaignant. Des agents de police en civil sont sur place. Le plaignant est allongé face contre terre, il gémit et a du sang près de la tête. Ses yeux sont fermés. Un os est visible au niveau du poignet gauche du plaignant. Deux agents de police en civil se tiennent debout près du plaignant. Tous deux portent des gilets de Kevlar extérieurs avec des insignes de police visibles. Trois autres agents de police en civil se trouvent à proximité, portant également des gilets de Kevlar avec des insignes de police.

À 13 h 23 min 26 s, le Service d’incendie de Toronto arrive et prend en charge les premiers soins du plaignant. Un agent de police en civil dit aux pompiers que le plaignant respire toujours et qu’il n’a pas été déplacé.

À 13 h 25 min 23 s, la TC sort de l’immeuble et se dirige vers le plaignant. Elle se met immédiatement à hurler : « C’est mon fils! ». Les agents de police tentent d’empêcher la TC de s’approcher du plaignant et lui disent qu’il reçoit de l’aide médicale.

À 13 h 27 min 28 s, un VUS des Services médicaux d’urgence arrive. La TC pleure et crie au plaignant : « Pourquoi? Pourquoi as-tu fait ça? ». La TC retourne à l’intérieur de l’immeuble. Une ambulance arrive et le plaignant y est installé. L’agent n° 1 se rend d’urgence au SHSC.

Documents obtenus du service de police

L’UES a examiné les éléments et documents suivants que lui a remis, à sa demande, la Police provinciale de l’Ontario (Police provinciale), le Service de police de Toronto (SPT) et le Service de police régional de York (SPRY) entre le 9 et le 30 novembre 2021 :
  • Service correctionnel du Canada (SCC) - Profil criminel
  • SCC - Profil normalisé
  • SCC - Photographie indicatrice de validité (VIP) du délinquant
  • Demande de renseignements confidentiels sur l’abonné - Freedom Mobile
  • Mandat du SCC (SPT)
  • Rapport d’incident général du SPT
  • Notes de l’AT n° 3 (SPT)
  • Notes de l’AT n° 1 (SPT)
  • Notes de l’AT n° 5 (Police provinciale)
  • Notes de l’AT n° 2 (SPT)
  • Notes de l’AT n° 4 (SPRY)
  • Séquences captées à l’aide de la caméra d’intervention de l’agent n° 1 (SPT).

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a également obtenu, entre le 17 novembre et le 20 décembre 2021, les éléments suivants provenant d’autres sources :
  • Rapport d’appel d’ambulance et rapport sommaire d’incident - SMU
  • Dossiers médicaux du SHSC
  • Enregistrement vidéo capté à l’aide de la caméra de sécurité de l’immeuble d’habitation situé sur le boulevard Humber

Description de l’incident

Le scénario suivant se dégage des preuves recueillies par l’UES et peut être brièvement résumé ci-dessous. Comme il en avait le droit, l’AI a choisi de ne pas s’entretenir avec l’UES et de ne pas autoriser la diffusion de ses notes.

Le 9 novembre 2021, en début d’après-midi, une équipe de policiers en civil du SPT, de la Police provinciale et du SPRY, membres de la Brigade provinciale de recherche des fugitifs, se sont rendus dans un appartement situé au 8e étage d’un immeuble du boulevard Humber Sud. Ils voulaient exécuter un mandat d’arrestation visant le plaignant pour manquement aux conditions de sa libération conditionnelle, et avaient des raisons de croire que l’homme se trouvait à cette adresse, soit l’appartement de sa mère.

Le plaignant était effectivement dans l’appartement. Sachant que des agents de police se trouvaient devant la porte d’entrée et cherchaient à l’arrêter, le plaignant a verrouillé la porte de l’appartement et s’est rendu sur le balcon afin de s’échapper. Il est descendu jusqu’au balcon de l’appartement situé juste en dessous de celui de sa mère, où il a déposé plusieurs objets personnels, dont un téléphone portable et des accessoires facilitant la consommation de drogues, avant de perdre pied et de tomber en contrebas. Il était environ 13 h 10.

Au moment où sa mère - la TC - avait déverrouillé la porte de l’appartement pour laisser entrer les agents, le plaignant était déjà soit sur le balcon du 8e ou du 7e étage soit déjà tombé.

Des agents, dont l’agent impliqué, sont entrés dans l’appartement et l’ont fouillé, mais en vain. Ils ont ensuite aperçu le plaignant étendu sur le sol, juste en dessous du balcon. Les agents se sont précipités vers l’endroit où gisait le plaignant et lui ont prodigué les premiers soins en attendant l’arrivée des ambulanciers paramédicaux.

Le plaignant a été transporté d’urgence à l’hôpital où l’on a constaté qu’il avait de multiples fractures et un traumatisme crânien. L’homme se remet toujours de ses blessures.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphs 219 et 220 du Code criminel -- Négligence criminelle causant des lésions corporelles

219 (1) est coupable d’une négligence criminelle quiconque :
a) soit en faisant quelque chose;
b) soit en omettant de faire quelque chose qui est de son devoir d’accomplir, montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.
(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi. 

221 Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans quiconque, par négligence criminelle, cause des lésions corporelles à autrui.

Analyse et décision du directeur

Le 9 novembre 2021, le plaignant a été grièvement blessé en tombant du balcon d’un appartement situé dans un grand immeuble. Comme la chute du plaignant s’est produite quelques instants après qu’une équipe d’agents ait frappé à la porte de l’appartement dans lequel il se trouvait, l’UES en a été informée et a ouvert une enquête. L’AI du SPT a été identifié comme l’agent impliqué. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation des preuves, il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que l’AI a commis une infraction criminelle relativement aux blessures du plaignant.

L’infraction à examiner est la négligence criminelle causant des lésions corporelles conformément à l’article 221 du Code criminel. Cette infraction est réservée aux cas graves de négligence qui démontrent une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui. La simple négligence ne suffit pas à entraîner la responsabilité; ce qui est plutôt requis, en partie, c’est une conduite qui équivaut à un écart marqué et important par rapport au niveau de soin qu’une personne raisonnable aurait exercé dans les circonstances. Dans le cas présent, la question est de savoir s’il y a eu un manque de diligence de la part de l’AI, suffisamment flagrant pour entraîner une sanction criminelle, qui a causé ou contribué à la chute du plaignant. À mon avis, ce n’est pas le cas.

Les agents qui se sont rendus au domicile de la TC et qui étaient présents dans l’appartement et à ses alentours lorsque le plaignant est tombé étaient légalement positionnés en tout temps. Ils étaient en possession d’un mandat autorisant l’arrestation du plaignant pour manquement aux conditions de sa libération conditionnelle, et avaient été autorisés à entrer dans l’appartement par la propriétaire légitime, soit la TC.

Rien ne permet d’affirmer que les agents, dont l’AI, n’ont pas fait preuve de la diligence et de l’attention nécessaires au bien-être du plaignant tout au long de l’opération policière. Non seulement ils se sont présentés correctement avant que la TC ne les laisse entrer, mais ils avaient aussi positionné un agent à l’extérieur pour surveiller le balcon de l’appartement avant de frapper à la porte. Cet agent se trouvait assez loin de l’immeuble et n’aurait exercé que peu ou pas d’effet dissuasif sur les intentions de fuite du plaignant. Enfin, les preuves indiquent que les agents qui sont entrés dans l’appartement n’ont pas eu la possibilité d’intervenir pour empêcher la chute du plaignant. Ce dernier avait en effet déjà pris la décision tragique de descendre par le balcon de sa mère.

De ce fait, il n’existe aucun motif raisonnable de croire que l’AI a transgressé les limites de la prudence prescrites par le droit criminel en ce qui concerne la chute du plaignant. Par conséquent, il n’y a aucune raison de porter des accusations criminelles dans le cadre de cette affaire, et le dossier est clos.

Date : 7 mars 2022

Approuvé électroniquement par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les dossiers suivants contiennent des renseignements personnels sensibles et ne sont pas divulgués en vertu du paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les éléments importants des enregistrements sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.