Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 24-TCI-400
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Contenus:
Mandat de l’UES
L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.
En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.
Restrictions concernant la divulgation de renseignements
Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales
En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
- le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes;
- des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle;
- des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne;
- des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête;
- des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi;
- des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.
Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée
En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
- des renseignements qui révèlent des
- des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
- les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins;
- des renseignements sur le lieu de l’incident;
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
- d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.
Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé
En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.
Autres instances, processus et enquêtes
Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.
Exercice du mandat
En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.
Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.
De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.
Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES au sujet des blessures graves subies par un homme de 28 ans (le « plaignant »).
L’enquête
Notification de l’UES[1]
Le 20 septembre 2024, à 4 h 26, le Service de police de Toronto (SPT) a signalé ce qui suit à l’UES.
Le 20 septembre 2024, à 0 h 56, le SPT a reçu un appel d’une femme signalant que son petit ami — le plaignant — avait exprimé des pensées suicidaires et se trouvait sur les voies ferrées à la hauteur de la rue East Liberty et de l’avenue Strachan, à Toronto. Les agents se sont rendus sur les lieux et ont localisé le plaignant à 1 h 40. Ce dernier a pris la fuite et les agents l’ont poursuivi à pied. Le plaignant a sauté par-dessus un mur de soutènement au 50, rue Ordnance et a atterri sur le sol en contrebas. Les services médicaux d’urgence (SMU) ont été appelés et le plaignant a été transporté à l’Hôpital St. Michael [36, rue Queen Est, Toronto]. On lui a diagnostiqué une fracture de l’os orbital des deux yeux, des lésions aux reins et à la rate, plusieurs côtes brisées, des contusions aux deux poumons et une hémorragie cérébrale.
L’équipe
Date et heure de l’envoi de l’équipe : 20 septembre 2024 à 7 h 30
Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 20 septembre 2024 à 10 h 54
Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3
Nombre d’enquêteurs spécialistes des
sciences judiciaires de l’UES assignés : 1
Personne concernée (« le plaignant ») :
Plaignant : Homme de 28 ans, a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés
Le plaignant a participé à une entrevue le 9 décembre 2024.
Témoin civil (TC)
TC A participé à une entrevue
La témoin civile a participé à une entrevue le 21 septembre 2024.
Agent impliqué (AI)
AI A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
L’agent impliqué a participé à une entrevue le 3 novembre 2024.
Agents témoins (AT)
AT no 1 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
AT no 2 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
AT no 3 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
Les agents témoins ont participé à des entrevues entre le 15 octobre 2024 et le 18 octobre 2024.
Éléments de preuve
Les lieux
Les événements en question ont débuté sur la rue East Liberty, à une certaine distance à l’ouest de l’avenue Strachan, se sont poursuivis vers l’est sur la rue East Liberty, puis sur la rue Ordnance, et vers le nord, juste après le bâtiment situé au 30, rue Ordnance, en direction d’un mur de soutènement qui donnait sur une voie ferrée en contrebas.
Éléments de preuve matériels
Le 20 septembre 2024, à 4 h 45, un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES s’est rendu sur la rue Ordnance, à Toronto, un petit cul-de-sac croisant l’avenue Strachan et s’étendant en direction est. Des tours d’habitation — les tours numéro 50 et 30 — se trouvaient sur cette rue. Entre ces tours d’habitation, une allée piétonne menait à un espace vert. Des allées pavées étaient aménagées dans l’espace vert et il y avait une passerelle pour piétons qui enjambait des voies ferrées. Les voies ferrées étaient généralement orientées d’est en ouest. Une clôture à mailles losangées restreignait l’accès aux voies ferrées, lesquelles se trouvaient à un niveau inférieur. La clôture à mailles losangées avait une hauteur de 1,866 mètre. Du côté nord de la clôture, il y avait une petite zone de 1,2 mètre de large menant à un mur de soutènement, à la base duquel se trouvait un chemin d’accès, au sud des voies ferrées. Le mur de soutènement avait une hauteur de 4,5 mètres.
L’enquêteur spécialiste des sciences judiciaires s’est rendu sur le chemin d’accès situé sous le mur de soutènement, au sud des voies ferrées. Il y avait une zone de taches de sang sur le chemin, à une distance de 1,3 à 1,6 mètre du mur de soutènement. L’enquêteur a prélevé un échantillon de sang à cet endroit. Des photos de la zone inférieure ont été prises. Ensuite, des photos de la zone supérieure ont été prises.
Figure 1 — Le chemin d’accès et le mur de soutènement
Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[2]
Vidéo captée par la caméra d’intervention de l’AI
Le 20 septembre 2024, vers 1 h 40, l’AI aperçoit le plaignant qui marche sur le trottoir de l’autre côté de la rue. Il hèle le plaignant et traverse la rue pour se diriger vers lui. Il tente de parler au plaignant, mais celui-ci lui demande qui il est et refuse de s’arrêter ou de lui parler. L’AI l’implore de lui parler, mais le plaignant lui répond qu’il devrait le laisser tranquille.
L’AI, et un autre agent du SPT qui vient d’arriver sur les lieux — l’AT no 3 —, continuent à implorer le plaignant de leur parler et lui ordonnent de [Traduction] « venir ici ». Les agents se mettent à courir après le plaignant, lequel prend la fuite. Durant la poursuite à pied, l’AI et l’AT no 3 semblent se trouver à une dizaine de mètres du plaignant. Les parties traversent la route et continuent en direction est sur Ordnance Road. L’AI et l’AT no 3 ordonnent au plaignant de s’arrêter, mais celui-ci refuse et continue d’augmenter la distance qui le sépare de l’AI, jusqu’à ce qu’ils soient à une distance d’environ 20 à 25 mètres. Peu après, le plaignant tourne le coin du mur faisant face à l’est d’un bâtiment situé sur Ordinance Road et disparaît. L’AI tourne le coin du mur du bâtiment et crie que le plaignant se cache dans les buissons.
Le plaignant escalade une clôture et descend sur un mur de soutènement de l’autre côté. L’AI atteint la clôture et s’arrête. Il appelle d’autres agents du SPT, dont l’AT no 3, l’AT no 2 et l’AT no 1, qui étaient maintenant sur les lieux, et leur dit qu’ils vont devoir se rendre de l’autre côté de la clôture. Les trois agents se précipitent dans un escalier se trouvant sur le côté du bâtiment, et l’AI commence à demander pour son téléphone.
L’AT no 3 braque sa lampe de poche vers le bas et annonce que le plaignant est au sol. L’AT no 2 déclare qu’il faut faire venir une ambulance de toute urgence et se met à retracer ses pas en courant le long de l’itinéraire de la poursuite jusqu’à ce qu’il trouve son téléphone sur le sol.
En arrière-plan, on entend l’AT no 3 dire à un sergent que le plaignant est conscient et qu’il respire, mais qu’il saigne du nez. L’AT no 3 confirme qu’aucun agent n’a été blessé. Le sergent lui dit de rester avec le plaignant, puis se met à prendre des dispositions pour faire envoyer une ambulance. On annonce quelques secondes plus tard qu’une ambulance est en route.
L’AI retourne sur les lieux et reste près de l’endroit où le plaignant a escaladé le mur. Il appelle l’AT no 3 et l’AT no 2 et leur demande comment ils sont descendus jusqu’au plaignant. Ils lui montrent où ils sont descendus et l’AI les rejoint.
L’AI arrive et rencontre l’AT no 3 qui tient le plaignant en position latérale de sécurité. Le plaignant est allongé sur le sol, sur le côté droit, et l’AT no 3 est à genoux à côté de lui. L’AT no 3 demande au plaignant de lui parler. L’AI demande s’il avait dit quelque chose. L’AT no 3 répond qu’il était conscient.
À 1 h 53, une ambulance arrive. Les ambulanciers paramédicaux lui posent un collier cervical. À 1 h 57, ils le placent sur une civière avec l’aide des agents du SPT.
Enregistrements des communications
Le 20 septembre 2024, vers 0 h 54, la TC téléphone à la police via le 911. La TC indique au répartiteur de la police que le plaignant avait menacé de se faire du mal. Il lui avait envoyé tous ses mots de passe et lui avait transféré tout l’argent qu’il avait dans ses comptes bancaires. Il avait envoyé des messages textes à la TC et avait indiqué qu’il se trouvait sur les voies ferrées et qu’il allait se jeter sous un train. La TC croyait qu’il se trouvait près des voies ferrées de Liberty Village.
Vers 0 h 58 environ, l’AI et l’AT no 3 se mettent en route pour aller rencontrer la TC. La police demande à Rogers Communications de sonder le téléphone portable du plaignant par PING.
L’AI et l’AT no 3 rencontrent la TC vers 1 h 9, et cette dernière leur fournit une photo du plaignant. La TC communiquait avec le plaignant par messages textes, mais ce dernier n’avait pas indiqué où il se trouvait exactement. Des ouvriers du bâtiment signalent à l’AI et à l’AT no 3 qu’ils ont vu le plaignant courir en direction ouest, près des voies ferrées, sur la rue Atlantic. Une description de ses vêtements est diffusée par radio.
Vers 1 h 37, le plaignant envoie un message texte à la TC pour lui dire qu’il voit les agents de police chez lui.
Vers 1 h 40, l’AT no 1 et l’AT no 2 suivent le plaignant à la hauteur de l’avenue Strachan et de la rue East Liberty. Le plaignant refuse de s’arrêter pour eux.
L’AI et l’AT no 3 se lancent dans une poursuite à pied.
L’AT no 1 et l’AT no 2 indiquent au répartiteur de la police que le plaignant court dans le parc. Il avait sauté par-dessus une clôture se trouvant à côté des voies ferrées et se trouvait maintenant sur un mur de soutènement à l’angle de la rue Ordnance et de l’avenue Strachan.
Vers 1 h 42, l’AT no 1 annonce au répartiteur de la police que le plaignant est tombé en bas d’un mur de soutènement se trouvant à « 10 à 12 pieds » du sol. Les SMU sont dépêchés sur les lieux. Le plaignant est conscient et respire. Il a une blessure à l’arrière de la tête, une large plaie enflée sur la tempe gauche, des saignements au niveau du nez et un œil enflé. Il respire bruyamment. Les SMU arrivent sur les lieux et prodiguent des soins au plaignant. Il est ensuite transporté en ambulance à l’Hôpital St. Michael, à Toronto. Un agent se trouve avec lui dans l’ambulance.
Vidéo no 1 — 30, rue Ordnance
Le 20 septembre 2024, vers 2 h 56 min 4 s[3], la vidéo s’ouvre sur une vue en direction sud depuis l’angle nord-est du 30, rue Ordnance.
Vers 2 h 59 min 24 s, le plaignant contourne l’angle sud-est du bâtiment et court vers le nord.
Vers 2 h 59 min 27 s, l’AI et l’AT no 2 contournent l’angle sud-est du bâtiment et courent après le plaignant. Ce dernier sort du champ de la caméra dans le coin inférieur gauche.
Vers 2 h 59 min 29 s, l’AT no 1 contourne l’angle sud-est du bâtiment.
Vers 2 h 59 min 59 s, l’AT no 3 apparaît dans le coin inférieur du champ de la caméra. Il marche vers le sud pour contourner l’angle sud-est du bâtiment.
Vidéo no 2 — 30, rue Ordnance
Le 20 septembre 2024, vers 2 h 52 min 44 s, la vidéo s’ouvre sur une vue du côté nord du 30, rue Ordnance, en direction ouest. Il y a une passerelle en béton sur toute la longueur du champ de la caméra et une rambarde sur le bord du côté nord de la passerelle. Les chemins de fer du CN et de Metrolinx se trouvent en contrebas de la rambarde, au nord de celle-ci. Il fait sombre et l’éclairage par ampoules est minimal.
Vers 2 h 59 min 50 s, l’AT no 1 et l’AT no 2 entrent dans le champ droit de la caméra, regardent par-dessus la rambarde et courent vers l’ouest le long de la passerelle.
Vers 3 h 2 min 15 s, un sergent entre dans le champ inférieur droit de la caméra et regardé par-dessus la rambarde.
Vers 3 h 2 min 18 s, l’AT no 3 entre dans le champ inférieur de la caméra et marche vers l’ouest le long de la passerelle.
Vers 3 h 2 min 38 s, le sergent marche en direction ouest le long de la passerelle.
Vers 3 h 3 min 29 s, l’AI entre dans le champ droit de la caméra et marche vers l’ouest sur la passerelle.
Vers 3 h 11 min 19 s, une ambulance entre dans le champ supérieur de la caméra et se dirige vers l’est, le long des terrains du CN et de Metrolinx, au nord de la rambarde, puis sort du champ de la caméra juste au nord de la rambarde, sur le côté est du bâtiment.
Vers 3 h 20 min 40 s, un véhicule de police du SPT, dont les gyrophares sont activés, entre dans le champ supérieur de la caméra et se dirige vers l’est. Il s’immobilise dans le champ inférieur gauche de la caméra.
Vidéo no 3 — 30, rue Ordnance
Le 20 septembre 2024, vers 2 h 52 min 6 s, la vidéo s’ouvre sur une vue de la rue en direction est depuis l’angle sud-ouest du 30, rue Ordnance.
Vers 2 h 58 min 40 s, on voit le reflet des gyrophares sur les bâtiments.
Vers 2 h 58 min 47 s, le plaignant court en direction est dans la voie de circulation en direction ouest de la rue Ordnance. L’AI, l’AT no 2, l’AT no 3 et l’AT no 1 le poursuivent.
Éléments obtenus auprès du service de police
Sur demande, l’UES a obtenu les éléments suivants auprès du SPT entre le 22 septembre 2024 et le 18 octobre 2024 :
- Images captées par les systèmes de caméras intégrées aux véhicules
- Enregistrements captés par les caméras d’intervention
- Rapport du système de répartition assistée par ordinateur
- Rapport d’incident général
- Liste des agents concernés
- Politique relative aux personnes en situation de crise
- Notes — AI, AT no 1, AT no 2 et AT no 3
- Enregistrements des communications
Éléments obtenus auprès d’autres sources
L’UES a obtenu les éléments suivants auprès d’autres sources entre le 22 septembre 2024 et le 20 novembre 2024 :
- Dossiers médicaux du plaignant, fournis par le HSM
- Vidéos du 30, rue Ordnance
Description de l’incident
Le scénario suivant ressort des éléments de preuve recueillis par l’UES, ce qui comprend des entrevues avec le plaignant, l’AI et d’autres témoins de la police, ainsi que des enregistrements vidéo montrant certaines parties de l’incident.
Au petit matin du 20 septembre 2024, la police a été dépêchée à une adresse située sur la rue East Liberty. La TC avait téléphoné au 911 pour signaler que le plaignant avait menacé de se suicider. Elle a indiqué que le plaignant lui avait transféré une importante somme d’argent et lui avait fourni le mot de passe de son compte.
L’AI est arrivé sur les lieux avec son partenaire, l’AT no 3. Ils se sont rendus au domicile du plaignant pour le chercher. Il n’était pas là. La TC a rejoint les agents à cet endroit et a indiqué qu’elle était toujours en communication avec le plaignant. À l’aide de son téléphone, les agents ont envoyé au plaignant un message texte indiquant qu’ils le cherchaient. Le plaignant ne s’est pas montré réceptif.
Le plaignant s’est mis à revenir vers son domicile. De loin, il a vu la TC en compagnie des agents à l’extérieur de son domicile. La TC a aperçu le plaignant et a alerté les agents. L’AI s’est dirigé vers l’est sur la rue East Liberty et a aperçu le plaignant qui sortait d’un parc de poche situé sur le côté nord de la route, à l’ouest de l’avenue Strachan. Le plaignant s’est retourné et s’est éloigné de l’agent en direction est sur la rue East Liberty. L’agent a demandé au plaignant de s’arrêter et de lui parler. Le plaignant a demandé qu’on le laisse tranquille.
L’AT no 3 a rejoint l’AI, et ils se sont tous deux mis à suivre le plaignant. Ils ont continué de l’appeler, mais en vain. Ayant décidé qu’ils devaient placer le plaignant en garde à vue, ils ont accéléré le pas et se sont lancés à sa poursuite. Le plaignant s’est enfui en direction est, traversant l’avenue Strachan et se rendant sur la rue Ordnance. Les agents ont poursuivi le plaignant en direction est sur la rue Ordnance et sur un sentier longeant le côté sud du 30, rue Ordnance. Le plaignant a contourné le coin de l’adresse et a continué vers le nord sur une courte distance, en direction d’une clôture. Il a escaladé la clôture et a atterri sur une saillie de l’autre côté. Puis il est tombé en bas d’un mur de soutènement en essayant de descendre jusqu’au sol en contrebas.
Arrivés à la clôture, les agents ont constaté que le plaignant était immobile sur le sol en contrebas. Il était tombé d’une hauteur d’environ quatre mètres.
Les SMU ont été appelés. Ils se sont rendus sur les lieux et ont transporté le plaignant à l’hôpital. Le plaignant avait subi de multiples blessures, y compris des fractures au visage et aux côtes, ainsi que des lésions cérébrales permanentes et une hémorragie interne.
Dispositions législatives pertinentes
Articles 219 et 221 du Code criminel — Négligence criminelle causant des lésions corporelles
219 (1)Est coupable de négligence criminelle quiconque :
a) soit en faisant quelque chose;
b) soit en omettant de faire quelque chose qu’il est de son devoir d’accomplir,
montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.
(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée
par la loi.
221 Quiconque, par négligence criminelle, cause des lésions corporelles à autrui est coupable :
a) soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de dix ans; b) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Article 17 de la Loi sur la santé mentale — Intervention de l’agent de police
17. Si un agent de police a des motifs raisonnables et probables de croire qu’une personne agit ou a agi d’une façon désordonnée et qu’il a des motifs valables de croire que cette personne :
a) soit a menacé ou tenté de s’infliger des lésions corporelles ou menace ou tente de le faire;
b) soit s’est comportée ou se comporte avec violence envers une autre personne ou de manière à lui faire craindre qu’elle lui causera des lésions corporelles;
c) soit a fait ou fait preuve de son incapacité de prendre soin d’elle-même,
et qu’en plus, il est d’avis que cette personne souffre, selon toute apparence, d’un trouble mental d’une nature ou d’un caractère qui aura probablement l’une des conséquences suivantes :
d) elle s’infligera des lésions corporelles graves;
e) elle infligera des lésions corporelles graves à une autre personne;
f) elle subira un affaiblissement physique grave,
et qu’il serait dangereux d’agir selon les termes de l’article 16, il peut amener sous garde cette personne dans un lieu approprié afin qu’elle soit examinée par un médecin.
Analyse et décision du directeur
Le 20 septembre 2024, le plaignant a été grièvement blessé lors d’une chute de hauteur. Puisque des agents du SPT le poursuivaient à pied au moment de l’incident, l’UES a été informée de l’incident et a ouvert une enquête. L’AI a été identifié comme étant l’agent impliqué dans cette affaire. L’enquête est maintenant terminée. Après avoir examiné les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI a commis une infraction criminelle en rapport avec les blessures graves subies par le plaignant.
L’infraction possible à l’étude dans cette affaire est la négligence criminelle causant des lésions corporelles, en contravention de l’article 221 du Code criminel. Cette infraction est réservée aux cas graves de négligence qui témoignent d’une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui. L’infraction repose, en partie, sur une conduite constituant un écart marqué et substantiel par rapport au degré de diligence qu’une personne raisonnable aurait exercé dans les mêmes circonstances. Dans l’affaire en question, il faut donc déterminer si l’AI n’a pas fait preuve de la diligence requise et si ce manque de diligence, le cas échéant, pourrait avoir causé les blessures subies par le plaignant ou y avoir contribué, et pourrait être considéré comme suffisamment grave pour entraîner l’imposition d’une sanction pénale. À mon avis, cela n’est pas le cas.
L’AI et les autres agents qui se sont rendus sur les lieux s’acquittaient de leur devoir de protection et de préservation de la vie tout au long de la série d’événements qui se sont soldés par la chute du plaignant. Ayant été informés que le plaignant avait des idées suicidaires, les agents avaient le devoir de prendre toutes les mesures raisonnables pour empêcher le plaignant de se faire du tort. Puisque la TC les avait informés que le plaignant souffrait de troubles mentaux, les agents avaient également des raisons de croire qu’il pouvait être appréhendé au titre de l’article 17 de la Loi sur la santé mentale.
Je suis également persuadé que les agents, y compris l’AI, ont fait preuve de la prudence et de la diligence nécessaires pour assurer la santé et le bien-être du plaignant alors qu’ils s’acquittaient de leur devoir. N’ayant aucune raison de douter de son intention de se faire du mal, les agents ont agi de façon raisonnable lorsqu’ils ont poursuivi le plaignant à pied en vue de le placer en garde à vue. Après l’avoir localisé, ils auraient eu tort de ne pas tenter de l’appréhender afin qu’il reçoive de l’aide à l’hôpital. Il est très regrettable que les agents n’aient pas réussi à rattraper le plaignant avant qu’il n’atteigne la clôture, ne tombe de l’autre côté et ne subisse de graves blessures, mais ce n’est pas faute d’avoir essayé.
Pour les motifs qui précèdent, j’en conclus qu’il n’y a pas lieu de porter des accusations criminelles dans cette affaire et le dossier est clos.
Date : 16 janvier 2025
Approuvé électroniquement par
Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
Notes
- 1) Sauf indication contraire, les renseignements fournis dans cette section reflètent les renseignements fournis à l’UES au moment de la notification. Ils ne reflètent pas nécessairement les faits constatés par l’UES dans le cadre de son enquête. [Retour au texte]
- 2) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués, comme le prévoit le paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les principaux éléments des documents sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]
- 3) Les heures indiquées dans ces enregistrements n’étaient pas synchronisées avec l’heure réelle. [Retour au texte]
Note:
La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.