Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 24-TCI-230

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :

  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes;
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle;
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne;
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête;
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi;
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :

  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins;
  • des renseignements sur le lieu de l’incident;
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, elle perd une partie du corps ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur les blessures graves subies par un homme de 37 ans (plaignant).

L’enquête

Notification de l’UES[1]

À 13 h 23 le 1er juin 2024, le Service de police de Toronto a communiqué avec l’UES pour lui transmettre les renseignements qui suivent.

À 10 h 27, le Service de police de Toronto a reçu un appel d’un homme signalant que son voisin était en état de crise dans un immeuble d’habitation près de l’intersection entre la rue King Ouest et l’avenue Spencer. L’homme a précisé que le voisin avait déjà été admis par le passé au Centre de toxicomanie et de santé mentale. Deux agents sont arrivés pour aller voir ce voisin, soit le plaignant, qui était accroché à une fenêtre. Ils sont entrés dans le logement et ont retenu l’homme pour l’empêcher de tomber. Vers 11 h, le service des incendies de Toronto a été appelé en renfort. L’homme a fini par tomber au sol sous la fenêtre. Il était alors blessé, mais conscient. Il a été transporté en ambulance à l’Hôpital St. Michael, où on a diagnostiqué une fracture du bassin. Il a refusé de recevoir des soins et il a été admis au moyen d’une formule en vertu de la Loi sur la santé mentale.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : Le 1er juin 2024, à 14 h 31

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : Le 1er juin 2024, à 16 h 40

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Personne concernée (« plaignant ») :

Homme de 37 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés.

Le plaignant a participé à une entrevue le 12 juin 2024.

Témoins civils

TC no 1 A participé à une entrevue.

TC no 2 A participé à une entrevue.

TC no 3 A participé à une entrevue.

TC no 4 A participé à une entrevue.

TC no 5 A participé à une entrevue.

TC no 6 A participé à une entrevue.

TC no 7 A participé à une entrevue.

Les témoins civils ont participé à une entrevue entre le 4 juin 2024 et le 20 juin 2024.

Agents impliqués

AI no 1 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées.

AI no 2 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées.

Les agents impliqués ont participé à une entrevue les 27 et 28 juin 2024.

Agent témoin

AT A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées.

L’agent témoin a participé à une entrevue le 3 juin 2024.

Éléments de preuve

Les lieux

Les événements en question se sont déroulés à l’intérieur d’un logement dans le secteur de l’intersection entre la rue King Ouest et l’avenue Spencer, à Toronto.

Éléments de preuve matériels

Il s’agissait d’un immeuble d’habitation à logements multiples de hauteur moyenne.

Le logement concerné comportait deux fenêtres au-dessus d’une petite zone gazonnée, et c’est là où le plaignant est tombé.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[2]

Enregistrements des communications de la police

Le 1er juin 2024, à 10 h 27[3], le TC no 6 a signalé que le plaignant n’allait pas bien mentalement. Il avait cogné sur les murs et causé des dommages à son logement depuis deux heures. Environ un mois plus tôt, le plaignant avait été conduit au Centre de toxicomanie et de santé mentale par la police.

À 10 h 42, l’AI no 1 et l’AI no 2 ont été dépêchés à l’immeuble d’habitation.

À 10 h 59 min 59 s, l’AI no 1 a transmis un message radio pour demander de l’aide. Il a indiqué que le plaignant était suspendu à la fenêtre et retenu par les chevilles. Une ambulance a alors été demandée d’urgence.

À 11 h 3, la chute du plaignant a été signalée. Environ 15 secondes plus tard, l’AT a indiqué que le plaignant était tombé et il a demandé une ambulance d’urgence. L’AT a précisé que le plaignant respirait, mais ne parlait pas.

Enregistrement vidéo de la caméra d’intervention de l’AI no 1

Le 1er juin 2024, à 10 h 57 min 11 s, l’AI no 1 a pénétré dans l’ascenseur d’un immeuble d’habitation.

À 10 h 58 min 7 s, l’AT no 2 a frappé à la porte du plaignant. Celui-ci a répondu à la porte avec deux sacs dans les mains. Il a demandé aux agents d’entrer dans son logement. L’AI no 1 a demandé pourquoi il voulait les faire entrer, ce à quoi le plaignant a répondu : [Traduction] « Je dois vous montrer ce qui se passe. » Il s’est alors rendu à la fenêtre et a ouvert les rideaux.

L’AI no 1 a appuyé sur l’interrupteur pour allumer la lumière, mais ça n’a pas fonctionné. Le plaignant a alors tiré les rideaux et il a ouvert la petite fenêtre du côté droit en disant : [Traduction] « Vous savez quoi? C’est maintenant que le spectacle commence pour de vrai. » Le plaignant a alors montré les deux sacs et a dit : [Traduction] « J’ai deux cachets de doxycycline et laissez-moi vous dire… Oh! s’il vous plaît, prenez ça. » L’AI no 1 a placé un marteau et un couteau dans l’évier. Le plaignant a continué en disant : [Traduction] « Donc, il y a eu… », avant de passer sa jambe gauche par la fenêtre ouverte et de pencher la tête et le haut du tronc pour passer par la fenêtre. L’AI no 2 s’est alors précipité vers le plaignant et a attrapé sa jambe droite, qui était toujours dans le logement. Quant à l’AI no 1, il a attrapé la cheville droite du plaignant. À ce stade, le plaignant avait son corps au complet à partir du genou droit qui pendait par la fenêtre.

À 10 h 59 min 57 s, l’AI no 1 a demandé d’autres unités en renfort, vu que le corps du plaignant pendait par la fenêtre. Les agents ont tenté de le ramener à l’intérieur en tirant, mais sans succès.

À 11 h 0 min 30 s, la caméra d’intervention était bloquée. L’AI no 2 a crié à une autre personne [maintenant identifiée comme le TC no 1], qui était à l’extérieur : [Traduction] « La police est là. Appelez les pompiers. Appelez quelqu’un. On a besoin d’aide! » Le plaignant a hurlé : [Traduction] « À l’aide! » à plusieurs reprises.

À 11 h 1 min 6 s, les deux agents luttaient pour retenir le plaignant. L’AI no 2 a dit à l’AI no 1 : [Traduction] « Garde sa jambe vers le bas. Vaut mieux lui garder le pied en bas. »

À 11 h 1 min 17 s, l’AI no 1 a demandé que les pompiers aillent dans la cour, car ils ne retenaient le plaignant que par la cheville. L’AI no 1 a ajouté : [Traduction] « [AI no 2], n’abandonne pas! » et [Traduction] « Ne le lâche pas, [AI no 2]! »

À 11 h 2 min42 s, l’AI no 2 a répété à bout de souffle : [Traduction] « Nous allons l’échapper! »

À 11 h 2 min 49 s, l’AI no 2 a crié : [Traduction] « Sergent! Il va tomber! On est en train de l’échapper! On est sur le point de le perdre! Oh! merde! »

À 11 h 3 min 0 s, l’AI no 1 a annoncé au centre de répartition que le plaignant était tombé. Les AI nos 1 et 2, qui étaient penchés en dehors de la fenêtre sont rentrés complètement à l’intérieur.

À 11 h 3 min 13 s, on pouvait voir que l’AI no 2 avait des égratignures au visage et au cou. Il s’est penché pour reprendre son souffle.

L’AI no 2 a dit : [Traduction] « Merde! Mon visage en a pris un coup. » L’AI no 2 a indiqué que, dans la lutte, il avait reçu des coups de pied et avait été égratigné au visage et dans le cou. Il avait aussi perdu sa montre et son épaulette gauche. L’AI no 1 avait aussi perdu sa montre et un gant en latex, et il avait du sang sur le bras.

À 11 h 4 min 8 s, l’AI no 1 a dit à un agent que le plaignant s’était rendu à la fenêtre pour sauter après qu’il a mis un marteau, des ciseaux et un couteau dans l’évier de la cuisine. L’AI no 2 a réussi à l’attraper avant qu’il ne traverse complètement la fenêtre.

À 11 h 5 min 34 s, l’AI no 1 et l’AI no 2 sont sortis du logement et ont pénétré dans l’ascenseur. L’AI no 2 a indiqué que le plaignant avait essayé de lui frapper les yeux. Il les avait donc fermés et avait détourné la tête. L’AI no 1 lui a dit qu’il avait fait du bon travail et il a ajouté : [Traduction] « Il y tenait, à sauter, pas vrai? »

À 11 h 21 min 25 s, l’AT a dit à l’AI no 1 de se faire examiner par les ambulanciers, puis de retourner au poste de police.

À 11 h 24 min 31 s, la caméra d’intervention de l’AI no 1 a été éteinte.

Enregistrement de la caméra d’intervention de l’AT

À 11 h 2 min 43 s le 1er juin 2024, l’AT est arrivé dans la cour du logement. Un homme enregistrait une vidéo à l’aide de son téléphone cellulaire, et plusieurs objets jonchaient le sol sous la fenêtre. L’AT a ordonné à deux agents de monter immédiatement.

À 11 h 2 min 58 s, le plaignant est tombé au sol et a atterri sur sa hanche droite.Il était conscient et gémissait.L’AT et un autre agent ont veillé à garder la tête du plaignant et son corps immobiles. Le plaignant a été encouragé à bien respirer.

À 11 h 7 min 4 s, les pompiers ont installé un collier cervical au plaignant.

Enregistrement vidéo sur téléphone cellulaire

On pouvait voir le plaignant qui pendait de la fenêtre, la tête en bas. Deux agents, soit les AI nos 2 et 1, lui tenaient la jambe droite pour l’empêcher de tomber. Le plaignant luttait et tentait de se dégager de l’AI no 2. Avec son pied gauche, le plaignant a tenté de pousser sur le mur pour s’éloigner. Il s’est ensuite replié vers le haut, comme pour faire un redressement assis, de manière à frapper et à égratigner les mains et la tête de l’AI no 2. Il a arraché les gants en latex de l’AI no 1, et celui-ci s’est servi de ses mains pour repousser celles du plaignant. L’agent a tenté d’attraper n’importe quel membre à sa portée. Le plaignant a dit : [Traduction] « À l’aide! À l’aide! » Il a donné des coups de pied au visage et à la tête de l’AI no 2 avec son pied gauche, et l’AI no 1 lui a attrapé la jambe pendant un instant. Le plaignant a alors agrippé l’AI no 2 par la tête et le cou et aussi par les mains qui retenaient sa jambe pour les égratigner. L’AI no 1 est parvenu à attraper la cheville droite du plaignant un court instant, tandis que celui-ci continuait à gigoter pour se libérer de la prise de l’AI no 2. Il s’est servi du mur pour courber le dos et se pousser. Un troisième agent est alors arrivé à la fenêtre, et l’enregistrement a pris fin.

Documents obtenus du service de police

L’UES a examiné les éléments et documents suivants que lui a remis, à sa demande, le Service de police de Toronto entre le 1er juin 2024 et le 11 septembre 2024 :

  • les notes de l’AT;
  • les notes de l’AI no 2;
  • les notes de l’AI no 1;
  • la liste des agents concernés;
  • la liste des témoins civils;
  • les enregistrements des communications
  • les enregistrements de caméra d’intervention de l’AI no 1, de l’AI no 2, de l’AT et de quatre autres agents;
  • le rapport sur les blessures et maladies du Service de police de Toronto;
  • les antécédents du plaignant;
  • le rapport des détails de l’événement;
  • la procédure du Service de police de Toronto relative aux interventions en cas d’incident (usage de la force et comment ramener le calme);
  • la procédure du Service de police de Toronto relative aux personnes en situation de crise.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a obtenu et examiné les documents et éléments suivants obtenus d’une autre source le 4 juillet 2024 :

  • les dossiers médicaux du plaignant provenant de l’Hôpital St. Michael

Description de l’incident

Le déroulement des événements en question, qui ressort clairement des éléments de preuve recueillis par l’UES, peut se résumer brièvement comme suit.

Vers 10 h 30 le 1er juin 2024, des agents du Service de police de Toronto ont été appelés à un logement situé près de l’intersection entre la rue King Ouest et l’avenue Spencer. Un voisin avait téléphoné à la police pour signaler que le résident du logement, soit le plaignant, était en état de crise de santé mentale. Il frappait sur les murs et endommageait son logement depuis deux heures.

Les AI nos 1 et 2 sont arrivés sur les lieux juste avant 11 h. Ils sont montés au logement, et le plaignant les a fait entrer. Après quelques instants à peine, le plaignant s’est approché d’une fenêtre du logement et l’a ouverte. Pendant que les agents l’observaient, le plaignant a passé la jambe gauche et le tronc par la fenêtre. Les agents se sont précipités et ont réussi à attraper sa jambe droite avant que le plaignant ait complètement traversé la fenêtre.

Il s’est ensuivi une lutte à la fenêtre pendant laquelle le plaignant, alors suspendu la tête en bas, le dos appuyé au mur extérieur de l’immeuble, tentait de se dégager des agents qui cherchaient à l’empêcher de tomber. Le plaignant a donné des coups de pied aux agents avec sa jambe gauche et il s’est agrippé à eux et les a égratignés avec ses mains. L’AI no 2 n’a pas lâché la jambe droite du plaignant, même s’il s’est fait faire du mal et s’est fait blesser pendant ce temps. Par moments, l’AI no 1 tenait le pied droit du plaignant ainsi que son partenaire, pour éviter qu’il ne tombe par la fenêtre. Ils ont fini par se fatiguer et par lâcher prise. Il était alors 11 h 2.

Le plaignant est tombé en bas de plusieurs étages. Il a été transporté à l’hôpital où plusieurs fractures au bassin ont été diagnostiquées.

Dispositions législatives pertinentes

Les articles 219 et 221 du Code criminel – Négligence criminelle ayant causé des lésions corporelles

219 (1) Est coupable de négligence criminelle quiconque :

a) soit en faisant quelque chose;

b) soit en omettant de faire quelque chose qu’il est de son devoir d’accomplir,

montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.

(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.

221 Quiconque, par négligence criminelle, cause des lésions corporelles à autrui est coupable :
a) soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de dix ans; b) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.

Analyse et décision du directeur

Le plaignant a été gravement blessé en tombant d’une certaine hauteur à Toronto le 1er juin 2024. Puisque des agents du Service de police de Toronto étaient présents et ont tenté d’empêcher la chute, l’UES a été avisée de l’incident et a entrepris une enquête. Les AI nos 1 et 2 ont été identifiés comme les agents impliqués. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation des éléments de preuve, il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que l’un ou l’autre des agents impliqués a commis une infraction criminelle ayant un lien avec la chute et les blessures du plaignant.

La seule infraction potentielle à prendre en considération est celle de négligence criminelle ayant causé des lésions corporelles contraire à l’article 221 du Code criminel. Elle ne s’applique que dans les cas de grave négligence qui dénotent une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui. On se base en partie sur le fait que la conduite représente un écart marqué et important par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans la même situation. Dans l’affaire qui nous concerne, la question est de savoir s’il y a eu, de la part des AI, un manque de diligence ayant causé la chute ou y ayant contribué qui était suffisamment flagrant pour entraîner des sanctions pénales. Ce n’est pas le cas.

Les AI nos 2 et 1 étaient fondés à se trouver sur les lieux et ils étaient dans l’exercice de leurs fonctions durant leur brève interaction avec le plaignant. Puisqu’ils avaient été dépêchés pour intervenir auprès d’une personne en détresse, les agents avaient le devoir d’être là et de faire tout en leur pouvoir pour prêter assistance. Quand ils sont arrivés au logement, le plaignant les a fait entrer.

J’estime également que les deux agents impliqués ont fait preuve de diligence pour assurer la santé et la sécurité du plaignant. Ils n’ont pas tardé à comprendre que le plaignant avait l’intention de sauter par la fenêtre et ils sont intervenus rapidement pour tenter de l’en empêcher. Ils ont aussi lutté de toutes leurs forces pour prévenir la chute du plaignant, même pendant qu’il les frappait et qu’il faisait tout ce qu’il pouvait pour se dégager. Même si les agents n’ont pu empêcher la chute du plaignant, ce n’est pas faute d’avoir essayé de leur mieux.

Pour les raisons qui précèdent, il n’y a pas lieu de porter des accusations dans cette affaire, et le dossier est clos.

Date : Le 19 septembre 2024

Approuvé par voie électronique

Joseph Martino

Directeur

Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) À moins d’avis contraire, les renseignements contenus dans cette section reflètent les informations reçues par l’UES au moment de la notification et ne reflètent pas nécessairement les conclusions de fait de l’UES à la suite de son enquête. [Retour au texte]
  • 2) Les enregistrements contiennent des renseignements personnels confidentiels qui ne peuvent être divulgués, conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les renseignements utiles pour l’enquête sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]
  • 3) Les heures indiquées proviennent du rapport des détails de l’évènement et sont donc approximatives. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.