Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 24-TCD-088

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :

  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes;
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle;
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne;
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête;
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi;
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :

  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins;
  • des renseignements sur le lieu de l’incident;
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur le décès d’un homme de 40 ans (plaignant).

L’enquête

Notification de l’UES[1]

Le 26 février 2024, à 12 h 33, le Service de police de Toronto a avisé l’UES du décès du plaignant.

Selon le Service de police de Toronto, à 13 h 11 le 24 février 2024, le plaignant a été arrêté pour intrusion au Palais des congrès de la communauté urbaine de Toronto (PCCUT) par des agents de sécurité, qui l’ont ensuite confié à des agents du Service de police de Toronto. L’agent témoin (AT) et un autre agent [agent du Service de police de Toronto no 1[2]] ont mis le plaignant sous garde après l’avoir maîtrisé à mains nues. Le plaignant a été menotté et placé dans une ambulance, car il semblait être sous l’influence de drogues. Deux autres agents du Service de police de Toronto ont porté assistance sur les lieux. Le plaignant a été transporté à l’Hôpital Mount Sinai, où il a été libéré sans condition et laissé aux soins de l’hôpital. À 4 h 20 le 26 février 2024, le coroner a avisé le Service de police de Toronto qu’un médecin de l’hôpital avait déclaré le plaignant mort à 2 h 20.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : Le 27 février 2024, à 6 h 41

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : Le 27 février 2024, à 8 h 50

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Personne concernée (« plaignant ») :

Homme de 40 ans, décédé.

Témoins civils

TC no 1 A participé à une entrevue.

TC no 2 A participé à une entrevue.

TC no 3 A participé à une entrevue.

Les témoins civils ont été interrogés entre le 6 et le 19 mars 2024.

Agent témoin

AT A participé à une entrevue.

L’agent témoin a été interrogé le 20 mars 2024.

Éléments de preuve

Les lieux

Les événements en question sont survenus au Palais des congrès de la communauté urbaine de Toronto (PCCUT).

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[3]

Enregistrements des communications de la police

À 13 h 10 min 52 s le 24 février 2024, l’agent du Service de police de Toronto no 1 a demandé une ambulance pour le plaignant, qui avait été arrêté pour intrusion. Il a signalé au centre de répartition que le plaignant transpirait abondamment. Des cris incompréhensibles (provenant vraisemblablement du plaignant) pouvaient être entendus en arrière-plan. L’agent du Service de police de Toronto no 1 a informé le centre de répartition que le plaignant était sous l’influence d’une drogue quelconque.

À 13 h 12 min 30 s, le centre de répartition a indiqué à l’agent du Service de police de Toronto no 1 qu’une ambulance était en route.

À 13 h 17 min 12 s, le centre de répartition s’est informé du plaignant. L’agent du Service de police de Toronto no 1 lui a indiqué que les agents du Service de police de Toronto avaient toujours du mal à maîtriser le plaignant et que ce dernier avait été attaché. L’agent du Service de police de Toronto no 1 a mentionné que les agents du Service de police de Toronto étaient encore à l’intérieur de l’édifice et attendaient un fauteuil roulant pour le plaignant, car celui-ci leur avait donné des coups de pied. L’agent du Service de police de Toronto no 1 a demandé que les ambulanciers apportent un brancard dans l’édifice à leur arrivée. On entendait le plaignant hurler (paroles incompréhensibles) en arrière-plan. L’agent du Service de police de Toronto no 1 a ajouté qu’il était impossible de marcher avec le plaignant, que celui-ci devait être transporté et que les agents du Service de police de Toronto allaient donc attendre l’arrivée des ambulanciers avec le brancard.

Enregistrement de caméra vidéo du PCCUT

L’enregistrement n’avait pas de son ni d’indication de la date et de l’heure.

Le plaignant a été filmé en train d’entrer au Toronto International Auto Show (TIAS) en se faufilant sous une barrière de contrôle de foule. Il a contourné un contrôle de sécurité et couru jusqu’à un escalier mécanique double en direction ascendante. Il a sauté par-dessus la rampe de l’escalier mécanique ascendant le plus à gauche et couru jusqu’en haut. Au bout d’environ 16 secondes, il a redescendu par le même escalier mécanique ascendant. Il a contourné le contrôle de sécurité en courant, est passé sous la même barrière de contrôle de foule et a franchi un portillon sur lequel était écrit [Traduction ] « Sortie seulement ». Le plaignant a contourné en courant un contrôle de sécurité situé au pied de deux escaliers mécaniques en direction ascendante. Il s’est arrêté au pied de l’escalier mécanique ascendant de gauche et a semblé avoir une brève conversation avec un agent de sécurité. Il a monté l’escalier mécanique de gauche en courant, sauté par-dessus la cloison centrale pour accéder à l’escalier mécanique de droite et poursuivi sa course vers l’étage supérieur hors du champ de la caméra. Le plaignant est entré en courant dans une zone d’exposition du TIAS, a ralenti et a marché en rond. Il a ensuite marché derrière un stand de roues d’automobiles.

Après approximativement 16 secondes, le plaignant est sorti en trombe du rideau arrière du stand et a fait tomber plusieurs roues d’automobiles au sol. Plusieurs spectateurs ont reculé ou tenté de retenir les roues. Le plaignant est entré dans une zone d’exposition d’automobiles en courant pendant que des agents de sécurité le poursuivaient. Les agents de sécurité ont attrapé le plaignant, qui a semblé se débattre. Un homme a tenté de prêter main-forte aux agents de sécurité[4]. Quatre agents du Service de police de Toronto sont arrivés. L’un d’eux [maintenant identifié comme l’agent du Service de police de Toronto no 2[5]] a installé un dispositif de contention aux jambes du plaignant. Le plaignant a été remis debout par les agents de police. L’agent du Service de police de Toronto no 1, avec l’aide de l’AT, a menotté le plaignant, les mains derrière le dos. Le plaignant a été emmené par les agents de police.

Le plaignant a d’abord semblé coopératif, puis a commencé à pousser les agents de police. Il a été transporté par les agents, qui lui tenaient chacun un bras ou une jambe.

Les quatre agents de police ont sorti le plaignant d’un ascenseur en le transportant et l’ont allongé par terre, sur le côté gauche, dans un hall près d’une porte extérieure. Il n’y avait pas de lutte ou d’altercation entre les agents et le plaignant.

Environ 20 minutes plus tard, deux ambulanciers paramédicaux sont entrés dans le hall avec un brancard. Les agents de police ont mis le plaignant debout et l’ont placé sur le brancard en position assise. Les ambulanciers paramédicaux l’ont sorti du hall par une porte extérieure.

Enregistrement de la caméra d’intervention de l’agent du Service de police de Toronto no 1

À 13 h 10 min 9 s le 24 février 2024, l’agent du Service de police de Toronto no 1 a été filmé en train de marcher dans le PCCUT alors que le salon de l’auto était en cours. Il s’est approché de l’AT et de deux hommes[6] maintenant le plaignant au sol. L’AT a ordonné au plaignant de mettre les mains derrière le dos.

À 13 h 10 min 33 s, l’agent du Service de police de Toronto no 1 a menotté le plaignant et demandé une ambulance.

À 13 h 13 min 11 s, l’agent du Service de police de Toronto no 1 a indiqué au plaignant qu’on allait le mettre debout. On a ensuite escorté le plaignant hors du PCCUT.

À 13 h 14 min 56 s, l’agent du Service de police de Toronto no 1 a demandé au plaignant ce qu’il avait consommé.

À 13 h 17 min 45 s, l’agent du Service de police de Toronto no 1 a fait le point sur la situation par message radio. Il a ajouté qu’ils avaient besoin d’un fauteuil roulant pour amener le plaignant jusqu’à l’ambulance.

À 13 h 21 min 20 s, l’agent du Service de police de Toronto no 1 a demandé au plaignant quelles substances il avait prises.

À 13 h 36 min 35 s, un agent a fouillé dans les poches du plaignant et trouvé une pièce d’identité, identifiant ainsi le plaignant.

À 13 h 38 min 8 s, le plaignant a été placé sur un brancard.

Enregistrement de la caméra d’intervention de l’AT

À 13 h 9 min 58 s, l’AT s’est approché du plaignant qui était maintenu au sol, recouvert de moquette, par des civils. L’AT a annoncé au plaignant qu’il était en état d’arrestation pour intrusion et lui a demandé de mettre les mains derrière le dos.

Entre 13 h 10 min 12 s et 13 h 10 min 33 s, l’agent du Service de police de Toronto no 1 est arrivé en renfort. Les agents de police ont dit au plaignant de [Traduction] « cesser de résister ». L’agent du Service de police de Toronto no 1 a menotté le plaignant, les mains derrière le dos.

À 13 h 13 min 41 s, les agents de police ont assis le plaignant, puis l’ont mis debout. Ils ont tenté de l’escorter à l’extérieur en marchant. Le plaignant ne marchant pas, les agents l’ont sorti en le transportant. Les agents lui ont dit d’arrêter de donner des coups de pied et l’ont emmené dans un ascenseur. On a vu les agents de police sortir le plaignant de l’ascenseur et le transporter jusqu’à un hall d’entrée, près de portes vitrées.

Entre 13 h 26 min 41 s et 13 h 29 min 11 s, le plaignant a répété à plusieurs reprises : [Traduction] « Laissez-moi partir, les gars! » et « Aidez-moi quelqu’un! ». L’agent du Service de police de Toronto no 2 a demandé au plaignant quelles substances il avait prises.

À 13 h 36 min 34 s, un agent a trouvé un portefeuille dans la veste du plaignant et a ainsi obtenu une pièce d’identité.

Entre 13 h 37 min 44 s et 13 h 38 min 20 s, les agents de police ont mis le plaignant debout et l’ont placé sur un brancard.

À 13 h 42 min 1 s, des ambulanciers paramédicaux ont sorti le plaignant de l’édifice sur le brancard.

Enregistrement de la caméra d’intervention d’un agent du Service de police de Toronto

À 13 h 22 min 21 s, le plaignant a été filmé sur la moquette, mains menottées derrière le dos, allongé sur le côté en position de récupération, les agents de police le maintenant au sol avec les mains. Les agents lui ont dit de se détendre et de continuer à respirer, ajoutant que l’ambulance était en route.

À 13 h 26 min 21 s, le plaignant a crié à plusieurs reprises : [Traduction] « Laissez-moi partir ».

Entre 13 h 37 min 44 s et 13 h 38 min 10 s, les agents de police ont mis le plaignant debout et l’ont placé sur un brancard.

À 13 h 42 min 1 s, des ambulanciers paramédicaux ont sorti le plaignant sur le brancard.

Documents obtenus du service de police

L’UES a examiné les éléments et documents suivants que lui a remis, à sa demande, le Service de police de Toronto et le Service de police de Hamilton entre le 27 février 2024 et le 6 mars 2024 :

  • les enregistrements des communications (Service de police de Toronto);
  • les enregistrements de la caméra vidéo du PCCUT et des caméras d’intervention (Service de police de Toronto);
  • les politiques : arrestation; intervention sur un incident; personne en situation de crise (Service de police de Toronto);
  • le rapport d’incident général (intrusion) (Service de police de Toronto);
  • le rapport d’incident général (mort subite) (Service de police de Toronto);
  • les rapports du système de répartition assisté par ordinateur (Service de police de Toronto);
  • le formulaire de contact avec une personne en situation de crise (Service de police de Hamilton);
  • les rapports des détails des incidents (Service de police de Hamilton);
  • les notes de l’AT (Service de police de Toronto);
  • la liste des agents en service rémunéré (Service de police de Toronto);
  • les photos de l’agent des scènes de crime (Service de police de Toronto).

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a obtenu les documents suivants d’autres sources le 27 février 2024 :

  • le rapport d’appel d’ambulance et le résumé détaillé de l’incident des services médicaux d’urgence de Toronto;
  • le rapport d’incident général de Target;
  • le rapport d’incident du PCCUT;
  • les photos du TC no 1;
  • le rapport préliminaire sur la cause du décès du Service de médecine légale de l’Ontario.

Description de l’incident

Le scénario qui suit ressort des éléments de preuve recueillis par l’UES, y compris les entrevues avec les agents de police témoins et les témoins civils, ainsi que les enregistrements vidéo ayant capté les événements en question.

Le plaignant était dans les environs du PCCUT dans l’après-midi du 24 février 2024. Alors qu’il se trouvait à l’extérieur de l’édifice, il est monté à bord d’une navette hors service et a été prié de sortir par des agents du Service de police de Toronto en service rémunéré. À l’intérieur de l’édifice, le plaignant a eu des comportements imprévisibles, a causé des troubles et a été ordonné de quitter les lieux par le personnel de sécurité. Comme il ne s’exécutait pas, le personnel de sécurité a attrapé le plaignant et l’a maintenu au sol.

L’AT, un agent en service rémunéré travaillant à l’extérieur du PCCUT, a été approché par un agent de sécurité qui lui a demandé de l’aide. L’agent de police et un autre agent en service rémunéré, l’agent du Service de police de Toronto no 1, ont suivi l’agent de sécurité jusqu’à un escalier mécanique menant à une zone d’exposition où le plaignant était maintenu à plat ventre. Le plaignant a été arrêté pour intrusion, menotté les mains derrière le dos et attaché par les jambes, puis placé en position de récupération. Il transpirait, avait de l’écume aux lèvres et semblait sous l’influence de drogues ou d’alcool.

On a mis le plaignant debout avant de l’escorter jusqu’à l’ascenseur pour qu’il soit ramené au rez-de-chaussée. La police a demandé l’envoi d’une ambulance. Pendant qu’on accompagnait le plaignant jusqu’à l’ascenseur, celui-ci s’est trouvé dans l’incapacité de se tenir debout et a donc dû être transporté par la police.

Au rez-de-chaussée, le plaignant a de nouveau été placé en position de récupération pendant que les agents attendaient l’arrivée des ambulanciers paramédicaux. Il est resté dans cette position pendant environ 20 minutes avant l’arrivée de l’ambulance.

Le plaignant a été placé dans l’ambulance et conduit à l’hôpital, où il a été libéré sans condition par la police.

Le 26 février 2024, alors qu’il était encore à l’hôpital, le plaignant a été déclaré mort.

Cause du décès

À l’autopsie, le médecin légiste n’a pas été en mesure de déterminer la cause du décès, qui reste inconnue à l’heure actuelle. Le corps ne présentait aucun signe de traumatisme.

Dispositions législatives pertinentes

L’article 215 du Code criminel : Devoir de fournir les choses nécessaires à l’existence

215 (1) Toute personne est légalement tenue :

c) de fournir les choses nécessaires à l’existence d’une personne à sa charge, si cette personne est incapable, à la fois :

(i) par suite de détention, d’âge, de maladie, de troubles mentaux, ou pour une autre cause, de se soustraire à cette charge,

(ii) de pourvoir aux choses nécessaires à sa propre existence.

(2) Commet une infraction quiconque, ayant une obligation légale au sens du paragraphe (1), omet, sans excuse légitime, de remplir cette obligation, si :

b) à l’égard d’une obligation imposée par l’alinéa (1)c), l’omission de remplir l’obligation met en danger la vie de la personne envers laquelle cette obligation doit être remplie, ou cause, ou est de nature à causer, un tort permanent à la santé de cette personne.

Les articles 219 et 220 du Code criminel : Négligence criminelle ayant causé la mort

219 (1) Est coupable de négligence criminelle quiconque :

a) soit en faisant quelque chose;

b) soit en omettant de faire quelque chose qu’il est de son devoir d’accomplir,

montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.

(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.

220 Quiconque, par négligence criminelle, cause la mort d’une autre personne est coupable d’un acte criminel passible :

a) s’il y a usage d’une arme à feu lors de la perpétration de l’infraction, de l’emprisonnement à perpétuité, la peine minimale étant de quatre ans;

b) dans les autres cas, de l’emprisonnement à perpétuité.

Analyse et décision du directeur

Le plaignant est décédé à l’hôpital le 26 février 2024. Comme il avait été laissé aux soins de l’hôpital à la suite de son arrestation par des agents du Service de police de Toronto le 24 février 2024, l’UES a été informée de l’incident et a entrepris une enquête. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation des éléments de preuve, il n’y a pas de motifs raisonnables de croire qu’un ou l’autre des agents du Service de police de Toronto a commis une infraction criminelle en relation avec l’arrestation et le décès du plaignant.

Les seules infractions à prendre en considération dans cette affaire seraient le défaut de fournir les choses nécessaires à l’existence et la négligence criminelle ayant causé la mort, qui sont respectivement contraires aux exigences des articles 215 et 220 du Code criminel. Un simple manque de diligence ne suffit pas à engager la responsabilité pour ces deux infractions. Pour la première, la culpabilité serait fondée, en partie, sur la conclusion que la conduite constituait un écart marqué par rapport à la norme de diligence qu’une personne raisonnable aurait exercée dans les mêmes circonstances. La deuxième correspond aux cas encore plus graves de conduite qui font preuve d’un mépris déréglé ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autres personnes. Pour que cette infraction soit établie, il faut notamment que la négligence constitue un écart à la fois marqué et important par rapport à une norme de diligence raisonnable. En l’espèce, il faut donc déterminer si les agents qui ont eu affaire au plaignant ont fait preuve d’un manque de diligence qui a mis en danger la vie du plaignant ou a contribué à son décès, et si ce manque était suffisamment flagrant pour entraîner une sanction pénale. À mon avis, ce n’est pas le cas.

Aucun élément de preuve n’indique que l’un ou l’autre des agents de police a omis de se comporter de manière diligente pour protéger la santé et le bien-être du plaignant. L’AT et l’agent du Service de police de Toronto no 1 ont rapidement constaté que le plaignant était en détresse et avait besoin de soins médicaux. Ils ont demandé l’envoi d’une ambulance et veillé à ce que le plaignant soit placé en position de récupération en attendant l’arrivée des ambulanciers paramédicaux. À aucun moment, les agents n’ont exercé une force importante contre le plaignant, mais ils ont dû utiliser une certaine force musculaire pour lui mettre les bras dans le dos afin de le menotter et pour le maintenir en position de récupération.

Pour les raisons qui précèdent, bien que la cause du décès regrettable du plaignant reste indéterminée, il est évident que la conduite des agents n’a pas causé le décès et qu’elle n’y a pas non plus contribué de quelque manière que ce soit qui pourrait justifier une sanction criminelle. Le dossier est donc clos.

Date : 25 juin 2024

Approuvé par voie électronique

Joseph Martino

Directeur

Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les renseignements contenus dans cette section reflètent les informations reçues par l’UES au moment de la notification et ne reflètent pas nécessairement les conclusions de fait de l’UES à la suite de son enquête. [Retour au texte]
  • 2) L’UES n’a pas interrogé l’agent du Service de police de Toronto no 1 ni reçu ses notes; cependant, l’UES a obtenu et examiné une copie de l’enregistrement de sa caméra d’intervention. [Retour au texte]
  • 3) Les enregistrements contiennent des renseignements personnels confidentiels qui ne peuvent être divulgués, conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les renseignements utiles pour l’enquête sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]
  • 4) L’homme n’a pas été interrogé. [Retour au texte]
  • 5) L’UES n’a pas interrogé l’agent du Service de police de Toronto no 2 ni reçu ses notes; cependant, l’UES a obtenu et examiné une copie de l’enregistrement de sa caméra d’intervention. [Retour au texte]
  • 6) Les hommes n’ont pas été interrogés. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.