Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 23-PFI-452

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur les blessures graves qu’a subies un homme de 40 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES [1]

Le 1er novembre 2023, à 10 h 20, la Police provinciale de l’Ontario a communiqué avec l’UES pour signaler ce qui suit.

Le 1er novembre 2023, à 0 h 01, des agents du Service de police des Six Nations (SPSN) [Ohsweken] ont été appelés à se rendre à une adresse afin de donner suite à une affaire concernant le plaignant. En effet, ce dernier aurait affronté un gardien de sécurité à l’aide d’une carabine et d’un couteau. Il n’y a pas eu de décharge d’arme à feu ni même d’altercation à ce moment-là, et le plaignant s’est enfui vers une résidence située sur Chiefswood Road, à Ohsweken. Les agents du SPSN se sont rendus sur place, ont établi un périmètre de sécurité autour de la résidence et ont communiqué avec la Police provinciale de l’Ontario qui a dépêché une unité tactique de son Détachement de London. Les agents de la Police provinciale de l’Ontario se sont efforcés de régler la situation, mais le plaignant a refusé de sortir de la maison et de se rendre. À 8 h, le plaignant a déchargé son arme à feu depuis la résidence et les balles ont touché un véhicule tactique situé à proximité, ce qui a suscité des inquiétudes pour la sécurité publique. À 10 h, les agents de l’Unité tactique et de secours (UTS) de la Police provinciale de l’Ontario ont défoncé la porte d’entrée de la résidence à l’aide de leur véhicule blindé de sauvetage (VBS). Le plaignant a alors tiré sur les agents depuis l’intérieur de la résidence. Un irritant en aérosol a alors été répandu à l’intérieur de la résidence et, peu de temps après, le plaignant est sorti. Une fois à l’extérieur, le plaignant a déchargé une arme à feu et une balle a atteint la tête d’un agent tactique de la Police provinciale de l’Ontario. Les policiers ont à leur tour tiré à plusieurs reprises sur le plaignant avec leur arme à feu et leur ARWEN (Anti-Riot Weapon Enfield). Le plaignant a été touché par des projectiles d’une ARWEN et des balles, mais il a survécu. Il a ensuite été transporté par ambulance à l’Hôpital général de Hamilton.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 1er novembre 2023 à 10 h 30

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 1er novembre 2023 à 12 h 15

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 6

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 2

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 40 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés.

Le plaignant a participé à une entrevue le 8 novembre 2023.

Témoins civils

TC n° 1 A participé à une entrevue
TC n° 2 A participé à une entrevue
TC n° 3 A participé à une entrevue
TC n° 4 A participé à une entrevue
TC n° 5 A participé à une entrevue
TC n° 6 A participé à une entrevue
TC n° 7 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à une entrevue entre le 5 et le 17 novembre 2023.

Agent impliqué

AI n° 1 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué
AI n° 2 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué
AI n° 3 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué

Agents témoins

AT n° 1 A participé à une entrevue
AT n° 2 A participé à une entrevue
AT n° 3 A participé à une entrevue
AT n° 4 A participé à une entrevue
AT n° 5 A participé à une entrevue
AT n° 6 A participé à une entrevue
AT n° 7 Notes examinées; entrevue jugée non nécessaire
AT n° 8 Notes examinées; entrevue jugée non nécessaire
AT n° 9 Notes examinées; entrevue jugée non nécessaire
AT n° 10 Notes examinées; entrevue jugée non nécessaire

Les agents témoins ont été interrogés les 5 et 6 novembre 2023.

Éléments de preuve

Les lieux

Les faits en question se sont déroulés à l’intérieur et autour d’une propriété située sur Chiefswood Road, à Ohsweken.

Éléments de preuve matériels

Le 1er novembre 2023

Le 1er novembre 2023, à 13 h 25, deux enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES sont arrivés à un point de rassemblement situé sur Chiefswood Road. La Police provinciale de l’Ontario leur a fourni des renseignements généraux sur l’incident, puis ils ont rencontré des agents de la Police provinciale de l’Ontario chargés d’effectuer des expertises judiciaires dans le cadre de l’enquête criminelle menée en parallèle par l’organisme. On a constaté qu’un membre de l’UTS de la Police provinciale de l’Ontario avait sous sa garde du matériel de police qui avait été utilisé au cours de l’incident faisant l’objet de l’enquête.

À 14 h 15, un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES a pris des photos d’une arme à feu à létalité atténuée, une ARWEN de 37 mm. L’arme aurait été utilisée par l’AI n° 2 qui aurait tiré une cartouche du chargeur-tambour rotatif de cinq cartouches. Des photographies ont été prises d’une deuxième ARWEN de 37 mm qui aurait été utilisé par l’AI n° 1 pour tirer une cartouche du chargeur-tambour rotatif de cinq cartouches.


Figure 1 - L’ARWEN de l’AI n° 2

Un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES a pris des photos d’un casque de protection balistique que l’AI n° 2 aurait porté. Le casque avait été endommagé dans la région du front à gauche, juste au-dessus du bord. Le matériau intérieur était bombé et semblait avoir été endommagé par un projectile. Le casque a été répertorié et photographié.


Figure 2 - Casque endommagé par l’impact

À 14 h 39, un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES a reçu une carabine C8, modèle Colt C8A2 de calibre .223, que l’AI n° 3 aurait utilisée. La carabine était équipée d’un chargeur amovible contenant 18 cartouches. La procédure opérationnelle habituelle consiste à approvisionner le chargeur avec 28 cartouches, ce qui laisse supposer que dix cartouches ont été déchargées. La carabine a été photographiée et consignée.

À 14 h 50, un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES a reçu une deuxième carabine C8, modèle Diemaco C8CQB de calibre .223, que l’AI n° 1 aurait utilisée. La carabine était équipée d’un chargeur amovible contenant 21 cartouches. Sept cartouches ont été tirées avec cette arme à feu. L’arme a été photographiée et consignée.


Figure 3 - La carabine C8 de l’AI n° 1

À 15 h 17, les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES se sont rendus sur les lieux de l’incident, sur Chiefswood Road. Des agents de la Police provinciale de l’Ontario et du SPSN ont établi un périmètre de sécurité autour des lieux, soit une zone résidentielle rurale. Chiefswood Road est orientée à peu près nord-sud et l’adresse en question se trouve en bordure de la route. Une voie d’accès pour autos permettait de se rendre à la propriété. Il y avait des fossés des deux côtés de la route.

Sur le côté sud de la voie d’accès pour autos, en retrait de la route et du fossé, se trouvait une caravane. L’extrémité ouest de la caravane, où se trouvait la porte d’entrée, a subi d’importants dommages. Une plateforme en bois faisait saillie du côté de la caravane.

En retrait de la route et au nord de la caravane et de la plateforme se trouvait un VBS noir identifié de la Police provinciale de l’Ontario. À l’avant du véhicule, en direction de la caravane, se trouvait un long bélier hydraulique rectangulaire qui semblait avoir été utilisé pour forcer la porte de la caravane. Sur le toit du véhicule se trouvait une trappe circulaire en forme de tourelle dont le couvercle était ouvert et orienté vers la caravane. De nombreux objets à létalité atténuée, dont des cartouches d’ARWEN, des dispositifs de distraction et des grenades à gaz, se trouvaient sur le toit, autour de la trappe ouverte. Les portières arrière du véhicule étaient ouvertes. Deux douilles d’ARWEN déchargées se trouvaient derrière le véhicule. Des impacts de projectiles étaient visibles sur le coin avant supérieur droit et sur le côté gauche du VBS. À ces endroits, la peinture avait été arrachée laissant voir le métal de la carrosserie avec une petite entaille sur la surface. À l’arrière du véhicule, des traces de pneus s’étendaient vers l’arrière de la voie d’accès, indiquant que le véhicule s’était déplacé vers l’avant à partir d’un autre endroit. Une dizaine de mètres plus haut, des douilles de projectiles d’ARWEN ont été trouvées.

Au sud de cette zone, derrière une voiture Ford blanche stationnée, se trouvaient des boîtes, une bobine de fil et des sacs portant des marquages de la Police provinciale de l’Ontario, contenant du matériel de communication tactique. Vers le coin arrière droit du VBS se trouvait un véhicule stationné. Sur l’herbe, dans le coin arrière droit de ce véhicule, dix douilles argentées semblant être du calibre d’une carabine ont été trouvées. À l’est du même véhicule argenté et au sud du véhicule blindé, sept autres douilles argentées similaires ont été trouvées sur le sol.

À l’est et au sud, un talus longeait la propriété. Plus près de la caravane, le long de ce talus, se trouvaient plusieurs vêtements et des débris médicaux. Les vêtements étaient abîmés et tachés. À l’ouest de la plateforme de la caravane, gisant sur le sol, se trouvait une carabine brun et noir. Près de la carabine se trouvait un couteau pliant à cran d’arrêt fermé. À l’ouest de la carabine et près du talus, on a trouvé une cartouche non éclatée de calibre .22.


Figure 4 - Carabine brun et noir trouvée sur les lieux

Parmi les débris présents sur la plateforme à côté de la caravane, un système de pilotage aérien à distance (drone) semblait avoir été endommagé. Parmi les débris du mur de la caravane, un projectile d’ARWEN vert et noir a été trouvé, ainsi qu’un second projectile vert et noir à l’intérieur de la caravane. Certaines parties de l’intérieur de la caravane étaient recouvertes d’une poudre jaune qui semblait être un mélange de gaz lacrymogène et de contenu d’extincteur. Plusieurs projectiles de gaz provenant d’une ARWEN ont été aperçus dans les débris. Plusieurs bonbonnes de gaz portant les mentions « OC » et « CS » ont été retrouvées dans les débris. Sur le sol, près du centre de la caravane, se trouvaient une chaise pliante et une certaine quantité de tissu qui semblait avoir été roussie ou brûlée. Trois extincteurs vides ont été trouvés sur la voie d’accès pour autos et sur la chaussée à proximité. À l’entrée de la propriété, près de la chaussée, se trouvaient plusieurs douilles de calibre .22 et une cartouche. Des photographies ont été prises pour exposer les lieux et pour répertorier les objets trouvés.
 

Le 2 novembre 2023

Des renseignements supplémentaires ont révélé qu’un autre véhicule avait été impliqué dans l’affaire avant que le plaignant n’arrive à l’adresse, et que ce véhicule avait apparemment roulé sur un tapis clouté. Le véhicule était stationné au fond de la voie d’accès, près d’une résidence située à l’ouest et au nord de la caravane. Ses deux pneus avant étaient à plat. Des photographies du véhicule et de l’état dans lequel il se trouvait ont été prises.

À 13 h 15, des enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES ont procédé à la collecte des douilles et les lieux ont été confiés à la Police provinciale de l’Ontario.

Les 23 et 24 novembre 2023

Le 23 novembre 2023, la Police provinciale de l’Ontario a trouvé un projectile dans des vêtements qui avaient été retirés au plaignant. Le 24 novembre 2023, un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES s’est rendu à l’Unité des services d’identification médicolégale de Tillsonburg de la Police provinciale de l’Ontario et a reçu un sac scellé qui contenait le projectile dans un récipient stérile. Le projectile a été transporté à l’UES afin d’y être entreposé. Il était déformé et revêtu de cuivre en plus d’être taché.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [2]

Vidéo prise à l’aide du système de caméra installé dans le véhicule de police et de caméras d’intervention

Seize vidéos prises par des caméras d’intervention d’agents de la Police provinciale d’intervention et six vidéos provenant du système de caméra installé dans des véhicules de la Police provinciale de l’Ontario ont été obtenues. Toutes les images ont été filmées à distance (le périmètre extérieur) et n’ont que peu d’intérêt pour l’enquête.

Captures d’écran de Facebook - Téléphone cellulaire du TC n° 5

L’UES a reçu des captures d’écran du téléphone cellulaire du TC n° 5 qui avaient été publiées sur le compte Facebook du plaignant. Elles montrent que, le 1er novembre 2023, à 2 h 06, le plaignant a accusé la Police provinciale de l’Ontario et le gouvernement canadien de l’avoir agressé et d’avoir enfreint la loi.
À 2 h 15, le plaignant tenait une grande machette dans ses mains et, à 2 h 54, il tenait une grande bouteille de rhum Bacardi dans une main et une carabine de calibre .22 dans l’autre.
À 4 h 01, un gros projecteur diffusait de la lumière à partir de la propriété où se trouvait la caravane du plaignant.
À 7 h 59, un VBS avec un bélier déplié se trouvait juste devant la caravane du plaignant.
À 9 h 16, le bélier du VBS était positionné à quelques mètres de la caravane du plaignant.

Vidéos prises par le téléphone cellulaire du TC n° 5

Huit vidéos ont été prises avec le téléphone cellulaire.

Le 1er novembre 2023 à 8 h 11, on voit un VBS avec un bélier déployé avancer et reculer légèrement près de la caravane du plaignant.
 
À 8 h 14, le plaignant dit en criant [traduction] « assassins » et un agent de police non identifié dit au plaignant qu’il ne veut ni le blesser ni qu’on le blesse.
 
À 8 h 25, le VBS se déplace lentement puis fait marche arrière à trois reprises pour défoncer la caravane à l’aide du bélier. Le plaignant reçoit l’ordre suivant : [traduction] « Arrêtez de tirer sur la police. Sortez sans l’arme à feu pour que personne ne soit blessé. » Des ordres du type : [traduction] « Déposez l’arme à feu. Tout de suite. », sont répétés.
 
À 8 h 35, le bélier du VBS a percuté la caravane à trois reprises et a arraché de petites surfaces de celle-ci. On répète dans un haut-parleur : [traduction] « [Nom du plaignant], sortez! »
 
À 9 h 13, le bélier du VBS se trouve à quelques mètres de la caravane du plaignant. On dit dans le haut-parleur: « Personne ne veut se faire tirer dessus. Que voulez-vous que nous fassions maintenant? »
 
À 9 h 27, le VBS s’approche lentement de la caravane et plusieurs agents de l’UTS sortent par l’arrière de celui-ci. Des grenades lacrymogènes sont lancées dans la caravane, et des grenades percutantes retentissent. Le plaignant sort de la caravane et y retourne immédiatement. Il tire plusieurs coups de feu et sort de la caravane avec un fusil à hauteur d’épaule pointée en direction du VBS. Les agents de la Police provinciale de l’Ontario tirent alors plusieurs coups de feu successifs. Le plaignant tombe et roule sur sa gauche, hors du champ de vision de la caméra.

Vidéos prises par un civil avec son téléphone cellulaire

Le 7 novembre 2023, l’UES a reçu deux vidéos d’un téléphone cellulaire. On y voit la porte avant de la caravane et le côté droit du VBS lorsqu’il s’est approché de l’avant de la caravane et qu’il a fait marche arrière. La vidéo n’est pas datée ni horodatée.

Dans la première vidéo, le VBS avance et son bélier heurte la porte avant de la caravane, poussant la porte et le mur de la caravane vers l’intérieur. On entend cinq coups de feu provenant de l’intérieur de la caravane et frappant le VBS. Le VBS recule, puis un coup de feu est tiré depuis l’intérieur de la caravane.
Dans la deuxième vidéo, on voit de la fumée s’échapper de l’intérieur de la caravane. Le VBS se positionne près d’une rambarde en bois installée devant la caravane. Le plaignant sort sur la plateforme, son fusil à hauteur d’épaule. Quelqu’un dit en criant : [traduction] « Il sort. » Le plaignant fait quelques pas vers la gauche, mais reste sur la plateforme. Il retourne ensuite dans la fumée et se place sur le côté droit. Quelqu’un dit en criant : [traduction] « Il revient ». Le plaignant sort alors de nouveau sur le côté droit de la plateforme (du point de vue du VBS) tenant le fusil dans sa main gauche juste au-dessus de sa taille. Le plaignant brandit son fusil et tire un coup de feu. On entend ensuite ce qui semble être un tir provenant d’une ARWEN. Le plaignant disparaît dans la fumée alors que quelqu’un dit en criant : [traduction] « Entrez. Entrez. » Le plaignant ressort sur la plateforme et des agents de la Police provinciale de l’Ontario ouvrent le feu. Le plaignant descend de la plateforme, l’arme pointée vers le VBS, avant de tomber vers l’avant et de rouler sur le côté gauche sur un objet blanc qui se trouve au sol. La vidéo se termine lorsque quelqu’un dit : [traduction] « Il est. »
 

Vidéo prise par un drone

La vidéo a été filmée après l’incident et n’a que peu d’intérêt pour l’enquête.

Vidéo de l’appui aérien du service de police régional de York (SPRY)

Le 1er novembre 2023, à 2 h 19 min 44 s, le plaignant entre dans une caravane qui se trouve sur le côté gauche d’une voie d’accès pour autos.

À 2 h 26, le plaignant sort de la caravane et se rend à pied dans un magasin situé sur Chiefswood Road. Il tient un objet dans les mains. Le plaignant reste dans le magasin pendant environ 20 minutes.

À 2 h 48 min 26 s, on voit le plaignant sortir du magasin et retourner à la caravane avec quelque chose dans la main droite; l’objet n’a pas pu être identifié.
 
À 3 h 14 min 40 s, on voit des nuages et la vidéo prend fin.

Enregistrements des communications de la police

Le 31 octobre 2023, peu avant 23 h 50, le personnel de sécurité d’une entreprise située sur Chiefswood Road reçoit un appel concernant un inconnu [on sait maintenant qu’il s’agit du plaignant] qui se déplace à pied avec un fusil de chasse à pompe et une machette. On entend le plaignant dire : [traduction] « La chasse aux ripoux est ouverte. » La dernière fois que le plaignant a été vu, il marchait sur Chiefswood Road.
Plusieurs unités du SPSN arrivent aux alentours de Chiefswood Road et on leur conseille de ne pas activer leurs feux d’urgence ni leurs sirènes. Tous les agents portent des gilets pare balles.
 
Le 1er novembre 2023, à 0 h 05, quelqu’un tire des coups de feu avec un fusil. Personne n’est blessé.
 
À 0 h 26, un poste de commandement est établi. Les services médicaux d’urgence (SMU) se mettent en place. On informe qu’une zone d’exclusion aérienne est établie, car des drones allaient être utilisés.
L’heure d’arrivée prévue de l’UTS est fixée à 2 h, et celle de dix membres de l’équipe d’intervention d’urgence et d’un chien de police était de 45 à 90 minutes. La Police provinciale de l’Ontario n’est pas disponible et le service d’aviation du SPRY doit arriver à destination dans les 45 minutes.
À 0 h 30, un drone est déployé.
 
À 1 h 14, des renseignements confirmant l’identité de la personne munie du fusil/de la carabine de chasse comme étant le plaignant sont rapportés.

À 1 h 30, un agent du SPSN passe en voiture et révèle des détails sur le véhicule en cause. On voit le plaignant près du véhicule lorsqu’il quitte les lieux. Un tapis clouté permet de crever deux pneus du véhicule qui échappe au SPSN. Ce véhicule retourne ensuite près de la caravane du plaignant.
 
À 1 h 39, quatre coups de feu sont tirés en direction des agents de police sur Chiefswood Road, depuis le côté sud-ouest de la route.
 
À 1 h 47, le plaignant se dirige vers le nord sur Chiefswood Road en direction d’un commerce. On lit l’énoncé de la mission de l’UTS [traduction] : « Isoler et confiner la zone en question et arrêter le suspect, en accordant une importance primordiale à la sécurité de la police, du public et du suspect. »

Le plaignant fait plusieurs allers-retours entre sa caravane et le commerce. Il possède une arme d’épaule.
 
À 3 h 03, le TC n° 1 transmet de l’information concernant la santé mentale du plaignant qui reste seul dans sa caravane et qui a en main une carabine de calibre .22.

À 3 h 14, l’UTS arrive au poste de commandement et les négociateurs de la Police provinciale de l’Ontario sont en route. Plusieurs coups de feu sont tirés depuis la caravane du plaignant, suivis de coups de feu sporadiques.
 
À 3 h 39, l’UTS se mobilise dans le secteur de Chiefswood Road. Les agents de l’UTS tentent de négocier avec le plaignant, mais il refuse de sortir de sa caravane.
 
À 7 h 31, l’UTS fait irruption dans la caravane avec le VBS et, à 7 h 34, le plaignant tire plusieurs coups de feu sur le VBS. À 7 h 40, l’UTS lance des gaz lacrymogènes dans la caravane, mais le plaignant reste barricadé. Le VBS continue de démanteler la caravane.
 
À 8 h 41, on voit le plaignant à l’intérieur de la caravane, assis sur une chaise et fumant une cigarette tout en pointant une carabine vers le VBS.
 
À 9 h 30, l’UTS déploie des dispositifs de distraction et, à 9 h 41, les intervenants des SMU sont escortés sur les lieux.
 
À 10 h 22, le service d’incendie des Six Nations termine la vérification des lieux.

Captures d’écran du clavardage du groupe de l’UTS déployé

Le 1er novembre 2023, à 1 h 39, un poste de commandement a été mis en place. Une fusillade s’est produite sur Chiefswood Road.
 
À 2 h 22, une photo du plaignant a été publiée et, dans un autre message, les renseignements relatifs au permis de conduire du plaignant ont été diffusés.
 
À 2 h 42, une capture d’écran du compte Facebook du plaignant a été publiée, sur laquelle il tient un fusil et regarde en direction de Chiefswood Road. La deuxième image était une capture d’écran du système de navigation GPS montrant une unité de police située à 38 kilomètres et arrivant à 3 h 20. Une capture d’écran du plaignant a été publiée, alors qu’il aiguisait une machette. Une deuxième image correspondait à une capture d’écran du GPS d’une unité située sur l’autoroute 403, à 37 kilomètres de là et arrivant à 3 h 20.

À 3 h 29, une note manuscrite a été publiée, sur laquelle on pouvait lire [traduction] : « Mission : isoler et confiner la zone en question et arrêter le suspect, en accordant une importance primordiale à la sécurité de la police, du public et du suspect ». Trois captures d’écran d’images aériennes du SPRY ont été diffusées et, à 4 h 49, une capture d’écran de la porte d’entrée de la caravane du plaignant a été diffusée.

Groupe de clavardage des négociateurs

Le 7 novembre 2023, l’UES a reçu des renseignements concernant les négociateurs de la Police provinciale de l’Ontario. Cette information a permis d’identifier les cinq négociateurs concernés, un échange de textos intitulé « Crisis Negotiator’s Group Chat » (clavardage du groupe de négociateurs en situation de crise) entre le moment où ils ont été appelés et la fin de l’incident, ainsi qu’une conversation téléphonique de douze minutes avec le plaignant.
Parmi les messages texte, il y avait un fil intéressant à 5 h 28. Un psychiatre indiquait en effet qu’il serait difficile de négocier avec le plaignant, car ce dernier n’était déjà pas rationnel et qu’il souffrait de troubles de la pensée. On a convenu de permettre au plaignant d’accéder à un téléphone cellulaire et d’évaluer sa réaction. Les autres échanges n’avaient aucune valeur pour l’enquête.

Communications des négociateurs de la police

Un agent s’est entretenu avec le plaignant au sujet de sa situation d’emploi. L’agent a confirmé que d’autres agents se trouvaient sur sa propriété et le plaignant a répondu [traduction] : « Je les ai identifiés comme étant des assassins. » Il était de plus en plus agité et a invoqué son immunité contre les lois canadiennes. Sa principale préoccupation était de faire en sorte que la police quitte sa propriété. L’agent a réitéré son désir d’assurer la sécurité de tous et sa volonté de régler la situation. Le plaignant a fait référence à un incident qui s’était déroulé à Brantford où il a affirmé avoir été attaqué avec un fusil d’assaut M-16.
Le plaignant a porté de vastes allégations de génocide et de meurtre contre les agents de police dans toute l’Amérique du Nord. Il a dit qu’il avait un sac avec des objets de valeur dont il pouvait se servir pour se défendre contre les assassins au sein de la police. La conversation n’ayant pas abouti, le plaignant a mis fin à l’appel, frustré.

Éléments obtenus du service de police

L’UES a obtenu les dossiers suivants du SPSN et de la Police provinciale de l’Ontario entre le 1er novembre et le 6 décembre 2023 :
  • Vidéos de caméras d’intervention
  • Renseignements provenant de la répartition assistée par ordinateur
  • Vidéo prise par un civil à l’aide d’un téléphone cellulaire
  • Vidéo prise par drone
  • Rapport général (SPSN)
  • Liste des négociateurs
  • Notes de l’AT n° 1
  • Notes de l’AT n° 2
  • Notes de l’AT n° 4
  • Notes de l’AT n° 5
  • Notes de l’AT n° 6
  • Notes de l’AT n° 7
  • Notes de l’AT n° 8
  • Notes de l’AT n° 9
  • Notes de l’AT n° 10
  • Notes des agents du SPSN
  • Clavardage du groupe de négociateurs en situation de crise de la Police provinciale de l’Ontario
  • Liste des agents impliqués de la Police provinciale de l’Ontario
  • Équipes et indicatifs d’appel des agents en uniforme de l’UTS de la Police provinciale de l’Ontario
  • Clavardage du groupe de l’UTS de la Police provinciale de l’Ontario
  • Rapport du SPSN sur le plaignant
  • Indicatifs d’appel des agents en uniforme
  • Résumé de témoignage anticipé des agents du SPSN
  • Images aériennes du SPRY
  • Rapport sur la formation de l’AI n° 1 (2023)
  • Rapport sur la formation de l’AI n° 2 (2023)
  • Rapport sur la formation de l’AI n° 3 (2023)

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a obtenu les documents suivants auprès des autres sources suivantes entre le 1er novembre 2023 et le 9 janvier 2024 :
  • Vidéo du compte Facebook du plaignant, fournie par le TC n° 5
  • Dossiers médicaux du plaignant de l’Hôpital général de Hamilton

Description de l’incident

Le scénario suivant se dégage des éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment les entrevues avec le plaignant, des agents témoins et des agents civils, ainsi que l’examen des vidéos montrant une partie de l’incident. Comme ils en avaient le droit, les AI ont refusé de s’entretenir avec l’UES et n’ont pas consenti à la divulgation de leurs notes.

Le 1er novembre 2023, peu avant minuit, des agents du SPSN ont été dépêchés à une résidence afin de donner suite à un appel à la police concernant un homme, le plaignant, qui avait brandi une machette et une arme à feu en direction du personnel de sécurité d’un établissement situé sur Chiefswood Road tout en déclarant que « la chasse aux agents de police était ouverte ». Alors que les agents s’approchaient de la résidence du plaignant sur Chiefswood Road à bord de deux voitures de patrouille, ils ont été la cible de tirs de la part du plaignant. Les agents ont alors établi un périmètre de sécurité autour du secteur et ont demandé l’aide de la Police provinciale de l’Ontario.

Une équipe de l’UTS de la Police provinciale de l’Ontario, sous le commandement de l’AT n° 1, a été mobilisée. Ces agents ont été informés des événements impliquant les agents du SPSN et se sont réunis, vers 3 h 10, au poste de commandement qui avait été établi à l’intersection de Chiefswood Road et de la route 54. À ce moment-là, on a constaté que le plaignant se trouvait dans sa caravane située au sud de la voie d’accès pour autos d’une adresse sur Chiefswood Road, juste à l’ouest de la chaussée. Un énoncé de mission a été prononcé, à savoir isoler et confiner la zone autour du plaignant et l’arrêter en accordant une importance primordiale à sa sécurité ainsi qu’à celle de la police et du public.

L’équipe de l’UTS est arrivée sur les lieux vers 4 h 05, à bord d’un VBS. Le véhicule a reculé dans la voie d’accès, près de l’avant de la caravane. À l’intérieur du véhicule se trouvaient les AI n° 2, n° 3 et n° 1, ainsi que l’AT n° 1, l’AT n° 2 (le conducteur), l’AT n° 3 et l’AT n° 6. L’AT n° 6, un maître-chien, avait son chien à ses côtés. Les AT n° 4 et n° 5 se sont installés en tant que tireurs d’élite à l’est de Chiefswood Road. À l’aide d’un haut-parleur, l’AT n° 1 a interpellé le plaignant à plusieurs reprises en lui demandant de sortir de la caravane les mains en l’air. L’agent a expliqué que la police souhaitait régler la situation de manière pacifique. Le plaignant n’a pas toujours répondu, mais lorsqu’il l’a fait, il a manifestement indiqué qu’il n’avait pas l’intention de sortir.

Le plaignant n’était pas sain d’esprit à ce moment-là. Il se prenait pour un enquêteur et considérait les agents de la Police provinciale de l’Ontario comme des assassins. Il portait un fusil.

Vers 4 h 30, le plaignant s’est présenté avec son fusil à la fenêtre de la caravane orientée vers l’est, que les agents de l’UTS avaient brisée. Vers 5 h 50, puis vers 6 h, le plaignant a tiré plusieurs coups de feu par la fenêtre de la caravane.

Comme le plaignant menaçait de plus en plus la sécurité publique en utilisant son fusil, la police a décidé de prendre les devants en lançant du gaz lacrymogène dans la caravane. On espérait que cette tactique obligerait le plaignant à sortir de la caravane, mais ce ne fut pas le cas. En fait, les bonbonnes de gaz lancées dans la caravane ont incité le plaignant à tirer d’autres balles par la fenêtre.

Vers 7 h 30, l’UTS s’est engagée dans une nouvelle escalade tactique. Elle a alors décidé d’utiliser l’extension du bras du VBS pour enfoncer la porte avant de la caravane à l’extrémité ouest de celle-ci. Alors que le VBS s’approchait de la porte pour la franchir, le plaignant a tiré sur le véhicule, le touchant et endommageant le pare-brise. D’autre gaz a été dispersé dans la caravane par l’ouverture de la porte grâce à des décharges d’ARWEN, mais en vain. Le plaignant n’est pas sorti de la caravane. Vers 8 h 15, le plaignant a aperçu un drone de la Police provinciale de l’Ontario voler près de la porte de la caravane. Il a donc décidé de l’abattre puis il s’est mis à tirer plusieurs balles sur le VBS.

La situation a dégénéré vers 9 h 30. Depuis la tourelle du VBS, l’AI n° 1 a lancé deux étuis fumigènes par la porte de la caravane. Alors que de la fumée s’échappait de la caravane, le plaignant est sorti sur la plateforme de la caravane, devant la porte, son fusil à la main, très près du côté passager du VBS. Il semble qu’il ait été touché par une balle d’une ARWEN tirée à ce moment-là par l’AI n° 1 depuis la tourelle. Le plaignant s’est repositionné du côté conducteur du VBS, toujours sur la plateforme, avant de retourner du côté passager et de décharger sa carabine. L’AI n° 2, qui se trouvait derrière le VBS, a déchargé avec son ARWEN sur le plaignant à peu près au moment où son casque de protection semble avoir été touché par une balle tirée par le plaignant. Quelques secondes plus tard, l’AI n° 1, depuis la tourelle, et l’AI n° 3, depuis l’arrière du VBS, ont à leur tour déchargé leur carabine C8, le premier tirant sept balles, le second dix. Le plaignant a été touché. L’AI n° 3, l’AT n° 3 et l’AT n° 6 sont sortis de derrière le VBS et ont menotté le plaignant.

Le plaignant a été transporté dans un hôpital de Hamilton où il a reçu des soins pour de multiples blessures par balle.

Dispositions législatives pertinentes

Article 34 du Code criminel -- Défense -- emploi ou menace d’emploi de la force

34 (1) N’est pas coupable d’une infraction la personne qui, à la fois :
a) croit, pour des motifs raisonnables, que la force est employée contre elle ou une autre personne ou qu’on menace de l’employer contre elle ou une autre personne
b) commet l’acte constituant l’infraction dans le but de se défendre ou de se protéger -- ou de défendre ou de protéger une autre personne -- contre l’emploi ou la menace d’emploi de la force
c) agit de façon raisonnable dans les circonstances
(2) Pour décider si la personne a agi de façon raisonnable dans les circonstances, le tribunal tient compte des faits pertinents dans la situation personnelle de la personne et celle des autres parties, de même que des faits pertinents de l’acte, ce qui comprend notamment les facteurs suivants :
a) la nature de la force ou de la menace
b) la mesure dans laquelle l’emploi de la force était imminent et l’existence d’autres moyens pour parer à son emploi éventuel
c) le rôle joué par la personne lors de l’incident
d) la question de savoir si les parties en cause ont utilisé ou menacé d’utiliser une arme
e) la taille, l’âge, le sexe et les capacités physiques des parties en cause
f) la nature, la durée et l’historique des rapports entre les parties en cause, notamment tout emploi ou toute menace d’emploi de la force avant l’incident, ainsi que la nature de cette force ou de cette menace;
1. f.1) l’historique des interactions ou communications entre les parties en cause
g) la nature et la proportionnalité de la réaction de la personne à l’emploi ou à la menace d’emploi de la force
h) la question de savoir si la personne a agi en réaction à un emploi ou à une menace d’emploi de la force qu’elle savait légitime
(3) Le paragraphe (1) ne s’applique pas si une personne emploie ou menace d’employer la force en vue d’accomplir un acte qu’elle a l’obligation ou l’autorisation légale d’accomplir pour l’exécution ou le contrôle d’application de la loi, sauf si l’auteur de l’acte constituant l’infraction croit, pour des motifs raisonnables, qu’elle n’agit pas de façon légitime.

Analyse et décision du directeur

Le 1er novembre 2023, le plaignant a reçu plusieurs balles tirées par des agents de la Police provinciale de l’Ontario à Ohsweken. L’UES a été informée de l’incident et a ouvert une enquête en désignant les AI n° 1, AI n° 2 et AI n° 3 comme étant les agents impliqués. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation des preuves, il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que l’un des agents impliqués a commis une infraction criminelle relativement aux blessures du plaignant.

L’article 34 du Code criminel prévoit que la conduite, qui autrement constituerait une infraction, est légitimée si elle visait à déjouer une attaque raisonnablement appréhendée, qu’elle soit réelle ou une menace, et était elle-même raisonnable. Le caractère raisonnable de la conduite doit être évalué dans les circonstances, c’est-à-dire en fonction de facteurs tels que la nature de la force ou de la menace; la mesure dans laquelle l’emploi de la force était imminent et l’existence d’autres moyens pour parer à son emploi éventuel; si les parties en cause ont utilisé ou menacé d’utiliser une arme; et, la nature et la proportionnalité de la réaction de la personne à l’emploi ou à la menace d’emploi de la force.

L’équipe de l’UTS était en droit d’être à cet endroit et dans l’exercice légitime de ses fonctions tout au long de la série d’événements qui ont abouti aux coups de feu tirés avec les ARWENS et les carabines C8. Ils avaient en effet des raisons de croire que le plaignant avait tiré avec une arme à feu sur des agents du SPSN. Ils étaient également sur place aux alentours de Chiefswood Road lorsque le plaignant a tiré à plusieurs reprises avec son fusil dans leur direction. Par conséquent, le plaignant était manifestement susceptible de se faire arrêter et les agents de l’UTS étaient en droit de chercher à le placer sous garde.

Quant aux projectiles que les AI n° 1 et n° 2 ont tiré avec leur l’ARWEN, et aux coups que les AI n° 1 et n° 3 ont tiré avec leur carabine C8, je suis convaincu qu’ils ont permis aux agents de se défendre et de défendre leurs collègues contre une agression que l’on pouvait raisonnablement appréhender. Bien qu’aucun des agents n’ait été interrogé par l’UES, comme ils en avaient légalement le droit, les circonstances entourant les coups de feu tirés par les agents poussent à cette conclusion. Au moment où les agents impliqués ont eu recours à leurs armes, le plaignant avait déjà tiré plusieurs balles en direction des agents de l’UTS. Il était donc évident que le plaignant n’avait aucun scrupule à tirer sur un agent et qu’il avait l’intention de le faire. Face à une menace mortelle, il est normal que les agents aient agit de sorte à se protéger contre des blessures graves, voire mortelles, lorsqu’ils ont ouvert le feu.

Je suis également convaincu que la force utilisée par les agents était raisonnable. Les décharges d’ARWEN étaient certainement justifiées. En effet, si elles avaient fonctionné, l’une ou l’autre des balles aurait temporairement mis le plaignant hors d’état de nuire, voire l’aurait dépossédé de son fusil, ce qui aurait donné aux agents suffisamment de temps pour procéder à une arrestation en toute sécurité sans infliger de blessures graves. Il est également évident que le recours aux carabines C8 par les AI n° 1 et n° 3 n’était pas prohibé. Le plaignant avait tiré sur les agents et s’apprêtait à tirer de nouveau lorsqu’il a reçu une rafale de coups de feu. Le plaignant représentait un danger réel et immédiat pour la vie des agents. Ces derniers étaient donc en droit de faire face à cette menace en recourant à leur propre force meurtrière. En effet, lors du dernier échange de coups de feu entre les parties, il semble qu’une balle tirée par le plaignant ait directement touché le casque de protection de l’AI n° 2 ou ait ricoché sur celui-ci. Bien que le nombre de coups de feu tirés par l’AI n° 1 et l’AI n° 3 avec leur carabine C8 soit sujet à un examen légitime, je ne suis pas en mesure de conclure raisonnablement qu’ils ont outrepassé les limites de la force autorisée dans les circonstances. Les tirs ont commencé au moment où le plaignant pointait son arme à feu dans leur direction (se préparant manifestement à tirer de nouveau), se sont poursuivis en succession rapide et se sont terminés dans la seconde ou les deux secondes qui ont suivi la chute du plaignant au sol. Compte tenu de la tension du moment, de la rapidité avec laquelle les événements se sont déroulés et du délai inhérent aux temps de réaction, je suis convaincu que le risque raisonnablement appréhendé par les agents a persisté du premier au dernier coup de feu.

Par conséquent, il n’y a aucune raison de porter des accusations criminelles contre les AI dans cette affaire. Le dossier est clos.


Date : 1er mars 2024

Approuvé électroniquement par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les renseignements contenus dans cette section correspondent à ceux dont disposait l’UES au moment de la notification et ne reflètent pas nécessairement la constatation des faits de l’UES à l’issue de son enquête. [Retour au texte]
  • 2) Les éléments suivants contiennent des renseignements personnels délicats et ne sont pas divulgués en vertu du paragraphe 34(2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les éléments importants des enregistrements sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.