Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 23-PFP-271

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la décharge d’une arme à feu par la police sur un homme de 46 ans (plaignant).

L’enquête

Notification de l’UES [1]

À 7 h 7 le 17 juillet 2023, la Police provinciale de l’Ontario a signalé qu’une arme ARWEN avait été déployée contre le plaignant durant une interaction avec la police.

D’après la Police provinciale, le plaignant se trouvait dans la zone de protection de la nature du Lac Pinehurst le 17 juillet 2023. Il avait eu une altercation avec des gardes du parc, et la Police provinciale avait été appelée. À l’arrivée de la police, à 14 h 40, le plaignant a fui dans les buissons, où il a menacé de mettre le feu à son corps. La Police provinciale a alors bouclé un périmètre. D’après ce qu’a signalé la police durant les pourparlers qui ont suivi, le plaignant aurait consommé de la cocaïne et du crack. Autour de 16 h 50, le plaignant est sorti des buissons et s’est précipité sur les agents. Deux armes à impulsions ont alors été déployées, mais les sondes ont raté le plaignant. Deux agents ont ensuite chacun déchargé une arme ARWEN et l’une de ces décharges a atteint le plaignant au bas de la jambe gauche et l’autre, à la région des côtes. Le plaignant a été conduit à l’hôpital du comté de Brant. Il n’était pas blessé, à l’exception d’ecchymoses.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : Le 17 juillet 2023, à 8 h 12

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : Le 17 juillet 2023, à 9 h 40

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1
 

Personne concernée (« plaignant ») :

Homme de 46 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés.

Le plaignant a participé à une entrevue le 7 juillet 2023.


Agent impliqué

AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.


Agents témoins

AT no 1 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été examinées; entrevue jugée non nécessaire.
AT no 2 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été examinées; entrevue jugée non nécessaire.
AT no 3 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été examinées; entrevue jugée non nécessaire.
AT no 4 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été examinées; entrevue jugée non nécessaire.
AT no 5 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été examinées; entrevue jugée non nécessaire.
AT no 6 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été examinées; entrevue jugée non nécessaire.
AT no 7 A participé à une entrevue

L’entrevue avec un agent témoin a eu lieu le 14 août 2023.



Éléments de preuve

Les lieux

Les événements en question sont survenus dans le secteur d’un boisé, du côté sud du chemin en direction est menant à l’entrée principale de la zone de protection de la nature du Lac Pinehurst et partant de Pinehurst Road, à Ayr.

Une inspection médicolégale des lieux a été faite par l’enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES à partir de 10 h 15 le 17 juillet 2023.

La zone de protection de la nature du Lac Pinehurst, au 469 Pinehurst Road, à Ayr, est une zone de protection assortie d’un terrain de camping exploitée par Grand River Conservation Authority sur un terrain de 9 hectares (23 acres) comprenant un lac entouré d’une forêt. Les activités offertes sont le camping, la baignade, le pique-nique, la randonnée pédestre et la pêche. En hiver, on y pratique la raquette et la pêche sur glace.

L’incident s’est déroulé à proximité de l’entrée du parc, du côté sud du chemin menant à l’entrée, juste derrière un panneau donnant la liste des différents frais d’admission au parc. On a retrouvé dispersés par terre deux douilles d’arme ARWEN, deux projectiles d’arme ARWEN, un filin et des sondes d’arme à impulsion et un extincteur. Une piste fraîche traversait les hautes herbes et les buissons, au sud par rapport aux débris du matériel de police, et menait jusqu’à un buisson où se trouvaient un sac à dos ainsi que des effets personnels et des papiers éparpillés appartenant au plaignant. Les papiers avaient été brûlés et il en restait des cendres.

Les lieux ont été photographiés et mesurés.

La première photo prise par l’UES (ci-dessous) montre une vue allant (essentiellement) de l’ouest à l’est, à partir du début de l’entrée grossièrement revêtue menant à la zone de protection, du côté est par rapport à Pinehurst Road.


Figure 1 – Entrée de la zone de protection de la nature du Lac Pinehurst

Figure 1 – Entrée de la zone de protection de la nature du Lac Pinehurst

Sur la photo suivante, on voit le périmètre encerclé par du ruban de police comprenant l’endroit où ont été trouvés les éléments de preuve matériels énoncés plus haut, dans le boisé du côté droit de l’image, là où le plaignant s’était caché. Quand le plaignant est sorti du boisé, il a été touché par des projectiles d’arme ARWEN dans le périmètre délimité par le ruban de police. C’est aussi à cet endroit que l’AI et les autres agents s’étaient positionnés et communiquaient avec le plaignant.


Figure 2 – Endroit où étaient positionnés les agents pour communiquer avec le plaignant

Figure 2 – Endroit où étaient positionnés les agents pour communiquer avec le plaignant

Schéma des lieux

Schéma des lieux

Éléments de preuve matériels

L’enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES a photographié et recueilli les armes ARWEN, les matraques et les cartouches ainsi que les débris d’arme à impulsions.


Figure 3 – Arme ARWEN de l’AI

Figure 3 – Arme ARWEN de l’AI


Figure 4 – Boisé d’où est sorti le plaignant

Figure 4 – Boisé d’où est sorti le plaignant


Figure 5 – Projectile d’arme ARWEN

Figure 5 – Projectile d’arme ARWEN


Figure 6 – Cartouche d’arme ARWEN

Figure 6 – Cartouche d’arme ARWEN

Éléments de preuves médicolégaux


Données de déploiement de l’arme à impulsions de l’AT no 6

L’AT no 6 a appuyé sur la détente de son arme à impulsions à 4 h 49 min 17 s [2] le 17 juillet 2023 et a ainsi déployé la cartouche no 1 pendant 1 seconde. À 4 h 49 min 19 s, il a déployé son arme à impulsions une autre fois pendant 1 seconde.
 

Données de déploiement de l’arme à impulsions de l’AT no 5

L’AT no 5 a déchargé son arme à impulsions à 4 h 49 min 26 s le 17 juillet 2023 pendant 5 secondes. L’AT no 5 a ensuite appuyé sur l’interrupteur ARC, une première fois à 4 h 49 min 37 s, puis à 4 h 49 min 43 s, produisant chaque fois une nouvelle charge électrique de 1 seconde au moyen des mêmes filins rattachés à la cartouche no 1.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [3]


Enregistrements des communications de la police par téléphone

Le 17 juillet 2023, vers 1 h 20 min 43 s, la Police provinciale de l’Ontario a reçu un appel téléphonique d’un membre du personnel de la zone de protection de la nature du Lac Pinehurst, qui voulait signaler qu’un homme [maintenant identifié comme le plaignant] avait conduit sa voiture à des vitesses dangereuses à l’intérieur du parc. Le plaignant avait indiqué au membre du personnel qu’il était à la limite de la schizophrénie et de la paranoïa. On lui avait déjà demandé de quitter les lieux. Celui-ci avait alors répondu que la dernière fois qu’on l’avait attrapé sur la route, il s’était retrouvé dans un institut psychiatrique, et qu’il n’allait pas laisser la même chose se produire ce jour-là. Le plaignant était à proximité du poste d’accueil à pied, il tenait un sac et avait quelques autres objets à la main. Il avait aussi quelque chose de camouflé sous son chandail. La personne au bout du fil a alors perdu le plaignant de vue et a dit qu’elle irait à la rencontre des agents à l’entrée du parc à leur arrivée. Les agents sont arrivés à 1 h 35 min 17 s.

À 3 h 58 min 16 s, durant un appel des services ambulanciers de Hamilton, la Police provinciale a dit avoir discuté avec le plaignant, qui avait peut être un couteau, qui était caché dans un boisé et qui avait menacé de se faire du mal.

Enregistrements des communications de la police par radio

Le premier enregistrement commençait à 1 h 23 min 13 s le 17 juillet 2023, au moment où des agents étaient dépêchés pour aller s’occuper d’un [Traduction] « indésirable » [maintenant identifié comme le plaignant], à la suite d’un appel provenant de la zone de protection de la nature du Lac Pinehurst, près du poste d’accueil. Le plaignant tenait des objets dans ses mains et avait aussi dissimulé quelque chose sous son chandail.

À l’arrivée de la police, un message a été envoyé pour signaler que le véhicule du plaignant avait été retrouvé sans occupant et que son identité avait été déterminée. La vérification du casier dans la base de données a révélé que l’homme avait des antécédents de voies de fait sur la police, d’accusations pour possession d’arme à feu et de menaces. Il a été signalé que des agents étaient partis à la recherche du plaignant dans le secteur, tandis que d’autres attendaient dans leur voiture.

Un agent a ensuite annoncé qu’ils entendaient un homme hurler dans le boisé près de l’entrée du parc, mais qu’ils ne le voyaient pas. Un autre message a ensuite indiqué que les agents avaient parlé avec le plaignant, qui était en colère et leur avait dit qu’il avait un couteau sur la gorge. Dans les enregistrements des communications par radio, on entend le plaignant en arrière-plan.

Les membres de l’équipe d’intervention d’urgence ont indiqué qu’ils arrivaient dans une minute et qu’ils avaient avec eux deux personnes entraînées pour l’utilisation d’une arme ARWEN.

Un autre message a mentionné que l’AT no 2 et l’AI avaient été affectés au côté nord du périmètre. Pour leur part, les AT nos 4 et 3 étaient postés du côté sud par rapport à l’emplacement présumé du plaignant. L’AI a ensuite dit que le plaignant avait menacé de se ruer sur les agents avec un couteau pour être tué par la police et qu’il était en possession d’une machette. Par la suite, un autre message a révélé que les négociateurs de la police se trouvaient à au moins deux heures de distance.

Le message suivant précisait que le plaignant avait menacé de mettre le feu à son corps, puis l’AI a annoncé que des armes à impulsions et des armes ARWEN avaient été déchargées. L’AT no 7 a ensuite dit que le plaignant était sous garde, qu’il y avait eu deux décharges d’arme à impulsions et deux décharges d’arme ARWEN et que l’UES devait être avisée. Par la suite, il y a eu un message indiquant que le plaignant avait été transporté à l’Hôpital général de Brantford.

Le deuxième enregistrement audio commençait par un message disant qu’un indésirable [maintenant identifié comme le plaignant] était entré par effraction dans la zone de protection de la nature du Lac Pinehurst, qu’il était schizophrène et qu’il était sous l’influence de la drogue et de l’alcool, qu’il avait des antécédents de violence envers la police et que son arrestation était justifiée à cause de la violation d’une interdiction de conduire. On craignait de plus qu’il soit en possession d’armes. L’équipe d’intervention d’urgence a été demandée avec un chien policier pour trouver le plaignant et l’arrêter.

Le message suivant disait que les agents avaient encerclé le véhicule inoccupé du plaignant et que des tapis cloutés avaient été placés sous les pneus. D’autres agents inspectaient le terrain de camping.

L’AT no 7 a demandé de faire venir trois membres de l’équipe d’intervention d’urgence, avec au moins une arme ARWEN. L’AT no 2 et son chien policier ont ensuite été dépêchés avant qu’un agent annonce que le plaignant été trouvé 6 mètres à l’intérieur du boisé et qu’il affirmait s’être mis un couteau sur la gorge.

Une consultation avec Command Incident Control (commandement des incidents critiques) a été demandée, et la réponse a été que plusieurs négociateurs avaient été contactés, mais qu’aucun n’était disponible. Deux membres de plus formés pour l’utilisation d’une arme ARWEN ont été dépêchés.

Dans le message suivant, on signalait que le plaignant avait menacé de se suicider en se faisant tuer par la police, puis son arrestation à la suite de deux décharges d’arme à impulsions et de deux autres décharges d’arme ARWEN a été rapportée. La transmission s’est poursuivie et indiquait que le plaignant demeurait combattif et violent et que, à part deux ecchymoses superficielles, il ne semblait pas blessé. Il a été transporté à l’Hôpital général de Brantford.

Enregistrement vidéo à la zone de protection de la nature du Lac Pinehurst

Le 17 juillet 2023, vers 1 h 17 min 55 s, un véhicule [dont on sait maintenant qu’il était conduit par le plaignant] s’est approché du poste d’accueil de la zone de protection de la nature du Lac Pinehurst et s’est arrêté devant. Une minute plus tard, deux gardes de sécurité se sont approchés du plaignant dans son véhicule et ont parlé avec lui.

Autour de 1 h 19 min 8 s, le plaignant est parti dans sa voiture, et les deux gardes de sécurité se sont mis à courir après lui.

Vers 1 h 39 min 18 s, plusieurs voitures de police sont arrivées au poste d’accueil. Le véhicule du plaignant était stationné à proximité. Les voitures de police lui ont bloqué le passage et l’ont inspecté.

Documents obtenus du service de police

L’UES a examiné les éléments et documents suivants que lui a remis, à sa demande, le Service de police de l’Ontario entre le 17 juillet 2023 et le 21 juillet 2023 :
  • les notes de l’AT no 1;
  • les notes de l’AT no 2;
  • les notes de l’AT no 3;
  • les notes de l’AT no 4;
  • les notes de l’AT no 5;
  • les notes de l’AT no 6;
  • les notes de l’AT no 7;
  • les données de déploiement des armes à impulsions;
  • les enregistrements des communications;
  • le rapport du système de répartition assisté par ordinateur;
  • le registre de formation de l’AI concernant la requalification pour le recours à la force;

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a obtenu les éléments et documents suivants d’autres sources entre le 21 juillet 2023 et le 1er août 2023 :
  • les dossiers médicaux du plaignant de l’Hôpital général de Brantford;
  • des enregistrements de caméra vidéo de la zone de protection de la nature du Lac Pinehurst.

Description de l’incident

Le scénario qui suit ressort des éléments de preuve réunis par l’UES, y compris les entrevues avec le plaignant et un agent présent au moment où les événements en question se sont produits. L’AI a refusé de participer à une entrevue de l’UES et de fournir ses notes, comme la loi l’y autorise.

Le 17 juillet 2023, au petit matin, des agents de la Police provinciale de l’Ontario ont été dépêchés à la zone de protection de la nature du Lac Pinehurst. C’est un membre du personnel qui avait appelé la police pour signaler que le plaignant refusait de partir et avait conduit son véhicule dans le parc à très grande vitesse. Il voulait que le plaignant sorte du parc.

Lorsqu’il a entendu la police arriver au parc, le plaignant, qui était alors à pied, est allé se cacher dans un boisé du côté sud du chemin menant à l’entrée. Pendant plus de trois heures, il est demeuré dans le boisé, tandis que des agents entouraient le secteur et tentaient de négocier pour amener le plaignant à se rendre sans résistance. Ce dernier refusait de sortir. Il a signalé aux agents qu’il avait pris de la drogue, qu’il avait un couteau et qu’il voulait se faire abattre par la police.

Une équipe d’intervention d’urgence de la Police provinciale a été envoyée sur place et elle comprenait l’AI, en possession d’une arme ARWEN. Avec d’autres agents, l’AI s’est positionné à proximité du boisé où le plaignant était caché, du côté nord. Les ambulanciers ont reçu la directive de rester à proximité, au cas où on aurait besoin d’eux.

Vers 4 h 40, le plaignant a crié qu’il allait mettre le feu et peu après, il est passé aux actes. Il a répété qu’il avait un couteau, ainsi que d’autres armes, et que la police allait devoir lui tirer dessus. Vers 4 h 50, le plaignant est sorti du boisé en courant en direction des agents se trouvant au nord par rapport à là où il était caché. Il a été atteint au torse par deux projectiles d’arme ARWEN tirés par l’AI, puis il est tombé au sol.

Voyant le plaignant avancer vers eux, les agents lui ont crié de s’arrêter et de s’étendre au sol. Comme ce dernier a continué de s’approcher d’eux, l’AT no 5 ainsi que l’AT no 6 ont déployé leur arme à impulsions environ au même moment que l’AI a tiré pour la première fois. Une fois le plaignant au sol, les agents se sont approchés et l’ont mis sous garde.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le 17 juillet 2023, la Police provinciale de l’Ontario a communiqué avec l’UES pour signaler qu’un de ses agents avait tiré sur un homme, soit le plaignant, avec une arme ARWEN. Dans l’enquête de l’UES qui a suivi sur l’incident, l’agent en question, soit l’AI, a été désigné comme l’agent impliqué. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation des éléments de preuve, il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que l’AI a commis une infraction criminelle en relation avec la décharge de son arme ARWEN.

En vertu du paragraphe 25(1) du Code criminel, des agents ne peuvent être reconnus coupables d’avoir fait usage de la force dans l’exercice de leurs fonctions, à condition que cette force soit raisonnablement nécessaire pour accomplir quelque chose que la loi les oblige ou les autorise à faire.

L’AI ainsi que les autres agents ayant participé à l’arrestation du plaignant étaient fondés à être sur les lieux et ils étaient dans l’exercice de leurs fonctions pendant le déroulement des événements qui ont mené à l’utilisation de l’arme ARWEN. Le plaignant était entré sans autorisation et il avait menacé de se faire du mal et d’en faire à des agents avec un couteau. Son arrestation était clairement justifiée.

J’estime également que la force employée par l’AI pour contribuer à l’arrestation du plaignant, notamment en tirant deux projectiles d’arme ARWEN, était légalement justifiée. Le plaignant avait dit à plusieurs reprises qu’il était en possession d’un couteau, soit une arme ayant le potentiel d’infliger des blessures graves et même de tuer. Les agents avaient le droit de prendre ses paroles au pied de la lettre. Lorsque, après des heures de pourparlers infructueux et juste après que le plaignant a mis le feu, il est sorti du boisé en se précipitant vers les agents, ils avaient toutes les raisons de croire qu’il représentait une menace imminente pour leur sécurité. L’AI aurait pu décider de s’éloigner ou de fuir, mais cela aurait pu le rendre, et rendre les autres agents à ses côtés, plus vulnérables à une attaque au couteau. Il aurait aussi pu tenter de lutter avec le plaignant, mais il se serait alors retrouvé à la portée du plaignant en possession d’une arme mortelle. Au vu du dossier, il semble que l’agent ait agi de façon raisonnable lorsqu’il a décidé d’agir à partir d’une certaine distance pour dissuader le plaignant d’avancer davantage en employant une arme comportant un faible risque de mortalité. Si elle était un succès, son intervention allait mettre le plaignant temporairement hors d’état de résister dans une mesure suffisante pour permettre de procéder à son arrestation en toute sécurité et sans que personne risque d’être blessé grièvement, ce qui était une issue souhaitable dans les circonstances, et c’est précisément ce qui s’est passé.

En définitive, comme il n’existe pas de motifs raisonnables de croire que l’AI n’a pas respecté les limites du droit criminel quand il a tiré à deux reprises avec son arme ARWEN sur le plaignant, il n’y a pas lieu de porter des accusations dans cette affaire, et le dossier est clos


Date : 14 novembre 2023


Signature électronique

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les renseignements contenus dans cette section reflètent les informations reçues par l’UES au moment de la notification et ne reflètent pas nécessairement les conclusions de fait de l’UES à la suite de son enquête. [Retour au texte]
  • 2) Les heures indiquées sont basées sur l’heure à l’horloge interne des armes à impulsions et ne sont pas forcément exactes ni les mêmes que celles des autres armes. [Retour au texte]
  • 3) Les enregistrements contiennent des renseignements personnels confidentiels qui ne peuvent être divulgués, conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.