Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 22-OFP-230

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la décharge d’une arme à feu par la police sur un homme de 44 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 8 septembre 2022, à 1 h 38 du matin, le Service de police de Hamilton (SPH) a contacté l’UES et lui a communiqué les renseignements suivants.

Cette nuit-là, peu après minuit, l’agent témoin (AT) no 4 a repéré le plaignant dans le secteur des rues Main et Victoria, à Hamilton. L’AT no 4 a essayé de parler au plaignant, qui était recherché en vertu de mandats non exécutés pour des infractions liées à des armes à feu. Le plaignant s’est enfui à pied et l’AT no 4 s’est lancé à sa poursuite en prévenant le répartiteur de la police de ce qu’il faisait et en lui indiquant la direction qu’il prenait. Pendant la poursuite, l’AT no 4 a vu le plaignant tenir une arme à feu. L’AT no 4 et d’autres agents ont encerclé le plaignant dans un stationnement de l’avenue East Nord, entre les rues King William et King. Ils ont essayé en vain de communiquer avec le plaignant. Plusieurs agents ont déployé leurs armes à impulsions sur le plaignant et l’AI a fait feu avec son pistolet de service. La balle a manqué le plaignant et a touché une maison.

Le plaignant n’a pas été blessé, à part avoir été frappé par des sondes d’armes à impulsions que des ambulanciers paramédicaux lui ont retirées. Le plaignant a été conduit en ambulance à l’Hôpital St. Joseph. Il a été soigné, puis libéré de l’hôpital et replacé sous la garde de la police.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 8 septembre 2022 à 1 h 40

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 8 septembre 2022 à 2 h 24

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 6

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 44 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

Le plaignant a participé à une entrevue le 8 septembre 2022.

Témoins civils (TC)

TC A participé à une entrevue

Le témoin civil a participé à une entrevue le 15 septembre 2022.

Agent impliqué (AI)

AI A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

L’agent impliqué a participé à une entrevue le 3 janvier 2023.

Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue
AT no 3 A participé à une entrevue
AT no 4 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées.
AT no 5 A participé à une entrevue
AT no 6 A participé à une entrevue
AT no 7 A participé à une entrevue
AT no 8 A participé à une entrevue
AT no 9 A participé à une entrevue
AT no 10 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées.

Les agents témoins ont participé à une entrevue entre le 13 et le 27 septembre 2022.

Éléments de preuve

Les lieux

L’incident s’est déroulé dans le stationnement municipal à l’ouest de l’avenue East Nord, entre la rue King Est et la rue King William.

L’avenue East Nord a une orientation générale nord-sud. La rue King Est est au sud du lieu de l’incident et la rue King William, au nord. Il y a des résidences, y compris des immeubles à logements multiples et à plusieurs niveaux, des deux côtés de la chaussée vers le sud, et des maisons individuelles vers le nord.

Des lampadaires éclairent la chaussée sur le côté ouest. Une ruelle mène vers l’ouest depuis l’avenue East Nord et est délimitée par un ensemble de logements en rangée à plusieurs étages au sud et par une clôture en bois qui borde un stationnement municipal au nord – le stationnement municipal 72. Ce stationnement est délimité par des clôtures en bois et éclairé par des lampadaires en surplomb sur les côtés sud et nord. On y accède depuis l’avenue East Nord et une ruelle.

Schéma des lieux

Éléments de preuve matériels

Les enquêteurs ont trouvé les objets suivants dans le coin nord-est du stationnement :

Pièce 1 Une douille de calibre 40.
Pièce 2 Composants de cartouche d’arme à impulsions.
Pièce 3 Composants de cartouche d’arme à impulsions.
Pièce 4 Trois pièces de monnaie : 2 de 25 cents et 1 de 10 cents.
Pièce 5 Une sonde d’arme à impulsions extraite du côté sud de la clôture nord, à 65 centimètres de la chaussée.
Pièce 6 Trace de balle sur le côté sud de la clôture nord, à 131 centimètres du sol. La trajectoire suivait un angle de 97 degrés. La balle a traversé deux planches de clôture et est ressortie du côté nord de la clôture. La balle a ensuite traversé la pelouse de l’immeuble no 1 sur l’avenue East Nord et s’est logée dans le mur sud de l’immeuble no 2 de cette avenue. La balle a frappé le mur sud à 127 ½ centimètres du sol et à 109 centimètres à l’ouest du coin sud-est de l’immeuble. Un petit trou de trois centimètres sur trois centimètres a été découpé dans le revêtement extérieur du mur pour faciliter le retrait de la balle.


Figure 1 – Trou de balle dans la clôture

Le pistolet du plaignant

Il s’agissait d’un pistolet automatique Glock modèle 42, calibre 380. Le chargeur du pistolet, d’une capacité de six balles, contenait cinq balles. Il n’y avait pas de balle dans la culasse.

Le pistolet a été photographié et conservé par l’UES.


Figure 2 - Le pistolet du plaignant

Le pistolet de l’AI

À 9 h 11, les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES se sont rendus à un poste de police du SPH où on leur a remis le pistolet de service de l’AI – un pistolet Glock, modèle 22 Gen.4, de calibre 40. Une balle de calibre 40 était dans la culasse. Le chargeur du pistolet, d’une capacité de 15 balles, contenait 13 balles de calibre 40.

Les enquêteurs de l’UES ont également examiné et photographié la ceinture de service de l’AI. La ceinture contenait : une arme à impulsions dans son étui, un bâton télescopique, un vaporisateur de gaz poivré, un étui à pistolet et une double pochette de chargeur contenant deux chargeurs Glock d’une capacité de 15 balles et contenant chacun 14 balles.


Figure 3 - Le pistolet de l’AI

Armes à impulsions de la police

Arme à impulsions de l’AT no 2
La première cartouche a été déployée le 8 septembre 2022 à 0 h 06 min 48 s, et la décharge a duré huit secondes.

Arme à impulsions de l’AT no 1
La première cartouche a été déployée le 8 septembre 2022 à 0 h 05 min 47 s, et la décharge a duré six secondes.

Arme à impulsions de l’AT no 10
La première cartouche a été déployée le 8 septembre 2022 à 0 h 05 min 34 s, et la décharge a duré quatre secondes.

La deuxième cartouche a été déployée, à 0 h 05 min 45 s, et la décharge a duré cinq secondes.


Figure 4 – Arme à impulsions


Figure 5 – Cartouche d’arme à impulsions

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [fn]1[/fn]

Enregistrements des communications

L’enregistrement, dont un résumé suit, date du 8 septembre 2022.

Au début de l’enregistrement, l’AT no 4 dit qu’il poursuit un homme à pied – le plaignant – qui est recherché pour une fusillade.
L’AT no 4 court vers le nord sur l’avenue East; le plaignant a sa main dans sa ceinture.

À 0 min 49 s du début de l’enregistrement, l’AT no 4 dit que le plaignant a une arme à feu qu’il met dans sa bouche.

Le répartiteur signale sur le réseau radio de la police que l’homme met une arme à feu dans sa bouche.

À 1 min 26 s du début de l’enregistrement, l’AT no 4 dit au répartiteur qu’il poursuit le plaignant vers l’ouest dans une ruelle.

À 4 min 16 s du début de l’enregistrement, un agent demande sur le réseau radio de la police si un chien policier est disponible; le répartiteur répond par la négative.

À 5 min 33 s du début de l’enregistrement, l’AT no 4 dit que le plaignant est sous garde. Il demande qu’on dépêche des ambulanciers paramédicaux pour le plaignant qui a été « Tasé ».

L’AT no 4 précise qu’il se trouve dans le stationnement municipal numéro 72.

Enregistrements vidéo – Caméras de sécurité

Le 7 septembre 2022, à 22 h 58 min 56 s, la vidéo commence par une vue d’une ruelle.

À 22 h 59 min 36 s, un homme – le plaignant – entre dans le champ de la caméra. Le plaignant porte des chaussures foncées, un chandail à capuchon et un short. De la main droite, il tient un objet dans sa bouche. Le plaignant disparaît du champ de vision de la caméra.

À 22 h 59 min 42 s, un agent entre dans le champ de la caméra; il brandit son pistolet devant lui dans la main gauche.

À 22 h 59 min 43 s, un autre agent entre dans le champ de la caméra. Les deux agents sortent ensuite du champ de vision de la caméra.

Le reste de la vidéo n’a pas de valeur probante pour l’enquête.

**********

Le 7 septembre 2022, à 22 h 30 min, la vidéo commence par une vue d’une ruelle.

À 22 h 59 min 37 s, le plaignant entre dans le champ de la caméra, marche vers l’ouest dans une ruelle et sort du cadre de la vidéo dans le coin inférieur gauche.

À 22 h 59 min 43 s, deux agents, les bras tendus devant eux, marchent vers l’ouest dans une ruelle et disparaissent du champ de la caméra.

À 23 h 00 min 5 s, le plaignant entre dans le stationnement municipal, suivi des agents. Il marche vers l’est dans le stationnement et les agents forment un triangle devant lui. Le plaignant traverse le stationnement vers l’ouest, suivi des agents.
À 23 h 00 min 26 s, un autre agent entre dans le champ de vision de la caméra; il court dans le stationnement pour rejoindre les autres agents. Les agents et le plaignant disparaissent du champ de vision de la caméra.

À 23 h 00 min 49 s, d’autres agents traversent le stationnement en courant.

À 23 h 01 min 13 s, le plaignant marche vers l’est à l’extrémité nord du stationnement, suivi des agents, les bras tendus devant eux.

À 23 h 01 min 50 s, les agents sont devant le plaignant, les bras tendus en avant.

À 23 h 03 min 14 s, les agents encerclent le plaignant. Du fait de la distance qui les sépare de la caméra, on ne voit pas clairement ce qui se passe.

À 23 h 19 min 17 s, des ambulanciers paramédicaux arrivent et s’occupent du plaignant.

À 23 h 23 min 44 s, le plaignant est placé sur une civière et transporté vers une ambulance.

**********

Le 7 septembre 2022, à 22 h 54 min 59 s, la vidéo commence par une vue aérienne du stationnement municipal 72, axée sur la clôture nord. La majorité du terrain est masquée par un toit.

À 23 h 00, le plaignant entre dans le champ de vision de la caméra et traverse le stationnement vers l’est. Un agent marche dans la même direction.

Le plaignant se dirige ensuite vers l’ouest dans le stationnement et s’arrête devant un véhicule. Il tient un objet contre sa tête. Deux agents sont devant le plaignant, les bras tendus en avant.

Le plaignant marche vers l’est et grimpe sur une glissière de sécurité. Trois agents sont devant lui et deux autres agents s’approchent et s’arrêtent derrière un véhicule.

À 23 h 01 min 41 s, le plaignant descend de la glissière. Il fait les cent pas. Un agent est devant lui.

A 23 h 02 min 7 s, deux agents rejoignent leurs deux collègues derrière le véhicule.

À 23 h 03 min 7 s, quatre agents avancent vers le plaignant, les bras tendus devant eux.

À 23 h 03 min 13 s, dix agents encerclent le plaignant. Du fait de la distance qui les sépare de la caméra, on ne voit pas clairement ce qui se passe.

À 23 h 23 min 19 s, les ambulanciers paramédicaux arrivent.

À 23 h 23 min 42 s, le plaignant est transporté vers une ambulance qui attend à proximité.
Le reste de la vidéo n’a pas de valeur probante.

Vidéo – Canadian Tire

Le 8 septembre 2022, à 0 h 00 dans l’enregistrement, la vidéo commence par une vue du poste d’essence du Canadian Tire.

À 0 h 0 min 2 s, un VUS portant les inscriptions du service de police roule le long du bord du trottoir et s’arrête.

À 0h 0 min 4 s, le VUS active ses gyrophares. Un agent de police [maintenant connu pour être l’AT no 4] sort du véhicule de police. Un homme [maintenant connu comme étant le plaignant] traverse le stationnement en courant suivi de l’AT no 4. Le plaignant contourne le kiosque du poste d’essence et disparaît du champ de vision de la caméra, toujours suivi de l’AT no 4.

Le reste de la vidéo n’a pas de valeur probante.

Éléments obtenus auprès du service de police

Sur demande, le SPH a remis à l’UES les éléments et documents suivants entre le 12 septembre et le 11 octobre 2022 :
• Rapport général;
• Enregistrements des communications;
• Courriel – agents concernés;
• Copie du mandat pour « Motifs raisonnables et probables »;
• Vidéo du Canadian Tire;
• Vidéos de caméras de sécurité
• Politique – usage la force.
• Politique – incidents avec coups de feu;
• Politique – arrestation;
• Chronologie de l’incident;
• Notes de l’AT no 7;
• Notes de l’AT no 5;
• Notes de l’AT no 6;
• Notes de l’AT no 2;
• Notes de l’AT no 3;
• Notes de l’AT no 8;
• Notes de l’AT no 9;
• Notes de l’AT no 4;
• Notes de l’AT no 1;
• Notes de l’AT no 10;
• Rapport supplémentaire.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a examiné les éléments suivants obtenus auprès d’autres sources :
• Dossier médical du plaignant (Hôpital St. Joseph).

Description de l’incident

Le scénario suivant découle des éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment des entrevues avec le plaignant, avec l’AI et avec d’autres agents qui étaient présents au moment des événements en question.
Dans la nuit du 7 au 8 septembre 2022, vers minuit, le plaignant, muni d’une arme à feu, était poursuivi à pied par un agent du SPH. Cet agent – l’AT no 4 – avait repéré le plaignant à proximité de la station-service située à l’intersection de la rue Main Est et de l’avenue Victoria Sud, et l’avait reconnu comme étant recherché pour une série d’infractions liées à des armes à feu. Ignorant l’ordre de l’agent de s’arrêter, le plaignant s’est enfui vers le nord sur l’avenue Victoria Sud, vers l’est sur la rue Main Est, puis vers le nord sur l’avenue East Sud. Le plaignant a récupéré un pistolet dans sa ceinture – un Glock – sur l’avenue East Sud et l’a mis dans sa bouche en disant qu’il allait tirer.

L’AT no 4 a annoncé par radio la poursuite à pied, l’identité du suspect et le fait que celui-ci avait une arme à feu avec laquelle il menaçait de se tuer. L’AT no 4 a poursuivi le plaignant jusqu’au stationnement municipal au nord-est de l’intersection de la rue King Est et de l’avenue East Nord. Pendant plusieurs minutes, la plaignant a confronté l’agent sur le stationnement, alors que d’autres agents arrivaient sur les lieux en réponse au message radio de l’AT no 4.

Le plaignant a fait les cent pas dans le stationnement en disant aux agents qu’il se tirerait dessus et refusait de retourner en prison. Il tenait le pistolet dans la main droite, le déplaçant par moments de sa bouche au côté de sa tête, et refusait toutes les supplications de lâcher son arme.
Une dizaine d’agents, dont l’AI, s’étaient rassemblés autour du plaignant pour l’empêcher de s’enfuir. Ils s’étaient regroupés au sud du plaignant et étaient tournés vers le nord, face à lui. Le plaignant marchait d’est en ouest, d’avant en arrière, près de la clôture en bois qui bordait l’extrémité nord du stationnement. L’AI et d’autres agents avaient dégainé leurs armes à feu, et d’autres agents avaient dégainé leurs armes à impulsions. L’AT no 1 a tenté de désamorcer la situation, mais n’est pas parvenu à calmer le plaignant ni à le convaincre de se rendre pacifiquement.
 
Environ deux minutes après le début des négociations, un agent a déchargé son arme à impulsions sur le plaignant. Cette décharge a été suivie peu après d’un coup de feu tiré par l’AI. L’arme à impulsions n’a pas neutralisé le plaignant et la balle a raté sa cible. Une volée supplémentaire de décharges d’armes à impulsions a atteint son objectif et immobilisé le plaignant. Plusieurs agents se sont alors approchés de lui, lui ont confisqué le pistolet qu’il tenait dans la main droite et l’ont fait allonger par terre pour le menotter. Le plaignant n’a subi aucune blessure grave.

Dispositions législatives pertinentes

Article 34 du Code criminel -- Défense -- emploi ou menace d’emploi de la force

34 (1) N’est pas coupable d’une infraction la personne qui, à la fois :
a) croit, pour des motifs raisonnables, que la force est employée contre elle ou une autre personne ou qu’on menace de l’employer contre elle ou une autre personne
b) commet l’acte constituant l’infraction dans le but de se défendre ou de se protéger -- ou de défendre ou de protéger une autre personne -- contre l’emploi ou la menace d’emploi de la force
c) agit de façon raisonnable dans les circonstances
(2) Pour décider si la personne a agi de façon raisonnable dans les circonstances, le tribunal tient compte des faits pertinents dans la situation personnelle de la personne et celle des autres parties, de même que des faits pertinents de l’acte, ce qui comprend notamment les facteurs suivants :
a) la nature de la force ou de la menace
b) la mesure dans laquelle l’emploi de la force était imminent et l’existence d’autres moyens pour parer à son emploi éventuel
c) le rôle joué par la personne lors de l’incident
d) la question de savoir si les parties en cause ont utilisé ou menacé d’utiliser une arme
e) la taille, l’âge, le sexe et les capacités physiques des parties en cause
f) la nature, la durée et l’historique des rapports entre les parties en cause, notamment tout emploi ou toute menace d’emploi de la force avant l’incident, ainsi que la nature de cette force ou de cette menace;
1. f.1) l’historique des interactions ou communications entre les parties en cause
g) la nature et la proportionnalité de la réaction de la personne à l’emploi ou à la menace d’emploi de la force
h) la question de savoir si la personne a agi en réaction à un emploi ou à une menace d’emploi de la force qu’elle savait légitime
(3) Le paragraphe (1) ne s’applique pas si une personne emploie ou menace d’employer la force en vue d’accomplir un acte qu’elle a l’obligation ou l’autorisation légale d’accomplir pour l’exécution ou le contrôle d’application de la loi, sauf si l’auteur de l’acte constituant l’infraction croit, pour des motifs raisonnables, qu’elle n’agit pas de façon légitime.

Analyse et décision du directeur

Le 8 septembre 2022, le SPH a contacté l’UES pour signaler qu’environ une heure plus tôt, un de ses agents avait fait feu sur un homme – le plaignant – au cours de son arrestation. L’agent qui a fait feu a été désigné comme étant l’agent impliqué (AI) aux fins de l’enquête de l’UES. L’enquête est maintenant terminée. Après avoir évalué les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI ait commis une infraction criminelle en lien avec ce tir.

L’article 34 du Code criminel stipule qu’une conduite qui constituerait autrement une infraction est légalement justifiée si elle visait à dissuader une agression raisonnablement appréhendée ou réelle, ou une menace d’agression, et si elle était elle-même raisonnable. Le caractère raisonnable de la force doit être évalué en tenant compte de toutes les circonstances pertinentes, notamment la nature de la force ou de la menace, la mesure dans laquelle l’usage de la force était imminent et d’autres moyens étaient disponibles pour faire face à l’usage possible de la force, le fait qu’une partie à l’incident utilisait ou menaçait d’utiliser une arme, ainsi que la nature et la proportionnalité de la réaction à l’usage ou à la menace d’usage de la force. À mon avis, la force utilisée par l’AI relevait de la justification prévue par la loi.

L’AI était en droit d’être à cet endroit et exerçait ses fonctions lorsqu’il est intervenu et a pris part à l’opération policière visant à mettre le plaignant sous garde. De toute évidence, l’arrestation du plaignant était justifiée. Il était recherché pour un certain nombre d’infractions liées à des armes à feu et était en possession d’une arme à feu qui constituait une menace pour le public.
 
Au cours de son entrevue avec l’UES, l’AI a déclaré qu’il avait fait feu pour se protéger d’une attaque imminente du plaignant. J’accepte que les appréhensions de l’agent à ce moment-là étaient honnêtes et raisonnables. Il ne fait guère de doute que le plaignant constituait une menace réelle et imminente pour la sécurité des agents qui l’entouraient. Même s’il avait dit qu’il voulait seulement se tirer dessus et qu’il ne semble pas avoir explicitement pointé l’arme sur un agent, la situation était très dangereuse et très dynamique, notamment concernant le mouvement de l’arme du plaignant. Dans les circonstances, on peut comprendre qu’un agent pourrait croire – comme c’était le cas de l’AI – que l’arme du plaignant était pointée sur lui, même si ce n’était pas nécessairement l’intention du plaignant.

J’accepte également que le coup de feu tiré par l’agent constituait une force raisonnable. Si, comme j’en suis convaincu, l’AI croyait honnêtement et raisonnablement que le plaignant était sur le point de tirer dans sa direction, il est difficile de voir ce que l’AI aurait pu faire d’autre pour éviter des blessures graves ou la mort.

L’agent aurait pu utiliser son arme à impulsions, comme d’autres agents l’ont fait, mais cette arme n’avait pas la puissance immédiate d’une arme à feu, comme le montre cette affaire puisque le déploiement initial d’une arme à impulsions ne semble pas avoir neutralisé le plaignant. Il s’est avéré que les décharges ultérieures d’armes à impulsions ont bel et bien neutralisé le plaignant alors que le coup de feu de l’AI n’a pas atteint sa cible et n’a donc pas eu d’effet. Quoi qu’il en soit, ce résultat était plus une question de hasard qu’un reflet du caractère déraisonnable de la conduite de l’AI.
 
Au bout du compte, comme il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI se soit comporté autrement que dans les limites prévues par le droit criminel quand il a fait feu en direction du plaignant, il n’y a aucune raison de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.



Date : 6 janvier 2023

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.