Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 21-PVD-064

Attention :

Cette page affiche un contenu graphique pouvant choquer, offenser et déranger.

Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  •  des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  •  les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la mort d’un homme de 62 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 27 février 2021, à 22 h 55, la Police provinciale de l’Ontario (O.P.P.) a communiqué avec l’Unité des enquêtes spéciales (UES) pour signaler ce qui suit :

À 21 h 40, l’agent impliqué (AI) a donné suite à un appel de service. Il conduisait une Ford Taurus au marquage discret, sans gyrophare ni sirène activés. L’AI roulait en direction est sur le chemin Roseneath Landing et, en montant une côte, il a aperçu une voiture venant en sens inverse dans sa voie. L’AI s’est arrêté et a laissé passer la voiture. Il a ensuite fait demi-tour et, sans que ses feux ou sa sirène ne soient activés, il s’est dirigé vers un véhicule renversé. Le conducteur du véhicule, le plaignant, était sans vie et sa mort a été déclarée à 22 h 30. L’homme semblait avoir consommé des boissons alcoolisées.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 28 février 2021 à 0 h 2

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 28 février 2021 à 0 h 35

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés :         2
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés :2
Nombre de spécialistes de la reconstitution des collisions assignés :  1

Personnes concernées (le « plaignants ») :

Homme de 62 ans qui est mort


Témoins civils

TC no 1 N’a pas participé à une entrevue; plus proche parent
TC no 2 A participé à une entrevue
TC no 3 A participé à une entrevue

Les TC no 2 et no 3 ont participé à une entrevue entre le 28 février et le 3 mars 2021, respectivement.

Agent impliqué

AI A refusé de participer à une entrevue et de fournir ses notes, comme il en a le droit


Éléments de preuve

Les lieux

Le plaignant a succombé à ses blessures dans le secteur des chemins 18 Northumberland et Roseneath Landing; plus précisément, devant le 8340, chemin de comté 18, du côté nord du chemin 18 Northumberland, juste à l’est du chemin Roseneath Landing. Selon la description fournie, il s’agit d’un secteur rural avec des routes asphaltées. Le véhicule, un Ford Ranger argenté, était lourdement endommagé et entouré de débris ainsi que de nombreuses canettes de boissons alcoolisées. 

Photo 1 - Le Ford Ranger argenté du plaignant

Éléments de preuve matériels

L’examen du véhicule de l’AI n’a révélé aucun dommage de collision lié à l’incident en question.

Éléments de preuve médicolégaux

Les données du système de positionnement global (GPS) de l’AI

Les données GPS associées au véhicule de l’AI ont permis d’établir ce qui suit :
• À environ 3,5 km à l’ouest du lieu de la collision, l’AI circulait en direction ouest sur le chemin de comté 18 Northumberland, à l’ouest du chemin Curtis Point, à une vitesse de 108 km/h.
• À environ 2,4 km à l’ouest du lieu de la collision, l’AI circulait en direction ouest sur le chemin de comté 18 Northumberland, à l’ouest du chemin Shearer Point, à une vitesse de 130 km/h.
• À environ 1,3 km à l’ouest du lieu de la collision, l’AI roulait en direction ouest sur le chemin de comté 18 Northumberland à une vitesse de 111 km/h.
• À environ 300 m à l’ouest du lieu de la collision, l’AI roulait en direction ouest sur le chemin de comté 18 Northumberland à une vitesse de 137 km/h.
• À environ 230 m à l’est du lieu de la collision, l’AI roulait en direction ouest sur le chemin de comté 18 Northumberland à une vitesse de 107 km/h.
• À environ 350 m à l’est du lieu de la collision, la vitesse de l’AI était de 0 km/h.


Soumissions et résultats du Centre des sciences judiciaires (CSJ)

À la suite de l’examen post-mortem du 3 mars 2021, le pathologiste a soumis un rapport de toxicologie. Les résultats ont conclu que le taux d’alcool éthylique sérique du plaignant était de 191 mg/100 ml; ce taux est bien supérieur à la limite légale et aurait influé sur la conduite d’un véhicule à moteur par l’homme. Le taux d’éthanol dans l’urine du plaignant était plus élevé, soit 252 mg/100 mL.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photos

L’UES a obtenu des enregistrements audio pertinents, comme indiqué ci-dessous :

Centre de communications provincial de la Police provinciale de l'Ontario - Résumé radio

L’AI a communiqué par radio à 21 h 39 min 3 s, demandant qu’une ambulance soit dépêchée à l’angle des chemins 18 Northumberland et Roseneath Landing.

L’AI se rendait sur les lieux d’une collision survenue à Campbellford pour donner suite à un appel de service concernant un délit de fuite, et se dirigeait vers le nord sur le chemin 18 Northumberland. Alors qu’il s’approchait du sommet d’une colline, juste au nord du chemin Roseneath Landing, une camionnette roulant en sens inverse, maintenant connue comme celle conduite par le plaignant, s’est engagée dans la voie de l’AI à grande vitesse. L’AI a viré à droite au moment où le plaignant passait à toute vitesse. Ensuite, l’homme a perdu le contrôle de son véhicule. L’AI a immobilisé son véhicule de police et a effectué un virage en trois points avant d’activer ses gyrophares. Malheureusement, la camionnette du plaignant avait déjà quitté la chaussée et percuté un gros arbre.

L’AI s’est immédiatement rendu sur le lieu de la collision et a confirmé que le plaignant ne présentait aucun signe de vie. Il en a ensuite informé le répartiteur.

La chaussée était mouillée et glissante au moment de la collision.

Éléments obtenus auprès du Service de police

L’UES a obtenu les dossiers suivants du détachement de Cobourg (Northumberland) de la Police provinciale de l’Ontario entre le 12 mars et le 15 mars 2021 :
• Données GPS;
• Rapport de répartition assisté par ordinateur de la Police provinciale de l’Ontario;
• Rapport d’incident général de la Police provinciale de l’Ontario - mort subite;
• Rapport sur les véhicules à moteur du ministère des Transports de la Police provinciale de l’Ontario;
• Centre de communications provincial de la Police provinciale de l’Ontario - enregistrement audio;
• Déposition soumise le 15 mars 2021.

Description de l’incident

Les éléments matériels recueillis par l’UES, qui comprennent les données GPS associées au véhicule de police de l’AI, montrent clairement les faits en question, qui sont brièvement résumés ci-dessous.

Le 27 février 2021, vers 21 h 39, l’AI roulait à vive allure vers l’est sur le chemin de comté 18 Northumberland, pour répondre à un appel de service concernant un délit de fuite. Juste après avoir dépassé le chemin Roseneath Landing, alors qu’il montait une côte, l’AI a vu une camionnette roulant à grande vitesse vers l’ouest, soit en sens inverse, se diriger dans sa direction dans la voie est. L’agent a viré à droite pour éviter une collision et a regardé la camionnette le dépasser.

Le plaignant était le seul occupant du véhicule. Après avoir dépassé le véhicule de l’AI, le plaignant, au volant de la camionnette, a traversé la chaussée et a heurté un arbre du côté nord de la route dans le secteur du 8340, chemin de comté 18 Northumberland.

L’AI a effectué un virage en trois points et a parcouru une courte distance vers l’ouest jusqu’au lieu de la collision. Le plaignant ne présentait aucun signe de vie à ce moment-là. L’agent a communiqué par radio ce qui s’était passé et des ambulanciers ont été dépêchés sur les lieux de la collision.

La mort du plaignant a été constatée sur place vers 22 h 30.

Cause de la mort

Le pathologiste qui a pratiqué l’autopsie était d’avis, à titre préliminaire, que le décès du plaignant était attribuable à de multiples impacts de force violente. Le taux d’alcoolémie mesuré à l’autopsie était de 191 mg/100 ml.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 128(13), Code de la route – Vitesse d’un véhicule de pompiers ou de police

128(13) Les limites de vitesse prescrites aux termes du présent article, d’un règlement ou d’un règlement municipal adopté en application du présent article ne s’appliquent pas aux véhicules suivants :

(b) au véhicule de police utilisé par un agent de police dans l’exercice légitime de ses fonctions.


Analyse et décision du directeur

Le 27 février 2021, le plaignant a succombé aux blessures qu’il avait subi lors d’une collision automobile à Roseneath, en Ontario. Comme le véhicule dans lequel il se trouvait avait failli heurter une voiture de la Police provinciale de l’Ontario juste avant la collision, l’UES a été informée de l’incident et a ouvert une enquête. Le conducteur du véhicule de la Police provinciale de l’Ontario, l’AI, a été désigné comme l’agent impliqué aux fins de l’enquête de l’UES. D’après mon évaluation des éléments de preuve, il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que l’AI a commis une infraction criminelle en rapport avec la mort du plaignant.

Compte tenu du dossier susmentionné, les preuves ne suggèrent aucunement un quelconque manque de diligence de la part de l’AI ayant pu causer la collision qui a entraîné la mort du plaignant. Les éléments de preuve indiquent que l’agent agissait dans l’exercice de ses fonctions légales, en se déplaçant pour donner suite à un appel de service, lorsqu’il a soudainement aperçu la camionnette du plaignant qui se dirigeait droit vers lui. L’AI a pu éviter la collision en virant à droite. Par la suite, il s’est rapidement rendu jusqu’au véhicule du plaignant pour lui fournir de l’aide. Bien que l’AI ait roulé à plus de 100 km/h dans les minutes qui ont précédé la collision, atteignant même 137 km/h à environ 300 mètres à l’ouest du lieu de l’accident, rien n’indique que la vitesse du véhicule de l’agent ait mis en danger la circulation autour de lui ou qu’elle ait contribué de quelque façon que ce soit à la perte de contrôle du véhicule du plaignant. En ce qui concerne la vitesse de l’AI, il est également important de noter que l’agent donnait suite à un appel de service et que, par conséquent, il était exempté des restrictions relatives à la vitesse en vertu de l’alinéa 128 (13) b) du Code de la route, et que le chemin de comté 18 Northumberland était un chemin de campagne situé dans un milieu principalement rural avec relativement peu de résidences situées le long du trajet de l’agent. Dans les circonstances, je suis convaincu que la collision ayant coûté la vie du plaignant est attribuable à ses facultés affaiblies par l’alcool, et que l’AI n’est en aucun cas responsable de la collision.

Par conséquent, il n’y a aucune raison de porter des accusations criminelles contre l’AI dans cette affaire et le dossier est clos.


Date : Le 24 juin 2021

Approuvé électroniquement par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.