Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 20-OCI-334

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  •  des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  •  les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur les blessures graves subies par un homme de 39 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 3 décembre 2020, à 10 h 37, le Service de police de Windsor (SPW) a informé l’UES d’une blessure subie par le plaignant et donné le rapport qui suit. Le 2 décembre 2020, à 13 h 53, des agents du SPW poursuivaient un véhicule, dans le secteur de Cabana Road et de l’avenue Longfellow, puis ont mis fin à la poursuite. À 14 h, à environ deux kilomètres de l’endroit où la poursuite a pris fin, le SPW a été appelé pour un accident de la route impliquant une seule voiture dans le secteur des rues Northwood et Totten. [1] Les agents ont trouvé le plaignant évanoui au volant du véhicule et l’ont arrêté pour conduite avec facultés affaiblies. Pendant qu’il transportait le plaignant au poste dans une fourgonnette pour prisonniers, l’agent au volant de la fourgonnette s’est inquiété parce que le plaignant semblait avoir de la difficulté à respirer. Il a arrêté le véhicule et, pendant qu’il vérifiait comment le plaignant se portait, ce dernier a tenté de s’échapper. L’agent a dû menotter le plaignant avant de le faire retourner dans la fourgonnette. Le plaignant a été conduit à l’hôpital où on lui a diagnostiqué une fracture de la vertèbre L2 et une hernie discale. Le médecin a indiqué qu’il était possible que la blessure résulte de l’accident.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 3 décembre 2020 à 11 h 18

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 4 décembre 2020 à 13 h

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 2

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 39 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

Le plaignant a participé à une entrevue au début de décembre 2020.


Témoins civils

TC no 1 A participé à une entrevue
TC no 2 A participé à une entrevue
TC no 3 A participé à une entrevue

Les entrevues avec les témoins civils ont eu lieu entre le 7 décembre 2020 et le 7 janvier 2021.

Agents impliqués

AI A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

L’AI a participé à une entrevue à la mi-décembre 2020.


Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue
AT no 3 A participé à une entrevue
AT no 4 A participé à une entrevue

Les entrevues avec les agents témoins ont eu lieu entre le 9 décembre 2020 et le 28 janvier 2021.


Retard dans l’enquête


Comme plusieurs événements auraient pu causer la blessure du plaignant, il était nécessaire d’obtenir les dossiers médicaux pour avoir plus de détails sur la blessure. En raison de la COVID-19, les dossiers médicaux ont mis 15 jours pour parvenir à l’UES, après quoi les fêtes de fin d’année ont entraîné un retard supplémentaire. Il y a également eu un retard dans les entrevues avec l’AT no 3 et l’AT no 4, en raison de la possibilité qu’ils soient désignés agents impliqués. Ces agents avaient remis leurs notes, qui étaient très détaillées, mais leurs entrevues n’ont eu lieu que fin janvier 2021, pour confirmer les renseignements fournis.

Éléments de preuve

Les lieux

L’UES a été avisé presque 24 heures après la poursuite; il n’y avait donc pas de scène à examiner.

La blessure du plaignant pourrait s’être produite dans le compartiment des prisonniers d’un véhicule de transport de prisonniers de la police.

Éléments de preuves médicolégaux

Le SPW a fourni les données du système de positionnement global (GPS) du Dodge Durango du SPW conduit par l’AT no 4, le seul véhicule équipé de la fonction de suivi GPS. Le véhicule de l’AT no 3 n’avait pas de feux d’urgence ni de sirène.

À 13 h 54, l’AT no 4 était à l’intersection de Cassandra et Kennedy Drives. Il a tourné sur Cabana Road West vers 13 h 55 et atteint une vitesse maximale de 86 km/h, avant de s’arrêter à l’intersection de Cabana Road West et de l’avenue Dougall vers 13 h 56. Lors de son entrevue avec l’UES, l’AT no 4 a dit qu’il avait poursuivi le plaignant pendant environ 20 secondes, mais qu’il avait mis fin à la poursuite et s’était arrêté quand le plaignant, au lieu de s’arrêter, avait accéléré. Les données GPS n’étaient pas suffisamment détaillées pour confirmer ce récit, mais elles montraient que la poursuite avait duré moins d’une minute.

L’AT no 4 s’est arrêté pendant 18 secondes avant de se diriger vers le nord-ouest sur l’avenue Dougall, atteignant une vitesse maximale de 96 km/h. Vers 13 h 58, il s’est arrêté pendant 30 secondes à l’angle de l’avenue Dougall et du boulevard West Grand, puis a fait demi-tour et est reparti en direction sud-est sur l’avenue Dougall. Lors de son entrevue, l’AT no 4 a dit qu’il essayait alors de localiser le plaignant. Il est resté dans ce secteur jusqu’à environ 14 h 03.

L’appel au 9-1-1 signalant que le plaignant avait percuté le poteau d’un feu de circulation a été reçu vers 14 h 03. C’était aussi à l’intersection de l’avenue Northway et de Tecumseh Road West, soit (d’après Google Maps) à 7,6 kilomètres de l’endroit où l’AT no 4 s’était arrêté.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies

L’UES a recherché des photographies et des enregistrements audio et vidéo pertinents et obtenu les résultats suivants :


Vidéo de la fourgonnette de transport de prisonniers du SPW


Le 2 décembre 2020, le plaignant a été impliqué dans une collision. Comme le plaignant faisait l’objet d’accusations, le SPW a envoyé une fourgonnette de transport de prisonniers sur les lieux pour le conduire le plaignant au centre de détention du SPW. L’AI est arrivé et a fait monter le plaignant dans la fourgonnette, qui était équipée d’un système de surveillance audio et vidéo. Le SPW a fourni cette vidéo à l’UES le 12 décembre 2020, mais en raison de problèmes techniques liés au fonctionnement du lecteur vidéo (Genetec), ce n’est que le 4 janvier 2021 que le clip vidéo a pu être examiné. On y voit ce qui suit : le 2 décembre 2020, vers 14 h 45, l’AI ouvre l’arrière de la fourgonnette de transport de prisonniers pour faire entrer le plaignant dans le compartiment arrière. L’AI effectue une fouille par palpations sur le plaignant avant de le faire entrer dans la fourgonnette. Cette fouille dure deux minutes; le plaignant ne se plaint d’aucune blessure et reste debout du début à la fin.

Vers 14 h 47, le plaignant entre dans le compartiment arrière et s’assoit, sans avoir besoin d’aide. Pendant la minute suivante, il se tord dans tous les sens pour essayer de faire passer ses bras menottés sous ses fesses et les mettre sur le devant de son corps, sans succès. Alors que le véhicule roule, le plaignant appuie ses pieds sur la banquette en face de lui pour changer de position et soulève et abaisse les jambes, sans monter de signe de douleur.

Vers 14 h 57, le plaignant penche lentement son torse vers la gauche, les pieds toujours droits devant lui. Vers 14 h 58, il ouvre les yeux, regarde autour de lui, puis semble retomber sur sa gauche, glissant cette fois de la banquette. On peut entendre quelqu’un – vraisemblablement l’AI – dire qu’il est tombé. Le plaignant est toujours éveillé et se déplace sur le plancher de la fourgonnette.

Vers 14 h 59, l’AI ouvre le compartiment arrière et demande au plaignant s’il va bien. Le plaignant est éveillé et se déplace sur le plancher, mais ne répond pas à l’AI, qui lui demande à plusieurs reprises s’il va bien.

Le plaignant, toujours menotté dans le dos, fait glisser ses jambes pour avancer vers l’AI, qui lui dit de rester en place. L’AI demande du renfort par radio. Le plaignant s’est maintenant déplacé suffisamment pour passer ses jambes devant les marches de la camionnette, tandis que l’AI lui dit d’arrêter. Le plaignant ignore l’AI, dit quelque chose d’incompréhensible, et continue d’avancer pour sortir complètement de la fourgonnette. L’AI doit saisir le manteau du plaignant pour l’empêcher de tomber et l’aider à se mettre debout. La porte du compartiment arrière se ferme, obstruant la vue de la caméra. Au moment de la fermeture de la porte, le plaignant ne semble pas stable sur ses pieds et commence à tomber en avant tandis que l’AI le retient par son manteau. La fonction audio fonctionne et on peut entendre le plaignant dire : [traduction] « Laisse-moi tranquille. »

Vers 15 h, une autre unité du SPW arrive, vraisemblablement l’AT no 2. Elle disparait aussi du champ de vision de la caméra. Quelques secondes plus tard, deux autres unités du SPW arrivent sur les lieux.

Vers 15 h 01, l’AI ferme l’arrière de la fourgonnette. Lors de son entrevue avec l’UES, l’AI a expliqué que le service d’ambulance était très surchargé et qu’il a donc été décidé de transporter le plaignant directement à l’hôpital parce qu’il était dans un état de détresse médicale. Vers 15 h 06, le plaignant est placé dans un compartiment plus petit sur le côté de la fourgonnette pour sa sécurité. Il marche sans aide jusqu’à ce compartiment, toujours menotté dans le dos. Il entre dans le compartiment en gravissant la marche, et s’assoit sans aide. Il ne se plaint d’aucune blessure. On peut voir qu’il a perdu le contrôle de sa vessie. L’AI lui dit qu’ils l’amènent à l’hôpital.

Vers 15 h 11, l’AI se gare à l’Hôpital régional de Windsor (HRW) et ouvre le compartiment latéral. Le plaignant sort sans aide et marche aux côtés de l’AI.

Chronologie du 2 décembre 2020

13 h 44 : L’AT no 3 voit le Ford Escape rouler à grande vitesse sur l’avenue Longfellow. Il fait une recherche du numéro d’immatriculation sur le CIPC (Centre d’information de la police canadienne) et découvre que le véhicule a été impliqué dans un vol d’essence à London plus tôt dans la journée.

12 h 54 : Il est demandé à l’AT no 4 d’arrêter un véhicule. L’AT no 2 conduisait un véhicule de surveillance sans feux d’urgence ni sirène.

13 h 55 : L’AT no 4, au volant d’un Dodge Durango banalisé, suit le plaignant et allume ses feux d’urgence et sa sirène sur Cabana Road West, en direction est, juste après l’avenue Longfellow. Le plaignant accélère et s’enfuit à grande vitesse en s’engageant dans la voie de circulation en sens inverse (voie vers l’ouest) près de l’avenue Dougall. L’AT no 4 s’arrête sur l’accotement de Cabana Road West et met fin à la poursuite. L’AT no 3, qui surveille la situation depuis une certaine distance, perd le plaignant de vue à l’intersection de Cabana Road et de l’avenue Dougall.

14 h 00 (environ) : Une collision avec délit de fuite s’est produite entre un Ford Escape et une Mitsubishi bleue, près de la bretelle d’accès à l’autoroute EC Row depuis l’avenue Dougall. [2] L’agent chargé d’enquêter se rend sur lieu de la collision avec délit de fuite où se trouve un Ford Escape. Il y a une trace de peinture bleue sur le Ford Escape et le rapport de l’agent du SPW indique que le Ford Escape avait causé ces dommages au Mitsubishi bleu. [3]

14 h 03 : Un appel au 9-1-1 signale un accident de la circulation à l’intersection de l’avenue Northway et de Tecumseh Road West. [4] Le TC no 2 dit qu’un Ford Escape a percuté un poteau de signalisation. Le conducteur est sorti du véhicule et refuse de parler à qui que ce soit. Le TC no 2 pense que le plaignant a ses facultés affaiblies.

14 h 07 : L’AT no 2 est envoyé sur les lieux.

14 h 09 : Les SMU sont sur les lieux. Le plaignant leur dit qu’il n’a pas besoin d’eux et ils repartent.

14 h 11 : L’AT no 2 arrive sur les lieux.

14 h 16 : L’AT no 3 a entendu l’annonce de l’accident à 14 h 03; le véhicule et la plaque d’immatriculation correspondent à ceux du véhicule qu’il a observé plus tôt. Il informe l’AT no 2 des motifs d’arrêter le plaignant pour conduite dangereuse d’un véhicule à moteur.

14 h 18 : L’AT no 1 est envoyé sur les lieux de l’accident.

14 h 20 : L’AT no 1 arrive. L’AT no 2 a arrêté le plaignant pour conduite dangereuse et conduite avec facultés affaiblies.

14 h 23 : Le plaignant est recherché en vertu d’un mandat non exécuté; les agents demandent au répartiteur d’envoyer une fourgonnette de transport de prisonniers, que l’AI conduit à ce moment-là.

14 h 28 : L’AT no 3 arrive sur les lieux. Il vérifie le Ford Escape et trouve à l’intérieur des drogues (stimulants) et de l’alcool, certains ouverts et d’autres fermés. Le véhicule est remorqué pour débloquer la circulation.

14 h 40 : L’AI arrive sur les lieux au volant de la fourgonnette de transport de prisonniers.

14 h 46 : L’AT no 4 arrive sur les lieux.

14 h 51 : L’AI commence à transporter le plaignant vers l’unité de détention du SPW.

14 h 54 : L’AT no 2 est en route vers l’unité de détention du SPW.

14 h 56 : L’AI arrive à l’intersection de la rue Wyandotte Ouest et de l’avenue Crawford. Une annonce est diffusée : [traduction] « L’homme s’est évanoui à l’arrière et a essayé de s’enfuir, maintenant en pleurs. » L’AI demande du renfort.

14 h 57 : L’AT no 1 arrive à l’intersection de la rue Wyandotte Ouest et de l’avenue Crawford. Ses notes mentionnent « crise d’épilepsie » (seizure) et que le plaignant a perdu le contrôle de sa vessie (le plaignant avait un trouble de santé). Les notes ajoutent que le plaignant n’a aucune blessure visible et ne se plaint d’aucune blessure.

14 h 58 : L’AT no 2 arrive à l’intersection de la rue Wyandotte Ouest et de l’avenue Crawford.

3 h 00 : Quelqu’un dit que l’ambulance viendrait au besoin.

3 h 07 : L’AI et l’AT no 1 commencent à se diriger vers l’hôpital.

3 h 12 : L’AI arrive à l’hôpital. L’ambulance est annulée.

Éléments obtenus auprès du service de police

L’UES a examiné les documents suivants que le SPW lui a remis entre le 7 et le 10 décembre 2021 :
  • Répartition assistée par ordinateur (x2);
  • Déclarations de témoins civils (x2);
  • Photographies de collision;
  • Texte narratif - ATs et un agent non désigné; et
  • Notes des ATs;

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES examiné les dossiers suivants que lui a remis l’Hôpital régional de Waterloo :
  • Dossiers médicaux du plaignant.

Description de l’incident

La séquence d’événements suivante se dégage des éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment des entrevues avec le plaignant et avec l’AI ainsi que des vidéos d’une partie de la période où le plaignant était sous la garde de la police. Le 2 décembre 2020, vers 13 h 55, l’AT no 4 a lancé une poursuite d’un VUS Ford Escape conduit par le plaignant en direction est, sur Cabana Road West. La police avait des renseignements selon lesquels le véhicule avait été impliqué dans un vol d’essence plus tôt dans la journée.

La poursuite a été lancée juste à l’est de Casgrain Drive et s’est terminée dans le secteur de l’avenue Dougall, moins d’un kilomètre et une minute après avoir commencé.

Le plaignant s’est dirigé vers le nord sur l’avenue Dougall, depuis Cabana Road West, et a été impliqué dans une collision mineure avec un autre véhicule dans le secteur de la bretelle d’accès à l’autoroute EC Row. Il a continué à grande vitesse et a roulé vers le nord sur l’avenue Northway, en direction de Tecumseh Road West, où il s’est écrasé contre un poteau de signalisation sur le terre-plein central.

L’AT no 2 était le premier agent arrivé sur les lieux. L’agente a arrêté le plaignant vers 14 h 15 pour conduite avec facultés affaiblies et conduite dangereuse.

Peu avant 15 h, l’AI est arrivé sur les lieux au volant d’un véhicule de transport de prisonniers. Le plaignant a été placé dans le compartiment des prisonniers du véhicule où il s’est assis sur une banquette pour être transporté à l’unité de détention du poste de police. Le véhicule a démarré et quelques minutes plus tard, le plaignant a perdu connaissance et est tombé de la banquette. Voyant ce qui venait de se passer sur l’écran des caméras du véhicule, l’AI s’est arrêté à l’intersection de Wyandotte Road et de l’avenue Crawford pour vérifier l’état du plaignant.

L’AI a demandé du renfort par radio et d’autres agents sont arrivés. Lorsqu’il est devenu évident qu’il faudrait attendre un certain temps avant l’arrivée d’une ambulance, les agents ont décidé de conduire le plaignant à l’hôpital dans le véhicule de transport de prisonniers.

Le personnel de l’hôpital a pensé que le plaignant s’était évanoui à la suite d’une crise d’épilepsie. Il a en outre été constaté qu’il avait une fracture aiguë dans la région lombaire.

Dispositions législatives pertinentes

Articles 219 et 221, Code criminel -- Négligence criminelle causant des lésions corporelles

219 (1) est coupable d’une négligence criminelle quiconque :
a) soit en faisant quelque chose;
b) soit en omettant de faire quelque chose qui est de son devoir d’accomplir, montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui. 
(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.

221 Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans quiconque, par négligence criminelle, cause des lésions corporelles à autrui.

Analyse et décision du directeur

Le 2 décembre 2020, le plaignant a reçu un diagnostic d’une fracture par compression de la colonne vertébrale alors qu’il était sous la garde du SPW. Avant d’être arrêté ce jour-là, le plaignant avait été impliqué dans une brève poursuite policière et dans deux collisions de véhicules. L’AI a été identifié comme étant l’agent impliqué aux fins de l’enquête de l’UES. Après avoir évalué le dossier de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI ait commis une infraction criminelle en lien avec l’arrestation et la blessure du plaignant.

On ne sait pas exactement quand le plaignant a subi sa fracture par compression. Selon la preuve médicale, il est possible que le plaignant ait subi cette blessure à la suite de l’une ou l’autre des collisions qui ont précédé son arrestation, ou quand il s’est effondré sur le plancher du véhicule de transport de prisonniers. En fait, cette blessure pourrait aussi s’être produire avant le 2 décembre 2020. Quoi qu’il en soit, je suis convaincu qu’il y a un lien de causalité insuffisant entre les collisions (en supposant que la blessure résulte de l’un ou de l’autre de ces accidents) et la poursuite du VUS du plaignant par la police. Cette poursuite, qui a été brève tant en distance qu’en durée, avait été interrompue bien avant la première de ces collisions – plusieurs minutes s’étaient écoulées depuis la fin de la poursuite. Par conséquent, en ce qui concerne la compétence de l’UES, l’enquête est centrée sur la possibilité que le plaignant ait été blessé dans le véhicule de transport de prisonniers.

L’infraction à prendre en considération dans ce contexte est la négligence criminelle causant des lésions corporelles, une infraction visée par l’article 221 du Code criminel. La culpabilité serait fondée, en partie, sur la conclusion que la conduite constituait un écart marqué et important par rapport à la norme de prudence raisonnable dans les circonstances. En l’espèce, la question à trancher est donc de savoir si, dans la façon dont il a procédé à la garde du plaignant, l’AI a fait preuve d’un manque de diligence qui a contribué à la blessure du plaignant d’une façon suffisamment flagrante pour justifier une sanction pénale. À mon avis, ce n’est pas le cas.

D’après le dossier de preuve, l’effondrement du plaignant dans le véhicule de transport de prisonniers résulte probablement d’une crise d’épilepsie provoquée par un trouble médical. Aucun élément de preuve ne suggère que l’AI ait conduit le véhicule de transport de prisonniers de manière imprudente ou dangereuse. De plus, la preuve indique que l’agent s’est rapidement rendu compte que le plaignant était en détresse médicale et qu’il a fait ce qu’il pouvait pour prêter assistance au plaignant avant que celui-ci puisse recevoir des soins médicaux, y compris en le conduisant à l’hôpital parce que l’ambulance était retardée.

En conséquence, même si le plaignant a été blessé en présence de la police le jour de son arrestation, rien ne prouve que la conduite de la police ait causé sa fracture par compression ou qu’elle ait enfreint d’une autre manière les limites de diligence prescrites par le droit criminel. Il n’y a donc pas lieu de déposer des accusations criminelles dans cette affaire, et le dossier est clos.



Date : 22 mars 2021

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Il a été déterminé par la suite qu’il s’agissait en fait de l'intersection de Tecumseh Road West et de l'avenue Northway. [Retour au texte]
  • 2) En recherchant l'itinéraire le plus rapide depuis l’intersection de Cabana Road et l'avenue Dougall jusqu’au lieu de l'accident, la voie express EC Row s’affiche comme étant l'itinéraire le plus rapide. On pense que le plaignant a fui la poursuite et s'est engagé sur l'autoroute EC Row, heurtant alors une voiture et a pris la fuite. On ne sait pas si le plaignant a subi une blessure au cours de cette première collision. [Retour au texte]
  • 3) Le SPW a inclut des photographies à l'appui. [Retour au texte]
  • 4) L'accident s'est produit à 7,6 kilomètres - ou 11 minutes en conduisant à la vitesse habituelle depuis l'endroit où le plaignant avait été observé pour la dernière fois à l'intersection de Cabana Road et de l'avenue Dougall [source : Google Maps]. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.