Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 20-OFD-166

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (« LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :
  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
  • le nom de tout agent impliqué;
  • le nom de tout agent témoin;
  • le nom de tout témoin civil;
  • les renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel lié à la santé de personnes identifiables. 

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave (y compris une allégation d’agression sexuelle).

On doit englober dans les «â€‰blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de «â€‰blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES concernant le décès d’un homme de 42 ans (« le plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 7 juillet 2020, à 19 h, le Service de police de Hamilton (SPH) a avisé l’UES d’une blessure par balle subie par le plaignant. Le SPH a ainsi fait savoir que le 7 juillet 2020, vers 15 h 34, il avait reçu un appel d’une femme signalant que son ex-petit ami était armé d’un fusil et la tenait en otage. L’appel avait été effectué depuis une résidence située sur la rue Ottawa Nord. Le SPH avait alors établi l’identité de l’ex-petit ami, déterminant qu’il s’agissait du plaignant, car il était lié à un vol de véhicule.

Vers 16 h, le véhicule volé a été retrouvé dans le secteur de la rue Cannon Est et de l’avenue Gage Nord, dans le stationnement d’un dépanneur. Des agents en uniforme ont placé leur véhicule devant le véhicule volé pour empêcher les voleurs de fuir, et plusieurs agents s’en sont approchés.

Tandis que l’on sortait le conducteur du véhicule, deux agents ont tiré avec leur arme à feu et ont atteint le plaignant. Le plaignant a été transporté à l’Hôpital général de Hamilton; au moment de la notification, il était toujours dans un état critique aux soins intensifs. 

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 5
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 3 
 

Plaignant :

Homme de 42 ans, décédé


Témoins civils (TC)

TC no 1 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue
TC no 2 A participé à une entrevue
TC no 3 A participé à une entrevue
TC no 4 A participé à une entrevue
TC no 5 A participé à une entrevue
TC no 6 A participé à une entrevue
TC no 7 A participé à une entrevue
TC no 8 A participé à une entrevue
TC no 9 N’a pas participé à une entrevue (plus proche parent)
TC no 10 N’a pas participé à une entrevue (plus proche parent)
TC no 11 A participé à une entrevue

Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue
AT no 3 A participé à une entrevue
AT no 4 A participé à une entrevue
AT no 5 A participé à une entrevue
AT no 6 A participé à une entrevue


Agent impliqué (AI)

AI no 1 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué
AI no 2 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué


Éléments de preuve

Les lieux

À 21 h 30, les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES sont arrivés sur les lieux, soit sur la rue Cannon Est; il s’agit d’un petit complexe commercial en forme de « L » qui comprend des commerces au rez-de-chaussée et des appartements à l’étage. Divers magasins se trouvent du côté est du stationnement. Les portes d’entrée principales sont orientées vers le sud-ouest, vers l’intersection de la rue Cannon Est et de l’avenue Gage Est. Lorsque les enquêteurs sont arrivés, des membres du SPH se trouvaient sur les lieux et limitaient la circulation des véhicules et des piétons dans le secteur. Les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES ont filmé et photographié les lieux et ont obtenu des mesures en vue de la réalisation d’un dessin de l’endroit.

Figure 1 – Le où les coups de feu ont été tirés.

Figure 1 – Le complexe où les coups de feu ont été tirés.


Schéma des lieux

Schéma des lieux

Éléments de preuve matériels

Pendant l’examen des lieux, l’UES a trouvé les éléments de preuve importants suivants, qui sont marqués sur le diagramme à l’échelle :

  • Une douille de calibre .40 a été trouvée dans le stationnement, entre les véhicules stationnés et la façade d’un restaurant de pizza.
  • Une douille de calibre .40 a été trouvée près de la portière arrière de droite d’un véhicule Kia Sedona gris [il s’agit d’un véhicule banalisé du SPH qui était conduit par l’AI no 2].
  • Un véhicule Buick Allure 2005 à quatre portes. Ce véhicule était orienté vers le nord et avait reculé dans un espace de stationnement. La portière avant de droite était partiellement ouverte. Des taches de sang étaient visibles sur le siège avant de droite et sur l’intérieur de la portière de ce même côté.
  • Un fusil à canon tronqué a été trouvé sur le toit du véhicule Buick, au dessus de l’espace du passager avant. Dans le baril du fusil à un coup, on a trouvé une douille de balle tirée de calibre .12. Les sièges avant du véhicule étaient des sièges baquets, et la console centrale était en position ouverte, soit vers le haut. Il y avait une marque vraisemblablement laissée par une balle sur le coin supérieur gauche du couvercle de la console centrale, qui était soulevé. Il y avait aussi une marque de balle au milieu du côté droit du pare-brise. Il avait une autre marque de balle sur la vitre de la portière avant, côté passager. De même, il y avait un grand sac noir et blanc de marque « Bench » muni d’une courroie sur la chaussée à côté de la portière avant de droite. Enfin, des taches de sang étaient visibles au bas de l’extérieur de la portière arrière de droite.
  • Il y avait du rembourrage de cartouche sur la chaussée du côté gauche du véhicule Buick.
  • Il y avait une trace de balle à l’intérieur de la vitre de la portière avant de gauche, dans le coin inférieur gauche. Sur la bordure extérieure de cette même vitre se trouvaient plusieurs billes de grenaille.
  • Un véhicule utilitaire sport (VUS) Kia Sportage rouge était orienté vers le nord et avait reculé dans un espace de stationnement. Ce véhicule se trouvait à l’ouest et du côté conducteur du véhicule Buick Allure. Il y avait sur la portière arrière de droite de la Kia une marque de balle correspondant à l’impact de billes de grenaille. Il y avait une grande quantité de résidus de coup de feu sur la portière et la vitre.
  • Un VUS Hyundai Santa Fe noir était orienté vers le nord et avait reculé dans un espace de stationnement à l’extrémité ouest du stationnement. Il y avait un conteneur de plastique de douille de calibre .12 sur la chaussée, près de la portière arrière de droite.
  • Un véhicule Dodge Grand Caravan bleu était orienté vers le nord, du côté est de l’avenue Gage Nord. Il y avait des dommages causés par de la grenaille du côté arrière droit du véhicule. L’enquête a révélé que le véhicule circulait en direction nord sur l’avenue Gage Nord et traversait l’intersection de la rue Cannon Est au moment du coup de fusil.

Figure 2 – Le véhicule Buick Allure 2005 à quatre portes. Des trous de balle sont visibles dans le pare-brise et la vitre du côté passager. Le fusil à canon tronqué se trouve sur le véhicule.

Figure 2 – Le véhicule Buick Allure 2005 à quatre portes. Des trous de balle sont visibles dans le pare-brise et la vitre du côté passager. Le fusil à canon tronqué se trouve sur le véhicule.


Figure 3 – Vue rapprochée du fusil à canon tronqué.

Figure 3 – Vue rapprochée du fusil à canon tronqué.


À 22 h 45, les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES sont arrivés au commissariat du quartier East End du SPH. Voici une liste des articles d’intérêt recueillis auprès de l’AI no 1 :
  • Un ceinturon de service contenant deux chargeurs de réserve, un pistolet Glock, un vaporisateur de poivre de Cayenne, un bâton télescopique et une arme à impulsions (non déployée). On a noté que le chargeur se trouvant dans le pistolet contenait 13 projectiles, et qu’il y avait un autre projectile dans la chambre. On a effectué un essai de tir avec l’arme à impulsions, puis on a téléchargé les données de celles-ci, on l’a photographiée et on l’a remise au SPH.

Figure 4 – Le pistolet de l’AI no 1.

Figure 4 – Le pistolet de l’AI no 1.

Voici une liste des articles d’intérêt recueillis auprès de l’AI no 2 :
  • Un pistolet Glock. Le chargeur du pistolet contenant 13 projectiles, et un autre projectile se trouvait dans la chambre.

Figure 5 – Le pistolet de l’AI no 2.

Figure 5 – Le pistolet de l’AI no 2.

Éléments de preuves médicolégaux

Un scientifique du Centre des sciences judiciaires (CSJ) a examiné le fusil à canon tronqué récupéré sur les lieux pour déterminer s’il était possible d’en tirer des profils d’ADN et d’exclure le plaignant en tant que source de cet ADN. Selon le rapport biologique du scientifique daté du 18 août 2020, il n’était pas possible d’exclure le plaignant en tant que source du profil d’ADN masculin tiré de l’échantillon recueilli près de la fenêtre d'éjection du fusil.

Un toxicologue du CSJ a examiné des échantillons de sang du plaignant recueillis à l’hôpital et dans le cadre de l’autopsie pour déterminer s’il y avait des traces de drogues et/ou de poisons. De l’éthanol (175 mg/100 ml), de la méthamphétamine, de l’amphétamine et de la benzoylecgonine ont été détectés.

Un scientifique du CSJ faisant partie de la section responsable de l’identification des armes à feu et des traces d’outils a examiné les pistolets de l’AI no 1 et de l’AI no 2 pour déterminer si les éléments de munitions soumis avaient été tirés depuis ces pistolets. Il a déterminé, dans les limites de la certitude pratique, que l’une des douilles avait été tirée depuis le pistolet de l’AI no 1. En outre, il a établi, dans les limites de la certitude pratique, qu’une autre douille avait été tirée depuis le pistolet de l’AI no 2.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou photographiques


Enregistrement vidéo


Le 8 juillet 2020, l’UES a reçu, de la part du magasin Corner’s Variety, une clé USB contenant des enregistrements relatifs à l’incident provenant des caméras de surveillance intérieures et extérieures. Les extraits vidéo sont horodatés et en couleur, mais ne comportent pas de piste audio.

Voici un sommaire des points saillants des enregistrements :

Vidéo no 1

  • À 15 h 48 min 59 s, la vidéo commence. La caméra se trouve à l’intérieur du magasin et montre la caisse 1.
  • À 15 h 51 min 11 s, le TC no 2 entre par l’entrée principale.
  • À 15 h 51 min 24 s, le TC no 1 entre par l’entrée principale. Le TC no 2 et lui cherchent des articles dans les allées.
  • À 15 h 54 min 25 s, le TC no 1 et le TC no 2 se rendent à la caisse. Le TC no 1 paye ses articles comptant.
  • À 15 h 55 min 49 s, le plaignant entre par l’entrée principale.
  • À 15 h 57 min 15 s, le plaignant achète des articles.
  • À 15 h 59 min 11 s, le plaignant sort du magasin.
  • À 16 h 8 min 58 s, l’enregistrement prend fin.

Vidéo no 2

  • À 15 h 49 min, la vidéo commence. La caméra se trouve à l’intérieur du magasin et montre les portes de l’entrée principale.
  • À 15 h 49 min 28 s, un véhicule Buick de couleur dorée s’arrête momentanément devant les portes de l’entrée principale; il y a trois hommes à bord du véhicule.
  • À 15 h 51 min 7 s, le TC no 2 entre par l’entrée principale.
  • À 15 h 51 min 21 s, le TC no 1 entre par l’entrée principale.
  • À 15 h 55 min 46 s, le plaignant entre par l’entrée principale.
  • À 15 h 57 min 30 s, le TC no 1 sort du magasin.
  • À 15 h 57 min 36 s, le TC no 2 sort du magasin.
  • À 15 h 59 min 10 s, le plaignant sort du magasin.
  • À 16 h 4 min 54 s, un VUS aux couleurs de la police quitte sa position pour se placer devant le véhicule Buick doré.
  • À 16 h 14 min 2 s, la vidéo prend fin.

Vidéo no 3

  • À 15 h 49 min 24 s, un véhicule Buick doré entre dans le stationnement du magasin depuis la rue Cannon. Trois hommes de race blanche se trouvent à bord du véhicule.
  • À 15 h 51 min 7 s, l’un des hommes, qui porte un t-shirt, un short gris, des souliers noirs et une casquette de baseball grise et bleue [on sait maintenant qu’il s’agissait du TC no 2], entre par l’entrée principale.
  • À 15 h 51 min 21 s, un autre des hommes, qui porte une camisole blanche et un pantalon de type kaki bleu et qui a un sac sur l’épaule et un tatouage sur le bras [on sait maintenant qu’il s’agissait du TC no 1], entre par l’entrée principale.
  • À 15 h 55 min 46 s, le troisième homme, qui porte un t-shirt blanc, un short gris, une casquette de baseball grise, des lunettes de soleil, un sac noir de marque « Bench » sur l’épaule ainsi que des souliers blancs et orange [on sait maintenant qu’il s’agissait du plaignant], entre par l’entrée principale.
  • À 15 h 57 min 20 s, une fourgonnette arrive dans le stationnement et se gare, orientée vers la rue Cannon.
  • À 15 h 57 min 32 s, le TC no 1 sort du magasin avec un sac à la main droite.
  • À 15 h 57 min 37 s, le TC no 2 sort du magasin avec des friandises à la main.
  • À 15 h 59 min 12 s, le plaignant sort du magasin avec un sac à la main gauche.
  • À 15 h 59 min 52 s, un agent en civil qui se trouvait dans la fourgonnette descend du véhicule et prend son arme à feu. Il se trouve sur le trottoir, devant son véhicule, sur la rue Cannon.
  • À 16 h 0 min 58 s, l’agent en civil descendu de la fourgonnette range son arme à feu et retourne du côté conducteur de son véhicule.
  • À 16 h 1 min 10 s, un agent en civil portant un short et un t-shirt ainsi qu’une veste sur laquelle est écrit « police » court sur la rue Cannon.
  • À 16 h 1 min 44 s, le TC no 2 est escorté par un agent de police en civil et une agente de police en uniforme hors du champ de la caméra, sur la rue Cannon. Il est menotté, les mains derrière le dos.
  • À 16 h 9 min 12 s, les services médicaux d’urgence arrivent sur les lieux.
  • À 16 h 10 min 15 s, on déplace le plaignant sur le trottoir de la rue Cannon, où l’on continue de lui administrer les premiers soins.
  • À 16 h 12 min 8 s, le plaignant est placé sur une civière.
  • À 16 h 13 min 4 s, le plaignant n’est plus dans le champ de la caméra.
  • À 16 h 13 min 58 s, la vidéo prend fin.

Vidéo no 4
  • À 15 h 48 min 40 s, la vidéo commence. La caméra se trouve à l’extérieur et montre le stationnement du magasin.
  • À 15 h 49 min 26 s, un véhicule Buick doré entre dans le stationnement, depuis la rue Cannon Est. La portière arrière côté passager s’ouvre et demeure ouverte un instant.
  • À 15 h 50 min 2 s, le Buick doré recule dans un espace de stationnement et est orienté vers le nord, en direction du magasin.
  • À 15 h 51 min 7 s, le TC no 2 entre dans le magasin par l’entrée principale.
  • À 15 h 51 min 21 s, le TC no 1 entre par l’entrée principale.
  • À 15 h 55 min 46 s, le plaignant entre par l’entrée principale.
  • À 15 h 57 min 10 s, une fourgonnette entre dans le stationnement depuis l’avenue Gage Nord et se gare, le devant du véhicule orienté vers le sud.
  • À 15 h 57 min 32 s, le TC no 1 sort du magasin avec un sac à la main droite et se rend du côté conducteur du Buick.
  • À 15 h 57 min 38 s, le TC no 2 sort du magasin avec des friandises à la main droite et se rend du côté passager arrière du véhicule.
  • À 15 h 58 min 24 s, le TC no 1 prend place sur le siège du conducteur.
  • À 15 h 59 min 13 s, le plaignant sort du magasin et prend place sur le siège du passager avant du véhicule.
  • À 15 h 59 min 47 s, un VUS aux couleurs de la police entre dans le stationnement et se place devant le Buick doré, lui bloquant le chemin. La portière côté passager avant s’ouvre avant que le VUS de police ne s’arrête.
  • À 15 h 59 min 51 s, un agent de police en civil descend de sa fourgonnette avec son arme à feu à la main et se rend derrière le Buick. Un agent en uniforme descend du VUS du côté passager avant avec une arme d’épaule, qu’il pointe en direction du conducteur du Buick.
  • À 15 h 59 min 56 s, un agent en uniforme descend du VUS de police du côté conducteur et pointe son arme à feu vers le Buick.
  • À 15 h 59 min 57 s, tandis qu’un agent en uniforme se trouve près de la portière côté conducteur, une bouffée de fumée émane de l’intérieur du Buick et semble atteindre le VUS rouge.
  • À 16 h 0 min 15 s, l’agent en uniforme, depuis le siège côté passager de son véhicule, semble utiliser sa radio.
  • À 16 h 0 min 29 s, la portière arrière du côté passager du Buick s’ouvre et le TC no 2 sort du véhicule.
  • À 16 h 0 min 59 s, un agent de police en civil range son arme à feu et retourne du côté conducteur de sa fourgonnette.
  • À 16 h 2 min, un deuxième véhicule aux couleurs de la police arrive sur les lieux.
  • À 16 h 5 min 30 s, deux agents de police en uniforme sortent le plaignant du véhicule depuis le siège du passager avant et le placent au sol.
  • À 16 h 9 min 8 s, les services médicaux d’urgence arrivent sur les lieux.
  • À 16 h 13 min 58 s, la vidéo prend fin.

Enregistrements de communications


Enregistrements des communications et du système de répartition assistée par ordinateur


Le SPH a fourni à l’UES dix fichiers relatifs à cet incident. Voici un sommaire des points saillants de ces enregistrements :

  • Le 7 juillet 2020, à 15 h 34 min 37 s, le SPH reçoit un appel par l’intermédiaire du service 9 1 1 de la part d’une femme signalant un incident de violence conjugale en cours à une résidence située sur la rue Ottawa Nord, à Hamilton. La personne a peu d’information, mais elle fait savoir que sa fille est tenue en otage par son ex-petit ami, le plaignant, qui a un fusil à canon tronqué.
  • À 15 h 36 min 4 s, un sergent est avisé de la situation et le SPH commence à dépêcher des unités.
  • À 15 h 39 min 15 s, la personne ayant appelé parle avec le téléphoniste du service 9 1 1, et elle parle aussi avec sa fille sur un autre téléphone. Sa fille affirme que le plaignant souhaite être tué par la police.
  • À 15 h 43 min 29 s, la personne ayant appelé au 9 1 1 signale que le plaignant a quitté la résidence.
  • À 15 h 49 min 44 s, des agents commencent à arriver à la résidence.
  • À 15 h 57 min 18 s, la personne ayant appelé au 9 1 1 indique que le plaignant pourrait s’être rendu à une résidence située sur l’avenue Dalkeith.
  • À 15 h 57 min 51 s, des agents arrivent sur l’avenue Dalkeith, mais ne voient personne.
  • À 15 h 58 min 16 s, des agents signalent avoir vu un véhicule Buick doré, qui a été volé, circuler dans le secteur, puis s’engager sur la rue Cannon Est et, ensuite, sur l’avenue Gage Nord.
  • À 15 h 59 min 4 s, le véhicule se trouve au nord-est de l’intersection de Gage et de Cannon.
  • À 16 h 0 min 16 s, des agents signalent que des coups de feu ont été tirés.
  • À 16 h 0 min 33 s, des agents demandent une ambulance.
  • À 16 h 0 min 50 s, des agents signalent qu’un passager se trouvant à l’avant du véhicule [on a plus tard établi qu’il s’agissait du plaignant] ne bouge pas.
  • À 16 h 5 min 18 s, des agents font savoir que toutes les unités ont reçu l’information (« 10 4 »).
  • À 16 h 6 min 15 s, des agents indiquent qu’ils commencent les compressions.
  • À 16 h 7 min 17 s, des agents signalent que le service des incendies arrive sur place.
  • À 16 h 9 min 6 s, des agents font savoir que les services médicaux d’urgence sont sur les lieux.

Éléments obtenus auprès du Service de police

Sur demande, l’UES a obtenu les documents et éléments suivants du SPH, et les a examinés :
  • enregistrements des communications audio;
  • rapport du système de répartition assistée par ordinateur;
  • dessins réalisés par l’AT no 1 et l’AT no 2;
  • rapport chronologique des événements;
  • empreintes digitales du plaignant;
  • notes des AT;
  • documents du Programme canadien des armes à feu;
  • rapport d’incident supplémentaire;
  • témoignages anticipés de l’AT no 1, de l’AT no 2, de l’AT no 3 et de l’AT no 4.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a également reçu les éléments suivants auprès d’autres sources :
  • rapport d’autopsie, daté du 27 octobre 2020, du bureau du coroner;
  • rapport sur les conclusions préliminaires de l’autopsie du Service de médecine légale de l’Ontario;
  • rapport biologique du Centre des sciences judiciaires, daté du 18 août 2020;
  • rapport sur les armes à feu du Centre des sciences judiciaires, daté du 5 octobre 2020.

Description de l’incident

Il est possible d’établir clairement les principaux événements qui se sont déroulés grâce aux entrevues réalisées auprès de témoins civils et de la police qui étaient présents sur les lieux de l’incident et près de ceux-ci, de même qu’aux enregistrements vidéo de caméras de surveillance qui ont capté l’incident. Comme la loi les y autorise, les agents impliqués ont choisi de ne pas participer à une entrevue avec l’UES et ont refusé qu’on communique leurs notes.

Vers 16 h le 7 juillet 2020, le plaignant était le passager avant d’un véhicule Buick Allure. Le véhicule était garé, orienté vers le nord, dans le stationnement du magasin Corner’s Variety situé au coin nord-est de l’intersection de l’avenue Gage Nord et de la rue Cannon Est. Le TC no 1 prenait place sur le siège du conducteur. Le TC no 2 se trouvait sur le siège arrière, du côté passager. Les hommes revenaient du magasin, où ils avaient acheté divers articles. Ils ne savaient pas, à ce moment-là, qu’ils avaient été suivis par des agents en civil dans un véhicule banalisé.

Environ une demi-heure plus tôt, le SPH avait reçu un appel, par l’intermédiaire du service 9 1 1, signalant un incident de violence en cours. La personne qui avait appelé était la mère de la victime. Sa fille parlait avec elle sur un autre téléphone et lui disait qu’elle était prise en otage chez elle par le plaignant. Elle a également indiqué que le plaignant était armé d’un fusil à canon tronqué et qu’il disait vouloir être tué par la police. Des agents ont alors été dépêchés à la résidence de la fille de la personne ayant appelé, sur la rue Ottawa Nord.

Le plaignant a quitté la résidence dans les minutes qui ont suivi l’appel au 9 1 1 et est monté dans un Buick Allure avec le TC no 1 et le TC no 2. Les trois hommes ont quitté les lieux et se sont dirigés vers l’ouest, jusqu’au magasin Corner’s Variety.

Des membres de l’équipe d’action contre les délinquants à risque élevé du SPH – l’AT no 2 et l’AT no 3 – ont rapidement repéré le Buick et l’ont suivi tandis qu’il se dirigeait vers l’intersection de l’avenue Gage Nord et de la rue Cannon Est, tout en communiquant la direction dans laquelle ils circulaient à d’autres agents.

L’AI no 2 faisait partie des agents qui avaient entendu les transmissions radio. Il s’est rendu sur les lieux et a stationné sa fourgonnette banalisée dans l’espace situé directement à l’est du Buick, en l’orientant vers le sud. Juste à l’ouest du Buick était stationnée une fourgonnette rouge appartenant à un civil non concerné par l’affaire. Pendant que l’AI no 2 attendait, le plaignant, le TC no 1 et le TC no 2 sont sortis du magasin pour remonter dans le Buick. Quelque secondes après leur retour dans le véhicule, un VUS aux couleurs de la police est entré dans le stationnement depuis la rue Gage Nord et s’est arrêté, plaçant le côté passager avant de son véhicule devant le Buick.

Des agents en uniforme – l’AI no 1 et son partenaire, l’AT no 4 – étaient à bord du VUS. Ils avaient eux aussi entendu les communications radio et s’étaient présentés sur les lieux pour aider. Lorsque le VUS s’est arrêté, l’AT no 4 est immédiatement descendu par la portière avant côté passager avec un fusil C8 pointé en direction du conducteur du Buick – le TC no 1; il a crié au conducteur de ne pas bouger. L’AI no 1, ayant descendu à son tour du véhicule, a pointé son arme de poing vers le devant du Buick; l’AI no 2, pour sa part, s’est placé derrière le Buick, du côté passager, pointant également son arme de poing vers le véhicule. L’AT no 4 a ouvert la portière côté conducteur du Buick, a agrippé le bras gauche du TC no 1 et a soudainement entendu une forte détonation provenant du devant du Buick. Ce bruit provenait du fusil du plaignant, qui avait tiré en direction de l’AT no 4.

Immédiatement après le coup de fusil, l’AI no 1 et l’AI no 2 ont chacun tiré une balle en direction du plaignant. La balle de l’AI no 2 a heurté le derrière de la tête du plaignant, et celui-ci a immédiatement été immobilisé. La balle de l’AI no 1 a atteint le haut de la tête du plaignant. Des fragments de l’un de ces projectiles, ou des deux projectiles, semblent avoir infligé d’autres blessures au plaignant, notamment au haut du bras gauche.

Après les coups de feu, l’AT no 4 a pu sortir le TC no 1 du Buick et le tirer près du côté passager arrière du véhicule, où il a été arrêté et menotté. Les agents ont également sorti le TC no 2 du Buick et ont procédé à son arrestation.

Le plaignant se trouvait sur le siège du passager, tenant toujours le fusil sur lui, pointé en direction du siège du conducteur. Les agents l’ont sorti du Buick et ont exécuté des manœuvres de réanimation cardiorespiratoire jusqu’à ce que les ambulanciers paramédicaux arrivent sur les lieux et prennent le relais. Le plaignant a été transporté à l’hôpital, où l’on a constaté son décès le même jour. 

Cause du décès


À la lumière de l’autopsie, le médecin légiste a établi que le décès du plaignant était attribuable à une blessure par balle à l’arrière de la tête.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

(3) Sous réserve des paragraphes (4) et (5), une personne n’est pas justifiée, pour l’application du paragraphe (1), d’employer la force avec l’intention de causer, ou de nature à causer la mort ou des lésions corporelles graves, à moins qu’elle n’estime, pour des motifs raisonnables, que cette force est nécessaire afin de se protéger elle-même ou de protéger toute autre personne sous sa protection, contre la mort ou contre des lésions corporelles graves.

Analyse et décision du directeur

Le 7 juillet 2020, le plaignant a été atteint par balle par deux agents du SPH, puis il a succombé à ses blessures à l’hôpital. Les agents qui ont tiré sur le plaignant – l’AI no 1 et l’AI no 2 – ont été désignés comme agents impliqués aux fins de l’enquête de l’UES. Selon mon évaluation des éléments de preuve, je suis d’avis qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que les agents impliqués ont commis une infraction criminelle relativement au décès du plaignant.

Aux termes du paragraphe 25(1) du Code criminel, les agents de police sont à l’abri de toute responsabilité criminelle pour l’usage de la force dans l’exercice de leurs fonctions, pourvu que cette force soit, sur la base d’un jugement raisonnable, nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou permis de faire. En ce qui concerne la force de nature à causer la mort, le paragraphe 25(3) indique que l’usage d’une telle force n’est pas justifié, à moins que l’agent n’estime, pour des motifs raisonnables, que cette force est nécessaire afin de se protéger lui-même ou de protéger toute autre personne sous sa protection contre la mort ou contre des lésions corporelles graves. Dans cette affaire, je suis d’avis que les coups de feu tirés par l’AI no 1 et l’AI no 2 étaient justifiés aux termes de la loi.

Les agents impliqués exerçaient leurs fonctions légitimes lorsqu’ils se sont rendus dans le stationnement du dépanneur en question dans le but d’arrêter le plaignant. Ils avaient entendu de l’information, tirée d’un appel au 9 1 1, selon laquelle le plaignant venait de quitter la résidence de son ancienne conjointe, qu’il avait confinée et menacée avec un fusil à canon tronqué. Tandis qu’elle entreprenait d’intervenir suivant l’appel au 9 1 1, la police avait également parlé au frère du plaignant, qui avait confirmé que ce dernier avait accès à des armes à feu.

Même si ni l’un ni l’autre des agents impliqués n’a fourni de déclaration à l’UES, rien dans les éléments de preuve recueillis ne donne à penser qu’ils ne croyaient pas qu’il était nécessaire de faire feu sur le plaignant pour se protéger et protéger les autres personnes dans les environs contre la mort ou des blessures graves. Bien au contraire. Vu les circonstances, je suis convaincu que l’AI no 1 et l’AI no 2 estimaient, sur la base d’un jugement raisonnable, qu’ils devaient tirer ces coups de feu. S’étant retrouvé encerclé par les agents sans possibilité de fuite, le plaignant a immédiatement montré qu’il n’avait pas l’intention de se rendre sans résister. En effet, il a plutôt pris son fusil, l’a pointé en direction du siège du passager et a tiré vers l’AT no 4 tandis que ce dernier tentait de sortir le TC no 1 du Buick. Il est très étonnant que ni l’AT no 4 ni le TC no 1 n’aient été tués. Ainsi, lorsque le plaignant a fait feu de la sorte, l’AI no 1 et l’AI no 2 n’ont eu d’autre choix que de riposter. Il y avait deux autres personnes dans le Buick ainsi que des civils dans le secteur, et le plaignant avait déjà montré qu’il était capable de séquestrer une personne. Dans ces circonstances, quitter les lieux n’était pas une option pour les agents, puisque cela aurait accru le risque très réel d’une autre prise d’otage. De toute façon, les agents impliqués étaient là, sur place, devant un homme armé, et ils avaient toutes les raisons de croire que celui-ci pouvait faire feu de nouveau. Compte tenu de la nature de la menace, l’AI no 1 et l’AI no 2 avaient le droit de se défendre et, j’en suis persuadé, de le faire en ayant recours à leurs armes à feu respectives.

En conclusion, je suis convaincu, sur la base de motifs raisonnables, que l’AI no 1 et l’AI no 2 ont agi d’une manière conforme à la loi pendant leur intervention auprès du plaignant, et qu’il n’y a donc aucun motif de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.


Date : 8 mars 2021

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.