Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 24-TCI-126
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Contenus:
Mandat de l’UES
L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.
En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.
Restrictions concernant la divulgation de renseignements
Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales
En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
- le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes;
- des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle;
- des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne;
- des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête;
- des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi;
- des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.
Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée
En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
- des renseignements qui révèlent des
- des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
- les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins;
- des renseignements sur le lieu de l’incident;
- les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
- d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.
Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé
En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.
Autres instances, processus et enquêtes
Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.
Exercice du mandat
En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.
Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.
De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.
Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES concernant la blessure grave subie par un homme de 23 ans (le « plaignant »).
L’enquête
Notification de l’UES[1]
Le 20 mars 2024, à 12 h 56, le Service de police de Toronto (SPT) a avisé l’UES de la blessure subie par le plaignant, âgé de 23 ans.
Le SPT a fait savoir que le 6 mars 2024, ou aux alentours de cette date, il a entrepris une enquête à propos d’un cas d’extorsion sur Internet. Des agents du SPT se sont fait passer pour une jeune fille de 16 ans et ont donné rendez-vous à un groupe d’hommes au Scarborough Town Centre (STC), où se trouvaient plusieurs agents de l’Unité des crimes majeurs (UCM). Le plaignant est arrivé sur les lieux, a semblé surpris et s’est enfui lorsqu’il a vu les agents de police. Il a sauté par-dessus un véhicule civil et est tombé au sol. Les agents de l’UCM ont pris le contrôle du plaignant et l’ont arrêté; il a ensuite été emmené aux installations de la 43e division, où il s’est plaint d’une douleur au coude droit. Il a été transporté à l’hôpital, où l’on a constaté qu’il avait une fracture du coude.
L’équipe
Date et heure de l’envoi de l’équipe : 2024/03/20, à 7 h 54
Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 2024/03/20, à 8 h 10
Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 0
Personne concernée (« plaignant ») :
Homme de 23 ans; n’a pas consenti à se soumettre à une entrevue; ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés.
Agents impliqués (AI)
AI no 1 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué; ses notes ont été reçues et examinées.
AI no 2 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.
Agents témoins (AT)
AT no 1 A participé à une entrevue; ses notes ont été reçues et examinées
AT no 2 A participé à une entrevue; ses notes ont été reçues et examinées
AT no 3 N’a pas participé à une entrevue; notes examinées; entrevue jugée non nécessaire
AT no 4 N’a pas participé à une entrevue; notes examinées; entrevue jugée non nécessaire
Les agents témoins ont participé à des entrevues entre le 28 mars 2024 et le 17 avril 2024.
Éléments de preuve
Les lieux
Les événements en question se sont déroulés sur le terrain extérieur du STC, au 300, promenade Borough, à Toronto, près de l’entrée principale de la salle de cinéma du centre commercial.
Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[2]
Enregistrement vidéo – STC
La seule caméra qui surveillait la zone d’intérêt dans le cadre de l’enquête était installée au?dessus de l’entrée principale de la salle de cinéma et était, de façon générale, orientée vers l’est. Elle a capté des images des parcs de stationnement situés au nord et à l’est dans son champ de vision, des routes liées à ces parcs de stationnement, ainsi que du trottoir et de l’escalier devant l’entrée de la salle de cinéma. L’enregistrement ne comprenait pas de piste audio ni d’horodatage.
À 4 min et 55 s, un véhicule [on sait maintenant qu’il s’agissait d’un véhicule de police banalisé conduit par l’AI no 1] entre dans le champ de la caméra, depuis le nord, et se gare en bordure de la chaussée, près de l’entrée de la salle de cinéma, derrière une voiture blanche.
À 5 min et 8 s, un véhicule utilitaire sport (VUS) de la police arrive depuis le nord et s’arrête derrière un véhicule de couleur argent qui est garé à cet endroit. Un autre VUS de la police s’approche et se gare devant le véhicule de couleur argent.
À 5 min et 33 s, alors que la portière du côté conducteur du premier véhicule de police s’ouvre, deux hommes [on sait maintenant qu’il s’agissait d’agents de police en civil] se précipitent vers l’entrée de la salle de cinéma. Des agents de police en uniforme descendent des véhicules de police et courent dans la même direction. Un homme – le plaignant – entre dans le champ de la caméra en courant, depuis l’auvent à l’entrée de la salle de cinéma, poursuivi par des agents de police en uniforme et deux agents de police en civil. L’image est partiellement obstruée par l’auvent et une enseigne.
À 5 min et 36 s, l’AI no 1 descend de son véhicule de police et court vers le côté conducteur du véhicule derrière lequel il s’est garé. La vue de l’avant de cette voiture est obstruée par l’enseigne de la salle de cinéma.
À 5 min et 37 s, une silhouette apparaît sur le capot de la voiture blanche, puis disparaît du côté conducteur. L’AI no 1 court vers cet endroit. Plusieurs autres agents de police, certains en civil, d’autres en uniforme, se précipitent vers le côté conducteur de la voiture. En raison de l’emplacement de la caméra, les événements se produisant de ce côté du véhicule ne sont pas visibles.
À 6 min et 49 s, l’un des agents de police en civil escorte le plaignant jusqu’à un VUS de la police. Le plaignant est fouillé, avant d’être escorté, à 9 min 13 s, hors du champ de la caméra.
Enregistrements de la caméra d’intervention – Agent no 1 du SPT
À 19 h 56 min 40 s, le 19 mars 2024, la vidéo débute en montrant la chaussée près de l’entrée de la salle de cinéma du STC. Il fait nuit, la chaussée est mouillée et une neige légère tombe. Un homme – le plaignant – est allongé face contre terre sur la chaussée, dans la voie de dépassement de la route à deux voies balisée par des panneaux de signalisation, à côté d’une berline blanche. Un véhicule foncé est garé derrière la berline.
Des agents de police en civil – l’AI no 2, l’AT no 1, l’AI no 1 et l’AT no 3 – se trouvent au?dessus du plaignant, tandis qu’un autre membre de l’UCM – l’AT no 4 – s’approche des jambes du plaignant. Le plaignant est sur le ventre, les mains sous lui. L’AT no 1 se trouve près de la tête du plaignant, à sa gauche. L’AT no 1 se trouve lui aussi près de la tête du plaignant, mais à sa droite. L’AT no 3 est à la gauche de l’AT no 1, au niveau du bas du corps du plaignant. L’AI no 2 se penche de manière à entrer dans le groupe qui entoure le plaignant, et se trouve à la gauche de ce dernier. L’AT no 4 est à la gauche du plaignant, à la hauteur de ses jambes.
À 19 h 56 min 42 s, un agent de police en uniforme [on sait maintenant qu’il s’agissait de l’AT no 2] s’approche du groupe de personnes.
À 19 h 56 min 51 s, l’AT no 4 se sert de son genou droit pour frapper le plaignant du côté droit.
À mesure que l’enregistrement progresse, il devient difficile d’interpréter tous les mouvements qui sont faits ou de voir clairement la position dans laquelle le plaignant se trouve, et ce, jusqu’à ce qu’on demande à l’agent no 1 du SPT d’aider à placer l’associé du plaignant sous garde et que l’agent quitte alors le secteur.
Images captées par les caméras à bord des véhicules de police
Les images captées ne montrent pas l’arrestation du plaignant.
Vidéo de la détention – SPT
Le 19 mars 2024, à 20 h 52 min 9 s, l’AT no 2 et l’agent no 2 du SPT conduisent le plaignant devant le sergent chargé de l’enregistrement. À 20 h 54 min 10 s, le sergent demande au plaignant s’il veut parler à un avocat. Le plaignant répond « ah, oui, bien sûr. J’ai mal au coude. Est-ce que je peux avoir de l’eau, s’il vous plaît? ». Le sergent lui demande s’il a des blessures. Le plaignant demande à son tour « des blessures dues à l’arrestation? », et le sergent répond « oui ». Le plaignant indique que son coude droit lui fait très mal, qu’il ressent une douleur horrible au poignet gauche en raison des menottes et qu’il a mal aussi au côté gauche de la tête, ajoutant qu’il ne sait pas s’il saigne. L’AT no 2 soulève les cheveux du plaignant pour inspecter sa tête, puis confirme qu’il n’y a pas de saignement.
L’agent no 2 du SPT fait savoir au sergent chargé de l’enregistrement qu’il y a eu une poursuite à pied lors de l’arrestation et, à 20 h 57 min 21 s, il retire les menottes au plaignant. Le plaignant se frotte le coude droit et dit qu’il pense qu’il a été disloqué. Il semble souffrir, gémit faiblement et accorde une attention particulière à son bras droit pendant qu’on recense ses biens. À 21 h 1 min 51 s, le plaignant est escorté hors du champ de la caméra et de l’aire de mise en détention.
À 22 h 7 min 19 s, le plaignant est emmené de nouveau au bureau d’enregistrement par deux agents de police [on sait maintenant qu’il s’agissait des agents no 3 et no 4 du SPT]. On lui dit qu’il sera conduit à l’hôpital pour qu’on puisse y examiner son bras, puis ramené au commissariat. Il est escorté hors du champ de la caméra; l’enregistrement prend fin à 22 h 7 min 43 s.
À 23 h 52 min 26 s, l’enregistrement recommence et on voit les agents no 3 et no 4 du SPT qui accompagnent le plaignant vers un banc, où il s’assoit. Son bras droit est dans un plâtre et soutenu par une écharpe. À 23 h 55 min 51 s, le sergent chargé de l’enregistrement examine les dossiers médicaux pour le compte rendu audio et lit, à haute voix, qu’on a constaté que le plaignant avait une fracture du coude droit et qu’on lui a prescrit des analgésiques. Le plaignant est escorté hors du champ de la caméra et de l’aire de mise en détention à 12 h 3 s le 20 mars 2024.
Enregistrements des communications radio et téléphoniques de la police
Le 19 mars 2024, à 17 h 15 min 55 s, le répartiteur avise les agents de police qu’un des véhicules associés à leurs suspects est lié à de multiples infractions : détournement de véhicule, vol avec arme à feu, port d’un déguisement dans l’intention de commettre un acte criminel, complot et possession de biens criminellement obtenus d’une valeur de plus de 5 000 $.
À 17 h 22 min 48 s, on fait savoir qu’un agent de police [on sait maintenant qu’il s’agissait de l’agente no 5 du SPT] a communiqué avec les suspects pour leur dire qu’il se préparait à les rencontrer et leur demander où ils devaient se retrouver.
À 17 h 24 min 31 s, un agent de police indique que le véhicule (mentionné ci?dessus) est garé sur la route Kingston, à l’ouest de la route Markham, dans le parc de stationnement d’un centre commercial. Un autre agent de police demande aux membres de l’équipe de continuer à observer ce véhicule jusqu’à ce qu’ils aient plus de renseignements.
À 17 h 56 min 3 s, l’agente no 5 du SPT indique qu’elle a reçu, de la part des suspects, un message lui demandant de les retrouver au STC. Elle demande à quelle heure l’équipe peut y être. Un autre agent demande à l’agente no 5 du SPT de répondre aux suspects qu’ils peuvent se rencontrer d’ici une heure, précisant que les agents veulent essayer de suivre le véhicule depuis la route Kingston et la route Markham. À 18 h 26 s, un agent de police fait savoir que le véhicule est en mouvement.
À 18 h 36 min 30 s, l’agente no 5 du SPT fait savoir qu’elle va envoyer aux suspects un message texte disant qu’elle est en chemin vers le STC. À 18 h 44 min 3 s, elle indique que les agents de police doivent attendre les suspects dans l’aire de restauration du niveau inférieur du STC.
À 19 h 39 min 23 s, un agent de police [on sait maintenant qu’il s’agissait de l’AT no 3] indique que les suspects se trouvent à dix minutes du lieu prévu de la rencontre. On donne ensuite des instructions, à savoir qu’il faut laisser les suspects se rendre à l’aire de restauration, où ils seront arrêtés.
À 19 h 49 min 42 s, un agent de police indique qu’un deuxième véhicule, associé aux suspects, est entré dans le parc de stationnement et qu’il se dirige vers la salle de cinéma. On précise ensuite que le véhicule s’est garé devant l’entrée de la salle de cinéma.
À 19 h 51 min 14 s, l’agente no 5 du SPT fait savoir qu’elle a reçu de la part des suspects un message lui demandant de les retrouver à la salle de cinéma.
À 19 h 53 min 24 s, l’AT no 3 demande aux membres de l’équipe d’intervention et de sécurité publique de bloquer la portière du côté conducteur du véhicule des suspects. À 19 h 54 min 53 s, un agent de police indique que les suspects sont descendus de leur véhicule et qu’ils marchent vers la salle de cinéma. On précise que le plaignant porte un pantalon rouge. À 19 h 55 min 28 s, un agent de police demande à (l’équipe chargée de l’arrestation) d’y aller sur-le-champ. À 19 h 57 min 47 s, un agent de police [on sait maintenant qu’il s’agissait de l’AT no 2] signale qu’une personne a été arrêtée. Un autre agent de police [on croit qu’il s’agissait de l’agent no 2 du SPT] fait lui aussi savoir qu’il a quelqu’un en garde à vue.
À 20 h 6 min 15 s, l’AT no 2 fait savoir qu’il s’apprête à transporter le plaignant au commissariat de la 43e division. Puis, à 20 h 20 min 7 s, l’AT no 2 indique qu’il est arrivé au commissariat.
À 22 h 4 min 35 s, un agent de police fait savoir qu’il entreprend le processus de transport d’une personne en état d’arrestation [on sait maintenant qu’il s’agissait du plaignant] vers l’Hôpital Centenary.
Documents obtenus du service de police
Sur demande, l’UES a reçu les documents suivants du SPT entre le 21 mars et le 6 avril 2024 :
- noms et information d’identification des agents concernés;
- enregistrements de la caméra d’intervention;
- images captées par les caméras à bord des véhicules de police;
- vidéo – SPT
- enregistrements des communications de la police;
- rapport du système de répartition assistée par ordinateur;
- notes de l’AT no 1;
- notes de l’AT no 2;
- notes de l’AT no 3;
- notes de l’AT no 4;
- notes de l’AI no 1;
- dossiers de requalification sur le recours à la force de l’AI;
- politique – arrestations;
- politique – recours à la force.
Éléments obtenus auprès d’autres sources
L’UES a obtenu les dossiers suivants auprès d’une autre source le 25 mars 2024 :
- dossiers médicaux du plaignant provenant du Centre de santé Centenary – Rouge Valley Health System.
Description de l’incident
Les éléments de preuve recueillis par l’UES, y compris les entrevues menées avec les agents de police qui ont participé à l’arrestation du plaignant et les enregistrements vidéo sur lesquels on voit certaines parties de l’incident, permettent d’établir le scénario suivant. Comme la loi les y autorise, les deux agents impliqués ont choisi de ne pas participer à une entrevue avec l’UES. L’AI no 1 a cependant accepté que l’on communique ses notes.
Dans la soirée du 19 mars 2024, des membres de l’UCM du SPT, y compris l’AI no 1 et l’AI no 2, se sont rassemblés au STC, avec des véhicules banalisés et en civil. Ils étaient là pour arrêter le plaignant et l’un de ses associés dans le cadre d’une enquête sur une affaire d’extorsion. Selon ce qui était présumé, les deux hommes avaient extorqué de l’argent à une personne et pensaient qu’ils allaient retrouver la victime de nouveau au centre commercial pour lui extorquer encore plus d’argent. Cependant, la victime avait fait appel à la police, qui avait ainsi mis sur pied une opération d’infiltration. Les agents, se faisant passer pour la victime, avaient accepté d’aller retrouver les deux hommes au centre commercial.
Le plaignant et son associé se sont rendus près de la salle de cinéma du centre commercial et ont envoyé un message texte à la « victime » pour lui indiquer où ils se trouvaient. Ils étaient tout juste devant l’entrée principale de la salle de cinéma lorsque des agents en civil se sont approchés d’eux et leur ont indiqué qu’ils étaient en état d’arrestation. Le plaignant a immédiatement pris la fuite. Il a sauté en bas de l’escalier menant à l’entrée de la salle de cinéma et a traversé la voie piétonnière en courant, en direction du parc de stationnement. Une fois au bout de la voie piétonnière, le plaignant a sauté sur le capot d’une berline blanche, a perdu pied et est tombé sur le sol, de l’autre côté du capot de la voiture.
L’AI no 1 et l’AI no 2 avaient garé leurs véhicules devant l’entrée de la salle de cinéma, derrière la berline blanche. C’est l’AI no 1 qui est arrivé en premier près du plaignant, après la chute de celui-ci. Le plaignant tentait de se relever lorsque le policier l’a porté de nouveau au sol. D’autres agents sont rapidement arrivés sur les lieux et le plaignant a été menotté, les mains dans le dos.
Le plaignant s’est immédiatement plaint qu’il avait mal. Il a été transporté au commissariat à bord d’une voiture de police, puis, plus tard, a été emmené à l’hôpital, où l’on a constaté qu’il avait une fracture du coude droit.
Dispositions législatives pertinentes
Paragraphe 25(1), Code criminel – Protection des personnes autorisées
25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier;
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public;
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public;
d) soit en raison de ses fonctions,
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.
Analyse et décision du directeur
Le plaignant a subi une blessure grave dans le contexte de son arrestation par des agents du SPT le 19 mars 2024. L’UES a été informée de l’incident et a entrepris une enquête, au cours de laquelle l’AI no 1 et l’AI no 2 ont été désignés à titre d’agents impliqués. L’enquête est maintenant terminée. Après avoir examiné les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’un ou l’autre des agents impliqués a commis une infraction criminelle relativement à l’arrestation et à la blessure du plaignant.
Il semble bien que les agents étaient en droit de procéder à l’arrestation du plaignant pour extorsion. Avant l’opération, on avait informé l’UCM de l’enquête en cours sur ce cas d’extorsion, au cours de laquelle le plaignant et son associé avaient été désignés comme suspects.
En ce qui concerne la force utilisée par les agents pour procéder à l’arrestation du plaignant, il n’y a aucune raison de croire qu’elle était contraire à la loi. Les éléments de preuve recueillis indiquent que le plaignant ne s’est pas rendu facilement en vue de son arrestation après sa chute, et que l’AI no 2 et l’AI no 1 ont employé une certaine force pour maîtriser ses bras. Ils n’ont pas eu recours à des armes et n’ont donné aucun coup. Même s’il est concevable que le plaignant ait subi sa fracture pendant qu’on luttait pour lui placer les bras dans le dos, il est plus probable qu’elle soit attribuable à sa chute au sol depuis le capot de la berline. L’enregistrement vidéo montre l’AT no 4 qui donne un coup de genou au côté droit du plaignant tandis que ce dernier est au sol, mais il semble qu’il s’agisse d’une tactique légitime pour contrer la résistance du plaignant, qui n’avait pas encore été menotté à ce moment-là. Vu ce qui précède, je ne suis pas en mesure de conclure, sur la base d’un jugement raisonnable, qu’on a employé une force excessive à l’endroit du plaignant.
Pour les raisons qui précèdent, j’estime qu’il n’y a aucun motif de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.
Date : 18 juillet 2024
Approuvé par voie électronique par
Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales
Notes
- 1) Sauf en cas d’indication contraire, les renseignements contenus dans cette section correspondent à ceux reçus par l’UES au moment où elle a été notifiée et ne correspondent pas nécessairement aux conclusions de l’UES à l’issue de son enquête. [Retour au texte]
- 2) Les enregistrements en question contiennent des renseignements personnels de nature délicate et ne sont donc pas divulgués, aux termes du paragraphe 34(2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties importantes de ces enregistrements sont résumées ci-dessous. [Retour au texte]
Note:
La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.