Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 24-OCI-026

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :

  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes;
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle;
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne;
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête;
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi;
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :

  • des renseignements qui révèlent des
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet

En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins;
  • des renseignements sur le lieu de l’incident;
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête;
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES au sujet d’une blessure grave subie par une femme de 40 ans (la « plaignante »).

L’enquête

Notification de l’UES[1]

Le 18 janvier 2024, à 8 h 50, le Service de police de Windsor (SPW) a signalé ce qui suit à l’UES.

Plus tôt ce jour-là, à 1 h 39, des agents du SPW se sont rendus dans le secteur de la rue Shepherd Est et de Lincoln Road pour une collision automobile impliquant une résidence. Des témoins avaient signalé qu’ils avaient vu un homme et une femme à bord du véhicule se disputer, et que la femme — la plaignante — était ensuite partie à pied en direction sud, sur la rue. Après enquête, les agents ont découvert que la plaignante faisait l’objet d’un mandat à ce moment-là et qu’elle habitait dans le quartier. Les agents se sont rendus chez elle. Ils ont cogné à la porte et le père de la plaignante a répondu. Il a demandé à la plaignante de venir à la porte d’entrée. Elle semblait ivre. Elle est sortie pieds nus sur le porche couvert de neige et de glace, a glissé et est tombée à la renverse sur le porche. Les agents l’ont aidée à se relever et l’ont placée en état d’arrestation à 2 h 2, sans autre incident. Les agents l’ont emmenée au poste du SPW et à l’unité de détention. Au moment de sa mise en détention, elle s’est plainte qu’elle avait mal au poignet droit et a indiqué au sergent de la mise en détention qu’elle était déjà blessée avant l’intervention de la police. Les services médicaux d’urgence (SMU) ont été appelés au poste de police à 3 h. La plaignante a été transportée au Complexe Ouellette de l’Hôpital régional de Windsor (HRW), où on lui a diagnostiqué une fracture du poignet droit vers 8 h.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 18 janvier 2024 à 14 h 17

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 18 janvier 2024 à 15 h 23

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des

sciences judiciaires de l’UES assignés : 0

Personne concernée (la « plaignante ») :

Femme de 40 ans, a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

La plaignante a participé à une entrevue le 22 janvier 2024.

Agent impliqué (AI)

AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué

Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT no 2 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT no 3 N’a pas participé à une entrevue; notes examinées et entrevue jugée non nécessaire

Les agents témoins ont participé à des entrevues le 1er février 2024.

Éléments de preuve

Les lieux

Les événements se sont produits sous le porche avant d’une résidence située dans le secteur de la rue Shepherd Est et de Lincoln Road, à Windsor.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[2]

Images de la détention — SPW

Le 18 janvier 2024, vers 2 h 44, on voit la plaignante s’approcher du comptoir de mise en détention. Elle vacille quelque peu, mais coopère avec la police et répond à toutes les questions.

Vers 2 h 46, la plaignante affirme qu’elle a subi une blessure au poignet droit lors de son arrestation. La blessure n’a pas été causée par les menottes. Elle explique : [Traduction] « Je pense que c’est arrivé dans la voiture ». Elle a de la difficulté à plier son poignet vers le haut et ne peut pas le plier. Elle ajoute : « Je pense que je l’ai foulé ou quelque chose ». La plaignante déclare qu’elle a bu quatre bouteilles de bière au cours de la soirée et qu’elle n’a pas consommé de drogue ni de cannabis.

Vers 2 h 48, le sergent de la mise en détention pose d’autres questions à la plaignante. Elle n’a aucune idée de ce qui a pu causer la blessure et indique que, après l’accident : « je suis rentrée chez moi, et c’est là que la police est arrivée, et j’ai commencé à remarquer que j’avais mal au poignet ». Lorsque le sergent de la mise en détention lui demande si elle avait mal au poignet avant que la police arrive chez elle, elle répond par l’affirmative.

Enregistrements des communications de la police/Système de répartition assistée par ordinateur (Système RAO)

Vers 1 h 39, le 18 janvier 2024, le SPW reçoit quatre appels au 911, dont un du propriétaire d’une maison située dans le secteur de la rue Shepherd Est et de Lincoln Road. Une camionnette noire avait fait une sortie de route et avait percuté son porche. Un homme aurait dit à une femme : [Traduction] « T’as détruit mon foutu camion ». La femme et l’homme ont essayé de déloger la camionnette du porche. Ils se sont ensuite disputés et la femme est partie à pied. Deux agents de police ont été envoyés sur les lieux, y compris l’AI.

Vers 2 h 9, l’AI indique qu’il se trouve à un domicile situé dans le secteur de la rue Shepherd Est et de Lincoln Road, et que le plaignante fait l’objet d’un mandat d’arrêt non exécuté. L’AI annonce que la plaignante est en garde à vue. Le mandat se rapportait à la conduite en état d’ébriété. Un fourgon de transport de prisonniers est demandé.

Le rapport du Système RAO indique que, vers 2 h 10, l’AT no 1 et l’AT no 2 se sont rendus sur les lieux pour aider l’AI.

Le rapport du Système RAO indique que, à 3 h 6, les SMU étaient au poste de police et allaient emmener la plaignante à l’hôpital.

Documents obtenus auprès du service de police

Sur demande, l’UES a reçu les éléments suivants de la part du SPW entre le 18 janvier 2024 et le 22 janvier 2024 :

  • Notes de l’AT no 1
  • Notes de l’AT no 2
  • Notes de l’AT no 3
  • Enregistrements de communications
  • Rapport du Système RAO
  • Vidéos de la détention
  • Rapport d’incident général — collision automobile
  • Rapport d’incident général — blessure
  • Copie du mandat à l’endroit de la plaignante

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a obtenu les documents suivants auprès d’autres sources le 23 janvier 2024 :

  • Dossier médical de la plaignante — Complexe Ouellette de l’Hôpital régional de Windsor

Description de l’incident

La preuve recueillie par l’UES, laquelle comprend une entrevue avec la plaignante et des vidéos de sa détention au poste de police, dresse le portrait suivant de l’incident. Comme la loi l’y autorise, l’AI a choisi de ne pas participer à une entrevue avec l’UES et de ne pas autoriser la communication de ses notes à l’UES.

Au petit matin du 18 janvier 2024, le SPW a reçu des appels au 911 concernant une collision automobile. Une camionnette semblait avoir percuté une maison dans le secteur de la rue Shepherd Est et de Lincoln Road, à Windsor. L’AI s’est rendu sur les lieux. Son enquête l’a mené à un domicile situé dans ce quartier. Il avait des raisons de croire qu’une femme impliquée dans la collision s’était rendue à ce domicile.

Une fois arrivé au domicile, non loin du lieu de la collision, l’AI a localisé la femme — la plaignante — et l’a mise en garde à vue. Elle a ensuite été emmenée au poste de police dans un fourgon de transport de prisonniers.

La plaignante s’est plainte qu’elle avait mal à la main droite et a été transportée à l’hôpital, où on lui a diagnostiqué une fracture du poignet droit.

Analyse et décision du directeur

Une blessure grave a été diagnostiquée chez la plaignante à la suite de son arrestation par un agent du SPW le 18 janvier 2024. L’UES a été informée de l’incident et a ouvert une enquête dans laquelle l’AI a été désigné comme étant l’agent impliqué. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon examen de la preuve, je n’ai aucun motif raisonnable de croire que l’AI a commis une infraction criminelle en lien avec l’arrestation de la plaignante et la blessure que cette dernière a subie.

La légalité de l’arrestation de la plaignante n’est pas en cause dans cette affaire. À ce moment-là, elle faisait l’objet d’un mandat d’arrêt non exécuté et l’AI avait donc les motifs nécessaires pour la placer en garde à vue.

Les éléments de preuve évoquent trois possibilités quant à l’origine de la blessure de la plaignante. La plus vraisemblable est que la plaignante, qui était à bord de la camionnette lors de la collision, a été blessée à ce moment-là. Selon certains éléments de preuve, il est également possible que la plaignante se soit brisé le poignet en tombant sur le porche glissant de son domicile, peu avant ou peu après que l’AI l’ait placée en état d’arrestation. Aucun de ces scénarios ne permet d’engager la responsabilité criminelle de l’agent. Dans deux des trois possibilités, la blessure s’est produite avant que la plaignante soit arrêtée. Dans le cas d’une prisonnière menottée, l’AI a assurément une obligation de diligence à son égard tant que la personne est sous sa garde. Cependant, les éléments de preuve permettent tout au plus d’envisager un manque d’attention momentané de la part de l’agent afin d’éviter que la plaignante fasse une chute sur une surface glissante. Cela est loin de constituer un écart marqué par rapport à la norme de diligence qui serait considérée comme raisonnable dans les circonstances, et qui pourrait donc ouvrir la voie à une sanction pénale.

Pour les motifs qui précèdent, j’en conclus qu’il n’y a pas lieu de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.

Date : 16 mai 2024

Approuvé électroniquement par

Joseph Martino

Directeur

Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) À moins d’indication contraire, les renseignements fournis dans cette section reflètent les renseignements fournis à l’UES au moment de la notification et ne reflètent pas nécessairement les faits constatés par l’UES dans le cadre de son enquête. [Retour au texte]
  • 2) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués, comme le prévoit le paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les principaux éléments des documents sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.