Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 23-TVI-416

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 27 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES [1]

Le 12 octobre 2023, à 0 h 08, le Service de police de Toronto (SPT) a communiqué à l’UES les renseignements suivants.

Le 11 octobre 2023, à 14 h 47, un agent motocycliste des Services de la circulation (SC) du SPT, l’agent impliqué (AI), a signalé au service de répartition de la police qu’il avait été témoin d’une collision avec blessures corporelles près de l’intersection de la rue Judson et de l’avenue Islington. Un homme [identifié plus tard comme étant le plaignant] qui roulait sur un vélo électrique, s’est engagé dans l’intersection à un feu rouge et a été happé par un véhicule. L’AI a demandé l’intervention des Services médicaux d’urgence (SMU), qui ont transporté le plaignant à l’hôpital St. Michael (HSM), où on lui a diagnostiqué des fractures au fémur, au pied et au cou. Il a été admis à l’hôpital en attendant une intervention chirurgicale.

La collision a fait l’objet d’une enquête des services de la circulation du SPT. Ils ont pris des photographies de la scène avant qu’elle ne soit libérée.
À 19 h 30, après avoir terminé son quart de travail, l’AI a contacté son superviseur, l’agent témoin (AT) no 2, pour lui signaler qu’avant de découvrir la collision, il avait tenté d’arrêter le plaignant qui conduisait le vélo électrique. On ne sait pas où ni pourquoi l’AI a tenté d’arrêter le plaignant, mais il a été signalé que le plaignant ne portait pas de casque et que le vélo électrique n’était pas immatriculé. C’est peu après que l’AI a découvert la collision. L’AI ne semblait pas avoir signalé la tentative de contrôle routier au service de répartition de la police.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 12 octobre 2023 à 6 h 13

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 12 octobre 2023 à 8 h 33

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 4
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1
Nombre de spécialistes de la reconstitution des collisions assignés : 1

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 27 ans; n’a pas consenti à participer à une entrevue; ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés


Témoins civils (TC)

TC no 1 N’a pas participé à une entrevue (a refusé)
TC no 2 N’a pas participé à une entrevue (a refusé)
TC no 3 A participé à une entrevue
TC no 4 N’a pas participé à une entrevue (a refusé)

Le témoin civil a participé à une entrevue le 16 octobre 2023.

Agent impliqué (AI)

AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorisait en tant qu’agent impliqué.


Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à une entrevue entre le 8 et le 22 novembre 2023.


Éléments de preuve

Les lieux

Les événements en question se sont déroulés sur un tronçon de route qui allait de l’avenue Evans, à l’est de l’avenue Horner, vers l’ouest puis vers
+ le sud sur l’avenue Horner, puis et enfin vers l’est sur la rue Judson jusqu’au lieu d’une collision automobile, à l’intersection de la rue Judson et de l’avenue Islington, à Toronto.

Le résumé avec schéma suivant, y compris certaines mesures, a été effectué par l’AT no 1 dans son rapport de collision de véhicule automobile. Il montre l’endroit où se trouvaient un vélo électrique et le véhicule du TC no 4, ainsi que l’endroit où le plaignant a atterri après la collision, dans les voies en direction nord.

schéma

Éléments de preuve matériels

L’intersection de l’avenue Islington et de la rue Judson est un grand carrefour contrôlé par des feux de circulation dans un secteur principalement industriel du sud d’Etobicoke. L’avenue Islington est orientée (principalement) nord-sud et la rue Judson (principalement) est-ouest.

La chaussée en direction sud de l’avenue Islington, au nord de l’intersection, est asphaltée, avec deux voies de circulation directe et, à l’intersection, une voie de virage à gauche (du sud vers l’est). Un terre-plein en béton sépare les voies sud des voies nord. Sur le côté ouest, la chaussée est délimitée par une bordure de hauteur courante, suivie d’une bande de gazon et d’un trottoir de largeur courante. Le trottoir borde la pelouse sur le terrain d’une entreprise de transport.

Les voies est de la rue Judson, à l’ouest de l’intersection, sont asphaltées et séparées des voies en direction ouest par un terre-plein en béton. La chaussée en direction est comprend une voie directe vers l’est et une voie de virage à gauche (de l’est vers le nord). Cette section de la chaussée est séparée de la propriété située au coin sud-ouest de l’intersection par une bordure et un trottoir de largeur courante.

Au sud de l’intersection, la chaussée en direction sud comprend deux voies de circulation séparées de la propriété située au coin sud-ouest par une section de chaussée revêtue (marquée comme interdite à la circulation par des inscriptions peintes), une bordure de hauteur courante, un trottoir plus large que la largeur courante et un muret de béton surmonté d’une balustrade en métal. Les voies sud et nord sont séparées par un terre-plein en béton.

L’intersection comprend des passages pour piétons dans les quatre directions.

Toutes les photographies ci-dessous ont été prises par le SPT le 11 octobre 2023. La première, orientée vers le sud depuis les voies en direction sud de l’avenue Islington, au nord de l’intersection, montre l’emplacement du vélo électrique du plaignant (repéré par une flèche rouge horizontale sur la photographie) et l’endroit où le véhicule du TC no 4 s’est arrêté après la collision (repéré par une flèche rouge verticale).


Figure 1 – Photographie de la scène avec le vélo électrique du plaignant repéré par une flèche horizontale rouge et le véhicule du TC no 4 repéré par une flèche verticale rouge

Figure 1 – Photographie de la scène avec le vélo électrique du plaignant repéré par une flèche horizontale rouge et le véhicule du TC no 4 repéré par une flèche verticale rouge

La photo suivante, orientée vers le nord depuis les voies en direction sud de l’avenue Islington, au sud de l’intersection, montre le vélo électrique et les débris sur la chaussée.


Figure 2 – Photographie de la scène montrant le vélo électrique du plaignant et les débris résultant de la collision

Figure 2 – Photographie de la scène montrant le vélo électrique du plaignant et les débris résultant de la collision

La photo suivante montre les dommages causés à la voiture du TC no 4 par l’impact. [2]


Figure3 – Le véhicule du TC no 4

Figure 3 – Le véhicule du TC no 4

Figure 4 - Le vélo électrique du plaignant

Figure 4 - Le vélo électrique du plaignant

Le 13 octobre 2023, un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES s’est rendu au poste des services de la circulation du SPT où il a examiné et photographié la moto du SPT sur laquelle l’AI roulait au moment de l’incident. La Harley Davidson 2015 était identifiée par un numéro de véhicule de service et par les graphismes des motos du SPT. Elle ne présentait aucun signe de dommage de collision. Son système d’éclairage d’urgence, son klaxon et sa sirène fonctionnaient comme prévu.

 la moto du SPT

Éléments de preuves médicolégaux


Données du système de positionnement global (GPS)

À 13 h 46 min 5 s, la moto de la police roule vers l’ouest sur l’avenue Evans, à l’approche de l’avenue Horner. Elle ralentit et roule à 55 km/h.

À 13 h 46 min 16 s, elle roule vers le sud sur l’avenue Horner et accélère rapidement depuis l’intersection de l’avenue Evans pour atteindre 101 km/h.

À 13 h 46 min 20 s, elle termine un virage à gauche sur l’avenue Horner et atteint 105 km/h.

À 13 h 46 min 24 s, elle approche du 88, avenue Horner, et ralentit à 85 km/h.

À 13 h 46 min 31 s, elle approche de l’intersection avec la rue Judson et ralentit à 68 km/h.

À 13 h 46 min 51 s, elle roule vers l’est sur la rue Judson, après avoir accéléré rapidement après l’intersection avec l’avenue Horner, et roule à environ 103 km/h.

À 13 h 46 min 53 s, elle continue vers l’est, toujours en accélérant. Elle roule à environ 126 km/h à ce moment-là.

À 13 h 46 min 57 s, elle accélère encore en direction est pour atteindre une vitesse maximale enregistrée de 137 km/h, à environ 200 mètres de l’intersection de l’avenue Islington et de la rue Judson.

À 13 h 47 min 2 s, elle ralentit à environ 93 km/h à environ 50 mètres de l’intersection.
À 13 h 47 min 8 s, elle est à l’intersection avec une vitesse enregistrée de 5 km/h.

Témoignage d’expert


Spécialiste de la reconstitution des collisions de l’UES

Un spécialiste de la reconstitution des collisions de l’UES a examiné les données disponibles et est arrivé aux conclusions suivantes.

La collision s’est produite à l’intersection de la rue Judson et de l’avenue Islington; cependant, le secteur d’intérêt comprenait aussi l’avenue Horner et la rue Judson, à l’ouest de l’intersection de l’avenue Islington.

Le secteur en question est principalement un secteur industriel entrecoupé d’allées menant à des bâtiments commerciaux de faible hauteur qui croisent les routes locales. L’avenue Horner est orientée nord-sud et comprend quatre voies. Le côté est de l’avenue Horner est bordé d’une bande gazonnée suivie d’un trottoir. La limite de vitesse affichée est de 50 km/h.

La rue Judson est orientée est-ouest et comprend deux voies. Elle croise l’avenue Horner suivant une intersection en T. La circulation qui emprunte la rue Judson depuis l’avenue Horner en direction sud n’est pas contrôlée (pas de panneau d’arrêt ni de feux de circulation), mais une voie est réservée aux virages à gauche. La limite de vitesse sur la rue Judson est de 40 km/h. Le côté nord de la rue est bordé d’une bande gazonnée suivie d’un trottoir.

L’avenue Islington est orientée nord-sud et comporte quatre voies. L’intersection de la rue Judson et de l’avenue Islington est une intersection à quatre voies contrôlée par des feux de circulation. Des terre-pleins en béton surélevés séparent les voies en direction opposée. La limite de vitesse sur l’avenue Islington est de 60 km/h.

Après l’impact, le vélo électrique a glissé sur la chaussée sur environ 30 mètres avant de s’immobiliser. Les recherches sur le frottement par glissement typique des petites motos sur l’asphalte ont conclu à une plage de frottement comprise entre 0,40 et 0,65. D’après cette plage de friction, la vitesse après impact du vélo électrique était de 55 à 70 km/h. Compte tenu de la trajectoire présumée de chaque véhicule avant l’impact, toute la trajectoire du vélo électrique vers le sud après l’impact résultait de l’impact avec le véhicule qu’il a heurté. Autrement dit, compte tenu de l’endroit où le vélo électrique s’est immobilisé, le véhicule qu’il a heurté roulait probablement entre 55 et 70 km/h au moment de la collision. Cette plage de vitesse correspondait au fait que le véhicule roulait à peu près à la limite de vitesse de 60 km/h au moment de l’impact.

En ce qui concerne la vitesse du vélo électrique, l’angle entre les marques d’impact au coin avant droit et au centre du linteau de toit était d’environ 30 degrés. Cela correspond à une vitesse du vélo électrique comprise entre 32 et 40 km/h au moment de l’impact.

L’angle droit de la caméra qui a enregistré le vélo électrique et la moto de police quand ils roulaient vers le sud sur l’avenue Horner a permis d’obtenir une mesure de la vitesse raisonnablement précise. La vitesse du vélo électrique dans cette vidéo a été estimée à une moyenne d’environ 85 km/h. La vitesse de la moto a été estimée à environ 80 km/h.

On a procédé à une simulation du mouvement de la moto de police au cours de la minute précédant la collision entre le vélo électrique et un autre véhicule, en se fondant sur les données GPS et en intégrant le mouvement approximatif du vélo électrique dans les 15 secondes précédant l’impact d’après les images des caméras de sécurité et l’hypothèse selon laquelle la vitesse maximale du vélo électrique était de 114 km/h.

La moto était à environ 100 mètres à l’ouest de l’intersection de l’avenue Islington et de la rue Judson quand le vélo électrique s’est engagé dans l’intersection de l’avenue Islington où la collision s’est produite.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [3]


Vidéos du centre communautaire Ourland et de Clutch Auto Sales

Les vidéos du centre communautaire Ourland de la ville de Toronto, situé au 18, avenue Ourland, au coin nord-est de l’avenue Islington et de la rue Judson, et de Clutch Auto Sales, situé au 223, avenue Evans, n’ont pas permis d’obtenir des renseignements utiles pour l’enquête.

Vidéo de Cordeiro Roofing - Caméra « Devant S »

Située au 88, avenue Horner, la caméra était orientée vers le nord, vers une courbe de l’avenue Horner, au nord du bâtiment. Le 11 octobre 2023, vers 12 h 30 min 1 s, la vidéo montre une circulation légère à modérée dans les deux sens.

Vers 13 h 44 min 53 s, un vélo électrique conduit par le plaignant entre dans le champ de vision de la caméra et se dirige vers le sud dans la voie en bordure. Une moto du SPT conduite par l’AI circule à côté du vélo électrique, à environ un mètre de celui-ci. Le plaignant s’engage dans l’allée conduisant au stationnement nord de Cordeiro Roofing et continue vers le sud sur le trottoir, du côté ouest de l’avenue Horner; l’AI roule à sa hauteur dans la voie en bordure. Les feux d’urgence de la moto sont activés. Les deux véhicules disparaissent du champ de la vision de la caméra à 13 h 44 min 57 s. [4]

Vidéo de Cordeiro Roofing – Caméra « Devant N »

La caméra était orientée vers le sud le long de l’avenue Horner.

Le plaignant apparaît sur la vidéo vers 13 h 44 min 56 s. Il roule sur son vélo électrique vers le sud sur la pelouse devant le bâtiment de Cordeiro Roofing, à l’ouest du trottoir. Une moto de police conduite par l’AI roule vers le sud dans la voie en bordure, parallèlement au plaignant, ses feux d’urgence activés. Il n’y a aucun piéton sur le trottoir. Le plaignant se dirige vers un passage piéton qui mène au stationnement sud de Cordeiro Roofing et roule le long de ce passage avant de continuer à travers le stationnement et sur une pelouse entre le trottoir et la clôture périphérique d’une propriété voisine. Le vélo électrique perd brièvement contact avec le sol pendant que le plaignant poursuit sa route vers le sud. L’AI passe dans la voie de dépassement en direction sud de l’avenue Horner, puis revient dans la voie en bordure. Juste au nord de la rue Judson, le plaignant tourne vers l’est, franchit le trottoir, puis traverse l’avenue Horner, avec l’AI au sud de lui (au sud de l’intersection). Le plaignant se dirige ensuite vers l’est sur la rue Judson.

Vers 13 h 45 min 8 s, alors que le plaignant vire pour continuer sur la rue Judson, l’AI fait demi-tour et contourne un véhicule civil arrêté sur l’avenue Horner. L’AI se dirige vers l’est sur la rue Judson et semble accélérer. À 13 h 45 min 16 s, la moto et le vélo électrique ne sont plus visibles sur la vidéo.

Vidéo de Cordeiro Roofing – Caméra « Entrée S »

La moto de l’AI entre dans le champ de vision de la caméra à 13 h 44 min 57 s Elle roule vers le sud sur l’avenue Horner dans la voie en bordure. Le plaignant est à environ deux longueurs de moto derrière lui. Le plaignant roule sur le trottoir et dépasse l’AI, qui passe dans la voie de dépassement en direction sud.

À 13 h 44 min 59 s, le vélo électrique disparait du champ de vision de la caméra suivi une seconde plus tard de la moto de police.

Enregistrements des communications et rapport de la répartition assistée par ordinateur (RAO)

Enregistrées le 11 octobre 2023, les communications radio et téléphoniques de la police commencent à 13 h 47, au moment où l’AI demande qu’on envoie d’urgence une ambulance à l’intersection de la rue Judson et de l’avenue Islington pour un homme – le plaignant – qui vient d’être happé par une voiture.

Vers 13 h 50, le centre de communication appelle les services médicaux d’urgence pour leur transmettre la demande, en précisant que du sang coule de la bouche de l’homme, qu’il a perdu connaissance et qu’il a été projeté dans les airs. Une minute plus tard, le centre de communication demande sur le réseau radio de la police que des agents bloquent la circulation dans le secteur.

À 13 h 55, une entrée dans le rapport de RAO indique que le plaignant a été projeté sur six mètres.
À 13 h 59, un agent annonce que l’ambulance est arrivée et qu’on évalue l’état du plaignant.

À 14 h 15, on annonce que l’ambulance conduit le blessé à l’hôpital.

À 14 h 28, on annonce l’arrivée de l’ambulance à l’Hôpital St. Michael.

À 14 h 52, une entrée de RAO indique que le plaignant ne portait pas de casque et que son vélo électrique roulait à au moins 50 km/h.

À 15 h 14, le vélo électrique est décrit comme étant entièrement électrique, sans plaque d’immatriculation et sans pédales.

À 16 h 55, on annonce par radio que les blessures du plaignant ne mettent pas sa vie en danger.

À 18 h 02, on annonce que le plaignant a une fracture du fémur, un pied cassé et une fissure au cou et qu’il devra subir une intervention chirurgicale en soirée.

À 18 h 03, le rapport de RAO mentionne la déclaration d’un témoin selon lequel le plaignant avait brûlé un feu de circulation et avait été happé par un véhicule qui roulait vers le sud et pour lequel le feu était au vert.

Vidéo de la caméra d’intervention de l’AI

Le 11 octobre 2023, la caméra d’intervention de l’AI a enregistré environ 40 minutes en vidéo à partir d’environ 13 h 47. Au début de la vidéo, l’AI est sur l’avenue Islington, au sud de la rue Judson. Sa moto est garée à l’intersection, feux d’urgence activés. Un blessé – le plaignant – est allongé sur la chaussée. L’AI retourne à sa moto, récupère sa radio de police portative, puis se dirige vers le plaignant et lui demande s’il peut l’entendre. Le plaignant ne répond pas.

Vers 13 h 48, l’AI demande qu’on envoie d’urgence une ambulance et dit au plaignant de ne pas bouger. Le plaignant essaie de se relever. L’AI demande du renfort par radio.

D’autres agents arrivent à partir de 13 h 50 et commencent à contrôler la circulation.

À 13 h 52, l’AI demande de nouveau par radio qu’on envoie une ambulance d’urgence. Des pompiers du service d’incendie de Toronto arrivent à 13 h 54 et examinent le plaignant.

À 13 h 55, l’AI parle avec le TC no 4, le conducteur de la voiture qui est entrée en collision avec le plaignant.

Une ambulance arrive à 13 h 57, et un homme [vraisemblablement le TC no 3] explique aux ambulanciers paramédicaux que la collision a projeté le plaignant dans les airs.

Vers 14 h 01, le TC no 3 demande à l’AI [5] : « L’avez-vous vu? » L’AI déclare : « Je suis arrivé après coup, mais j’ai vu le vélo exploser. » Le TC no 3 dit : « Vous êtes arrivé assez vite », et l’AI répond : « Mon centre d’entraînement est juste de l’autre côté. » Le TC no 3 dit : « Les voitures tournaient à gauche, je l’ai vu dans les airs. Il portait un masque alors je l’ai enlevé pour qu’il puisse respirer. Il a été projeté très haut.

L’ambulance part à 14 h 15.

L’AT no 1 demande à l’AI : “T’as vu ce qui s’est passé? et l’AI répond : « Non, je suis tombé dessus, j’ai vu des vélos similaires là-bas, mais je ne sais pas qui est qui et quoi est quoi, j’allais juste au terrain d’entraînement. »

À 14 h 20, l’AI se dirige vers la voiture du TC no 4 et sa caméra filme l’avant et le pare-brise endommagés.

À 14 h 25, un autre agent demande à l’AI s’il avait vu la collision et il répond qu’il est arrivé après coup.

À 14 h 27, après avoir demandé à l’AT no 2 s’ils devraient éteindre leur caméra d’intervention, l’AI éteint sa caméra.

Vidéo de la caméra d’intervention de l’AT no 2

Le 11 octobre 2023, la caméra d’intervention de l’AT no 2 a enregistré environ 140 minutes en vidéo. Au début de la vidéo, vers 14 h 12, l’AT no 2 est sur l’avenue Islington, au sud de la rue Judson, et discute avec d’autres agents de police à proximité d’une ambulance. L’audio est activé à 14 h 13, quand l’AT no 2 demande à l’AI si des témoins ont fait des déclarations. Il donne ensuite des instructions aux autres agents.

À 14 h 15, l’AT no 2 annonce sur le réseau radio de la police que l’ambulance est en route vers l’hôpital.

Vers 14 h 25, l’AT no 2 parle à l’AT no 1, qui lui explique ce qu’il a compris du déroulement de la collision, d’après ses conversations avec des témoins. Elle lui dit qu’elle ne pense pas que le conducteur du véhicule qui est entré en collision avec le plaignant était sous l’influence de l’alcool ou de drogues.

À 14 h 27, l’AI demande à l’AT no 2 s’ils devraient éteindre leurs caméras. L’AT no 2 est d’accord et éteint sa caméra. Il la remet en marche à 14 h 45.

À 14 h 52, l’AT no 2 dit sur le réseau radio de la police que le TC no 4 respectait probablement la limite de vitesse.

À 15 h 01, l’AT no 2 parle à l’AI, qui dit : « Je commence à me demander si ce ne sont pas les deux motos que j’ai vues. C’était à l’autre intersection et ils sont partis à toute allure, alors j’ai pris à droite et je suis allé dans cette direction et il n’y avait personne. Alors, je suis descendu le long d’Evans. Quoi qu’il en soit, j’ai tourné à gauche et je suis arrivé ici et boum, je l’ai trouvé. »

À 15 h 14, l’AT no 2 et l’AT no 1 discutent des caractéristiques du vélo électrique.
À 15 h 20, l’AT no 2 met l’enregistrement audio en sourdine et répond à un appel téléphonique d’une minute.
À 15 h 29, l’AT no 2 se dirige vers la voiture du TC no 4 et prend des notes.

À 15 h 34, l’AT no 2 se rapproche à moto de l’intersection et aide à contrôler la circulation. À 15 h 59, il met la fonction audio en sourdine et répond à un appel téléphonique de 14 minutes.

Vers 16 h 23, le TC no 4 s’approche de l’AT no 2 et lui dit : ‘L’AI m’a dit qu’il arrivait sur Evans, et a vu deux gars à vélo qui roulaient à toute vitesse et c’est pour cela qu’il est venu par ici et je parlais au chauffeur de la dépanneuse, et il m’a dit que l’un des gars passait par là et s’éloignait à toute vitesse. Donc, un gars est allé dans une direction et l’autre dans l’autre direction. C’est pour ça qu’il a brûlé le feu rouge, il essayait de s’enfuir. L’AI était juste derrière lui. Dès qu’il l’a frappé.

L’AT no 2 éteint sa caméra d’intervention à 16 h 40. Il la remet en marche de 16 h 48 à 16 h 50, puis l’éteint de nouveau. Il la remet en marche à 17 h 01. Il est alors près du vélo électrique qu’il aide un autre agent à examiner avant la fin de l’enregistrement.

Vidéo de caméra corporelle d’un agent non désigné (ND)

Le 11 octobre 2023, vers 14 h 14 environ, le TC no 2 dit à l’agent ND que, vers 13 h 55, il était arrêté au feu rouge, en direction est sur la rue Judson, qui contrôlait la circulation à son intersection avec l’avenue Islington. Il a d’abord remarqué un vélo électrique dans son rétroviseur, puis l’a vu passer devant lui à grande vitesse, franchir le feu rouge, s’engager dans l’intersection et heurter une voiture. La collision a fait tomber le rétroviseur latéral du véhicule heurté par le vélo électrique. Il déclare : “Je ne savais même pas qu’il était pourchassé, ou suivi, ou je ne sais quoi par l’autre agent.” Le conducteur du vélo électrique a été projeté par-dessus les feux de circulation et a été grièvement blessé. Une moto de police est également arrivée derrière lui, a activé ses feux d’urgence, s’est arrêtée à l’intersection, après quoi l’agent s’est engagé dans l’intersection et a commencé à prodiguer les premiers soins.
 

Vidéo de la caméra d’intervention de l’AT no 1

La vidéo de la caméra d’intervention de l’AT no 1 commence le 11 octobre 2023 à 13 h 59. Alors que l’AT no 1 sort de son véhicule de police, la vidéo montre la scène après la collision en direction sud depuis les voies en direction sud de l’avenue Islington, juste au nord de son intersection avec la rue Judson. L’AT no 1 parcourt les lieux en prenant des notes, retourne à son véhicule de police puis revient à l’intersection. Les ambulanciers paramédicaux placent un homme [maintenant connu pour être le plaignant] dans une ambulance. L’AT no 1 parle à un témoin – le TC no 3 – qui lui dit que le plaignant “avait grillé le feu rouge et qu’une voiture rouge l’avait heurté et qu’il avait été projeté dans les airs”, ajoutant qu’il n’avait pas vu le plaignant porter un casque et que "les flics sont arrivés ici très vite aussi".
L’AT no 1 marche jusqu’au vélo électrique du plaignant, puis jusqu’à l’ambulance. Le plaignant est dans l’ambulance, sur une civière; il gémit. L’AT no 1 lui demande s’il a consommé de l’alcool ou des drogues, et le plaignant lui répond par la négative. Elle demande à un ambulancier paramédical si le plaignant avait un casque et l’ambulancier lui répond qu’il ne sait pas. Elle dit qu’elle ne sent pas une odeur d’alcool.

L’AT no 1 parle ensuite au TC no 4 – le conducteur du véhicule que le plaignant a frappé. Le TC no 4 lui dit qu’il n’a pas consommé d’alcool. L’AT no 1 lui dit qu’elle ne va pas lui poser de questions au sujet de la collision, car un détective voudra peut-être lui parler en premier. Elle note les dommages du côté passager et du pare-brise du véhicule du TC no 4.

L’AT no 1 parle ensuite à un agent avant de retourner à son véhicule de police où elle couvre la lentille de sa caméra et utilise l’ordinateur à bord du véhicule. Un policier – un agent ND – lui dit qu’il avait parlé au TC no 2, qui a vu « le vélo électrique se diriger vers l’est, puis traverser au rouge et qu’une moto du SPT était là et a allumé ses feux ». Une voix non identifiée [probablement l’AI] déclare : "Le sergent nous a dit d’éteindre nos caméras, car il n’y avait plus d’enquête." L’AT no 1 dit qu’elle va éteindre sa caméra. La vidéo prend fin à 14 h 40.

Éléments obtenus auprès du service de police

Sur demande, le SPT a remis à l’UES les éléments et documents suivants entre le 17 octobre et le 12 décembre 2023 :

  • Liste des agents concernés;
  • Liste de témoins civils;
  • Rapport de répartition assistée par ordinateur;
  • Rapport de collision de véhicules automobiles;
  • Enregistrements des communications de la police;
  • Photographies des lieux;
  • Vidéo de la caméra d’intervention de l’AT no 1;
  • Vidéo de la caméra d’intervention d’un agent non désigné;
  • Vidéo de la caméra d’intervention de l’AI;
  • Vidéo de la caméra d’intervention de l’AT no 2;
  • Données GPS de la moto de police;
  • Politique du SPT relative aux poursuites en vue de l’appréhension d’un suspect.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a obtenu les dossiers suivants auprès d’autres sources entre le 21 novembre 2023 et le 19 janvier 2024.

  • Dossier médical du plaignant – Hôpital St. Michael (reçu le 19 janvier 2024) ;
  • Vidéo du centre communautaire Ourland (reçue le 27 novembre 2023) ;
  • Vidéo de Clutch Automotive Sales (reçue le 21 novembre 2023);
  • Vidéo de Cordeiro Roofing (reçue le 21 novembre 2023).

Description de l’incident

La séquence d’événements suivante découle des éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment de vidéos qui ont enregistré certaines parties de l’incident. L’AI n’a pas consenti à participer à une entrevue avec l’UES ni autorisé la communication de ses notes, comme la loi l’y autorisait en tant qu’agent impliqué.

Dans l’après-midi du 11 octobre 2023, l’AI conduisait sa moto de police sur l’avenue Evans lorsqu’un vélo électrique a attiré son attention. Il a décidé de le suivre. Le conducteur du vélo électrique ne portait pas de casque – une infraction au Code de la route.

Quand il a réalisé que l’AI le suivait, le conducteur du vélo électrique – le plaignant – a accéléré pour s’enfuir. Depuis l’avenue Evans en direction ouest, il a tourné vers le sud sur l’avenue Horner où il a conduit de manière imprudente : il a franchi la bordure de la chaussée du côté ouest, a roulé à grande vitesse sur le trottoir ouest et sur l’aire gazonnée à l’approche de la rue Judson, et a viré à gauche sur la rue Judson depuis le trottoir ouest.

L’AI a poursuivi le plaignant sur l’avenue Horner avec ses feux d’urgence allumés, pour finalement arriver à sa hauteur dans la voie en bordure au moment où le vélo électrique quittait la chaussée. Quand le plaignant a tourné à gauche derrière lui sur la rue Judson, l’agent a fait demi-tour, puis a viré à droite pour continuer de le poursuivre. À ce moment-là, le plaignant était à une bonne distance de l’AI.

Une fois sur la rue Judson, l’AI a accéléré vers l’est pour rattraper le vélo électrique. L’agent a atteint une vitesse maximale d’environ 137 km/h à environ 200 mètres de l’avenue Islington, soit environ 400 mètres à l’est de la rue Judson, puis a commencé à ralentir. L’AI est arrivé à l’intersection de l’avenue Islington – le lieu d’une collision automobile – quelques secondes plus tard.

Le plaignant s’était engagé dans l’intersection de l’avenue Islington à un feu rouge et a été percuté par un véhicule qui roulait vers le sud. Sous l’impact, le plaignant a été éjecté de son vélo électrique et projeté dans les voies en direction nord.




L’AI s’est approché du plaignant pour lui venir en aide. Il a demandé par radio qu’on envoie une ambulance. Il était alors environ 13 h 47.

Le plaignant a été transporté à l’hôpital où on lui a diagnostiqué des fractures à la jambe gauche, à la cheville gauche et à la colonne vertébrale.

Dispositions législatives pertinentes

Articles 219 et 221 du Code criminel -- Négligence criminelle causant des lésions corporelles par négligence

219 (1) est coupable d’une négligence criminelle quiconque :
a) soit en faisant quelque chose;
b) soit en omettant de faire quelque chose qui est de son devoir d’accomplir, montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.
(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.

221 Quiconque, par négligence criminelle, cause des lésions corporelles à autrui est coupable : 
a) soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de dix ans; 
b) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.

Article 320.13 du Code criminel – Conduite dangereuse causant des lésions corporelles 

320.13 (1) Commet une infraction quiconque conduit un moyen de transport  d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances.

(2) Commet une infraction quiconque conduit un moyen de transport d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, et cause ainsi des lésions corporelles à une autre personne.
 

Règlement de l’Ontario 266/10 - Poursuites visant l’appréhension de suspects - Amorce ou continuation de la poursuite

2. (1) Un agent de police peut poursuivre ou continuer de poursuivre un véhicule automobile en fuite qui ne s’immobilise pas :
a) soit s’il a des motifs de croire qu’une infraction criminelle a été commise ou est sur le point de l’être 
b) soit afin d’identifier le véhicule ou un particulier à bord du véhicule. Règl. de l’Ont. 266/10,

Analyse et décision du directeur

Le plaignant a été grièvement blessé lors d’une collision de véhicules motorisés le 11 octobre 2023 à Toronto. Comme le véhicule qu’il conduisait à ce moment-là était poursuivi par un agent du SPT, l’UES a été avisée et a ouvert une enquête. Un agent a été désigné en tant qu’agent impliqué (AI). L’enquête est maintenant terminée. Après avoir évalué les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI ait commis une infraction criminelle en lien avec les blessures du plaignant.

Les infractions à prendre en considération sont la conduite dangereuse causant des lésions corporelles et la négligence criminelle causant des lésions corporelles, des infractions visées respectivement par le paragraphe 320.13 (2) et l’article 221 du Code criminel. Pour la première, la culpabilité serait fondée, en partie, sur la conclusion que la conduite constituait un écart marqué par rapport au niveau de diligence qu’une personne raisonnable aurait exercé dans les circonstances. La deuxième correspond aux cas encore plus graves de conduite qui font preuve d’un mépris déréglé ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autres personnes. Pour que cette infraction soit établie, il faut notamment que la négligence constitue un écart à la fois marqué et important par rapport à une norme de diligence raisonnable. En l’espèce, il faut donc déterminer si l’AI a fait preuve d’un manque de diligence qui a mené ou contribué à la collision et qui était suffisamment grave pour entraîner une sanction pénale. À mon avis, ce n’est pas le cas.

L’AI avait des raisons de lancer une poursuite du plaignant. Il l’avait vu conduire un vélo électrique sans casque – une infraction au Code de la route. Rien n’indique qu’il avait identifié le plaignant ou le vélo électrique avant la collision, ce qui aurait nécessité de mettre fin à la poursuite en vertu du Règl. de l’Ont. 266/10 – le règlement qui régit les poursuites dans la province.

En ce qui concerne la manière dont l’AI s’est comporté tout au long de son intervention en lien avec le plaignant, je ne peux pas raisonnablement conclure que l’agent a transgressé les limites de diligence prescrites par le droit criminel. Certains aspects de la conduite de l’AI méritent un examen. Conformément à la politique du SPT, l’agent n’aurait pas dû poursuivre le vélo électrique. Il était lui-même à moto et la personne qu’il poursuivait roulait également sur un vélo motorisé – deux facteurs de disqualification. L’AI roulait également à des vitesses dangereusement élevées sur la rue Judson, atteignant une vitesse maximale de 137 km/h. Enfin, l’agent avait suffisamment observé la conduite dangereuse du plaignant pour se rendre compte que continuer de le poursuivre n’était pas dans l’intérêt de la sécurité publique. Il a néanmoins persisté. D’un autre côté, la circulation le long du trajet de la poursuite était légère à modérée, avec très peu de piétons dans ce secteur principalement commercial et industriel. Autrement dit, les dangers inhérents aux vitesses de l’AI n’étaient pas aggravés par des facteurs externes. Le fait que l’agent avait activé ses feux d’urgence pendant la majeure partie de la poursuite, signalant ainsi sa présence aux autres usagers de la route, est un autre facteur atténuant. Enfin, la preuve indique que l’AI, lors de l’avant-dernière étape de la poursuite sur la rue Judson, était loin derrière le vélo électrique – à une distance d’au moins 100 mètres environ – lorsque le plaignant s’est engagé dans l’intersection de l’avenue Islington. Dans ces circonstances, il ne serait pas juste de dire que l’AI a effectivement poussé le plaignant à entrer dans l’intersection. Comme l’a mentionné un témoin oculaire à l’UES, le plaignant aurait pu tourner à droite sur l’avenue Islington pour poursuivre sa fuite devant la police au lieu de continuer tout droit.

D’après le dossier susmentionné, lorsque l’on met en balance les manquements de l’AI et les facteurs atténuants, je ne suis pas convaincu, pour des motifs raisonnables, que sa conduite s’écarte sensiblement d’une norme de diligence raisonnable. Il n’y a donc pas de raison de porter des accusations criminelles contre l’agent.


Date : 9 février 2024

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) À moins d’indication contraire, les renseignements contenus dans cette section reflètent les informations reçues par l’UES au moment de la notification et ne reflètent pas nécessairement les conclusions de fait de l’UES à la suite de son enquête. [Retour au texte]
  • 2) Les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES n’ont pas examiné le vélo électrique, car on l’avait restitué à un membre de la famille du plaignant avant que l’affaire ne soit signalée à l’UES. [Retour au texte]
  • 3) Les éléments de preuve suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties pertinentes des enregistrements sont résumées ci-après. [Retour au texte]
  • 4) On ne voit aucun autre vélo électrique ou véhicule de police sur la vidéo de Cordeiro Roofing au moment de cette poursuite. Cependant, à 13 h 58 min 03 s, on voit une moto du SPT rouler vers le nord sur l’avenue Horner, puis, à 14 h 12 min 49 s, trois autres motos rouler aussi vers le nord dans la voie de dépassement de l’avenue Horner. [Retour au texte]
  • 5) Toutes les citations entre guillemets dans cette version française du rapport sont des traductions de l’anglais. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.