Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 16-OVI-178

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave ou ont donné lieu une allégation d’agression sexuelle.

On doit englober dans les « blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.

Le rapport porte sur l’enquête menée par l’UES au sujet d’une fracture de l’orteil subie dans une collision de véhicule par un homme de 17 ans, le 7 juillet 2016 à 15 h, lorsqu’il conduisait sa moto hors route non immatriculée suivie par une voiture de police.

L’enquête

Notification de l’UES

Le 7 juillet 2016, à 18 h, l’UES a été avisée par la police régionale de Halton (PRH) que le plaignant avait subi une blessure dans un accident de la route. La PRH a déclaré qu’à environ 15 h, l’agent impliqué (AI) était au volant d’une voiture de police identifiée et roulait en direction est sur la rue Main à Milton, en Ontario, lorsqu’il a aperçu le plaignant, qui conduisait une moto hors route sur la rue Main. Le plaignant a emprunté une route secondaire. L’AI a fait demi-tour et a tourné sur la route secondaire, mais il n’a pas activé sa sirène ni ses feux d’urgence. Le plaignant est entré en collision avec un véhicule immobilisé au coin de Donovan Heights et de la rue Whitmore. Il s’est enfui sur une distance d’un pâté de maisons sur sa moto ou à pied, avant d’être arrêté.

Après son arrestation, le plaignant a dit s’être blessé au pied. Il a été conduit à l’hôpital, où une fracture du gros orteil a été diagnostiquée. Le père du plaignant est venu le rejoindre et l’a accompagné à l’hôpital. Le plaignant devait être accusé de conduite dangereuse et il a été libéré sous la garde de son père.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 5

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Les enquêteurs des sciences judiciaires de l’UES se sont présentés sur les lieux et ont identifié et préservé les éléments de preuve. Ils ont recueilli de l’information sur les lieux associés à l’incident en prenant des notes et des photos.

Plaignante

Homme de 17 ans, qui a participé à une entrevue et pour qui le dossier médical a été obtenu et examiné

Témoins civils

TC no 1 A participé à une entrevue

TC no 2 A participé à une entrevue

TC no 3 A participé à une entrevue

Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue

AT no 2 A participé à une entrevue

AT no 3 A participé à une entrevue

AT no 3 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été obtenues et examinées

Agents impliqué

AI A participé à une entrevue, et ses notes ont été obtenues et examinées

AI A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise.

Éléments de preuve

Les lieux

La collision s’est produite à l’intersection de la rue Whitmer et de Kendall Drive, à Milton. Les véhicules ont parcouru un pâté de maisons vers le sud, sur Donovan Heights, pour parvenir à l’intersection de la rue Whitmer et de Donovan Heights. La rue Whitmer est une rue résidentielle qui va vers le nord et vers le sud, avec une voie dans chaque direction. La limite de vitesse affichée sur la rue Whitmer est de 40 km/h. Kendall Drive est une rue résidentielle qui va vers l’ouest, à partir de la rue Whitmer. La chaussée était bien entretenue, droite et de niveau.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio et de photographies

L’UES a ratissé le secteur à la recherche d’éléments de preuve sous forme d’enregistrements audio ou vidéo ou de photographies mais n’a rien trouvé.

Données du système de localisation automatique de véhicules (SLAV) de la voiture de police de l’AI

Le SLAV a pris des mesures de la vitesse de la voiture de police de l’AI toutes les cinq secondes, de 15 h à 15 h 5, le 7 juillet 2016. La vitesse à laquelle l’AI a conduit sa voiture a varié entre 6 km/h et 62 km/h.

à 15 h 00 min 50 s, l’AI roulait en direction est sur la rue Main à 62 km/h. à 15 h 1 min 15 s, il allait vers l’est sur la rue Main, à l’intersection avec le boulevard Scott, à une vitesse de 19 km/h. à 15 h 1 min 30 s, l’AI roulait à 61 km/h et se dirigeait vers l’est, sur la rue Main. à 15 h 1 min 35 s, l’AI allait vers l’est sur la rue Main, juste à l’ouest sur la rue Whitmer, à une vitesse de 56 km/h.

à 15 h 1 min 40 s., l’AI roulait en direction sud sur la rue Whitmer, à 37 km/h. à 15 h 1 min 45 s, il allait toujours en direction sud sur la rue Whitmer, mais à 53 km/h. à 15 h 1 min 50 s, l’AI se dirigeait vers le sud sur la rue Whitmer, à 56 km/h. à 15 h 1 min 55 s, l’AI continuait sa route vers le sud sur la rue Whitmer, à 48 km/h, au sud de Kendall Drive. à 15 h 2 min 0 s, l’AI, qui était toujours sur la rue Whitmer, direction sud, roulait à 43 km/h, à l’intersection avec Donovan Heights.

à 15 h 2 min 5 s, l’AI roulait vers l’ouest sur Donovan Heights, à 6 km/h. à 15 h 2 min 10 s, la voiture de l’AI était immobile sur Donovan Heights.

Éléments obtenus auprès du service de police

L’UES a demandé à la PRH les documents suivants, qu’elle a obtenus et examinés :

  • le rapport d’arrestation
  • les données du système de localisation automatique de véhicules (SLAV) de la voiture de police de l’AI pour le 7 juillet 2016;
  • la déclaration sur la collision du TC no 3
  • la déclaration sur la collision du plaignant
  • la copie de la lettre de demande de l’UES avec une note de la PRH sur les documents demandés
  • la directive sur les poursuites en vue de l’appréhension d’un suspect
  • la directive sur l’arrestation et la fouille de personnes
  • les documents sur la formation de conducteur, AI
  • le registre de service du 7 juillet 2016<
  • le registre de service, liste d’appel des agents
  • la chronologie des événements
  • le système de répartition assisté par ordinateur – information sur les événements du réseau intelligent
  • le rapport de collision de véhicule automobile
  • les notes des AT nos 1, 2, 3 et 4, et
  • le rapport de l’incident

Description de l’incident

Durant l’après-midi du 7 juillet 2016, le plaignant, qui venait de s’acheter une moto hors route, la conduisait sans documents en règle prouvant qu’il en était le propriétaire et que le véhicule était assuré, sans phare avant et sans plaque d’immatriculation. L’AI a aperçu la moto et l’a suivie, à bord de sa voiture de police, dans l’intention d’identifier le conducteur. La sirène et les feux d’urgence de la voiture de police n’étaient pas activés.

En approchant du panneau indicateur d’arrêt obligatoire, il n’a pas remarqué que le VUS devant lui ralentissait. Lorsque celui-ci s’est arrêté, le pied droit du plaignant a heurté le pare-chocs arrière du VUS, du côté gauche, et il a été blessé à l’orteil. Le plaignant a néanmoins poursuivi sa route jusqu’à ce que l’AI lui fasse signe de se ranger sur le côté, un pâté de maisons plus loin. L’AI a alors procédé à l’arrestation du plaignant pour conduite dangereuse, en vertu du Code criminel, il lui a menotté les mains derrière le dos et il l’a conduit jusqu’à la voiture de police. L’AI a demandé au plaignant s’il était blessé, et celui-ci a répondu que oui. Le pied droit du plaignant était enflé, et une ambulance a été appelée.

Le plaignant a été conduit en ambulance à l’hôpital, où une radiographie a révélé que le plaignant avait une fracture transversale du milieu du corps de l’os de la phalange proximale du 1er orteil, une fracture du col du deuxième métatarsien de droite (2e orteil) et une fracture sans déplacement du troisième métatarsien de droite (3e orteil). Cette dernière fracture n’est pas franche.

Dispositions législatives pertinentes

Article 249, Code criminel – Véhicules à moteur, bateaux et aéronefs, Conduite dangereuse

249 (1) Commet une infraction quiconque conduit, selon le cas :

  1. un véhicule à moteur d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, y compris la nature et l’état du lieu, l’utilisation qui en est faite ainsi que l’intensité de la circulation à ce moment ou raisonnablement prévisible dans ce lieu […]

Article 62, Code de la route – Feux

62 (1) Au cours de la période comprise entre une demi-heure avant le coucher du soleil et une demi-heure après le lever du soleil, et à un autre moment lorsque, à cause de la lumière insuffisante ou de conditions atmosphériques défavorables, des personnes et des véhicules qui se trouvent sur la voie publique ne sont pas nettement visibles à une distance de 150 mètres ou moins, les véhicules automobiles autres que les motocyclettes doivent être munis de trois feux allumés à un endroit bien visible, un de chaque côté à l’avant du véhicule et émettant une lumière blanche ou jaune seulement, et un autre à l’arrière du véhicule et émettant une lumière rouge seulement.

(2) Sous réserve du paragraphe (3), la motocyclette utilisée sur une voie publique doit être munie en tout temps, à un endroit bien visible, d’un phare émettant une lumière blanche seulement et d’un feu arrière émettant une lumière rouge seulement […]

(17) Au cours de la période comprise entre une demi-heure avant le coucher du soleil et une demi-heure après le lever du soleil, et à tout autre moment lorsque, à cause de la lumière insuffisante ou de conditions atmosphériques défavorables, des personnes et des véhicules qui se trouvent sur la voie publique ne sont pas nettement visibles à une distance de 150 mètres ou moins, les cyclomoteurs et les bicyclettes, autres que les monocycles, doivent être munis à l’avant d’un feu allumé émettant une lumière blanche ou jaune et, à l’arrière, d’un feu allumé émettant une lumière rouge ou d’un réflecteur. En outre, la fourche avant d’un tel moyen de transport doit être munie d’un dispositif réfléchissant de couleur blanche, tandis que l’arrière de celui-ci doit être muni d’un dispositif réfléchissant de couleur rouge couvrant une surface d’au moins 250 millimètres de long et 25 millimètres de large […]

(26) Sous réserve du paragraphe (28), au cours de la période comprise entre une demi-heure avant le coucher du soleil et une demi-heure après le lever du soleil, et à tout autre moment lorsque, à cause de la lumière insuffisante ou de conditions atmosphériques défavorables, des personnes et des véhicules qui se trouvent sur la voie publique ne sont pas nettement visibles à une distance de 150 mètres ou moins, les véhicules autres que les véhicules automobiles, les cyclomoteurs, les bicyclettes à l’exception des monocycles et les véhicules visés au paragraphe (24), (25) ou (27) doivent être munis à un endroit bien visible, sur le côté gauche, d’un feu allumé émettant une lumière blanche à l’avant et une lumière rouge à l’arrière, ou d’un feu allumé émettant une lumière blanche à l’avant et d’un feu allumé émettant une lumière rouge à l’arrière. Ces feux doivent être nettement visibles à une distance minimale de 150 mètres de l’avant et de l’arrière du véhicule, selon le cas.

Analyse et décision du directeur

Pour les motifs exposés ci-dessous, j’estime qu’il n’existe pas de motifs suffisants pour établir que l’AI a commis un acte criminel en relation avec la blessure subie par le plaignant le 7 juillet 2016.

à 15 h, l’AI roulait en direction est sur la rue Main, à Milton, en Ontario, lorsqu’il a aperçu une moto hors route se dirigeant vers l’ouest. Il s’est avéré que la moto en question était conduite par le plaignant (un jeun homme visé par la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents). La moto hors route n’avait pas de phare avant ni de plaque d’immatriculation.

Lorsque l’AI s’est approché du plaignant, celui-ci a fait un virage serré à gauche pour prendre la rue Whitmer. L’AI a déclaré à l’UES qu’il avait tourné à droite (direction sud) sur la rue Whitmer et qu’il avait suivi la moto dans l’intention d’identifier le conducteur. Il n’a pas activé sa sirène ni ses feux d’urgence et il roulait à environ 40 km/h. L’AI a indiqué qu’il avait vu que le plaignant s’était retourné pour le regarder et ne prêtait pas tellement attention à la circulation sur la route où il se trouvait.

Le plaignant venait de s’acheter une moto hors route. Sur son chemin, il a vu l’AI dans une voiture de police. Le véhicule devant le plaignant, un VUS, ralentissait et s’apprêtait à arrêter. Le plaignant n’a aperçu le VUS qu’une fois à une distance d’à peine 3 mètres de lui. Il a tenté de tourner à gauche pour éviter le VUS, mais il en a été incapable et il a heurté l’arrière du VUS. Durant la collision, il s’est cogné le pied droit sur l’arrière du VUS, ce qui a entraîné la fracture du gros orteil. Le plaignant ne conteste pas le fait que c’est lui qui a causé la collision.

Dans cette affaire, l’AI a suivi le plaignant, comme l’autorise l’article 62 du Code de la route, puisque la moto hors route n’avait pas l’équipement nécessaire pour circuler sur une route. L’AI n’avait pas activé sa sirène ni ses feux d’urgence et il n’a rien fait pour perturber la conduite du plaignant. Il s’est limité à suivre le plaignant pour l’identifier. Le plaignant a été distrait par la présence de la voiture de police, il ne prêtait pas attention à la circulation et il ne s’est pas aperçu que le VUS ralentissait. Il s’est trop approché du VUS, il a tenté de virer à gauche pour l’éviter, mais il était trop près lorsque celui-ci a freiné, et c’est pourquoi son pied droit a heurté le coin arrière du VUS, ce qui lui a fait perdre son soulier. Le plaignant a néanmoins poursuivi sa route, et l’AI a fini par l’arrêter. Le plaignant a été accusé de conduite dangereuse. La collision a occasionné la fracture du gros orteil du pied droit du plaignant.

Dans les circonstances, il ressort clairement de l’ensemble des éléments de preuve que la blessure subie par le jeune homme résulte de son manque d’expérience et de son inattention et qu’elle n’a nullement été causée par des actions de l’AI. Par conséquent, aucune accusation n’est portée dans cette affaire.

Date : 5 septembre 2017

Original signé par

Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.