Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 16-OCI-303

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave ou ont donné lieu une allégation d’agression sexuelle.

On doit englober dans les « blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par une femme de 58 ans lors de son interaction avec des agents de police le 27 octobre 2016.

L’enquête

Notification de l’UES

Le 5 décembre 2016, vers 9 h 10, la plaignante a téléphoné à l’UES pour signaler ce qui suit : le 27 octobre 2016, elle était dans un refuge, à Windsor, lorsque la police a été appelée au refuge pour une tentative de suicide. La plaignante nie avoir eu l’intention de se suicider. Apparemment, la police procédait à son arrestation en vertu de la Loi sur la santé mentale (LSM). Lors de l’arrestation, une agente (l’agente impliquée) a tordu le bras gauche de la plaignante dans le dos, lui causant une fracture du coude. La plaignante a ajouté qu’elle avait alors été « tasée » trois fois, puis transportée en ambulance à l’hôpital. À l’hôpital, elle a passé une entrevue avec une infirmière en analyse psychiatrique, en attendant cinq heures que son bras soit radiographié. On lui a alors dit qu’on ne voyait pas de fracture, mais qu’on demanderait à un radiologue d’examiner la radiographie. Elle a quitté l’hôpital à minuit.

Le 4 novembre 2016, elle est retournée à l’hôpital pour un tomodensitogramme. Une fracture au coude gauche a été diagnostiquée, et son bras a été placé dans un plâtre en résine souple.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 2

Plaignante

Femme de 58 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés.

Témoins civils

TC no 1 A participé à une entrevue

TC no 2 A participé à une entrevue

Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue

AT no 2 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été obtenues et examinées

AT no 3 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été obtenues et examinées

AT no 4 A participé à une entrevue

Agent impliqué

AI N’a pas consenti à participer à une entrevue, comme la loi l’y autorise, mais ses notes ont été reçues et examinées.

Éléments de preuve

Enregistrements des communications

Appel au 9-1-1 :

La TC no 1 a communiqué avec le numéro des appels non urgents du SPW en indiquant que la plaignante refusait de quitter le refuge et qu’elle s’était « essentiellement barricadée dans sa chambre ». La TC no 1 a ajouté que la plaignante avait dit qu’elle se ferait du mal si le refuge la renvoyait. Elle a également déclaré que la plaignante avait des antécédents de maladie mentale et de tentatives de suicide.

Communications radio

Les notes du centre de répartition mentionnaient la présence d’une femme possiblement suicidaire au refuge. L’appelante était une employée du refuge qui avait indiqué qu’on avait donné à une femme (la plaignante) jusqu’à 15 heures pour partir. La femme n’était pas violente à ce moment-là, mais s’était barricadée dans une chambre en disant que si on la forçait à partir, elle se ferait du mal.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio et de photographies

Les enquêteurs de l’UES ont fait le tour du refuge à la recherche d’enregistrements audio ou vidéo ou de photographies, mais n’ont rien trouvé de pertinent.

La plaignante a fourni trois photos de ses blessures. Voici une photo de son bras gauche :

Une photo de son bras gauche

Téléchargement des données d’une arme à impulsions électriques

L’arme à impulsions de l’AI a été déchargée pendant cinq secondes le 27 octobre 2016 à 16 h 20 min 9 s. Elle n’a été déchargée qu’une seule fois.

Documents obtenus auprès du Service de police

L’UES a demandé les documents suivants au Service de police de Windsor (SPW), qu’elle a obtenus et examinés :

  • Messages et transmissions de terminaux de données mobiles (TDM)
  • Notes des agents témoins AT no 1, AT no 2, AT no 3 et AT no 4
  • Déclarations préparées - AI, TC no 1 et TC no 2
  • Registre de service
  • Rapport d’événement général - Appréhension antérieure de la plaignante en vertu de la LSM
  • Appel au 9-1-1
  • Fichier téléchargé de l’arme à impulsions
  • Rapport de l’agent de l’équipe de soutien et de liaison communautaire (COAST)
  • Politique du SPW – Personnes atteintes d’une maladie mentale
  • Enregistrements des communications, et
  • Description supplémentaire - Téléchargement des données du Taser

Description de l’incident

Le 27 octobre 2017, un refuge de Windsor a communiqué avec le SPW pour demander de l’aide pour faire partir la plaignante. Comme la plaignante n’avait pas respecté les règles du refuge, on lui avait demandé de partir avant 15 heures ce jour-là. La plaignante avait refusé de quitter les lieux et indiqué qu’elle se ferait du mal si on l’expulsait.

L’AI et l’AT no 1 ont répondu à l’appel et se sont présentés au refuge pour aider à faire sortir la plaignante et l’emmener à l’hôpital, au besoin, en raison de ses commentaires sur son intention de se faire du mal. À leur arrivée, l’AI et l’AT no 1 ont rencontré la TC no 1, qui les a informés des circonstances ainsi que des antécédents de santé mentale de la plaignante.

Au moment où les agents sont arrivés, la plaignante était dans sa chambre. L’AI lui a dit qu’elle devait quitter le refuge et qu’ils la conduiraient à l’hôpital. La plaignante a refusé de partir et une lutte s’est ensuivie. L’AI et l’AT no 1 ont mis la plaignante à terre; elle continuait de résister, au point que l’AT no 1 a été blessé. L’AT no 1 a déchargé son arme à impulsions. Les policiers ont alors menotté la plaignante et l’ont emmenée à l’hôpital pour une évaluation psychiatrique. À l’hôpital, la plaignante s’est plainte d’une douleur au coude gauche. Une radiographie a révélé une fracture au coude gauche, qui a ensuite été confirmée par un tomodensitogramme.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1), Code criminel - Protection des personnes chargées de l’application et de l’exécution de la loi

25. (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :

  1. soit à titre de particulier;
  2. soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public;
  3. soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
  4. soit en raison de ses fonctions,

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Article 17, Loi sur la santé mentale – Intervention de l’agent de police

17 Si un agent de police a des motifs raisonnables et probables de croire qu’une personne agit ou a agi d’une façon désordonnée et qu’il a des motifs valables de croire que cette personne :

  1. soit a menacé ou tenté de s’infliger des lésions corporelles ou menace ou tente de le faire;
  2. soit s’est comportée ou se comporte avec violence envers une autre personne ou de manière à lui faire craindre qu’elle lui causera des lésions corporelles;
  3. soit a fait ou fait preuve de son incapacité de prendre soin d’elle-même,

et qu’en plus, il est d’avis que cette personne souffre, selon toute apparence, d’un trouble mental d’une nature ou d’un caractère qui aura probablement l’une des conséquences suivantes :

  1. elle s’infligera des lésions corporelles graves;
  2. elle infligera des lésions corporelles graves à une autre personne;
  3. elle subira un affaiblissement physique grave,

et qu’il serait dangereux d’agir selon les termes de l’article 16, il peut amener sous garde cette personne dans un lieu approprié afin qu’elle soit examinée par un médecin.

Analyse et décision du directeur

Le 27 octobre 2016, la plaignante demeurait dans un refuge, à Windsor. Comme elle enfreignait continuellement les règles du refuge, alors qu’elle connaissait ces règles, le personnel lui a demandé de partir avant 15 heures. La plaignante a refusé et a affirmé qu’elle se ferait du mal si on l’expulsait. Du fait de cette menace d’autodestruction proférée par la plaignante, le refuge a appelé le SPW en demandant de l’aide pour faire sortir la plaignante des lieux.

L’AI et l’AT no 1 sont arrivés sur place peu après et ont rencontré la TC no 1. La TC 1 les a informés des circonstances ainsi que des antécédents de santé mentale de la plaignante. La plaignante était alors dans sa chambre. Les agents se sont rendus à la chambre de la plaignante et lui ont dit qu’elle devait quitter la résidence et qu’ils allaient l’emmener à l’hôpital. La plaignante a résisté et une lutte s’est ensuivie; la plaignante a été mise à terre. Comme la plaignante continuait de se débattre, l’AT no 1 a déchargé son arme à impulsions. Les agents sont alors parvenus à menotter la plaignante et l’ont conduite à l’hôpital pour une évaluation psychiatrique. À l’hôpital, la plaignante s’est plainte d’une douleur au coude gauche, qui a été radiographié. La radiographie a révélé une possible fracture au coude gauche. Un tomodensitogramme ultérieur a confirmé cette facture.

Même si l’AI n’a pas consenti à une entrevue, comme c’est son droit, ses notes indiquent que lorsqu’elle est allée avec l’AT no 1 dans la chambre de la plaignante et qu’elle lui a parlé, la plaignante a confirmé son intention de se faire du mal si on l’obligeait à partir. L’AI a avisé la plaignante qu’elle devait aller à l’hôpital avec les agents. La plaignante a réagi en tentant de retourner dans sa chambre et de fermer la porte. L’AI et l’AT no 1 sont entrés dans la chambre de la plaignante, qui s’est montrée plus hostile à leur égard. Elle était assise sur son lit, les bras croisés, et déclarant qu’elle ne bougerait pas. L’AI a avisé la plaignante qu’elle était appréhendée en vertu de la Loi sur la santé mentale. Lorsque les agents ont tenté de menotter la plaignante, elle a résisté, s’est croisé les bras autour de la poitrine et s’est allongée sur le lit, les bras serrés contre elle. Elle a aussi commencé à donner des coups de pied aux agents. La plaignante est alors passée du lit à une chaise et a agité ses bras et ses jambes. L’AT no 1 a sorti son arme à impulsions, l’a placé en mode paralysant et a déployé une charge sur la plaignante. Sous l’effet de la décharge, la plaignante a glissé sur le plancher, allongée sur le côté. Comme la plaignante continuait de refuser de se laisser menotter, l’AT no 1 l’a prévenue que si elle continuait, il utiliserait de nouveau l’arme à impulsions. L’AI et l’AT no 1 sont alors parvenus à tirer les mains de la plaignante dans son dos et à la menotter.

Selon l’AT no 1, lorsqu’il s’est présenté dans la chambre de la plaignante avec l’AI, la plaignante leur a dit qu’elle n’avait pas l’intention de partir ce jour-là et que si on l’expulsait, elle se ferait du mal. L’AI lui a expliqué qu’ils étaient là pour l’emmener à l’hôpital. La plaignante s’est énervée et est retournée rapidement dans la chambre. L’AI l’a suivie dans la chambre tandis que l’AT no 1 est resté près de la porte. La chambre était très petite, environ 6 pieds sur 10 pieds (1,83 mètre sur 3,05 mètres). Après une dizaine de minutes pendant lesquelles les policiers ont tenté de convaincre la plaignante de les suivre, la plaignante s’est levée et s’est dirigée vers l’AI les poings serrés, en déclarant qu’elle ne partirait pas. L’AI a saisi le bras gauche de la plaignante et l’AT no 1 a saisi son bras droit. Une lutte s’est ensuivie et la plaignante a repoussé les agents, s’est dégagée de leur emprise et est tombée en arrière sur le lit. La plaignante a alors commencé à leur donner des coups de pied. La lutte est passée du lit à une chaise. La plaignante refusait que l’AI ou l’AT no 1 lui saisissent les poignets ou lui placent les mains dans le dos. À un moment donné, la plaignante a saisi le pouce de l’AT no 1 et l’a forcé latéralement, ce qui lui a fait mal. L’AT no 1 a alors a averti la plaignante que si elle ne coopérait pas, il déchargerait son arme à impulsions. La plaignante continuant de résister, l’AT no 1 a déchargé son arme à impulsions une fois en mode paralysant sur la hanche supérieure gauche de la plaignante. La plaignante est tombée de la chaise sur le plancher, mais a recommencé à se débattre. L’AT no 1 a de nouveau placé son arme à impulsions contre la hanche gauche de la plaignante en lui disant qu’il tirerait une deuxième fois si elle continuait de résister. La plaignante a alors laissé les agents la menotter. L’AT no 1 a déclaré qu’il n’avait vu à aucun moment l’AI manipuler le bras gauche de la plaignante à la verticale ou le tirer vers le haut du dos. L’AI no 1 n’était au courant d’aucune blessure subie par la plaignante avant d’en avoir été avisé par l’UES.

Lorsque l’AT no 4 est arrivé au refuge, l’AI et l’AT no 1 étaient déjà sur place. Il s’est rendu dans la chambre de la plaignante et a vu celle-ci à plat ventre sur le plancher de la chambre, criant, se débattant et se roulant par terre. Il est entré dans la petite chambre et a dit à la plaignante de se calmer, mais elle a continué de se débattre alors que l’AI et l’AT no 1 tentaient de la maîtriser. L’AT no 4 est ensuite sorti de la pièce, car elle était trop petite, pour permettre à ses collègues de la menotter.

L’UES a examiné l’arme à impulsions de l’AT no 1 et a constaté que, contrairement aux affirmations de la plaignante, elle n’a été déchargée qu’une seule fois pendant cinq secondes.[1]

En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les agents de police ont le droit d’utiliser la force dans l’exécution de leurs fonctions légitimes, mais seulement dans la limite de ce qui est raisonnablement nécessaire dans les circonstances. Tout d’abord, en ce qui concerne la légalité de l’appréhension de la plaignante par l’AI et l’AT no 1 en vertu de la LSM, je conviens que cette appréhension était justifiée puisque la plaignante avait affirmé à plusieurs reprises qu’elle se ferait du mal si on l’obligeait à quitter le refuge et qu’elle avait des antécédents connus de santé mentale. Par conséquent, les deux agents exécutaient leurs fonctions légitimes en essayant de placer la plaignante sous garde.

Toutefois, je n’accepte pas la version de la plaignante quant à la façon dont elle a subi une fracture du coude lors de son appréhension. La plaignante allègue que l’AI, qui pèse deux fois moins qu’elle[2], a tiré son bras gauche en arrière avec une force suffisante pour lui casser l’os du coude. Compte tenu de la différence de corpulence entre les deux femmes, cela semble improbable et n’est corroboré par aucun autre témoin. Dans sa déclaration, la plaignante a aussi nettement minimisé le niveau de la résistance et de la violence qu’elle a opposées aux deux agents de police, dont l’un a été blessé à la suite de ses actions. Par conséquent, je dois remettre en question la crédibilité de la plaignante ou, à tout le moins, la fiabilité de sa déclaration en ce qui concerne l’origine de sa blessure. En outre, étant donné que la plaignante a clairement tort quant au nombre de décharges de l’arme à impulsions, j’ai également des doutes quant à la fiabilité de son souvenir des faits.

Tous les autres témoins, civils comme policiers, décrivent la plaignante comme en colère et criant fort, lors d’une scène chaotique qui se déroulait dans sa petite chambre pendant que l’AI et l’AT no 1 tentaient légalement de la menotter. L’AI et l’AT no 1 ont décrit tous les deux la plaignante comme donnant des coups de pied et de poing, refusant de présenter ses bras et ont expliqué qu’il avait fallu décharger l’arme à impulsions pour être en mesure de la menotter. Les deux agents ont indiqué que la plaignante était tombée par terre à ce moment-là. Il est possible que la plaignante se soit blessée au coude gauche en donnant des coups aux policiers, ou lorsqu’elle est tombée sur le plancher après avoir reçu la décharge électrique de l’arme à impulsions. Nous ne saurons sans doute jamais avec certitude comment la plaignante s’est cassé le coude. Toutefois, même en supposant que cette fracture ait été causée par les actes de l’AI (ou, d’ailleurs, de l’AT no 1), il semble que c’était involontaire et résultait uniquement des efforts que les agents ont dû déployer pour essayer de menotter la plaignante, laquelle était déterminée à ne pas se laisser conduire à l’hôpital.

Par conséquent, je suis convaincu, pour les motifs qui précèdent, que l’AI et l’AT no 1 ont employé la force raisonnablement nécessaire pour appréhender la plaignante en vertu de la LSM, malgré la blessure qu’elle a pu subir. La jurisprudence est claire : on ne peut pas s’attendre à ce que les policiers apprécient avec exactitude le degré de force qu’ils emploient dans leur intervention (R. c. Baxter [1975], 27 C.C.C. (2d) 96 (C.A. Ont.) et on ne devrait pas leur appliquer la norme de la perfection (R. c. Nasogaluk [2010] 1 RCS 206). Je n’ai aucun motif raisonnable de croire que l’un ou l’autre des agents a commis une infraction criminelle et il n’y a donc aucun motif de porter des accusations en l’espèce.

Date : 31 octobre 2017

Original signé par

Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) [1] Toutes les armes à impulsions génèrent un « rapport » chaque fois qu’elles sont déchargées. Pour le jour en question, le rapport indique que l’arme à impulsions de l’AT no 1 a été déchargée une fois à 16 h 20 min 9 s. [Retour au texte]
  • 2) [2] Même si l’AI et la plaignante sont à peu près de la même taille, la plaignante pèse plus de deux fois plus que l’AI. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.