Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 17-TVI-035

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave ou ont donné lieu à une allégation d’agression sexuelle.

Les « blessures graves » englobent celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, a priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant que la gravité de la blessure puisse être évaluée, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider de l’envergure de son intervention.

Le présent rapport décrit l’enquête de l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 33 ans le 16 février 2017 lors d’une collision impliquant un véhicule automobile.

L’enquête

Notification de l’UES

Le 16 février 2017, à 20 h 04, le Service de police de Toronto (SPT) a informé l’UES d’une blessure subie durant un accident automobile, qui s’était produit à 15 h 37 ce jour‐là.

Le SPT a rapporté que deux agents de police de l’Unité d’intervention communautaire du SPT avaient arrêté un véhicule avec deux occupants à bord à Toronto. Les agents de police sont retournés à leur voiture de patrouille pour vérifier les données concernant les occupants, et le véhicule a pris la fuite. À l’intersection du chemin Burnhamthorpe et de la rue Dundas Ouest, le véhicule est entré en collision avec un second véhicule. Le conducteur du second véhicule a été transporté à l’hôpital, où, selon le diagnostic, il avait la clavicule fracturée.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 5

Nombre d’enquêteurs judiciaires de l’UES assignés : 2

Nombre de spécialistes en reconstitution des collisions de l’UES assignés : 1

Les enquêteurs judiciaires de l’UES se sont rendus sur les lieux de l’incident et ont repéré et préservé les éléments de preuve. Ils ont documenté les lieux pertinents associés à l’incident au moyen de notes, de photographies, de croquis et de mesures.

Plaignant :

Entretien avec l’homme âgé de 33 ans; dossiers médicaux obtenus et examinés

Témoins civils (TC)

TC no 1 A participé à une entrevue

TC no 2 A participé à une entrevue

TC no 3 A participé à une entrevue

TC no 4 A participé à une entrevue

TC no 5 A participé à une entrevue

Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue

AT no 2 A participé à une entrevue

AT no 3 A participé à une entrevue

AT no 4 A participé à une entrevue

AT no 5 A participé à une entrevue

AT no 6 A participé à une entrevue

AT no 7 A participé à une entrevue

Agents impliqués (AI)

AI A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées.

Description de l’incident

Au milieu de l’après‐midi du 16 février 2017, l’AT no 6 et l’AI no 7 de la Police régionale de York (PRY) ont demandé à l’AI et l’AT no 1 de procéder à un arrêt routier d’une Jeep de couleur argent et d’identifier le conducteur.

Peu après, l’AI et l’AT no 1 ont trouvé la Jeep de couleur argent et en utilisant l’équipement d’urgence de la voiture de patrouille, ont arrêté la Jeep qui se dirigeait en direction nord sur l’avenue Islington, au nord du croissant Aberfoyle. Les deux agents de police se sont approchés du véhicule à pied, et l’AI a parlé au TC no 1, qui était le conducteur, et lui a demandé de lui présenter une pièce d’identité. Au lieu de cela, le TC no 1 a mis le levier de changement de vitesses à marche avant pour ensuite fuir à toute vitesse.

L’AI et l’AT no 1 sont retournés à leur voiture de patrouille, et l’AT no 1 a signalé par la radio que la Jeep s’était enfuie à une vitesse élevée et qu’il la suivait. Aucun des agents n’a toutefois indiqué qu’ils avaient entamé une poursuite policière.

La Jeep a tourné à droite sur l’avenue Cordova à partir de l’avenue Islington, alors que la voiture de police était derrière elle à environ neuf longueurs de voiture, est entrée dans l’intersection de l’avenue Cordova et de la rue Dundas Ouest alors que le feu était rouge et est entrée en collision avec le côté gauche du côté du conducteur d’une minifourgonnette Toyota, qui se dirigeait vers l’ouest sur la rue Dundas Ouest. Puis la Jeep a heurté le côté passager d’une Pontiac, qui se dirigeait vers le sud sur le chemin Burnhamthorpe et s’est immobilisée en faisant face vers le nord dans la voie sud du chemin Burnhamthorpe, avec le côté passager contre le côté passager de la Pontiac. Le TC no 1 est sorti de la Jeep et a couru vers le nord sur le chemin Burnhamthorpe, où l’AT no 1 l’a rattrapé et l’a mis en état d’arrestation. Le passager dans la Jeep s’est enfui à pied.

Le plaignant, qui conduisait la minifourgonnette Toyota, avait été blessé et a été transporté par ambulance à l’hôpital. D’après une radiographie, le plaignant avait subi une fracture oblique à l’extrémité gauche de la clavicule.

Preuve

Les lieux de l’incident

Le 16 février 2017, à 20 h 35, l’enquêteur judiciaire (EJ) de l’UES est arrivé sur les lieux de l’accident, c’est-à-dire sur la rue Dundas Ouest, à l’intersection du chemin Burnhamthorpe et de l’avenue Cordova.

La rue Dundas Ouest comporte deux voies dans chaque direction et se dirige généralement dans la direction est/ouest, et comporte une voie de virage à gauche marquée dans chaque direction. La chaussée est pavée, et les marques y sont visibles. Le chemin Burnhamthorpe se dirige vers le nord à partir de la rue Dundas Ouest. Il y a deux voies dans chaque direction et une voie de virage à gauche pour la circulation se déplaçant vers le sud et tournant à gauche (vers l’est) sur la rue Dundas Ouest. La limite de vitesse qui y est affichée est de 50 km/h. L’avenue Cordova va vers le sud à partir de la rue Dundas Ouest. Il y a deux voies dans chaque direction et une voie de virage à gauche pour la circulation se dirigeant vers le nord et tournant à gauche (vers l’ouest) sur la rue Dundas Ouest. La chaussée est pavée et les marques y sont visibles. La limite de vitesse affichée y est de 40 km/h. L’intersection est contrôlée au moyen de feux de circulation en hauteur qui semblaient bien fonctionner, et il faisait frais et le ciel était clair et les chaussées étaient sèches.

La voiture de patrouille du SPT impliquée dans cet incident avait été retirée des lieux. Il y avait trois véhicules impliqués dans la collision :

Véhicle 1  : minifourgonnette de Toyota, de couleur argentée. Ce véhicule faisait face au nord‐est et chevauchait les deux voies en direction nord du chemin Burnhamthorpe et se trouvait au nord de l’intersection. Des traces de pneus se dirigeant vers le sud‐ouest depuis la minifourgonnette arrêtée jusqu’à la voie est de la rue Dundas Ouest montraient que ce véhicule se déplaçait en direction ouest sur la rue Dundas Ouest, avant la collision. La minifourgonnette avait d’importants dégâts causés par la collision au côté gauche, à l’avant et à l’arrière.

Véhicle 2  : Pontiac à hayon, de couleur argent. Ce véhicule faisait face au sud et se trouvait dans la voie de virage à gauche vers le sud du chemin Burnhamthorpe, et au nord de l’intersection. Il y avait quelques dommages mineurs causés par la collision au côté droit de ce véhicule.

Véhicle 3  : Jeep, de couleur grise. Ce véhicule faisait face au nord dans la voie du centre en direction sud du chemin Burnhamthorpe et était entré en collision avec le véhicule 2 et se trouvait au nord de l’intersection. Il y avait d’importants dommages causés par la collision au côté droit avant et arrière du véhicule. Les quatre clignotants étaient allumés, et la vitre arrière était ouverte. La vitre du côté du conducteur était abaissée d’environ trois quarts. Les sacs gonflables du côté du conducteur et du côté du passager avant s’étaient déployés. Il y avait des marques d’éraflures sur la chaussée au sud de ce véhicule. L’EJ a photographié les lieux de l’incident et a pris les mesures nécessaires pour produire un croquis de la scène.

Le 17 février 2017 à 1 h 55, les EJ de l’UES se sont rendus à la division du SPT pour examiner la voiture de patrouille du SPT impliquée dans l’incident, qui était une Ford Crown Victoria. Ce véhicule était une voiture de patrouille identifiée comportant des éléments graphiques du SPT. La voiture de patrouille était équipée d’équipement de vidéo à bord, et le kilométrage enregistré était de 77 660 kilomètres. Le véhicule de police était muni également de feux d’urgence et d’une sirène, mais les EJ n’ont pas pu vérifier leur fonctionnement, du fait que l’activation des feux risquait de détruire l’enregistrement vidéo de la caméra dans le véhicule. La voiture de police présentait des dégâts mineurs causés par une collision au côté gauche avant et on ne savait pas si les dommages pouvaient être attribués à la collision décrite ici. Les EJ ont photographié la voiture de patrouille du SPT.

Schéma des lieux

schéma des lieux<

Preuve matérielle

Résumé du rapport de localisation automatique du véhicule (LAV) de la voiture de patrouille du SPT conduite par l’AI

HeureLatitudeLongitudeVitesse
3 :37 :19 p.m.64517-79.5235713
3 :39 :02 p.m.64654-79.5242187
3 :39 :07 p.m.64786-79.5247676
3 :39 :34 p.m.64784-79.5267187
3 :39 :41 p.m.64854-79.5281564
3 :39 :53 p.m.64900-79.5296047

scene photo

Au moment où l’arrêt véhiculaire au croissant Aberfoyle et à l’avenue Islington était sur le point de se faire à 15 h 37 m 19 s, la voiture de patrouille en cause se déplaçait à 13 km/h. La Jeep est partie en accélérant, et la voiture de police l’a suivie en direction nord sur l’avenue Islington. À 15 h 39 m 02 s, la voiture de patrouille se déplaçait à 87 km/h et à 15 h 39 m 07 s, elle poursuivait son chemin vers le nord sur l’avenue Islington et se déplaçait à 76 km/h. C’était juste avant qu’elle tourne à droite sur l’avenue Cordova. À 15 h 39 m 34 s, la voiture de patrouille a continué vers le nord-ouest sur l’avenue Cordova vers le chemin Burnhamthorpe à 87 km/h. La voiture de police venait de passer l’école secondaire de premier cycle Islington. At 15 h 39 m 41 s, la voiture de patrouille se dirigeait vers le nord sur l’avenue Cordova à 64 km/h et s’approchait de l’intersection avec la rue Dundas Ouest. À 15 h 39 m 53 s, la voiture de police venait de franchir l’intersection et les lieux de la collision et se déplaçait à 64 km/h en direction nord sur le chemin Burnhamthorpe.

On a examiné deux points de données GPS pour déterminer, en supposant que la vélocité était constante, la vitesse moyenne de la voiture de patrouille alors qu’elle se dirigeait vers le nord et passait devant l’école secondaire de premier cycle Islington sur l’avenue Cordova. La limite de vitesse affichée était de 40 km/h. On a déterminé que la vitesse de la voiture de patrouille était de 71 km/h (voir ci&hyphen;dessous).

scene diagram

Preuve d’expert

Résumé de l’enquête sur la collision

Le jeudi 16 février 2017, à 22 h 15, un spécialiste en reconstitution des collisions de l’UES s’est rendu sur les lieux de la collision des véhicules automobiles à l’intersection du chemin Burnhamthorpe et de la rue Dundas Ouest à Toronto. Dans cette collision étaient impliqués trois véhicules, c’est&hyphen;à&hyphen;dire une Jeep, une Toyota et une Pontiac. Selon l’information obtenue, la Jeep aurait pris la fuite après un arrêt routier par la police, incident qui s’était produit plus au sud, avant la collision. Le conducteur de la Toyota avait subi une grave blessure.

L’intersection était contrôlée par des feux de circulation qui semblaient bien fonctionner. La rue Dundas Ouest est en direction est/ouest et il y a une intersection avec le chemin Burnhamthorpe du côté nord et avec l’avenue Cordova du côté sud. Les traces de pneu à l’intersection confirmaient le lieu de l’impact entre la Jeep et la Toyota, et ce lieu d’impact était aligné avec les voies vers le nord du chemin Burnhamthorpe et les voies vers l’ouest de la rue Dundas Ouest. Cela correspondait à la direction dans laquelle voyageaient la Jeep et la Toyota qui étaient entrées en collision à l’intersection. Les preuves matérielles trouvées sur les lieux de l’accident montraient que la Jeep se déplaçait vers le nord sur l’avenue Cordova et était entrée dans l’intersection.

La Toyota se déplaçait vers l’ouest sur la rue Dundas Ouest et était entrée dans l’intersection. Le coin avant droit de la Jeep avait heurté le coin avant gauche de la Toyota. La Toyota avait entamé une rotation dans le sens des aiguilles de la montre et s’était immobilisée dans les voies nord au côté nord de l’intersection. La Jeep avait viré dans les voies en direction sud et était venue se reposer contre le côté passager de la Pontiac, qui à ce moment-là, était immobile en direction sud et attendait au feu rouge.

Le module de contrôle des sacs gonflables de la Toyota a généré un rapport qui montrait que l’impact avec la Toyota s’était produit sur le côté, de l’avant jusqu’à l’arrière. Le rapport d’extraction des données de collision (CDR) montrait que la Toyota était immobile environ cinq secondes avant la collision et que le conducteur avait accéléré après cela. Puis, le conducteur avait appuyé sur ses freins à la dernière seconde. La Toyota avait accéléré jusqu’à 23 km/h au moment de la collision. Les deux occupants de la Toyota portaient leur ceinture de sécurité. Il n’y avait pas de technologie CDR dans la Jeep; par conséquent, il était impossible de calculer la vitesse de ce véhicule.

La voiture de patrouille de la police était une Ford Crown Victoria Police Interceptor. L’odomètre affichait 77 660 kilomètres, et la voiture de patrouille comportait de légers dommages au coin avant gauche. Les dégâts subis par la voiture de patrouille confirmaient qu’elle avait été impliquée dans une légère collision, qui se serait produite dans un stationnement à proximité, après la collision à la rue Dundas Ouest et au chemin Burnhamthorpe.

Selon l’information fournie par les occupants de la Pontiac, le feu de circulation était rouge dans les directions nord/sud de Burnhamthorpe/Cordova et vert pour la circulation se dirigeant vers l’est/ouest sur la rue Dundas Ouest, quand la Jeep était entrée dans l’intersection. Cette information est corroborée par la preuve matérielle trouvée sur les lieux de l’accident.

L’examen des résultats de l’enquête sur les lieux de l’incident, les entretiens et l’analyse des vidéos de surveillance ne contenaient aucun élément laissant supposer que la voiture de patrouille du SPT poursuivant la Jeep aurait été impliquée, directement ou indirectement, dans la collision à l’intersection de la rue Dundas Ouest et du chemin Burnhamthorpe. La preuve montre également que la voiture de patrouille n’était jamais entrée en collision avec la Jeep durant la poursuite.

Preuve vidéo/audio/photographique

L’UES a examiné le secteur à la recherche d’enregistrements vidéo ou audio et des preuves photographiques et a obtenu une vidéo de surveillance d’un immeuble sur l’avenue Cordova, ainsi que la vidéo provenant de la caméra se trouvant à bord de la voiture de patrouille de l’AI et de l’AT no 3. Le TC no 4 a également fourni des photographies de la scène de l’accident.

Rapport sur la vidéo de surveillance provenant du bâtiment sur l’avenue Cordova

Deux caméras de surveillance étaient installées sur le côté ouest du bâtiment sur l’avenue Cordova et filmaient une partie de la rue. La vidéo de surveillance enregistrée proche du moment de la collision montre la Jeep et la voiture de patrouille alors qu’elles passent devant le bâtiment. L’heure indiquée sur l’enregistrement devançait d’environ deux minutes l’heure exacte. On voit les véhicules se déplacer de droite à gauche à l’écran, se diriger en direction sud sur l’avenue Cordova, après avoir tourné à droite depuis l’avenue Islington. Les véhicules ont pris le virage vers la droite pour continuer vers l’ouest en passant au-dessus de l’avenue Islington et pour ensuite se diriger vers le nord vers le lieu de la collision. Le véhicule de police était environ sept secondes derrière la Jeep. La vitesse des deux véhicules n’a pas pu être déterminée en raison de l’angle des caméras et la vue limitée de la rue.

Séquences vidéo de la caméra dans la voiture de patrouille

Le SPT a fourni une copie de l’enregistrement vidéo provenant de la caméra dans la voiture de patrouille de l’AI et de l’AT no 3. La vidéo avait été enregistrée le 16 février 2017 et commençait à 15 h 28 m 54 s. L’AI conduisait, et l’AT no 1 était son passager. Voici un résumé des images vidéo :

  • à 15 h 28 m 54 s, la voiture de patrouille est arrêtée à un feu rouge sur l’avenue Horner à l’intersection de l’avenue Kipling; puis, à 15 h 29 m 25 s, tout en se trouvant toujours au feu rouge, les feux d’urgence de la voiture de patrouille sont activés et celle&hyphen;ci brûle le feu rouge et se rend vers l’est et vers le nord sur l’avenue Horner; les feux d’urgence sont désactivés une fois que la voiture de patrouille sort de l’intersection
  • à 15 h 30 m 38 s, la voiture de patrouille arrive à l’intersection des avenues Horner et Evans et tourne à droite et se dirige vers l’est sur l’avenue Evans
  • à 15 h 30 m 44 s, les feux d’urgence de la voiture de patrouille sont activés
  • à 15 h 31 m 05 s, la voiture de police arrive à l’intersection des avenues Evans et Islington et tourne à gauche et se dirige vers le nord sur l’avenue Islington
  • à 15 h 31 m 38 s, la voiture de police est prise dans la circulation en direction nord à l’intersection de l’avenue Islington et du Queensway
  • à 15 h 32 m 27 s, la sirène de la voiture de police est activée tandis que la voiture de patrouille se trouve à proximité de l’avenue Islington et du chemin Stanmills
  • à 15 h 32 m 53 s, la voiture de police se déplace vers le nord sur l’avenue Islington et traverse l’intersection avec le chemin Jutland
  • à 15 h 33 m 15 s, la voiture de police passe par l’intersection du chemin Norseman
  • à 15 h 33 m 18 s, la voiture de police commence à se diriger vers le nord sur l’avenue Islington dans la voie de virage au centre et à 15 h 33 m 32 s, elle retourne dans la voie en direction nord
  • à 15 h 34 m 05 s, la voiture de police s’arrête à un feu rouge à l’intersection avec la rue Bloor et désactive les feux d’urgence
  • à 15 h 34 m 27 s, la voiture de patrouille tourne à gauche sur la rue Bloor et commence à se diriger vers l’ouest; à 15 h 34 m 33 s, les feux d’urgence de la voiture de patrouille sont activés et à 15 h 34 m 41 s, elle fait demi&hyphen;tour pour se rendre vers l’est sur la rue Bloor
  • à 15 h 34 m 48 s, la voiture de patrouille entre dans la voie de virage vers la gauche et s’arrête derrière une Jeep de couleur argent; les feux d’urgence de la voiture de patrouille sont désactivés
  • à 15 h 37 m 02 s, la voiture de patrouille tourne à gauche et suit la Jeep en direction nord sur l’avenue Islington
  • à 15 h 37 m 07 s, la voiture de patrouille active ses feux d’urgence et sa sirène et à 15 h 37 m 24 s, la Jeep se range à droite et s’arrête en bordure de l’avenue
  • à 15 h 37 m 39 s, les microphones du conducteur et du passager sont activés et l’AI s’approche du côté conducteur de la Jeep, tandis que l’AT no1 s’approche du côté passager. L’AI commence à parler avec le conducteur de la Jeep, désigné plus tard comme le TC no 1
  • à 15 h 38 m 36 s, tandis que l’AI parle toujours au TC no1, celui&hyphen;ci accélère rapidement et prend la fuite
  • à 15 h 38 m 50 s, l’AI et l’AT no1 remontent dans la voiture de patrouille et commence à se diriger vers le nord sur l’avenue Islington dans la même direction que le TC no 1
  • à 15 h 39 m 09 s, la voiture de patrouille tourne à droite depuis l’avenue Islington sur l’avenue Cordova; la voiture de patrouille se trouve à environ 150 mètres derrière la Jeep
  • à 15 h 39 m 36 s, la voiture de patrouille se trouve à approximativement 125 mètres de l’intersection de la rue Dundas Ouest, quand la Jeep entre dans l’intersection alors que le feu est rouge et entre en collision avec une minifourgonnette
  • à 15 h 39 m 46 s, la voiture de patrouille entre dans l’intersection de l’avenue Cordova et de la rue Dundas Ouest en brûlant le feu rouge; on voit le TC no1 quitter son véhicule et prendre la fuite en courant vers le nord sur le chemin Burnhamthorpe

Enregistrements des communications

Résumé des communications

  • 15 h 39 m 37 s : l’AT no1 signale qu’un véhicule s’est enfui d’eux [il fournit une description du conducteur et de son passager.] Le répartiteur demande où se trouvent les agents
  • 15 h 39 m 38 s : répondant au répartiteur, l’AT no1 indique que les agents suivent le véhicule, une Jeep de couleur argent
  • 15 h 39 m 55 s : l’AT no1 explique que la Jeep est entrée en collision avec un autre véhicule et qu’un homme [il fournit une description de l’homme] est sorti de la Jeep et s’est enfui en courant. De nouveau, le répartiteur demande à savoir où se trouvent les agents. Le GPS montre qu’ils avaient procédé à un arrêt véhiculaire au croissant Aberfoyle
  • 15 h 40 m 33 s, l’AT no1 informe le service de répartition qu’ils ont placé quelqu’un sous garde. L’agent de police semble être hors d’haleine et indique que la collision s’est produite au chemin Burnhamthorpe et à la rue Dundas Ouest. Il demande une ambulance

Éléments obtenus du Service de police

L’UES a obtenu sur demande et a examiné les éléments et documents suivants qui lui ont été fournis par le SPT et la police régionale de York (PRY) :

  • enregistrements des communications
  • séquences filmées par la caméra dans la voiture de patrouille de l’AI
  • feuille d’admission de la Division du SPT
  • table des données LAV
  • rapport des détails de l’incident
  • notes des AT nos1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7
  • rapport des fiches de service
  • enregistrement des communications – résumé de la conversation
  • politique du SPT sur la poursuite visant l’appréhension de suspects
  • rapport sur l’historique de l’unité

Dispositions législatives pertinentes

Articles 1-3, Règlement de l’Ontario 266/10, Loi sur les services policiers – Poursuites visant l’appréhension de suspects

1.(1) Pour l’application du présent règlement, une poursuite visant l’appréhension de suspects a lieu lorsqu’un agent de police tente d’ordonner au conducteur d’un véhicule automobile de s’immobiliser, que le conducteur refuse d’obtempérer et que l’agent poursuit, en véhicule automobile, le véhicule en fuite afin de l’immobiliser ou de l’identifier ou d’identifier un particulier à bord du véhicule

(2) La poursuite visant l’appréhension de suspects est interrompue lorsque les agents de police ne poursuivent plus un véhicule automobile en fuite afin de l’immobiliser ou de l’identifier ou d’identifier un particulier à bord du véhicule.

2.(1) Un agent de police peut poursuivre ou continuer de poursuivre un véhicule automobile en fuite qui ne s’immobilise pas :

  1. soit s’il a des motifs de croire qu’une infraction criminelle a été commise ou est sur le point de l’être
  2. soit afin d’identifier le véhicule ou un particulier à bord du véhicule

(2) Avant d’amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects, un agent de police s’assure qu’il ne peut recourir à aucune des solutions de rechange prévues dans la procédure écrite, selon le cas :

  1. du corps de police de l’agent, établie en application du paragraphe 6 (1), si l’agent est membre d’un corps de police de l’Ontario au sens de la Loi de 2009 sur les services policiers interprovinciaux
  2. d’un corps de police dont le commandant local a été avisé de la nomination de l’agent en vertu du paragraphe 6 (1) de la Loi de 2009 sur les services policiers interprovinciaux, si l’agent a été nommé en vertu de la partie II de cette loi
  3. du corps de police local du commandant local qui a nommé l’agent en vertu du paragraphe 15 (1) de la Loi de 2009 sur les services policiers interprovinciaux, si l’agent a été nommé en vertu de la partie III de cette loi

(3) Avant d’amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects, l’agent de police décide si, afin de protéger la sécurité publique, le besoin immédiat d’appréhender un particulier à bord du véhicule automobile en fuite ou le besoin d’identifier le véhicule ou le particulier l’emporte sur le risque que peut présenter la poursuite pour la sécurité publique.

(4) Pendant une poursuite visant l’appréhension de suspects, l’agent de police réévalue continuellement la décision prise aux termes du paragraphe (3) et interrompt la poursuite lorsque le risque que celle-ci peut présenter pour la sécurité publique l’emporte sur le risque pour la sécurité publique que peut présenter le fait de ne pas appréhender immédiatement un particulier à bord du véhicule automobile en fuite ou de ne pas identifier le véhicule ou le particulier.

(5) Nul agent de police ne doit amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects pour une infraction non criminelle si l’identité d’un particulier à bord du véhicule automobile en fuite est connue.

(6) L’agent de police qui entreprend une poursuite visant l’appréhension de suspects pour une infraction non criminelle interrompt la poursuite une fois que le véhicule automobile en fuite ou le particulier à bord du véhicule est identifié.

3.(1) Un agent de police avise un répartiteur lorsqu’il amorce une poursuite visant l’appréhension de suspects

(2) Le répartiteur avise un surveillant des communications ou un surveillant de la circulation, s’il y en a un de disponible, qu’une poursuite visant l’appréhension de suspects a été amorcée.

Articles 219 et 221 du Code criminel – Négligence criminelle

219 (1) Est coupable de négligence criminelle quiconque :

  1. soit en faisant quelque chose
  2. soit en omettant de faire quelque chose qu’il est de son devoir d’accomplir

montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.

(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.

221 est coupable d’un acte criminel est passible d’un emprisonnement maximal de dix ans quiconque, par négligence criminelle, cause des lésions corporelles à autrui.

Article 249 du Code criminel – Conduite dangereuse

(1) Commet une infraction quiconque conduit, selon le cas :

  1. un véhicule à moteur d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, y compris la nature et l’état du lieu, l’utilisation qui en est faite ainsi que l’intensité de la circulation à ce moment ou raisonnablement prévisible dans ce lieu

(3) Quiconque commet une infraction mentionnée au paragraphe (1) et cause ainsi des lésions corporelles à une autre personne est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans.

Analyse et décision du directeur

Le 16 février 2017, l’AT no 6 et l’AT no 7 de la Police régionale de York (PRY) ont demandé à l’AI, qui était de service et conduisait une voiture de patrouille avec son collègue, l’AT no 1, d’arrêter une Jeep de couleur argent et de confirmer l’identité du conducteur. Selon l’AT no 6 et l’AT no 7, le conducteur de la Jeep avait effectué une transaction liée à la drogue avec un agent d’infiltration du PRY. L’AT no 1, qui a fourni une déclaration aux enquêteurs de l’UES, ne savait pas quelle était la raison de la requête d’arrêter la Jeep. L’AI savait que la PRY avait demandé qu’un agent de la SPT procède à l’arrêt routier d’un véhicule pour identifier le conducteur et son passager. On ne lui avait pas fourni beaucoup de détails sur la raison pour laquelle la PRY souhaitait qu’on arrête ainsi le véhicule ou pourquoi il fallait en identifier les occupants.

Selon l’AI et l’AT no 1 et tel que confirmé par la vidéo filmée par le caméra dans la voiture de patrouille, à 15 h 37 m 26 s, l’AI et l’AT no 1 ont arrêté la Jeep, et les deux agents de police se sont approchés du véhicule, c’est‐à‐dire que l’AI s’est approché du côté du conducteur et l’AT no 1, du côté du passager; la Jeep s’était arrêtée quand l’AI avait allumé ses feux d’urgence sur le toit et avait activé sa sirène. Une fois qu’il est à la Jeep, on entend l’AI demander au conducteur [traduction] « Avez‐vous été impliqué dans un incident de rage au volant? » Quand le conducteur, le TC no 1, le nie, l’AI lui explique qu’on lui a demandé d’arrêter une Jeep de couleur argent pour cette raison et puis demande au conducteur de lui montrer ses documents en ajoutant qu’après cela, il pourra poursuivre sa route. Alors que l’AI et AT no 1 se trouvent encore respectivement à la vitre du conducteur et à celle du passager, la Jeep démarre et part à toute vitesse; puis, les deux agents de police retournent à leur voiture de patrouille et à 15 h 38 m 49 s, commencent à suivre la Jeep. Du fait que les microphones étaient activés à bord de la voiture de patrouille, lorsque celle‐ci tourne à droite sur une autre rue, on peut entendre la conversation entre les deux agents, qui affirment que c’est la direction dans laquelle ils ont vu la Jeep tourner. À 15 h 39 m 15 s, on entend l’AT no 1 dire au répartiteur [traduction] « il y a une Jeep de couleur argent qui s’est enfuie de nous », mais lorsque le répartiteur demande « la suivez‐vous? », initialement, l’AT no 1 répond « non, non », mais puis l’AI dit « nous le font » et puis l’AT no 1 informe le répartiteur que les agents de police suivent la Jeep. À 15 h 39 m 36 s, le répartiteur demande à savoir où se trouvent les agents de police, mais on les entend juste prononcer différents jurons et ils n’indiquent pas où ils se trouvent. Le prochain message venant de la voiture de patrouille de l’AI et de l’AT no 1 est envoyé à 15 h 39 m 40 s, quand on entend l’AT no 1 dire « le véhicule vient de percuter une voiture ». À ce moment‐là, plutôt que de s’arrêter sur les lieux de la collision pour porter secours, l’AI traverse l’intersection et poursuit le conducteur de la Jeep. Une fois de plus, le répartiteur demande « où vous trouvez‐vous? » et l’AT no 1 répond « à la rue Dundas, un homme a pris la fuite en courant ». Puis, la voiture de patrouille s’arrête et l’enregistrement audio révèle clairement que les agents de police poursuivent le conducteur à pied et ils ne fournissent pas tous les détails concernant l’endroit où ils se trouvent au répartiteur avant d’avoir appréhendé le conducteur.

Les séquences vidéo de la caméra de surveillance provenant d’un bâtiment sur l’avenue Cordova confirment qu’au moment de la collision, la voiture de patrouille était sept secondes derrière la Jeep.

Les données LAV de la voiture de patrouille confirment que celle‐ci se déplaçait à 87 km/h, puis avait ralenti à 76 km/h et puis avait de nouveau accéléré à 87 km/h avant la première transmission au service de répartition durant laquelle l’AT no 1 avait indiqué qu’un véhicule venait de s’enfuir d’eux, mais qu’ils ne le suivaient pas. Immédiatement après cette transmission, ils avaient ralenti à 64 km/h. L’analyse des données LAV a révélé que la voiture de patrouille se déplaçait à une vitesse de 71 km/h lorsqu’elle avait traversé une zone scolaire, où la limite de vitesse affichée était de 40 km/h.

Tous les conducteurs civils des véhicules impliqués dans la collision ou qui étaient présents à l’intersection de la rue Dundas Ouest et du chemin Burnhamthorpe et de l’avenue Cordova au moment de la collision et qui se souvenaient de l’incident ont confirmé que la Jeep au volant de laquelle se trouvait le TC no 1 était entrée dans l’intersection en brûlant un feu rouge et avait causé les collisions subséquentes.

Après avoir examiné l’ensemble de la preuve, je n’ai aucune difficulté à conclure que l’AI et l’AT no 1 avaient entamé une poursuite policière du véhicule du TC no 1 et qu’ils enfreignaient la Loi sur les services policiers de l’Ontario, de même que la réglementation connexe du SPT intitulée [traduction] « Poursuites visant l’appréhension de suspects » pour les motifs suivants :

En vertu du Règlement de l’Ontario 266/10 pris en application de la LSP de l’Ontario intitulé Poursuites visant l’appréhension de suspects :

Par. 2 (1) Un agent de police peut poursuivre ou continuer de poursuivre un véhicule automobile en fuite qui ne s’immobilise pas :

  • soit s’il a des motifs de croire qu’une infraction criminelle a été commise ou est sur le point de l’être
  • soit afin d’identifier le véhicule ou un particulier à bord du véhicule

(2) Avant d’amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects, un agent de police s’assure qu’il ne peut recourir à aucune des solutions de rechange prévues […]

(3) Avant d’amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects, l’agent de police décide si, afin de protéger la sécurité publique, le besoin immédiat d’appréhender un particulier à bord du véhicule automobile en fuite ou le besoin d’identifier le véhicule ou le particulier l’emporte sur le risque que peut présenter la poursuite pour la sécurité publique.

(4) Pendant une poursuite visant l’appréhension de suspects, l’agent de police réévalue continuellement la décision prise aux termes du paragraphe (3) et interrompt la poursuite lorsque le risque que celle-ci peut présenter pour la sécurité publique l’emporte sur le risque pour la sécurité publique que peut présenter le fait de ne pas appréhender immédiatement un particulier à bord du véhicule automobile en fuite ou de ne pas identifier le véhicule ou le particulier. [Non en gras dans l’original.]

La politique du SPT adoptée en vertu de la LSPO prévoit ce qui suit :

traduction]

Responsabilité pour l’exécution sécuritaire

La responsabilité pour l’exécution sécuritaire d’une poursuite incombe à l’agent de police individuel, au préposé aux communications - Services des communications, au superviseur des poursuites et à toute autre personne autorisée qui surveille la poursuite.

Dans ce cas-ci, l’agent ayant amorcé la poursuite n’en a jamais informé le préposé aux communications, ce qui signifie évidemment que le préposé aux communications, le superviseur des poursuites et toute autre personne autorisée qui est censée surveiller la poursuite n’ont aucunement participé à la gestion de la poursuite, étant donné qu’il est clair que personne ne la surveillait.

Il ressort clairement de la vidéo filmée par la caméra dans la voiture de patrouille de l’AI ainsi que des données LAV que l’AI poursuivait le véhicule du TC no 1 en ayant ses feux d’urgence et sa sirène activés à des vitesses élevées allant jusqu’à 87 km/h dans des secteurs où la limite de vitesse était de 50 km/h et qu’il a traversé une zone scolaire à une vitesse de 71 km/h alors que la limite de vitesse qui y était affichée était de 40 km/h. Cette preuve établit clairement que l’AI poursuivait le véhicule. Bien que l’AT no 1, qui était le passager dans le véhicule de l’AI, ait informé initialement le répartiteur qu’un véhicule venait de s’enfuir d’eux, il a nié qu’ils le poursuivaient lorsque le répartiteur lui a demandé initialement si c’était le cas, mais a ensuite admis qu’ils poursuivaient effectivement le véhicule, lorsque l’AI l’avait incité à le faire.

Sur la foi de cette preuve, il est clair qu’aussi bien l’AI, le conducteur, et l’AT no 1, qui parlait au répartiteur par la radio, poursuivaient activement le véhicule automobile du TC no 1 et qu’ils enfreignaient la LSP et la politique du SPT, en ce sens qu’aucun d’eux n’a informé le préposé aux communications qu’ils se livraient à une poursuite active, malgré le fait qu’ils suivaient le véhicule automobile du TC no 1 à des vitesses considérablement élevées allant jusqu’à 87 km/h dans des zones de 50 km/h et de 71 km/h dans une zone scolaire où la limite de vitesse était de 40 km/h. En outre, l’AI ou l’AT no 1 n’ont à aucun moment tenu le répartiteur au courant de l’endroit où ils se trouvaient et ne lui ont pas fourni les détails concernant le véhicule automobile en fuite, avant d’être sorti de leur véhicule, de se mettre à courir après le TC no 1 et de l’arrêter.

Dans le message qu’il a transmis après la tentative échouée d’identifier le conducteur du véhicule du TC no 1, l’AT no 1 a indiqué que la Jeep de couleur argent s’était juste [traduction] « enfuie d’eux en accélérant » et qu’ils le suivaient, sans préciser à aucun moment qu’ils poursuivaient le véhicule automobile. Je conclus qu’à partir de ce moment-là, il est clair tant à partir des données de LAV que des images vidéo enregistrées par la caméra dans la voiture de patrouille que l’AI avaient amorcé une poursuite jusqu’au moment où le véhicule automobile du TC no 1 est entré en collision avec le véhicule automobile du plaignant et que sa course s’est arrêtée abruptement lorsqu’il a percuté un autre véhicule. Durant cette période, aucun des agents concernés n’a communiqué avec le centre de communication pour l’informer qu’ils se livraient à une poursuite. Chaque agent avait l’obligation de signaler au répartiteur qu’il avait amorcé une poursuite dès qu’elle avait été entamée, et l’affirmation de l’AT no 1 selon laquelle ils suivaient simplement le suspect à une vitesse allant jusqu’à 87 km/h, sans mentionner qu’ils se livraient à une poursuite, est une déformation du sens de la législation. Alors que l’AI était peut‐être occupé à conduire son véhicule à des taux de vitesse élevés durant sa poursuite de la Jeep, la présence de l’AT no 1 dans le véhicule était un avantage pour lui et rien ne l’empêchait donc d’informer le service de répartition de la poursuite. Je doute fort qu’une personne raisonnable penserait que la décision d’immobiliser un véhicule automobile pour identifier le conducteur pour des raisons non précisées l’emporte sur le risque que présentait pour la sécurité publique le fait de continuer à poursuivre un véhicule automobile aux vitesses auxquelles roulaient les agents, compte tenu du fait que c’était la fin de la journée scolaire dans une ville à grande activité, alors qu’on pouvait s’attendre à ce que des véhicules et piétons circulent. Je note en outre que malgré la vitesse à laquelle l’AI conduisait sa voiture de patrouille derrière la Jeep, après que celle-ci s’était enfuie d’eux en accélérant, il ne semblait y avoir aucun sentiment d’urgence chez les agents de police, qu’on voit retourner tranquillement à leur voiture de patrouille et qu’environ 14 secondes s’étaient écoulées avant qu’ils commencent à suivre la Jeep. Durant cette période, les agents avaient amplement le temps d’informer le répartiteur que la Jeep avait pris la fuite et qu’ils entameraient une poursuite.

Les mots « poursuite » ou « je suis, mais je ne poursuis pas » ne sont pas des mots magiques qui d’une manière ou d’une autre transforment ce qui était manifestement une poursuite en quelque chose d’autre qui permet de contourner les obligations de la police lorsqu’elle entame une poursuite, lesquelles obligations sont énoncées dans le Règlement sur les poursuites visant l’appréhension de suspects. En vertu de ce règlement, une poursuite visant l’appréhension de suspects a lieu lorsqu’un agent de police tente d’ordonner au conducteur d’un véhicule automobile de s’immobiliser, que le conducteur refuse d’obtempérer et que l’agent poursuit, en véhicule automobile, le véhicule en fuite dans l’intention de l’immobiliser. Même si l’AT no 1 prétendait qu’une poursuite n’avait pas lieu, je ne vois aucune raison de poursuivre un véhicule à 87 km/h sur une rue bondée durant l’heure de pointe un jour de semaine à toute fin autre que de tenter de l’immobiliser. Lorsque l’AT no 1 a finalement admis au répartiteur qu’ils suivaient la Jeep, ces mots auraient dû être suivis de [traduction] « nous poursuivons maintenant le véhicule et nous nous déplaçons à 87 km/h », afin que le sergent des communications puisse décider s’il y avait lieu ou non de mettre fin à la poursuite. Et plutôt que de garder le silence quand l’AT no 1 a informé le répartiteur qu’ils suivaient la Jeep, l’AI avait lui aussi l’obligation de signaler qu’ils poursuivaient en fait activement le suspect.

Compte tenu de l’ensemble de la preuve, j’ai des réserves au sujet de l’omission des deux agents de police d’informer le répartiteur qu’ils poursuivaient activement le véhicule du TC no 1, dans une situation où il n’était pas allégué que celui‐ci venait de commettre une infraction criminelle ni qu’une infraction criminelle était sur le point d’être perpétrée, où la PRY avait déjà identifié le véhicule automobile conduit par le TC no 1, où il n’y avait aucune preuve que les agents savaient pourquoi la PRY voulait qu’ils arrêtent le véhicule et où leur seul but était d’identifier le conducteur. Il m’est difficile d’imaginer que deux policiers différents croyaient que cela équivalait à une situation où « afin de protéger la sécurité publique, le besoin immédiat d’appréhender un particulier à bord du véhicule automobile en fuite […] l’emporte sur le risque que peut présenter la poursuite pour la sécurité publique ». Je ne parviens pas à comprendre non plus comment la responsabilité de chacun de ces agents de réévaluer la situation et d’interrompre « la poursuite lorsque le risque que celle-ci peut présenter pour la sécurité publique l’emporte sur le risque pour la sécurité publique que peut présenter le fait de ne pas appréhender immédiatement un particulier à bord du véhicule automobile en fuite » aurait pu être remplie en décidant de continuer la poursuite plutôt que d’y mettre fin.

Cela dit, le non-respect de la LSP ou de la politique du SPT n’équivaut pas à des motifs raisonnables de croire qu’une infraction criminelle a été commise. La question à trancher est de savoir s’il existe des motifs raisonnables de croire que l’AI a commis une infraction criminelle lorsqu’il a entamé la poursuite du TC no 1 et plus particulièrement si la conduite est devenue dangereuse et, par conséquent, était en contravention du paragraphe 249(1) du Code criminel et a ainsi causé des lésions corporelles contraires au paragraphe 249(3) ou s’il s’agissait d’une négligence criminelle contraire à l’article 221 du Code criminel et a ainsi causé des lésions corporelles.

La décision de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt R. c. Beatty, [2008] 1 R.C.S. 49 nous dit que, pour que l’article 249 puisse être invoqué, il faut établir que la personne conduisait « d’une façon dangereuse pour le public, eu égard à toutes les circonstances, y compris la nature et l’état du lieu, l’utilisation qui en est faite ainsi que l’intensité de la circulation à ce moment ou raisonnablement prévisible dans ce lieu » et que cette façon de conduire constituait « un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans la même situation que l’accusé »; dans le cas de l’infraction visée par l’article 221, il faut qu’il y ait un [traduction] « un écart marqué et important par rapport à la norme de diligence que respecterait un conducteur raisonnable dans les circonstances » où l’accusé [traduction] « a manifesté un mépris téméraire pour la vie et la sécurité d’autrui » (R. c. Sharp (1984), 12 C.C.C. (3d) 428 (C.A. Ont.)).

Après examen de l’ensemble de la preuve, il est clair que les agents de police voyageaient à des vitesses qui n’étaient pas nécessaires durant leur poursuite du véhicule automobile du TC no 1 (surtout lorsqu’ils se trouvaient dans une zone scolaire). Je conclus toutefois qu’il n’y a aucune preuve que la conduite de l’AI créait un danger pour les autres utilisateurs de la chaussée ou qu’il a, à un moment ou à un autre, entravé la circulation, puisque ces autres automobilistes ont cédé le passage aux agents de police. De plus, les conditions environnementales étaient bonnes, et les routes étaient sèches. De plus, alors que la vitesse à laquelle conduisait l’AI au moment de sa poursuite du véhicule automobile du TC no 1 a peut‐être exacerbé initialement la conduite de ce dernier, il ressort clairement de la preuve fournie par le TC no 1 qu’il avait perdu de vue la voiture de patrouille à un moment donné avant la collision et qu’il avait quand même continué de rouler à ces vitesses excessives et avait fini par brûler un feu rouge, était entré dans l’intersection illégalement et avait causé les collisions subséquentes. Sur la foi de cette preuve, je conclus que le TC no 1 a malheureusement décidé de tenter d’échapper à la police et, ce faisant, s’est enfui à une vitesse excessive et a fait des manÅ“uvres dangereuses sans égard aux autres personnes qui utilisaient la route. Compte tenu de l’ensemble de la preuve, le TC no 1 a décidé de conduire à des vitesses qui ne lui permettaient pas de respecter les feux de circulation ou il les a simplement ignorés et est entré en collision d’abord avec le véhicule automobile du plaignant et puis avec le véhicule automobile du TC no 3. Étant donné cet élément de preuve, il est clair que le TC no 1 a sciemment décidé de conduire de façon téméraire et à des vitesses trop élevées afin d’échapper à la police.

Je conclus, en me fondant sur cette preuve, que la conduite de l’AI, pendant qu’il se livrait à une poursuite et tentait d’appréhender le TC no 1 ne constituait pas « un écart marqué par rapport à la norme » et, manifestement, ne peut donc pas équivaloir à « un écart marqué et important de la norme » et je suis dans l’impossibilité d’établir qu’il y avait un lien causal entre les actions des agents et la collision des véhicules automobiles à l’origine de la blessure du plaignant. Par conséquent, je conclus qu’il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve pour en arriver à des motifs raisonnables de croire qu’une infraction criminelle a été commise, de sorte qu’il n’y a aucun fondement pour apporter des accusations en l’espèce.

Date : 21 novembre 2017

Original signé par

Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.