Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 17-TVI-288

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave ou ont donné lieu à une allégation d’agression sexuelle.

Les « blessures graves » englobent celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, a priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant que la gravité de la blessure puisse être évaluée, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider de l’envergure de son intervention.

Ce rapport décrit l’enquête de l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 45 ans durant son arrestation le 5 octobre 2017.

L’enquête

Notification de l’UES

Le jeudi 5 octobre 2017, vers 20 h 20, le Service de police de Toronto (SPT) a informé l’UES d’une blessure subie par un motocycliste. Au moment où il a signalé l’incident, le SPT ne connaissait pas encore l’identité du blessé.

à 12 h 38 cette journée‐là, d’après le SPT, l’agent impliqué (AI) conduisait un véhicule aux fins d’application du Code de la route sur la promenade Don Valley dans la ville de Toronto. L’AI a tenté d’arrêter une motocyclette qui était conduite dangereusement. Le motocycliste s’est enfui en accélérant et a pris la rampe de sortie du chemin York Mills, et l’AI a mis fin à ses efforts de l’appréhender en s’arrêtant dans les voies réservées aux véhicules à occupation multiple de la promenade Don Valley. L’AI a alors entendu ce qu’il croyait être une collision et a découvert ensuite que le motocycliste était entré en collision avec un autre véhicule. Le motocycliste a été arrêté pour conduite dangereuse et amené à l’hôpital.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 4

Nombre d’enquêteurs judiciaires de l’UES assignés : 2

Nombre de spécialistes en reconstitution des collisions de l’UES assignés : 1

L’UES a immédiatement envoyé trois enquêteurs, soit deux enquêteurs judiciaires et un spécialiste en reconstitution des collisions. Le premier membre de l’UES est arrivé à 21 h 36. Les enquêteurs de l’UES se sont également rendus à l’hôpital pour interroger le plaignant.

La scène, qui avait été préservée par le SPT, a été photographiée et les enquêteurs ont utilisé un appareil Total Station pour prendre les mesures nécessaires sur le lieu de l’incident à des fins de cartographie judiciaire.

Plaignant :

Entretien avec l’homme âgé de 45 ans, obtention et examen des dossiers médicaux

Témoins civils (TC)

TC no 1 Déclaration écrite fournie

TC no 2 Déclaration écrite fournie

TC no 3 Déclaration écrite fournie

TC no 4 Déclaration écrite fournie

TC no 5 Déclaration écrite fournie

Avant que la blessure du plaignant ne soit diagnostiquée, le Bureau des services de la circulation du SPT a interrogé les automobilistes susmentionnés, qui au moment des faits étaient arrêtés dans la rampe de sortie du chemin York Mills. Le SPT a fourni à l’UES des copies de ces entrevues, qu’un enquêteur de l’UES a examinées sur les lieux le 5 octobre 2017. Compte tenu de l’information contenue dans ces entrevues et de l’aveu du plaignant à l’UES qu’il était seul responsable de la collision, il a été jugé inutile de réinterroger ces témoins civils.

Agents témoins (AT)

AT no 1 Notes examinées, entrevue jugée non nécessaire

AT no 2 Notes examinées, entrevue jugée non nécessaire

AT no 3 Notes examinées, entrevue jugée non nécessaire

AT no 4 Notes examinées, entrevue jugée non nécessaire

Les agents de police susmentionnés se sont rendus sur les lieux de l’incident. Aucun d’entre eux n’était présent au moment de celui‐ci. Les enquêteurs ont examiné les notes qu’ils avaient prises, mais l’UES ne s’est pas entretenu avec eux, en raison du contenu de ces notes.

Agent impliqué (AI)

AI n° 1 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

Description de l’incident

Le 5 octobre 2017, le plaignant conduisait sa motocyclette en direction sud sur la promenade Don Valley, dans la ville de Toronto. Le plaignant manœuvrait sa motocyclette dans la circulation d’une manière qui a attiré l’attention de l’AI, qui a activé ses feux d’urgence et a utilisé son klaxon pour attirer l’attention du plaignant. Plutôt que de s’arrêter, le plaignant a décidé de quitter l’autoroute et il s’est rapidement rendu dans la rampe de sortie du chemin York Mills. Alors qu’il roulait dans la rampe de sortie, le plaignant a d’abord effleuré un véhicule qui y était arrêté et puis est entré en collision avec l’arrière d’une fourgonnette, qui elle aussi était arrêtée dans la rampe; le plaignant a été éjecté de sa motocyclette et a percuté la vitre arrière de la fourgonnette et est entré partiellement dans la fenêtre.

L’AI, après avoir attendu pendant une période raisonnable au bord de la route, a redémarré son véhicule et est entré dans la rampe de sortie, où il est arrivé sur les lieux de la collision.

Nature de la blessure/traitement

Le plaignant avait le bassin fracturé, des dents ébréchées et des écorchures.

Preuve

Les lieux de l’incident

La rampe de sortie vers le chemin York Mills à partir de la promenade Don Valley est une voie unique asphaltée, qui comporte un virage dans le sens horaire allant de la direction sud à la direction nord. Il y a une intersection en forme de T avec le chemin York Mills. à cet endroit, la rampe comporte deux voies de virage désignées vers la gauche et une voie de virage désignée vers la droite. L’intersection est contrôlée par un feu de circulation qui fonctionne. La rampe de sortie est longée de bordures en béton et d’accotements asphaltés.

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Au moment de la collision, la route était sèche et en bon état. La limite de vitesse affichée dans la rampe est de 30 km/h. La limite de vitesse affichée sur la promenade Don Valley est de 90 km/h.

Une motocyclette Suzuki était couchée sur son côté droit au centre de la rampe de sortie. La motocyclette comportait de graves dommages à l’avant causés par la collision. La jante de la roue avant et la fourche étaient tordues.

Il y avait une Honda Odyssey au centre de la voie de virage gauche de la rampe de sortie, devant la motocyclette. Le parechoc, le haillon et la vitre du haillon étaient endommagés. Du verre et divers accessoires se trouvaient dans le compartiment arrière et par terre près du haillon.

à côté de la Honda Odyssey se trouvait la voiture de patrouille conduite par l’AI.

Une BMW avait quitté les lieux, mais le SPT avait marqué le contour du véhicule sur la surface de la chaussée. La BMW s’était trouvée dans la voie de virage la plus à gauche de la rampe de sortie.

Une Kia Optima se trouvait au centre de la rampe de sortie, au sud des autres véhicules. Le côté droit du véhicule avait subi des dommages mineurs.

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Schéma des lieux

Schéma des lieux

Témoignage d’expert

Opinion du spécialiste en reconstitution des collisions

Il n’y avait aucun élément de preuve identifié sur la chaussée. Le plaignant et l’AI ont tous deux fourni des déclarations à l’UES, lesquelles ont aidé à déterminer le mécanisme de cette collision.

La paroi du pneu et l’enjoliveur de la roue arrière droite de la Kia Optima comportaient des traces de frottement, de 10 à 60 cm au‐dessus du sol. Ces traces de frottement correspondaient à un contact entre le côté gauche de l’enveloppement du carter de la motocyclette et possiblement la botte ou le soulier gauche du plaignant et la Kia. Du fait que ces traces étaient circulaires, la conclusion était que la roue arrière droite de la Kia tournait au moment de l’impact.

Une bosse sur le parechoc arrière du côté droit de la Kia, se trouvant 63 à 77 cm au‐dessus du sol, correspondait à la hauteur estimée du genou du motocycliste, et le spécialiste était d’avis que cette bosse avait été créée au moment de l’impact du genou gauche du plaignant. Deux égratignures sur la porte arrière droite de la Kia Optima étaient essentiellement à la même hauteur que l’égratignure au guidon gauche de la motocyclette. Cela suggère que le guidon avait heurté la porte arrière droite de la Kia. Si la Kia Optima était entièrement dans la rampe de sortie, le plaignant a dû la passer du côté droit, proche de l’extrémité est de la rampe asphaltée, et le côté gauche de son corps et le côté gauche de sa motocyclette sont entrés en collision avec le côté droit de la Kia.

Après une collision latérale aussi légère, un motocycliste aurait facilement pu poursuivre son chemin, mais il est fort probable que la motocyclette aurait été hors contrôle et que le motocycliste aurait été obligé de se concentrer entièrement sur le maintien de son équilibre. Cela pourrait expliquer le manque d’éléments de preuve sur la chaussée, alors que le plaignant se dirigeait vers la Honda Odyssey. Les morceaux de verre et accessoires près du haillon laissent supposer que la Honda Odyssey était arrêtée au moment de l’impact.

Une trace de pneu mince et noueuse au parechoc arrière de la Honda semblait indiquer qu’elle avait été causée par le pneu avant de la motocyclette. Cette trace se trouvait à la gauche du centre et les autres éléments de preuve confirmant l’impact avec le haillon se trouvaient à droite du centre. Cela donne à penser que la motocyclette avait tournée dans le sens antihoraire, de sorte que le côté droit de la motocyclette et du plaignant étaient entrés en contact avec le haillon de la Honda. Une visière en plastique d’un casque se trouvait dans le compartiment à bagages de la Honda, et le spécialiste pensait qu’elle s’était séparée au moment de l’impact lorsque le torse du plaignant avait été projeté dans la fenêtre du haillon de la Honda, alors que le reste de son corps demeurait à l’extérieur. La motocyclette avait glissé sur le côté, sur son côté droit, pour venir se reposer directement derrière la Honda Odyssey.

Compte tenu de la gravité des dommages et des endroits où les véhicules s’étaient arrêtés, il n’y avait aucune indication que l’un ou l’autre des véhicules auraient roulé à une vitesse excessive.

Enregistrements des communications

Les enregistrements des communications ont été obtenus et examinés.

éléments de preuve médico-légaux

Aucun élément ou document n’a été soumis au Centre des sciences judiciaires.

éléments obtenus du service de police

L’UES a demandé au SPT les éléments et documents suivants, qu’elle a obtenus et examinés :

  • enregistrements des communications radio
  • photographies des lieux prises par le SPT
  • déclarations écrites des AT nos 1 à 5
  • rapport détaillé des événements
  • rapport d’incident général
  • notes des AT nos 1 à 4 et de l’AI

L’UES a obtenu et examiné les documents suivants provenant d’autres sources :

  • Dossiers médicaux du plaignant

Dispositions législatives pertinentes

Articles 1-3, Règlement de l’Ontario 266/10, Loi sur les services policiers – Poursuites visant l’appréhension de suspects

1. (1) Pour l’application du présent règlement, une poursuite visant l’appréhension de suspects a lieu lorsqu’un agent de police tente d’ordonner au conducteur d’un véhicule automobile de s’immobiliser, que le conducteur refuse d’obtempérer et que l’agent poursuit, en véhicule automobile, le véhicule en fuite afin de l’immobiliser ou de l’identifier ou d’identifier un particulier à bord du véhicule.

(2) La poursuite visant l’appréhension de suspects est interrompue lorsque les agents de police ne poursuivent plus un véhicule automobile en fuite afin de l’immobiliser ou de l’identifier ou d’identifier un particulier à bord du véhicule.

2. (1) Un agent de police peut poursuivre ou continuer de poursuivre un véhicule automobile en fuite qui ne s’immobilise pas :

  1. soit s’il a des motifs de croire qu’une infraction criminelle a été commise ou est sur le point de l’être;
  2. soit afin d’identifier le véhicule ou un particulier à bord du véhicule.

(2) Avant d’amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects, un agent de police s’assure qu’il ne peut recourir à aucune des solutions de rechange prévues dans la procédure écrite, selon le cas :

  1. du corps de police de l’agent, établie en application du paragraphe 6 (1), si l’agent est membre d’un corps de police de l’Ontario au sens de la Loi de 2009 sur les services policiers interprovinciaux;
  2. d’un corps de police dont le commandant local a été avisé de la nomination de l’agent en vertu du paragraphe 6 (1) de la Loi de 2009 sur les services policiers interprovinciaux, si l’agent a été nommé en vertu de la partie II de cette loi;
  3. du corps de police local du commandant local qui a nommé l’agent en vertu du paragraphe 15 (1) de la Loi de 2009 sur les services policiers interprovinciaux, si l’agent a été nommé en vertu de la partie III de cette loi.

(3) Avant d’amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects, l’agent de police décide si, afin de protéger la sécurité publique, le besoin immédiat d’appréhender un particulier à bord du véhicule automobile en fuite ou le besoin d’identifier le véhicule ou le particulier l’emporte sur le risque que peut présenter la poursuite pour la sécurité publique.

(4) Pendant une poursuite visant l’appréhension de suspects, l’agent de police réévalue continuellement la décision prise aux termes du paragraphe (3) et interrompt la poursuite lorsque le risque que celle-ci peut présenter pour la sécurité publique l’emporte sur le risque pour la sécurité publique que peut présenter le fait de ne pas appréhender immédiatement un particulier à bord du véhicule automobile en fuite ou de ne pas identifier le véhicule ou le particulier.

(5) Nul agent de police ne doit amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects pour une infraction non criminelle si l’identité d’un particulier à bord du véhicule automobile en fuite est connue.

(6) L’agent de police qui entreprend une poursuite visant l’appréhension de suspects pour une infraction non criminelle interrompt la poursuite une fois que le véhicule automobile en fuite ou le particulier à bord du véhicule est identifié.

3. (1) Un agent de police avise un répartiteur lorsqu’il amorce une poursuite visant l’appréhension de suspects.

(2) Le répartiteur avise un surveillant des communications ou un surveillant de la circulation, s’il y en a un de disponible, qu’une poursuite visant l’appréhension de suspects a été amorcée.

Paragraphe 216 (1) du Code de la route de l’Ontario – Pouvoir d’un agent de police

216 (1) Un agent de police, dans l’exercice légitime de ses fonctions, peut exiger du conducteur d’un véhicule, autre qu’une bicyclette, qu’il s’arrête. Si tel est le cas, à la suite d’une demande ou de signaux, le conducteur obéit immédiatement à la demande d’un agent de police identifiable à première vue comme tel.

(2) Quiconque contrevient au paragraphe (1) est coupable d’une infraction et passible, sur déclaration de culpabilité, sous réserve du paragraphe (3), selon le cas :

  1. d’une amende d’au moins 1 000 $ et d’au plus 10 000 $;
  2. d’un emprisonnement d’au plus six mois;
  3. d’une amende et d’un emprisonnement.

(3) Si une personne est reconnue coupable d’une infraction prévue au paragraphe (2) et que le tribunal est convaincu, sur l’ensemble de la preuve, que cette personne a continué volontairement de se soustraire à la police lorsqu’un agent de police la poursuivait :

  1. la personne est passible d’une amende d’au moins 5 000 $ et d’au plus 25 000 $, plutôt que l’amende indiquée à l’alinéa (2) a);
  2. le tribunal ordonne l’emprisonnement de la personne pendant une période d’au moins 14 jours et d’au plus six mois, plutôt que la période indiquée à l’alinéa (2) b);
  3. le tribunal ordonne la suspension du permis de conduire de la personne :
    1. pendant une période de cinq ans, sauf si le sous-alinéa (ii) s’applique
    2. pendant une période d’au moins 10 ans si le tribunal est convaincu, sur l’ensemble de la preuve, que les actes de la personne ou la poursuite ont causé la mort ou une blessure corporelle à quiconque

(4) L’ordonnance prévue au sous-alinéa (3) c) (ii) peut prévoir la suspension du permis de conduire de la personne pour le reste de sa vie.

Analyse et décision du directeur

Le 5 octobre 2017, le plaignant conduisait sa motocyclette en direction sud sur la promenade Don Valley dans la ville de Toronto lorsqu’il a attiré l’attention de l’agent impliqué (AI), du fait qu’il avait conduit d’abord sur l’accotement de l’autoroute et puis dans la voie réservée aux véhicules à occupation multiple. Le plaignant a indiqué qu’il roulait environ 10 km/h plus vite que les autres véhicules, qui avaient ralenti à entre 30 et 60 km/h. L’AI s’est placé derrière le plaignant et a activité ses feux d’urgence sur le toit et a donné un coup de klaxon pour ordonner au plaignant de se ranger sur le côté; le plaignant a décidé de ne pas le faire, et au lieu de cela a viré dans la voie du centre et a accéléré pour quitter l’autoroute en empruntant la rampe de sortie vers le chemin York Mills. Le plaignant a indiqué qu’il savait que la voiture de patrouille de la police n’était plus derrière lui lorsqu’il était entré dans la rampe de sortie, mais qu’il pensait que l’agent suivrait.

L’AI a indiqué que dès qu’il s’était rendu compte que le plaignant n’allait pas s’arrêter, il avait obtenu le numéro de sa plaque d’immatriculation et puis avait éteint ses feux d’urgence et avait arrêté sa voiture de patrouille pendant quelques secondes. L’AI avait vu que le plaignant continuait à se diriger vers le sud dans la voie réservée aux véhicules à occupation multiple avant de bifurquer et traverser quatre voies de circulation vers la rampe de sortie du chemin York Mills.

Cet élément de preuve est corroboré par le témoin civil (TC) no 4, qui a fourni une déclaration écrite dans laquelle il précisait qu’au moment où il mettait son clignotant pour indiquer qu’il quitterait l’autoroute en prenant la rampe de sortie du chemin York Mills, la motocyclette du plaignant lui avait coupé le chemin. Le TC no 4 a indiqué que la vitesse de la circulation était entre 40 et 50 km/h, tandis que le plaignant roulait à environ 80 km/h. Le TC no 4 avait vu le plaignant prendre la rampe de sortie et puis avait vu le pneu de la motocyclette du plaignant toucher le pneu arrière d’un véhicule automobile Kia qui se trouvait également dans la rampe. Plus loin dans la rampe, le TC no 4 avait découvert que la motocyclette du plaignant avait percuté une fourgonnette, dont la vitre arrière avait été brisée durant la collision. Puis, le TC no 4 avait vu une voiture de patrouille arriver sur les lieux dans la voie d’urgence et mettre le plaignant en état d’arrestation.

La berline Kia avec laquelle le pneu de la motocyclette du plaignant était initialement entré en contact était conduite par la TC no 2. La TC no 2 a déclaré qu’elle roulait dans la rampe de sortie à approximativement 15 km/h, lorsque son véhicule automobile avait été heurté par la motocyclette du plaignant. La TC no 2 a indiqué qu’en dépit du fait que son véhicule était assez proche de la bordure droite, puisqu’elle avait l’intention de tourner à droite à l’intersection, le motocycliste était passé à grande allure à côté de son véhicule le long de la bordure et puis était entré en collision avec l’arrière d’une minifourgonnette Honda. La TC no 2 avait observé le plaignant tomber au sol avec sa motocyclette, mais se mettre debout en environ cinq secondes. La TC no 2 avait également vu l’AI arriver, dans les cinq secondes qui avaient suivi la collision.

La TC no 1, qui était au volant de la minifourgonnette Honda Odyssey, s’était arrêtée dans la rampe de sortie lorsqu’elle avait entendu un impact et la vitre arrière de sa minifourgonnette voler en éclats et elle avait réalisé que quelqu’un l’avait heurtée par derrière. En environ cinq à dix secondes, la TC no 1 avait vu une voiture de police se placer à côté d’elle.

Aucun des cinq témoins civils qui ont fourni des déclarations n’avait vu l’AI poursuivre la motocyclette du plaignant avant la collision ou au moment de celle-ci. Le plaignant lui‐même a déclaré qu’il savait que l’AI n’était plus derrière lui lorsqu’il était sorti de l’autoroute en prenant la rampe de sortie, ayant vu que la voiture de patrouille de la police était restée derrière lui dans la voie de dépassement.

Le plaignant a expliqué que lorsqu’il était entré dans la rampe de sortie, son pied avait griffé le pneu arrière d’un véhicule. L’enquête ultérieure menée par les enquêteurs judiciaires de l’UES a confirmé qu’il y avait une bosse à l’aile arrière droite de la Kia que conduisait la TC no 2, à un endroit qui correspondait au contact du genou d’un motocycliste avec le véhicule. Le plaignant a indiqué qu’il avait alors dépassé cinq ou six autres véhicules automobiles dans la rampe de sortie avant que sa motocyclette entre en collision avec l’arrière de la Honda Odyssey de la TC no 1. Les enquêteurs judiciaires de l’UES ont découvert deux éraflures sur la porte arrière du côté passager de la Kia, qui correspondaient aux marques laissées par le guidon d’une motocyclette, ainsi que des dommages au parechoc arrière, au haillon et à la vitre du haillon de la Honda Odyssey. Ils ont constaté que la motocyclette comportait des dommages considérables à l’avant, la jante du pneu et la fourche étant tordues.

Le plaignant a admis qu’il avait heurté l’arrière de la Honda Odyssey, du fait qu’il roulait entre 40 et 60 km/h dans la rampe de sortie, et il pensait que la motocyclette avait dérapé, comme elle était susceptible de le faire. Le plaignant a également confirmé que l’AI n’était pas derrière lui au moment de la collision, mais estimait que la voiture de patrouille était arrivée sur le lieu de l’impact environ une à deux minutes après la collision. Le plaignant a admis avec franchise aux enquêteurs de l’UES qu’il était responsable de la collision et que l’agent de police n’était pas impliqué. Durant la collision, le plaignant a subi une fracture au bassin, deux de ses dents avant ont été ébréchées et la peau a été arrachée de l’un de ses doigts de pied gauches.

Compte tenu de l’ensemble de la preuve, il est clair que l’AI avait des motifs raisonnables d’arrêter le plaignant et d’enquêter puisqu’il avait commis plusieurs infractions au Code de la route. Il est clair également qu’après l’activation initiale des feux d’urgence sur le toit et un coup de klaxon, l’AI avait décidé de ne pas poursuivre le plaignant et s’était rangé sur le côté pour s’y arrêter brièvement, avant de se rendre dans la rampe de sortie du chemin York Mills, où il avait découvert la collision entre la motocyclette du plaignant et les autres véhicules automobiles impliqués. Ni le plaignant ni aucun des cinq TC n’ont vu l’AI poursuivre le plaignant avant la collision ou au moment de celle-ci, et certains d’entre eux ont estimé que l’AI avait mis au moins cinq secondes et tout au plus une à deux minutes pour arriver sur les lieux après la collision.

Conformément au Règlement de l’Ontario 266/10 pris en application de la Loi sur les services policiers de l’Ontario intitulé Poursuites visant l’appréhension de suspects :

2(1) Un agent de police peut poursuivre ou continuer de poursuivre un véhicule automobile en fuite qui ne s’immobilise pas :

  1. soit s’il a des motifs de croire qu’une infraction criminelle a été commise ou est sur le point de l’être;
  2. soit afin d’identifier le véhicule ou un particulier à bord du véhicule.

(2) Avant d’amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects, un agent de police s’assure qu’il ne peut recourir à aucune des solutions de rechange prévues […]

(3) Avant d’amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects, l’agent de police décide si, afin de protéger la sécurité publique, le besoin immédiat d’appréhender un particulier à bord du véhicule automobile en fuite ou le besoin d’identifier le véhicule ou le particulier l’emporte sur le risque que peut présenter la poursuite pour la sécurité publique.

(4) Pendant une poursuite visant l’appréhension de suspects, l’agent de police réévalue continuellement la décision prise aux termes du paragraphe (3) et interrompt la poursuite lorsque le risque que celle-ci peut présenter pour la sécurité publique l’emporte sur le risque pour la sécurité publique que peut présenter le fait de ne pas appréhender immédiatement un particulier à bord du véhicule automobile en fuite ou de ne pas identifier le véhicule ou le particulier.

La politique 15-10 du SPT intitulée Poursuites visant l’appréhension de suspects, découlant de la Loi sur les services policiers de l’Ontario, renferme la disposition suivante :

[Traduction]

Responsabilité pour l’exécution sécuritaire

La responsabilité pour l’exécution sécuritaire d’une poursuite incombe à l’agent de police individuel, au préposé aux communications - Services des communications, au superviseur des poursuites et à toute autre personne autorisée qui surveille la poursuite.

Lorsque j’examine la preuve non contestée, il est clair pour moi que l’AI a tenu compte de ses obligations en vertu de la Loi sur les services policiers de l’Ontario et de la politique connexe du SPT et qu’après avoir obtenu le numéro de la plaque d’immatriculation du véhicule automobile du plaignant, a décidé de ne pas entamer une poursuite, mais plutôt de se ranger sur le côté et d’arrêter sa voiture de patrouille. Tout cela est confirmé par chacun des TC et par le plaignant lui‐même, qui a ouvertement admis que l’AI ne le suivait plus lorsqu’il avait emprunté la rampe de sortie ni durant les moments précédant la collision.

Je déduis des actions de l’AI qu’il s’était demandé s’il devait ou non entamer la poursuite du véhicule afin d’appréhender le plaignant pour plusieurs infractions au Code de la route et en soupesant les différentes possibilités, avait déterminé que le risque pour la sécurité publique l’emportait sur la nécessité d’appréhender immédiatement le plaignant; ce faisant, l’AI s’est entièrement conformé à la Loi sur les services policiers de l’Ontario et à la politique connexe du SPT.

Malheureusement, en dépit du fait que l’AI avait bien réfléchi à ses actions, le plaignant a continué de conduire de la manière mal avisée qui avait attiré initialement l’attention de l’AI. Ainsi, c’est clairement la conduite du plaignant qui était la cause directe de la collision avec les deux autres véhicules automobiles, ainsi que de ses propres blessures. Je suis entièrement d’accord avec l’évaluation faite par le plaignant que l’accident était entièrement de sa faute et que l’AI n’était pas à blâmer, et je conclus qu’il n’y a aucune preuve établissant un lien de causalité entre les blessures subies par le plaignant et les actions de l’AI.

En fait, l’examen de la preuve dans son intégralité montre clairement que non seulement l’AI a agi en se conformant entièrement au Code criminel, au Code de la route, à la Politique sur les poursuites visant l’appréhension de suspects et à la Loi sur les services policiers de l’Ontario, mais aussi qu’il s’est comporté en tout temps de façon professionnelle et prudente et tout en faisant preuve de jugement. Je n’ai aucune critique à formuler au sujet des actions de l’AI et, par conséquent, ne vois absolument aucun motif, dans cette affaire, de déposer des accusations au criminel.

Date : 20 avril 2018

Original signé par

Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.