Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 17-OCI-138

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave ou ont donné lieu à une allégation d’agression sexuelle.

Les « blessures graves » englobent celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, a priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant que la gravité de la blessure puisse être évaluée, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider de l’envergure de son intervention.

Le présent rapport décrit l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par un élève de 17 ans lors de son arrestation le 7 juin 2017.

L’enquête

Notification de l’UES

Vers 11 h 50, le mercredi 7 juin 2017, le Service de police de Windsor (SPW) a informé l’UES de la blessure subie par le plaignant durant sa mise sous garde.

Le SPW a déclaré que le mercredi 7 juin 2017, à 8 h 20, des agents du SPW se sont rendus à une école secondaire pour aider le personnel à gérer un élève agité. L’élève, le plaignant, avait été informé par le directeur adjoint qu’il était suspendu. Le plaignant est devenu contrarié et a refusé de quitter les lieux. Sa mère, la témoin civile (TC) no 3, a été appelée et a tenté en vain de convaincre son fils de partir. On a appelé la police, et l’agent témoin (AT) no 1 et l’agent impliqué (AI) ont répondu à l’appel, et le plaignant a continué de refuser de quitter l’école. Il a ensuite été arrêté pour entrée sans autorisation, et une lutte a eu lieu. Le plaignant a été amené à l’hôpital, où il a été déterminé qu’il avait l’os nasal cassé.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 2

Nombre d’enquêteurs judiciaires de l’UES assignés : 1

Plaignant :

Garçon de 17 ans interviewée, dossiers médicaux obtenus et examinés

Témoins civils (TC)

TC no 1 A participé à une entrevue

TC no 2 A participé à une entrevue

TC no 3 A participé à une entrevue

TC no 4 A participé à une entrevue

Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées

AT no 2 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées

AT no 3 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées

AT no 4 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées

AT no 5 Notes reçues et examinées, entrevue jugée non nécessaire.

Agents impliqués (AI)

AI no 1 N’a pas participé à une entrevue, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué. Notes reçues et examinées

Description de l’incident

Le 6 juin 2017, l’AI no 1 et l’AT no 1, appartenant tous deux au SPW, sont arrivés au bureau du directeur d’une école secondaire dans la ville de Windsor vers 8 h 29 et 8 h 30 respectivement pour répondre à un appel concernant un élève agité qui, en dépit de s’être fait dire à maintes reprises de quitter la propriété de l’école, a refusé de le faire. Il y a eu une lutte intense de très courte durée entre les agents de police et le plaignant, qui a par la suite été arrêté en vertu de la Loi sur l’entrée sans autorisation et pour avoir résisté à son arrestation en contravention de l’alinéa 129a) du Code criminel. Le plaignant a été transporté par ambulance à l’hôpital à 8 h 56.

Nature des blessures/traitement

Le plaignant a été amené par ambulance à la salle d’urgence vers 9 h. Les notes de triage indiquent qu’il avait reçu un coup de poing au nez et qu’il avait mal à cet endroit. Une radiographie a été commandée, laquelle a révélé qu’il avait une fracture déplacée à l’os nasal.

Preuve

Les lieux de l’incident

L’incident s’est déroulé dans une école secondaire dans la ville de Windsor, plus précisément dans le bureau administratif de l’établissement.

Preuve vidéo/audio/photographique

L’UES a examiné la vidéo enregistrée à l’école ainsi que la vidéo montrant le plaignant à l’intérieur du véhicule de transport des prisonniers. Les deux vidéos n’étaient d’aucune utilité pour l’enquête. L’UES a examiné les photographies du plaignant prises par le SPW.

Enregistrements des communications

Les enregistrements des communications ont été reçus et écoutés.

Éléments de preuve médico-légaux

Aucun élément n’a été soumis pour analyse au Centre des sciences judiciaires.

Éléments obtenus du Service de police

L’UES a demandé au SPW les documents et éléments suivants, qu’elle a obtenus et examinés :

  • résumé détaillé des appels
  • tableau de service
  • enregistrements des communications
  • photographies de la scène de l’incident et des blessures subies par le plaignant
  • résumé de l’événement
  • notes des AT nos 1-5, de l’AI et de deux agents de police non désignés;
  • déclarations écrites des AT nos 1-5
  • vidéo de l’unité de détention
  • dossier de détention : fiche de mise en détention
  • vidéo du transport des prisonniers
  • incident antérieur impliquant le plaignant et le SPW
  • transmissions du terminal de données mobiles (TDM)
  • données téléchargées de l’arme à impulsions du SPW

L’UES a obtenu et a examiné les documents suivants provenant d’autres sources :

  • dossiers médicaux du plaignant

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel – Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :

  1. soit à titre de particulier
  2. soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
  3. soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
  4. soit en raison de ses fonctions

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Paragraphe 2(1) de la Loi sur l’entrée sans autorisation - L’entrée sans autorisation est une infraction

2 (1) Est coupable d’une infraction et passible, sur déclaration de culpabilité, d’une amende d’au plus 10 000 $ quiconque n’agit pas en vertu d’un droit ou d’un pouvoir conféré par la loi et :

  1. sans la permission expresse de l’occupant, permission dont la preuve incombe au défendeur :
    1. ou bien entre dans des lieux lorsque l’entrée en est interdite aux termes de la présente loi
    2. ou bien s’adonne à une activité dans des lieux lorsque cette activité est interdite aux termes de la présente loi
  2. ne quitte pas immédiatement les lieux après que l’occupant des lieux ou la personne que celui-ci a autorisée à cette fin le lui a ordonné

Loi sur l’éducation, L.R.O. 1990, chapitre E.2

305 (1) Le ministre peut, par règlement, régir l’accès aux lieux scolaires, préciser les catégories de personnes auxquelles il est permis de s’y trouver et préciser les jours et les heures où cela est interdit à des catégories différentes de personnes.

Interdiction

(2) Nul ne doit entrer ni rester dans des lieux scolaires à moins d’être autorisé par règlement à s’y trouver ce jour-là ou à cette heure-là.

Idem : politique du conseil

(3) Nul ne doit entrer ni rester dans des lieux scolaires si une politique du conseil lui interdit de s’y trouver ce jour-là ou à cette heure-là.

Ordre de quitter les lieux

(4) Tout directeur d’école peut ordonner à qui que ce soit de quitter des lieux scolaires s’il croit que les règlements ou une politique du conseil lui interdit de s’y trouver.

Infraction

(5) Quiconque contrevient au paragraphe (2) est coupable d’une infraction.

Analyse et décision du directeur

Le plaignant était un élève qui avait été suspendu le mardi 6 juin 2017 par le témoin civil (TC) no 2 (le directeur adjoint) à cause d’un problème de conduite. Le mercredi 7 juin 2017, vers 8 h 15, le plaignant, accompagné de sa mère, la TC no 3, s’est présenté au bureau du directeur. Le but de leur visite était de rencontrer le directeur pour discuter de l’annulation de la suspension d’un jour. Le directeur était absent et devait revenir à l’école vers l’heure du dîner. Le plaignant et la TC no 3 ont parlé au TC no 2, qui a refusé de modifier la suspension. Le TC no 2 a proposé le compromis suivant au plaignant : le plaignant pourrait revenir en après-midi pour rencontrer le directeur, mais, dans l’intervalle, il ne pouvait pas demeurer sur les lieux de l’école. Le TC no 3 a accepté de quitter l’école pour parler au directeur à un autre moment et, bien qu’elle ait encouragé son fils à partir, il a refusé. Le TC no 2 a dit au plaignant qu’on appellerait la police s’il ne quittait pas immédiatement l’école.

Vers 8 h 20, le TC no 2 a demandé au TC no 4 d’appeler au numéro régulier du SPW pour l’informer qu’un élève suspendu refusait de quitter l’école. Le TC no 1 et les TC nos 4 et 2 ont indiqué que, pendant qu’ils attendaient l’arrivée des agents du SPW, une amie du plaignant était arrivée et avait tenté, sans succès, de convaincre le plaignant de quitter le bureau. Le TC no 4 a observé que le plaignant adoptait une attitude réfractaire; toutefois, il demeurait calme et a indiqué qu’il n’irait nulle part.

Le plaignant a expliqué que ses interactions initiales avec l’agent impliqué (AI) étaient très calmes. Le TC no 2 a indiqué que lorsque l’AI tentait de communiquer avec lui, le plaignant ne répondait pas, haussait les épaules et se tenait immobile en affichant une [traduction] « certaine attitude ». Le TC no 1 a entendu le plaignant tenter d’expliquer à l’AI la raison de sa suspension. L’AI a répondu : [traduction] « Nous ne sommes pas ici à ce sujet; vous devez simplement partir. » Le TC no 1 a vu un autre élève entrer dans le bureau, dont la porte était fermée. L’AI a dit au TC no 2 : [traduction] « Peux-tu croire cela? Les élèves dans ce bâtiment semblent penser avoir tous les droits. » L’AI a dit au plaignant : « Cela donne le ton quant à la façon dont je vais m’occuper de vous. Vous pensez que l’école vous appartient? » Le plaignant a répondu « Oui ». Ces conversations ont été confirmées par les TC nos 1 et 4.

Malgré cela, l’AI a tenté de désamorcer la situation sans y parvenir. Vers 8 h 31, l’AI a dit au plaignant que s’il ne quittait pas l’école, il serait arrêté en vertu de la Loi sur l’entrée sans autorisation. Le plaignant a répondu qu’il restait dans le bureau en attendant de parler au directeur. L’AI a demandé au plaignant de se retourner parce qu’il le plaçait en état d’arrestation. L’AI estimait qu’il avait tenté de raisonner avec le plaignant et croyait que le plaignant résistait passivement et qu’il n’était pas réceptif ou ouvert aux techniques de communication. Les tentatives de désamorçage et les ordres donnés par l’AI et l’AT no 1 étaient complètement inefficaces.

Environ 1 minute 50 après l’arrivée de l’AI sur les lieux, l’AT no 5, pendant qu’il s’y rendait également, avait entendu l’AI utiliser son microphone radio et dire [traduction] « la bagarre commence ». Une lutte courte et intense s’est ensuivie et selon le TC no 4, l’interaction a duré environ deux minutes. L’AI a réussi à saisir la main droite du plaignant pour tenter de le menotter derrière le dos. À son crédit, le plaignant, qui faisait face au comptoir, a volontairement présenté sa main droite.

Le TC no 4 a fait remarquer que, lorsque la TC no 3 était entrée dans le bureau, le plaignant [traduction] « avait perdu les pédales ». Le TC no 4 a expliqué que le plaignant avait immédiatement commencé à résister physiquement à l’AI. L’AI avait continué d’essayer de maintenir le contrôle de la main gauche du plaignant, qui avait cessé de coopérer, agrippait le comptoir avant avec sa main gauche; et résistait aux tentatives de l’AI de le maîtriser.

L’AT no 1 a expliqué que l’endroit était tellement exigu qu’il était impossible de mettre le plaignant au sol sans danger et d’utiliser efficacement une matraque sans courir le risque de causer une blessure grave. De plus, le manque de place empêchait l’AT no 1 de contourner l’AI pour l’aider à contrôler le bras gauche du plaignant.

Les enquêteurs de l’UES ont décrit la disposition du bureau. À l’entrée du bureau principal, il y a un banc contre le mur et directement en face de ce banc il y a un comptoir îlot. Derrière le comptoir, il y a deux bureaux et il y a une petite pièce à droite qui semble être une salle d’entreposage où se trouve une photocopieuse. L’entier bureau principal mesure 8,4 m sur 4,9 m. Le banc mesure 1,7 m de long et l’espace devant le comptoir est de 1,7 m. La pièce hébergeant la photocopieuse a des étagères aux deux murs, et la photocopieuse se trouve contre le troisième mur. L’espace libre est de 1,6 m sur 1,8 m (environ cinq pieds sur six pieds) et est donc un peu plus grand que la superficie de 4 pieds sur 4 pieds indiquée par l’AI dans ses notes.

Initialement, l’AT no 1 a décidé de dégainer son arme à impulsions et de la pointer sur le plaignant pour l’obliger à obéir. L’AT no 1 lui a ordonné de cesser de résister et de mettre ses mains derrière le dos. Tant le plaignant que le TC no 2 ont vu l’AT no 1 utiliser l’arme à impulsions au côté droit du torse du plaignant juste sous les côtes. Le plaignant a déclaré qu’il avait ressenti un léger choc. Du fait que la plaignant n’avait pas réagi, l’AT no 1 croyait que l’arme à impulsions avait manqué sa cible ou était inefficace. L’AT no 1 a corroboré l’opinion du TC no 2 en affirmant que l’arme à impulsions avait été utilisée près du plaignant dans le but d’établir un contact en trois points pour envoyer une décharge directement dans sa jambe. L’AT no 1 a déclaré que l’utilisation de l’arme à impulsions avait échoué.

La TC no 3 a commencé à s’approcher de l’AT no 1 et a poussé son bras suffisamment fort pour lui faire perdre l’équilibre. L’AT no 1 a dit à la TC no 3 de reculer. L’AT no 2 a vu la TC no 3 saisir les mains de l’AT no 1 au moment où il tentait de décharger l’arme à impulsions une deuxième fois. Alors que la lutte se poursuivait, l’AT no 1, l’AI et le plaignant sont entrés dans la petite pièce où se trouvait la photocopieuse.

L’AT no 1 a vu l’AI donner deux coups de poing au visage du plaignant, qui ont eu l’effet voulu. Le plaignant est tombé au sol sur le ventre et a finalement obtempéré. Le plaignant a informé l’AT no 1 et l’AI qu’il ne pouvait pas mettre la main gauche derrière le dos en raison d’une blessure antérieure et, avec sa collaboration, il a été menotté les mains dans le dos.

Après avoir examiné soigneusement l’ensemble de la preuve, je conclus que le dossier est clair sur la majorité des questions entourant l’incident. Premièrement, l’AI était contrarié par le fait que le plaignant ne réagissait pas à ses nombreux ordres directs de quitter immédiatement la propriété de l’école. De plus, l’AI a réagi au manque de respect de l’élève qui est entré dans le bureau du directeur alors que la porte était fermée. En raison de cela, l’AI a changé d’approche pour forcer le plaignant à quitter l’école.

Deuxièmement, il ne fait aucun doute que le plaignant a fait fi des règles et de l’autorité légale du TC no 2, qui lui ordonnait de quitter l’école. De plus, le plaignant n’a pas tenu compte du conseil judicieux de la TC no 3, puis de son amie, de quitter l’école.

Troisièmement, le TC no 2 a informé l’AI qu’il y avait deux occasions antérieures où l’on avait demandé au SPW de se rendre à l’école parce que le plaignant avait refusé de quitter l’école lorsqu’on lui avait ordonné de le faire.

Quatrièmement, bien qu’il ne soit pas contesté que le plaignant avait décidé qu’il ne quitterait par l’école, son attitude a changé après que la TC no 3 avait quitté le bureau et il a brièvement coopéré avec l’AI pendant qu’on le menottait les mains derrière le dos.

Toutefois, comme l’a fait remarquer l’AT no 5, lorsque la TC no 3 est revenue au bureau, elle était très agitée en voyant qu’on mettait son fils en état d’arrestation, ce qui a directement incité le plaignant à commencer à résister et à devenir agressif. Bref, le retour de la TC no 3 au bureau et la vue de son fils qui était mis en état d’arrestation ont directement contribué à la décision du plaignant de devenir moins obéissant et de résister de plus en plus.

Cinquièmement, bien que d’autres tentatives de désamorçage de la part de l’AI auraient été préférables, il n’y a aucune certitude que le plaignant aurait respecté par la suite les directives de l’AI et, au bout du compte, c’est la décision du plaignant de ne pas obéir aux ordres de l’AI qui est à l’origine du recours à la force.

L’AI et l’AT no 1 ont agi légalement en tentant de retirer le plaignant de la propriété de l’école, car il était un intrus en raison de sa suspension. La question consiste alors à déterminer si les agents ont usé d’une force excessive lorsqu’ils l’ont retiré de l’école.

En bref, je suis convaincu que la preuve ne peut donner lieu à une conclusion raisonnable que l’AI a commis une infraction criminelle. En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les agents de police ont le droit d’employer de la force dans l’exercice de leurs fonctions légitimes, dans la mesure où la force en question est raisonnablement nécessaire dans les circonstances. À mon avis, la force utilisée par l’AI pour procéder à l’arrestation du plaignant n’était pas déraisonnable dans aucune des circonstances.

Pour évaluer la situation, je garde à l’esprit l’état du droit applicable tel qu’il a été énoncé par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt R. c. Nasogaluak, [2010] 1 R.C.S. 206, qui dit ceci :

« Les actes des policiers ne devraient pas être jugés au regard d’une norme de perfection. Il ne faut pas oublier que ceux-ci accomplissent un travail exigeant et dangereux et qu’ils doivent souvent réagir à des situations urgentes. Leurs actes doivent alors être appréciés selon ce que commande ce contexte difficile. Comme le juge Anderson l’explique dans R. v. Bottrell (1981), 60 C.C.C. (2d) 211 (C.A.C.-B.), p. 218 :

[traduction] « Pour déterminer si la force employée par le policier était nécessaire, les jurés doivent tenir compte des circonstances dans lesquelles le policier y a eu recours. Il aurait fallu leur indiquer qu’on ne pouvait pas s’attendre à ce que l’appelant mesure la force appliquée avec précision. »

De plus, bien que la conduite en question doive être proportionnelle à la tâche à accomplir, la Cour d’appel dans R. c. Baxter (1975) 27 C.C.C. (2d) 96 (C.A. de l’Ont.) a précisé que l’on ne peut pas s’attendre à ce que les policiers apprécient avec exactitude le degré de force qu’ils emploient dans leur intervention.

En conclusion, je suis convaincu, pour les motifs qui précèdent, que l’arrestation du plaignant et la façon dont elle a été effectuée étaient légitimes malgré la blessure subie par ce dernier, qui a résulté directement de son refus d’obéir aux ordres de l’AI – qui agissait sous l’autorité du TC no 2 – et de sa résistance physique à l’arrestation, y compris le geste dangereux posé par la TC no 3 en tentant de saisir l’arme à impulsions de l’AT no 1 (ou, à tout le moins, de tenter de la lui arracher). À cet égard, tant le plaignant que la TC no 3 étaient les auteurs de leur propre malheur, qui découlait du refus du plaignant de quitter l’école lorsqu’on le lui avait ordonné légalement et convenablement. Je suis donc convaincu, pour des motifs raisonnables, que les actions de l’AI tombaient dans les limites prescrites par le droit criminel. Par conséquent, en ce qui concerne l’AI, je ne vois aucun motif de porter des accusations criminelles en l’espèce.

Date : 25 mai 2018

Original signé par

Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.