Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 17-OCI-148

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave ou ont donné lieu à une allégation d’agression sexuelle.

Les « blessures graves » englobent celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, a priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant que la gravité de la blessure puisse être évaluée, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider de l’envergure de son intervention.

Ce rapport a trait à l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 25 ans lors de son arrestation le 21 juin 2017.

L’enquête

Notification de l’UES

Vers 11 h 30, le 21 juin 2017, le Service de police régional de Durham (SPRD) a informé l’UES de la blessure grave subie par le plaignant.

Le SPRD a signalé qu’à 2 h 20, le plaignant circulait en direction est sur l’autoroute 401, près de l’autoroute 412, dans la région de Durham, à environ 160 km/h selon les témoins, lorsqu’il est entré en collision avec un véhicule commercial et a fui les lieux.

À 3 h 29, les agents de police de l’unité canine [dont on sait maintenant qu’il s’agissait de l’agent témoin (AT) no 10 et de l’agent impliqué (AI)] ont trouvé le plaignant dans un marécage. Le plaignant a refusé d’obéir aux ordres et il a été mordu par un chien policier. Les services médicaux d’urgence (SMU) sont venus sur place, mais le plaignant a refusé de recevoir des soins.

Le plaignant a ensuite été confié à la garde de la Police provinciale de l’Ontario (PPO). Le plaignant s’est plaint d’une blessure et il a été transporté à l’hôpital où, selon le diagnostic, il avait un os fracturé dans la main droite et une fracture à la pommette. Il a ensuite été remis entre les mains de la PPO.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES : 1

Plaignant :

Homme âgé de 25 ans; a participé à une entrevue; dossiers médicaux obtenus et examinés

Témoins civils (TC)

TC no 1 A participé à une entrevue

TC no 2 A participé à une entrevue

TC no 3 A participé à une entrevue

TC no 4 A participé à une entrevue

TC no 5 A participé à une entrevue

Agents témoins (AT)

AT n° 1 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT n° 2 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT n° 3 Notes examinées; entrevue jugée non nécessaire

AT n° 4 Déclaration écrite fournie, entrevue jugée non nécessaire

AT n° 5 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT n° 6 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT n° 7 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT n° 8 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT n° 9 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT n° 10 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT n° 11 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT no 12 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT no 13 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT no 14 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

AT no 15 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

Agents impliqués (AI)

AI no 1 A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

Description de l’incident

Le 21 juin 2017, vers 2 h 20, le véhicule automobile du plaignant est entré en collision avec un camion de transport sur l’autoroute 401, en direction est, près de l’autoroute 412, dans la ville de Whitby, dans la région de Durham. Après la collision, le plaignant a traversé en courant une zone marécageuse à proximité, a sauté par-dessus deux clôtures et s’est caché dans les buissons au sud de l’autoroute 401 et au nord du Centre de distribution de Sobey’s (CDS). Les agents du SPRD et de la PPO sont arrivés sur les lieux et se sont mis à chercher le plaignant.

À 3 h 29, l’AT no 10 et l’AI, appartenant tous deux au SPRD, et un chien policier ont trouvé le plaignant. Il a été escorté jusqu’à une clôture près du stationnement du CDS et a été remis à la garde des agents du SPRD, soit les AT nos 14 et 13. Le plaignant a été amené au stationnement du CDS et puis transporté au détachement de Whitby de la PPO. Par la suite, le plaignant a été transporté à l’hôpital.

Nature des blessures et traitement

À l’hôpital, le plaignant a subi une radiographie et un tomodensitogramme, qui ont permis de déterminer qu’il avait une fracture aiguë au milieu du cinquième métacarpien (l’os du petit doigt) présentant une angulation convexe dorsale significative et un chevauchement de fragments de la fracture dans la main droite. Il avait également subi une fracture distale subtile non déplacée au 3e os nasal et une possible fracture plus subtile de l’épine nasale.

Preuve

Les lieux de l’incident

La collision automobile est survenue dans les voies en direction est de l’autoroute 401, entre l’autoroute 412 et la rue Brock, dans la ville de Whitby. Le plaignant a couru vers le sud, à partir de l’autoroute 401, et a traversé des herbes hautes et une zone marécageuse. Il a grimpé par-dessus une clôture et est entré dans le parc des trains du Réseau GO, a traversé la voie ferrée et a sauté par-dessus une deuxième clôture à barbelés. Le plaignant a été appréhendé dans les buissons, au nord du CDS et au sud de l’autoroute 401. Après avoir été appréhendé, le plaignant a été escorté à la bordure dans le stationnement du CDS.

Scene photo

Scene photo

Scene photo

Scene photo

Preuve matérielle

Scene photo

Véhicule automobile Dodge Charger conduit par le plaignant

Éléments de preuve médicaux-légaux

Aucun élément n’a été soumis pour analyse au Centre des sciences judiciaires.

Preuve vidéo/audio/photographique

Vidéo de la télévision en circuit fermé (TVCF) du Réseau GO

Des séquences de TVCF ont été reçues du Réseau GO le 21 juin 2017 et ont révélé ce qui suit :

À 2 h 22 m 50 s, le plaignant a marché vers le sud à partir du fossé de l’autoroute 401, a franchi une clôture et est entré dans le parc des trains du Réseau GO au 1300, rue Henry, à Whitby. Il a traversé la voie ferrée du Réseau GO en courant vers une clôture à barbelés. Il a grimpé par-dessus la clôture, a atterri sur les pieds et a traversé la voie ferrée du CN.

À 2 h 26 m 07 s, le plaignant a marché en direction nord vers la clôture à barbelés, et puis vers l’ouest le long de la clôture. Il titubait en marchant.

À 2 h 26 m 45 s, le plaignant a marché vers l’ouest au côté nord de la clôture à barbelés. Il a tiré son pantalon vers le haut avec les deux mains.

À 2 h 27 m 48 s, le plaignant a marché vers l’est le long de la voie ferrée du Réseau GO, puis vers l’ouest.

À 2 h 40 m 51 s, un véhicule utilitaire sport (VUS) de la police avec ses feux d’urgence allumés est entré dans le parc des trains du Réseau GO à partir de la rue Henry et s’est garé. Deux agents de police [dont on sait maintenant qu’il s’agissait de l’AT no 10 et de l’AI] sont sortis du véhicule de police. L’AT no 10 a laissé sortir son chien policier du véhicule de police. L’AT no 10, l’AI et le chien policier se sont dirigés vers le sud vers la voie ferrée du Réseau GO.

TVCF du CDS

Le CDS a fourni les séquences de TVCF du 21 juin 2017. Les enquêteurs ont examiné les séquences de la TVCF de l’aire de stationnement des employés, allant de 1 h à 4 h 59 m 59 s. La caméra, qui est pointée vers le sud, a filmé le côté nord du CDS et le stationnement nord des employés.

À 3 h 46 m 04 s, une personne s’est déplacée à pied en direction sud à partir de l’espace vert vers le stationnement et à 3 h 46 m 08 s, quatre personnes se sont rendues de l’espace vert vers le stationnement en marchant.

À 3 h 51 m 36 s, le plaignant était assis sur la bordure, entouré d’une dizaine d’agents de police.

À 3 h 58 m 41 s, les agents du SPRD sont arrivés.

Les séquences filmées par la TVCF n’ont montré aucun agent de police frappant le plaignant.

TVCF du ministère des Transports de l’Ontario

Les enquêteurs ont obtenu, du MTO, les séquences de TVCF du 21 juin 2017. Les images ne contenaient aucune information pertinente aux fins de l’enquête.

Vidéo de la mise en détention fournie par la PPO

La PPO a fourni la vidéo de l’aire de mise en détention du 21 juin 2017, laquelle vidéo a révélé ce qui suit :

À 4 h 02 m 54 s, l’AT no 5 a escorté le plaignant dans le détachement.

À 4 h 07 m 43 s, le plaignant est entré dans la cellule de détention provisoire.

À 4 h 10 m 39 s, le plaignant a examiné ses mains.

À 5 h 26 m 45 s, les ambulanciers paramédicaux sont entrés dans le détachement et puis dans la cellule de détention provisoire. Les ambulanciers paramédicaux ont parlé au plaignant.

À 5 h 34 m 27 s, le plaignant, l’AT no 5 et les ambulanciers paramédicaux ont quitté le détachement.

À 11 h 14 m 40 s, un policier et le plaignant sont entrés dans le détachement. Le plaignant avait un plâtre à la main droite.

À 11 h 35 m 59 s, le plaignant est entré dans la cellule.

À 13 h 29 m 26 s, le plaignant et un policier ont quitté le détachement.

Enregistrements des communications

Enregistrement des communications du SPRD

Les enregistrements des communications ont été reçus du SPRD le 21 juin 2017 et ont révélé ce qui suit :

À 2 h 24 m 39 s, le préposé aux communications du SPRD a reçu un appel signalant qu’une personne avait été blessée dans les voies est de l’autoroute 401, à l’est de l’autoroute 412. Un homme (le plaignant) s’était enfui à pied.

À 2 h 25 m 01 s, le préposé aux communications a indiqué que l’homme avait pris la fuite à pied en direction est sur la voie ferrée. Au moment de la collision, son véhicule se déplaçait à plus de 185 km/h.

À 2 h 25 m 41 s, le préposé aux communications a indiqué que le véhicule du plaignant avait heurté une semi-remorque.

À 2 h 29 m 31 s, le préposé aux communications a indiqué qu’un agent du Service de police de Toronto (SPT), qui n’était pas de service, avait vu le plaignant quitter les lieux de la collision et sauter par-dessus la clôture le long de l’autoroute. Le plaignant s’était dirigé vers le sud, vers la voie ferrée.

À 3 h 28 m 05 s, l’AT no 10 a déclaré qu’il avait établi le contact avec le plaignant et a confirmé

qu’à 3 h 29 m 05 s, le plaignant était sous garde.

À 3 h 31 m 44 s, l’AT no 10 a informé le service des communications que les agents essayaient de faire passer le plaignant sous la clôture, à partir du terrain du CDS, mais que le plaignant ne coopérait pas. Il refusait de se lever et de marcher, et les agents de police seraient obligés de le traîner hors des buissons.

À 3 h 32 m 51 s, l’AT no 10 a indiqué qu’au moment où il a été découvert, le plaignant était caché et couché dans les herbes hautes, sous un arbre. Le chien policier avait saisi le plaignant. La blessure qu’il avait subie ne semblait pas grave.

À 3 h 33 m 16 s, l’AT no 9 a dit au service des communications que les agents avaient réussi à faire passer le plaignant sous la clôture et qu’ils l’escorteraient vers le sud.

À 3 h 39 m 54 s, l’AT no 9 a indiqué qu’il n’avait vu aucune blessure causée par le chien, mais a demandé une ambulance. Le plaignant avait des blessures au visage qui avaient été causées par la collision.

À 3 h 49 m 58 s, l’AT no 9 a déclaré qu’il avait vu des égratignures au dos du plaignant du côté gauche, mais que les blessures n’avaient pas besoin d’être suturées.

À 3 h 58 m 45 s, l’AT no 10 a indiqué que la garde du plaignant avait été transférée à la PPO et que le plaignant serait amené au détachement de Whitby de la PPO.

Enregistrements des appels au numéro 9-1-1 du SPRD

L’information contenue dans les enregistrements des appels au numéro 9-1-1 était conforme à celle contenue dans l’enregistrement des communications du SPRD.

Éléments obtenus du service de police

L’UES a demandé à obtenir et a examiné les éléments et documents suivants du détachement d’Aurora de la Police provinciale de l’Ontario (Division de la sécurité routière/administration centrale), du détachement de Burlington (Division de la sécurité routière), du SPRD et du SPT :

  • rapport sommaire des appels fourni par le SPRD
  • liste des agents en cause du SPRD
  • vérification des antécédents du plaignant du SPRD
  • manuel des normes policières (2000) du SPRD : prise de notes par les agents
  • procédure du SPRD : arrestation et exécution du mandat
  • enregistrement des appels au 9-1-1 du SPRD
  • enregistrement des communications de la police du SPRD
  • photographies des lieux du crime du SPRD
  • rapport descriptif (incident général)
  • notes des AT nos 1-16
  • rapport d’arrestation de la PPO
  • information détaillée du Système de répartition assistée par ordinateur (RAO) de la PPO
  • interrogation du système du CIPC par la PPO au sujet du plaignant
  • rapport d’entrevue des TC nos 1 et 2 de la PPO
  • dossier de conduite automobile du plaignant du MTO de la PPO
  • rapport de la collision véhicule automobile (CVA) de la PPO
  • rapport des détails de l’incident de la PPO
  • rapport détaillé de l’infraction de la PPO
  • manuel sur le traitement des prisonniers de la PPO
  • rapport sur la garde d’un prisonnier de la PPO
  • rapport de l’audience de justification de la PPO
  • photographies des blessures du plaignant sur les lieux du crime de la PPO
  • photographies de la Dodge Charger sur les lieux du crime de la PPO
  • procédure : calepin et procédures de prise de notes
  • rapport sur le recours à la force (appréhension par l’unité canine)
  • déclarations écrites des AT nos 4, 6-11 et 13-16

L’UES a obtenu et a examiné les documents suivants provenant d’autres sources :

  • séquences de TVCF du MTO
  • séquences de TVCF du CDS
  • dossiers médicaux du plaignant ayant trait à cet incident

Disposition législative pertinente

Paragraphe 25(1) du Code criminel – Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :

  1. soit à titre de particulier
  2. soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
  3. soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
  4. soit en raison de ses fonctions

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le 21 juin 2017, à 2 h 20, le plaignant se trouvait au volant d’un véhicule automobile, plus précisément une Dodge Charger, et a été impliqué dans un accident automobile. La collision s’est produite dans les voies en direction est de l’autoroute 401, entre l’autoroute 412 et la rue Brock, à Whitby, dans la région de Durham.

Le témoin civil (TC) no 2 et l’agent témoin (AT) no 4 ont vu le plaignant conduire à une vitesse élevée, estimée à 160 kilomètres à l’heure. Les témoins ont ensuite vu le véhicule du plaignant entrer en collision avec l’arrière d’un camion de transport, le plaignant perdre le contrôle du véhicule et le véhicule s’immobiliser dans un fossé du côté sud de l’autoroute.

Après la collision, le TC no 2 et l’AT no 4 ont vu le plaignant s’enfuir en courant du lieu de la collision vers une zone marécageuse, au sud de l’autoroute 401. Les deux témoins ont vu le plaignant franchir une clôture entourant le parc des trains du Réseau GO, traverser la voie ferrée puis sauter par-dessus une deuxième clôture à barbelés.

Plus tard, le plaignant a été appréhendé dans les buissons, au nord du Centre de distribution de Sobey’s (CDS). Après avoir été appréhendé, le plaignant a été escorté à la bordure dans le stationnement du CDS. L’AT no 2, de la Police provinciale de l’Ontario (PPO), est arrivé sur les lieux de la collision à 2 h 29 et a agi comme agent responsable de la supervision des agents de police pendant leur quart de travail et a assumé la responsabilité des lieux de la collision automobile.

L’AT no 2 a parlé aux TC, qui ont déclaré que le plaignant était entré en collision avec un véhicule commercial et que le véhicule du plaignant avait abouti ensuite dans le fossé. L’AT no 2 a constaté qu’il y avait d’importants dégâts au côté passager avant du véhicule, qui avait été déchiqueté, que les sacs gonflables avaient été déployés et qu’il y avait du sang sur le sac gonflable du côté du conducteur.

Après avoir interrogé les TC sur les lieux, l’AT no 2 a autorisé une fouille du périmètre au sud de l’autoroute 401 et au nord du CDS. En se fondant sur les renseignements qu’il avait recueillis auprès des témoins, l’AT no 2 a conclu qu’il avait des motifs raisonnables et probables d’arrêter le plaignant pour les infractions de conduite dangereuse d’un véhicule automobile et de défaut de rester sur les lieux d’un accident du Code criminel.

Le plaignant allègue qu’il n’était pas le conducteur de la Dodge Charger, mais seulement un passager, et qu’il s’était enfui du lieu de la collision en courant parce qu’il avait paniqué du fait qu’il avait consommé de l’alcool[1] et parce qu’il était la personne qui avait loué le véhicule. Le plaignant s’était alors éloigné de la scène de la collision et s’était caché dans le champ pendant une trentaine de minutes, en espérant pouvoir échapper aux agents de police qui le poursuivaient.

Le plaignant allègue en outre qu’à un moment donné, entre 3 h et 4 h, un chien policier l’avait trouvé et l’avait mordu à la taille, du côté gauche. Puis, le plaignant avait été menotté les mains dans le dos et, en raison de son refus de marcher, on avait fini par le traîner vers une zone ouverte couverte d’herbe à côté d’une clôture et à proximité d’eau. Le plaignant allègue qu’il a subi ses blessures lorsqu’il était à la clôture au sol, sous la garde de la police, les mains menottées derrière le dos, et qu’un agent de police non identifié s’était approché de lui et avait écrasé sa main droite avec son pied, ce qui l’avait fracturée et, qu’ensuite, un second agent de police non identifié s’était penché devant lui et l’avait frappé une fois à la bouche et une fois à l’œil droit.

Vers 3 h, le TC no 5 et le TC no 4, tous deux des ambulanciers paramédicaux, ont reçu un appel leur demandant de se rendre au CDS à Whitby, afin de s’occuper d’un homme qui était sous garde policière et qui avait été impliqué dans une collision automobile et avait été mordu par un chien policier.

Vers 3 h 10, les deux ambulanciers paramédicaux sont arrivés au côté nord du stationnement du CDS. Le plaignant était assis sur la bordure, les mains menottées derrière le dos, et une dizaine d’agents du SPRD, deux agents de l’unité canine de celui-ci et un agent de la PPO l’entouraient en formant un demi-cercle mesurant trois pieds.

Le TC no 5 a constaté que le plaignant était agité et jurait contre les agents de police. Lorsque le TC no 5 a demandé au plaignant ce qui s’était passé, le plaignant a dit, de façon agressive, [traduction] « qu’est-ce qui est arrivé, selon vous? » Le plaignant a levé sa chemise et a montré des égratignures au dos causées par les morsures du chien. Le plaignant ne s’est pas plaint d’autres blessures. L’AT no 5 a vu du sang sur le visage du plaignant, mais le plaignant a refusé d’être placé sur une civière et a demandé qu’on le place plutôt dans une voiture de patrouille. À ce moment-là, l’AT no 16 a décidé de ne pas envoyer le plaignant à l’hôpital, compte tenu des circonstances.

Plus tard ce soir-là, les mêmes ambulanciers paramédicaux ont reçu un appel leur demandant de se rendre au détachement de Whitby de la PPO, où le plaignant était sous garde. À 5 h 24, les ambulanciers paramédicaux sont arrivés au détachement de la PPO et un agent de police leur a dit que le plaignant voulait se rendre à l’hôpital. Le plaignant avait dormi dans la cellule et a informé le TC no 5 que ses côtes lui faisaient mal et qu’il avait de la difficulté à respirer. On a observé que le plaignant avait des écorchures aux mains et que celles-ci et ses jointures étaient enflées, ce que le TC no 5 n’avait pas vu plus tôt dans le stationnement du CDS. Le plaignant n’a pas mentionné comment il avait subi ses blessures et a nié avoir été impliqué dans une collision automobile.

À 5 h 39, le plaignant a été transporté par ambulance à l’hôpital et amené au service d’urgence sous la garde de deux agents de la PPO. Le médecin qui a évalué le plaignant a observé que celui-ci présentait des signes qu’il était sous l’influence d’alcool. On a demandé un tomodensitogramme ainsi que des radiographies de la main droite et du visage du plaignant, lesquels ont révélé que le plaignant avait une fracture aiguë au cinquième métacarpien (l’os du petit doigt) présentant une angulation convexe dorsale significative et un chevauchement des fragments de la fracture, ainsi qu’une certaine enflure des tissus mous supérieurs. De plus, il avait une fracture distale subtile au 3e os nasal ainsi que de possibles fractures subtiles de l’épine nasale. On a mis un plâtre à la main droite du plaignant. Le médecin a indiqué que ce type de fracture de la main correspondait à celle que l’on peut subir lors d’une collision automobile, lorsqu’on tombe en courant ou durant n’importe quel type d’interaction physique avec des agents de police. Le médecin a ajouté qu’il avait de la difficulté à formuler une opinion quant au mécanisme exact de la blessure du plaignant.

À 2 h du matin, le TC no 2 conduisait son véhicule en direction est dans la voie de dépassement de l’autoroute 401, à environ 500 mètres à l’est de l’autoroute 412, lorsqu’il a remarqué qu’un Dodge Charger sans ses phares allumés s’approchait rapidement de son véhicule. Lorsque le TC no 2 s’est placé dans la voie du milieu pour laisser passer la Charger, il a remarqué que seuls les feux de jour arrière de celle-ci étaient allumés. Le TC no 2 a constaté que la Charger se déplaçait à environ 160 km/h et qu’elle était presque entrée en collision avec un Hyundai dans la voie de dépassement. Le TC no 2 a vu qu’à environ 500 à 600 mètres devant lui, le conducteur de la Charger a alors perdu le contrôle du véhicule, qui a dérapé et a fait un tour dans chaque direction et a atterri sur les roues. Le TC no 2 a vu la Charger quitter la chaussée et finir sa course dans un fossé de l’autre côté de l’accotement de l’autoroute 401. Le TC no 2 s’est arrêté sur l’accotement sud et a appelé le préposé au numéro 9-1-1. Il a observé qu’il y avait des dommages du côté passager ainsi que du côté conducteur de la Charger et que la porte du conducteur était ouverte. Fait important, le TC no 2 a vu le conducteur de la Charger, le plaignant, sortir du côté du conducteur en titubant et en ayant de la difficulté à maintenir son équilibre, avec du sang sur la tête. Le TC no 2 a constaté qu’il n’y avait personne d’autre dans la Charger.

Le TC no 2 a vu le plaignant marcher en direction sud et traverser un fossé, grimper sans difficulté par‐dessus une clôture et courir parallèlement à la clôture vers le parc de trains du Réseau GO. Puis, le TC no 2 a vu le plaignant marcher vers la voie ferrée du Réseau GO, entre deux trains immobiles de celui-ci, puis sauter par-dessus une clôture à barbelés. Environ trois minutes plus tard, le TC no 2 a vu le plaignant franchir la clôture à barbelés dans l’autre sens et retourner sur la voie ferrée du Réseau GO, puis marcher vers l’ouest entre la clôture et le train du Réseau GO. À ce moment-là, le TC no 2 a perdu de vue le plaignant. Le TC no 2 est allé vérifier la Charger pour voir s’il y avait d’autres passagers à bord, mais n’en a trouvé aucun. Le TC no 2 n’a pas revu le plaignant après qu’il avait franchi la clôture.

Le TC no 1 roulait en direction est dans la voie du centre de l’autoroute 401, entre les sorties de l’autoroute 412 et de la rue Brock, quand, tout à coup et sans avertissement, il a senti un coup fort à l’arrière de son camion. Il a regardé dans le rétroviseur du côté du conducteur et a constaté qu’une voiture de couleur rouge foncé, soit une Charger, avait heurté le côté gauche arrière de sa remorque; la partie avant du côté passager de la Charger était appuyée sur la roue arrière gauche de sa remorque. La Charger a fini par se détacher de la roue de la remorque et a commencé à tourner en rond. Le TC no 1 a alors vu la Charger percuter le mur en béton du terre-plein au centre de l’autoroute, traverser trois voies et puis tomber dans un fossé profond du côté sud de l’autoroute 401. Le TC no 1 a indiqué que la Charger dépassait la limite de vitesse affichée et que ses phares étaient éteints. Le TC no 1 a alors vu le plaignant grimper sans aucune difficulté par-dessus une clôture à mailles de chaîne de huit pieds de haut longeant le côté sud de l’autoroute 401 et située à dix mètres de l’accotement sud. Il a alors vu que le TC no 2 s’était arrêté pour aider et qu’il avait vérifié s’il y avait des passagers dans la Charger.

Un agent de police qui n’était pas de service, soit l’AT no 4, du Service de police de Toronto, qui rentrait à la maison, conduisait en direction est sur l’autoroute 401 dans la voie de dépassement lorsqu’il a remarqué qu’une Charger s’approchait rapidement de lui, avec les phares éteints. L’AT no 4 a viré pour éviter que le véhicule percute le sien. L’AT no 4 a vu la Charger poursuivre son chemin dans le virage de l’autoroute, à l’ouest de la rue Brock, puis aboutir sur l’accotement et manquer de justesse le terre-plein au centre. La Charger a continué à rouler à une vitesse élevée et a dépassé un autre véhicule, conduit par le TC no 2. À ce moment‐là, la Charger est sortie de sa voie et est entrée en collision avec l’arrière d’un camion à remorque, et le conducteur de la Charger a perdu le contrôle du véhicule, qui a heurté le terre‐plein au centre, a continué de tourner sur lui-même, et s’est finalement arrêté dans l’herbe, du côté sud de l’autoroute.

À 2 h 20, l’AT no 4 a arrêté son véhicule sur l’accotement de l’autoroute et a parlé au préposé au numéro 9‐1‐1 pendant qu’il marchait vers la Charger. L’AT no 4 a vu le conducteur, c’est‐à-dire le plaignant, sortir de l’herbe dans le fossé, trébucher quelques fois, courir vers le sud à travers la zone marécageuse vers la voie ferrée du Réseau GO, franchir une clôture, traverser la voie ferrée, continuer vers le sud, grimper sur une clôture à barbelés puis poursuivre sa course vers le sud. L’AT no 4 est retourné à son véhicule et a attendu l’arrivée des intervenants d’urgence.

Le plaignant a été appréhendé plus tard, grâce à la coordination assurée entre deux agents de l’unité canine et de leurs chiens policiers. À 2 h 25, l’AT no 10 a été dépêché pour aider la PPO, à la suite d’une collision sur l’autoroute 401, à l’est de l’autoroute 412; lorsque l’agent impliqué (AI) est arrivé sur les lieux, les deux agents ont conduit jusqu’à la rue Victoria et se trouvaient parallèlement au secteur où le plaignant avait été aperçu pour la dernière fois.

À 2 h 38, les deux agents sont entrés dans le parc de trains du Réseau GO et, à 2 h 42, l’AT no 10 a laissé son chien sortir du véhicule. Alors que l’AT no 10 se déplaçait à pied en direction ouest le long de la voie ferrée, le chien a flairé une odeur humaine et, en l’espace d’une minute, a amené l’AT no 10 dans un gros fossé marécageux entre les deux voies ferrées. Aussi bien l’AT no 10 que l’AI ont entendu quelqu’un courir/trébucher dans la zone marécageuse, et les deux agents de police ont donné plusieurs ordres utilisés couramment par l’unité canine, dont le suivant : [traduction] « Je sais que vous êtes là, vous êtes en état d’arrestation, sortez maintenant. Rendez-vous ou je lâche le chien pour qu’il fouille le secteur. » Le plaignant n’a jamais réagi.

L’AT no 10 a continué de suivre la piste et s’est arrêté à une clôture à mailles de chaîne de huit pieds de haut qui comportait des barbelés sur le dessus et qui séparait la propriété du CN de celle du CDS. À 3 h 05, les réactions du chien ont fait comprendre à l’AT no 10 que la personne que l’on poursuivait avait franchi la clôture du sud au nord. À 3 h 09, l’AT no 10 a vu la silhouette de la tête d’une personne se diriger vers l’ouest, le long de la clôture, et a demandé à l’AT no 9 d’envoyer une deuxième unité canine au côté sud de la clôture. Vers 3 h 12, l’AT no 13 a été déployé comme agent de couverture avec l’AT no 14, pour aider l’AT no 9 à effectuer la fouille.

L’AT no 1, membre de l’équipe d’intervention d’urgence de la PPO, est alors arrivé et a aidé l’AT no 9. L’AT no 9 et son chien policier ont commencé à suivre la piste au côté sud du stationnement du CDS, en se dirigeant vers le nord et l’ouest, vers l’AT no 10. On pouvait entendre l’AT no 9 crier les ordres de l’unité canine à plusieurs reprises, invitant le plaignant à se rendre. Le chien s’est alors rendu à un endroit au côté sud de la clôture et a commencé à aboyer, pour indiquer que le plaignant était repassé par-dessus et était revenu au côté nord de la clôture.

À 3 h 18, l’AT no 9 a immédiatement informé l’AT no 10 que le plaignant se trouvait de nouveau au côté nord de la clôture. L’AT no 10 et l’AI ont fouillé la zone le long du côté ouest de la clôture et, à 3 h 28, le chien de l’AT no 10 a trouvé le plaignant couché dans des herbes très hautes et il l’a saisi (mordu) au bras ou au côté gauche. L’AT no 10 a immédiatement donné au chien l’ordre de lâcher le suspect et l’a éloigné de 15 pieds de ce dernier. L’AI criait au plaignant de montrer ses mains et d’arrêter de résister. L’AI a vu que du sang coulait d’une lacération sur le pont du nez du plaignant et qu’il avait une enflure au côté gauche du visage.

L’AI a tenté de prendre le contrôle physique du côté droit du plaignant et l’a poussé sur le dos, et puis l’a roulé sur le ventre. L’AI a tenté de tirer les mains et les bras du plaignant derrière son dos pour le menotter. Le plaignant a continué de résister activement et a commencé à crier des obscénités aux deux agents de police. L’AI a donné quatre coups de poing aux deux côtés du dos du plaignant, après quoi le plaignant a cessé de résister et l’AI l’a menotté dans le dos.

Lorsque le plaignant a refusé de se mettre debout et de marcher, l’AI l’a levé en le saisissant sous l’aisselle droite et l’a escorté sur 20 pieds vers le haut d’une colline au côté nord de la clôture du CDS. L’AI a constaté que l’haleine du plaignant dégageait une forte odeur d’alcool. L’AT no 1 a utilisé des pinces coupe-fils pour couper les maillons inférieurs de la clôture[2]. Une fois que les maillons de la clôture avaient été coupés, l’AI a tiré le bas de la clôture vers le haut et a fait glisser le plaignant sous la clôture, transférant ainsi sa garde aux AT nos 14 et 13. L’AT no 9 est resté à l’écart avec son chien.

Le plaignant refusait de marcher par lui-même et devenait un poids mort. Les AT nos 14, 13 et 15 ont traîné le plaignant vers le stationnement du CDS, où ils l’ont placé en position assise sur la bordure. Le nez du plaignant était enflé et saignait, il crachait du sang et criait des obscénités et des commentaires désobligeants directement aux agents présents. Lorsque l’AT no 9 s’est approché du plaignant et lui a demandé s’il avait besoin de soins médicaux, le plaignant lui a demandé plusieurs fois de lui donner un coup de poing au visage. L’AT no 13 a déclaré qu’il y avait une douzaine d’agents du SPRD qui formait un demi-cercle devant le plaignant, en plus des AT nos 5 et 1, de la Police provinciale de l’Ontario.

À 3 h 10, l’ambulance est arrivée sur les lieux, mais le plaignant a refusé tout traitement médical. À ce moment-là, l’AT no 5 a informé le SPRD que la PPO assumait la responsabilité de l’enquête ainsi que la garde du plaignant. À 4 h, le plaignant a été transporté au détachement de Whitby de la PPO. Le plaignant ne s’est pas plaint à l’AT no 5 de douleurs ou de la manière dont il avait été traité par les agents du SPRD ou de la PPO présents.

L’AI, l’AT no 14, l’AT no 15, l’AT no 13, l’AT no 7, l’AT no 8 ainsi que l’AT no 16 et l’AT no 1 et l’AT no 5 de la Police provinciale de l’Ontario ont tous indiqué que l’haleine du plaignant sentait fortement l’alcool.

Les éléments de preuve fiables dont je dispose révèlent que l’AI était le seul agent de police à avoir eu recours à de la force pour faire obéir le plaignant, qui refusait constamment de coopérer, qui résistait et qui était en colère. Aucun autre agent du SPRD ou de la PPO n’a employé de la force ou n’a été témoin d’un quelconque recours à la force contre le plaignant. Les deux ambulanciers paramédicaux qui se sont rendus sur les lieux n’ont été témoins d’aucune force physique exercée par des agents du SPRD ou de la PPO[3]. De plus, aucune des vidéos provenant des TVCF du Réseau GO, du CDS ou du MTO n’a montré des agents du SPRD ou de la PPO en train de frapper le plaignant à quelque moment que ce soit.

Je suis d’avis que la vaste majorité du souvenir qu’a le plaignant de la collision automobile du 21 juin 2017 n’est pas crédible ou fiable et n’a certainement pas été corroborée par aucun des TC et AT ni par les vidéos provenant des diverses sources. Le récit des faits fourni par le plaignant était très décousu et constituait une source d’information extrêmement peu fiable. Plus particulièrement, le plaignant a nié qu’il était au volant de la Dodge Charger et a déclaré qu’un ami non identifié conduisait le véhicule impliqué dans la collision. Deux témoins dignes de foi, le TC no 2 et l’AT no 4, ont contredit le plaignant puisqu’ils l’avaient vu sortir du véhicule du côté du conducteur. Le TC no 2 et l’AT no 4 n’ont vu aucun autre occupant ni dans le véhicule ni sortant du véhicule, et on n’a trouvé aucune autre personne près de la Charger ou dans le secteur, en dépit de la fouille effectuée par l’unité canine. Globalement, la déclaration du plaignant selon laquelle son ami était la personne qui conduisait le véhicule automobile est tout simplement intenable. De plus, le plaignant a nié avoir subi des blessures durant la collision, alors que le TC no 2 avait vu du sang sur la tête du plaignant au moment où il quittait la Charger, et que l’AI, avant d’arrêter le plaignant, avait constaté que le visage de ce dernier comportait du sang et était enflé. De plus, on a découvert du sang sur le coussin gonflable du côté du conducteur.

Il n’y a aucun doute que la police avait des motifs d’arrêter le plaignant étant donné l’information au sujet de la collision dont elle disposait et, par conséquent, la seule question que je dois trancher est celle de savoir si les coups que l’AI a donnés au dos du plaignant, de son propre aveu, étaient raisonnables pour procéder à son arrestation dans les circonstances.

Le médecin dans la salle d’urgence qui a traité le plaignant a conclu que la seule blessure importante subie par celui-ci était une main fracturée. Il a expliqué que le genre de fracture subie par le plaignant était compatible avec le fait qu’il avait été impliqué dans une collision automobile, qu’il avait fait une chute en courant ou qu’il avait eu une interaction physique quelconque avec les agents de police. Le médecin a conclu qu’il était difficile pour lui d’offrir une opinion quant au mécanisme exact ayant causé la blessure du plaignant.

À mon avis, il est nettement plus probable que le plaignant ait subi ses blessures durant la collision violente à haute vitesse avec un véhicule automobile dans laquelle il avait été impliqué et qu’il est nettement moins probable que sa blessure résultait d’une façon ou d’une autre des coups portés par l’AI. Bref, la preuve appuie la conclusion que les blessures du plaignant n’ont pas été causées par les actions de l’un ou de l’autre des agents du SPRD ou de la PPO sur les lieux.

Outre l’allégation d’un recours injustifié à de la force, le plaignant a allégué que des agents non identifiés du SPRD qui étaient présents l’ont traité de différents noms et se sont moqués de lui (il a prétendu que les ambulanciers paramédicaux avaient également ri de lui). À cet égard, son affirmation est quelque peu appuyée par l’AT no 5 de la PPO, qui a observé des agents du SPRD se moquer du plaignant et le contrarier en réaction à son attitude abusive et belliqueuse à l’égard de la police pendant qu’il était assis sur la bordure dans le stationnement du CDS[4]. Une telle conduite est certes injustifiée et non professionnelle et ce genre de comportement et d’attitude de la part de certains agents du SPRD pourrait être considéré comme déshonorant en vertu de la partie VII du Règlement de l’Ontario 268/10, en dépit du comportement belligérant du plaignant. Le par. 2 (1) du Code de conduite à l’annexe du règlement se lit comme suit :

Tout chef de police ou autre agent de police commet un acte d’inconduite s’il agit d’une manière qui constitue ou cause, selon le cas :

a) une conduite déshonorante, du fait que, selon le cas :

(v) il utilise un langage blasphématoire, injurieux ou insultant ou manque par ailleurs de civilité envers un membre du public.

Toutefois, même si l’AT no 5 a clairement observé ce qui pourrait être considéré comme une conduite déshonorante et non professionnelle de la part d’agents du SPRD, ce comportement ne pouvait en soi équivaloir à une conduite criminelle.

Bref, après avoir examiné soigneusement l’ensemble de la preuve, je suis convaincu que celle-ci ne donne pas lieu à une conviction raisonnable que l’agent impliqué a commis une infraction criminelle durant ses interactions avec le plaignant.

En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les agents de police ont le droit d’employer de la force dans l’exercice de leurs fonctions légitimes, pour autant que la force en question soit raisonnablement nécessaire dans les circonstances.

À mon avis, la force utilisée par l’AI pour procéder à l’arrestation du plaignant était raisonnable dans toutes les circonstances. Pour arriver à cette conclusion, je garde à l’esprit l’état du droit énoncé par la Cour suprême du Canada dans R. c. Nasogaluak, [2010] 1 R.C.S. 206, qui dit ceci :

Les actes des policiers ne devraient pas être jugés au regard d’une norme de perfection. Il ne faut pas oublier que ceux-ci accomplissent un travail exigeant et dangereux et qu’ils doivent souvent réagir rapidement à des situations urgentes. Leurs actes doivent alors être appréciés selon ce que commande ce contexte difficile. Comme le juge Anderson l’explique dans R. c. Bottrell (1981), 60 C.C.C. (2d) 211 (C.A.C.-B.) :

[traduction] Pour déterminer si la force employée par le policier était nécessaire, les jurés doivent tenir compte des circonstances dans lesquelles le policier y a eu recours. Il aurait fallu leur indiquer qu’on ne pouvait pas s’attendre à ce que l’appelant mesure la force appliquée avec précision. [p. 218]

De plus, bien que la conduite en question doive être proportionnelle à la tâche à accomplir, la Cour d’appel, dans l’affaire R. c. Baxter (1975) 27 C.C.C.(2d) 96 (C.A. de l’Ont.), a statué que l’on ne peut pas s’attendre à ce que les policiers apprécient avec exactitude le degré de force qu’ils emploient dans leur intervention.

En dernière analyse, je suis convaincu, pour les motifs qui précèdent, que l’arrestation du plaignant et la façon dont elle s’est faite étaient légitimes malgré la blessure subie, même si j’en venais à conclure que la police a causé la blessure du fait que le plaignant était tombé sur la main parce qu’elle le poursuivait, ce que je ne suis pas enclin à faire. Je ne crois pas que les trois coups donnés au dos du plaignant, lorsqu’il a refusé de présenter ses mains pour qu’on puisse le menotter, auraient causé la blessure à sa main. Les blessures subies par le plaignant résultaient vraisemblablement de la collision automobile, mais si elles ont été causées par la police, cela aurait été une conséquence directe du refus du plaignant d’obéir aux ordres donnés par les différents agents sur les lieux et étaient dues plutôt à son attitude l’incitant à vouloir éviter à tout prix d’être capturé.

Le facteur aggravant consistant à conduire un véhicule automobile en ayant consommé une quantité excessive d’alcool, qui était le double de la limite légale à laquelle on peut légalement conduire un véhicule automobile, a non seulement causé une collision avec un autre véhicule qui aurait pu être mortelle, mais semble avoir contribué à la résistance et à l’agressivité continues du plaignant et à son utilisation d’un langage injurieux contre les agents du SPRD et de la PPO. Je suis donc convaincu, pour des motifs raisonnables, que les actions de l’AI et de tous les autres agents de police qui ont participé à l’appréhension et à l’arrestation du plaignant tombaient dans les limites prescrites par le droit criminel. Par conséquent, je ne vois aucun motif de porter des accusations au criminel dans cette affaire et aucune ne sera portée.

Date : 11 juin 2018

Original signé par

Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) [1] Les échantillons d’haleine du plaignant ont révélé un taux d’alcoolémie de 176 et 153 milligrammes d’alcool dans 100 millilitres de sang, soit environ deux fois la limite légale à laquelle on est autorisé à conduire. [Retour au texte]
  • 2) [2] Les agents ne voulaient pas soulever le plaignant par-dessus la clôture à barbelés. [Retour au texte]
  • 3) [3] Plus précisément, aucun agent du SPRN ou de la PPO n’a vu un agent écraser la main du plaignant ou donner un coup de poing à ce dernier. [Retour au texte]
  • 4) [4] Lors de son entrevue avec les enquêteurs de l’UES, l’AT no 5 a déclaré qu’il y avait certains membres du SPRD qui, à ses dires, « avaient provoqué le plaignant ». L’AT no 5 a précisé toutefois que la personne qu’il entendait le plus était le plaignant, parce qu’il était le participant le plus bruyant. L’AT no 5 a déclaré qu’il [traduction] « … ne comprenait pas l’utilité de narguer et de contrarier le plaignant, d’avoir une conversation avec lui, n’importe quel type de conversation négative – vous avez attrapé le suspect, pourquoi agir ainsi, pourquoi continuer? ». Il va de soi que je suis d’accord avec l’AT no 5. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.