Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 17-PVI-232

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’ UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’ UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (La « LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :

  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire.

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :

  • le nom de tout agent impliqué
  • le nom de tout agent témoin
  • le nom de tout témoin civil
  • les renseignements sur le lieu de l’incident
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’ UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête.

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres procédures liées au même incident, par exemple des procédures pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave ou ont donné lieu à une allégation d’agression sexuelle.

Les « blessures graves » englobent celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, a priori, présomption de « blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant que la gravité de la blessure puisse être évaluée, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider de l’envergure de son intervention.

Le présent rapport décrit l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 30 ans à la suite d’une poursuite de son véhicule par la police le 27 août 2017.

L’enquête

Notification de l’UES

Vers 1 h 30, le 27 août 2017, le détachement de Rideau Lakes de la Police provinciale de l’Ontario (PPO) a informé l’UES des blessures graves subies par le plaignant âgé de 30 ans lors du tonneau d’un véhicule unique durant une poursuite visant l’appréhension d’un suspect (PAS).

La PPO a déclaré que juste après minuit, le 27 août 2017, des agents de la PPO, de concert avec des membres du Service de police de Smiths Falls (SPSF), avaient répondu à un appel au 9-1-1 concernant des troubles inconnus à l’adresse où habitait l’appelante dans le comté de Rideau Lakes. Le répartiteur avait entendu la femme pleurer au téléphone avant que le contact ne soit rompu.

Lorsque les agents de police sont arrivés à l’adresse, une camionnette a quitté la résidence à une vitesse élevée. Les agents de police ont entamé une brève poursuite du véhicule, mais l’ont rapidement abandonnée et sont retournés à l’adresse de l’appelante au 9-1-1. Peu de temps après, la camionnette est revenue sur les lieux et une deuxième poursuite a été entamée, mais une fois de plus, elle a été abandonnée pour des raisons de sécurité.

Dans le secteur de l’autoroute 15 et du chemin où habitait l’appelante au 9-1-1, la camionnette a délibérément heurté deux voitures de patrouille du SPSF, et une poursuite a de nouveau été entamée. Les agents de police n’ont pas réussi à rattraper le suspect en fuite, mais peu de temps après ont trouvé la camionnette sur le côté dans des buissons, au côté ouest de l’autoroute 15. Le plaignant avait subi des blessures assez graves du fait qu’il avait été éjecté du véhicule.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 4

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 2

Nombre de spécialistes en reconstitution des collisions de l’UES assignés : 1

Le 27 août 2017, l’UES a ouvert une enquête à Rideau Lakes. Des témoins civils (TC) ont été identifiés et interrogés, et les rapports médicaux du plaignant ont été obtenus avec le consentement de ce dernier, malgré le fait qu’il a refusé de subir une entrevue. Les enquêteurs ont mesuré et photographié les lieux et ont créé un schéma. Un spécialiste en reconstitution des collisions de l’UES a dressé un rapport exhaustif des aspects techniques des diverses collisions.

Plaignant :

Homme âgé de 30 ans ayant refusé de subir un entretien, dossiers médicaux obtenus et examinés

Témoins civils (TC)

TC no 1 A participé à une entrevue

Agents témoins (AT)

AT n° 1 A participé à une entrevue, et ses notes ont été reçues et examinées.

AT no 2 A participé à une entrevue, et ses notes ont été reçues et examinées.

AT no 3 A participé à une entrevue, et ses notes ont été reçues et examinées.

Agent impliqué (AI)

AI no 1 A participé à une entrevue, et ses notes ont été reçues et examinées.

Description de l’incident

Le 27 août 2017, vers 22 h 30, des membres du SPSF et du détachement de Rideau Lakes de la PPO sont intervenus à la suite d’un appel concernant des troubles inconnus à une résidence sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1 dans le comté de Rideau Lakes. Après avoir répondu à l’appel, le répartiteur avait perdu le contact avec l’appelante. L’appelante était en larmes. Lorsque les agents de police sont arrivés sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1, ils ont vu une camionnette, dont on savait qu’elle avait un lien avec la résidence, quitter les lieux en évitant de justesse les voitures de patrouille de la police. Le plaignant était au volant de la camionnette.

Au cours de la tentative d’appréhender le plaignant, la police a entamé trois poursuites avec des véhicules de police, mais chacune de ces poursuites s’est terminée peu après avoir commencé, pour des raisons de sécurité. Chaque fois que la décision était prise de mettre fin à la poursuite et que les véhicules de police s’arrêtaient sur l’accotement, le plaignant revenait vers eux, en roulant à des vitesses élevées et en conduisant dangereusement, apparemment pour provoquer la police et l’encourager à entreprendre une autre poursuite.

Trois voitures de patrouille du SPSF et un véhicule utilitaire sport (VUS) identifié de la PPO ont participé aux poursuites. Toutes les voitures de patrouille du SPSF avaient des caméras à bord, contrairement à l’unique véhicule de la PPO, conduit par l’agent impliqué (AI). Au cours de l’incident, deux des voitures de patrouille du SPSF, conduites respectivement par l’agent témoin (AT) no 3 et l’AT no 2, ont subi des dégâts en raison de contacts avec la camionnette conduite par le plaignant et sont devenus inutilisables. Le véhicule de la PPO conduit par l’AI et la voiture de patrouille du SPSF conduite par l’AT no 1 ont poursuivi le plaignant en tandem, et la camera dans la voiture de patrouille du SPSF a donc pu enregistrer l’entier incident.

Durant la seconde poursuite, il y a eu un incident sur le chemin où habitait l’appelante au 9‐1‐1, lorsque l’AT no 3 a tenté d’empêcher le plaignant d’entrer à nouveau sur l’autoroute 15. Les sacs gonflables de la voiture de patrouille conduite par l’AT no 3 se sont déployés au moment du contact du véhicule avec la camionnette, ce qui a mis fin à la participation de l’AT no 3. La voiture de patrouille de l’AT no 2 a également subi des dégâts considérables, mais a pu servir à poursuivre le plaignant, qui a réussi à s’échapper et à accéder à l’autoroute 15 en direction nord.

L’AT no 2 était suivi de l’AT no 1 et de l’AI. Finalement, la voiture de patrouille de l’AT no 2 ne pouvait plus avancer, et l’AT no 2 a été forcé de se mettre sur l’accotement. L’AT no 1 s’est placé à côté de l’AT no 2 pour s’assurer qu’il se portait bien, et ce faisant, a ralenti son véhicule et a perdu de vue la camionnette.

La caméra à bord de la voiture de patrouille de l’AT no 1 a non seulement saisi l’entier événement, mais, en particulier, les derniers moments de la troisième poursuite, qui s’est terminée par un tonneau de la camionnette durant lequel le plaignant a été gravement blessé.

La vidéo révèle qu’une fois que le plaignant était hors de vue, l’AT no 1 et l’AI avaient continué de se diriger vers le nord et n’avaient plus revu la camionnette, avant d’arriver sur les lieux de la collision, où la camionnette avait fait un tonneau et était entrée dans le fossé.

Nature des blessures/traitement

Le plaignant a subi un examen qui a révélé qu’il avait une fracture à la partie inférieure de l’os droit du pubis et une fracture médiale à la cheville gauche. Il a également reçu dix points de suture pour fermer une plaie à l’arrière de la tête.

Preuve

Les lieux de l’incident

Il y a deux lieux de collision reliés à cet incident. La scène initiale se trouvait sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1, juste à l’est de l’autoroute. Personne n’a été blessé durant les collisions à cet endroit.

Scene photo

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La deuxième scène (voir le schéma plus loin) était sur l’autoroute 15, près de la carrière de la Campbell’s Trucking Company, juste au sud de la ville de Smiths Falls. La distance entre les deux scènes de collision est de 3,27 kilomètres.

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À l’endroit où la camionnette a fait un tonneau, qui est l’accident à l’origine des blessures du plaignant, l’autoroute 15 est une chaussée asphaltée à deux voies, dont l’une se dirige vers le nord, et l’autre vers le sud. Au centre de la chaussée, deux lignes jaunes continues délimitent et séparent les voies opposées. Des lignes blanches et de profonds fossés longent la route. Il n’y a aucun éclairage artificiel dans le secteur.

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Là où est survenue la collision, il y a long virage vers la droite pour la circulation se dirigeant vers le nord, qui accuse une légère pente ascendante. Une carrière de gravier est située au côté ouest de l’autoroute 15, près du lieu de la collision, et on y voit un panneau de construction portant le nom « Campbell’s Trucking Company », à l’entrée. Le chemin allant vers l’ouest à partir de l’autoroute 15 et qui donne accès à la carrière, est recouvert de gravier meuble. La visibilité y est bonne, et la limite de vitesse affichée est de 80 km/h.

Scene photo

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Schéma des lieux

Scène des collisions initiales

Scène des collisions initiales

Scène de la collision finale sur l’autoroute 15

Scène de la collision finale sur l’autoroute 15

Éléments de preuve médico-légaux

Aucun document ou élément n’a été soumis au Centre des sciences judiciaires.

Preuve vidéo/audio/photographique

Analyse des données provenant d’une caméra à bord d’un véhicule

Même si les trois voitures de patrouille du SPSF étaient équipées d’une caméra, c’est seulement celle qui se trouvait dans la voiture de patrouille de l’AT no 1 qui a filmé les derniers moments de la poursuite. La voiture de patrouille de l’AT no 3 a été rendue inutilisable sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1, et la voiture de patrouille conduite par l’AT no 2 est tombée en panne sur l’autoroute 15, à une certaine distance au sud de l’endroit où est survenue la collision finale. Pendant toute la durée de l’incident, l’AT no 1 se déplaçait en tandem avec l’agent impliqué de la PPO, dont la voiture de patrouille n’était pas munie d’une caméra. Voici un résumé de la vidéo filmée par la caméra dans la voiture de patrouille de l’AT no 1.

Caméra dans la voiture de patrouille de l’AT no 1

Le 26 août 2017, à 22 h 43, l’AT no 1 se déplaçait sur une route dans le secteur résidentiel de la ville de Smiths Falls. L’AI conduisait un VUS de police entièrement identifié de la PPO et roulait devant l’AT no 1. Les feux d’urgence des deux véhicules de police étaient allumés.

L’AT no 1 suivait l’AI à partir de Smiths Falls, en direction sud sur l’autoroute 15. Les deux véhicules de police roulaient à une vitesse moyenne se situant entre 150 et 160 km/h en direction sud sur l’autoroute 15.

À 22 h 46, juste au sud du chemin Golf Club, les feux d’urgence des deux véhicules de police ont été éteints. L’AT no 1 a tourné à gauche depuis l’autoroute 15 en direction sud sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1 et s’est déplacé vers l’est derrière le véhicule de police de l’AI.

Juste à l’est de l’entrée du terrain de la Société agricole de Lombardy (Lombardy Agricultural Society Fairgrounds), le véhicule de police de l’AI a ralenti et s’est presque arrêté pour virer à gauche, chevauchant la ligne jaune du centre, tout en appliquant ses freins. Une camionnette de couleur foncée se dirigeait dans l’autre sens vers le véhicule de police de l’AI. La camionnette se déplaçait dans la voie en direction ouest du chemin où habitait l’appelante au 9-1-1 et roulait en partie sur l’accotement en gravier de la chaussée. La camionnette a frôlé le côté conducteur du véhicule de police de l’AI et a poursuivi son chemin et est passée par le côté conducteur du véhicule de police conduit par l’AT no 1.

L’AT no 1 a fait marche arrière avec son véhicule de police vers la droite, puis a avancé tout en tournant son volant vers la gauche et s’est rendu en direction ouest sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1 dans la même direction que la camionnette. L’AT no 1 a allumé les feux d’urgence sur le toit de son véhicule de police. La camionnette s’est approchée du panneau d’arrêt à l’intersection du chemin où habitait l’appelante au 9-1-1 et de l’autoroute 15, ne s’y est pas arrêtée et a tourné à droite pour se rendre en direction nord sur l’autoroute 15.

La camionnette a ensuite fait un grand virage à droite et est presque entrée en collision avec un véhicule qui circulait en direction sud dans la voie de virage à gauche de l’autoroute 15 à l’intersection avec le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1. L’AT no 1 a accéléré derrière la camionnette avec ses feux d’urgence et sa sirène activés. Il semble que la distance entre la camionnette et le véhicule de police conduit par l’AT no 1 était d’environ quatre ou cinq longueurs de véhicule et, selon les données enregistrées par le GPS du véhicule de la police, l’AT no 1 roulait à 130 km/h.

La camionnette est entrée dans un virage vers la gauche et les pneus droits de la camionnette ont traversé la ligne blanche au bord de la route et se sont retrouvés sur l’accotement en gravier. La camionnette s’est redressée, puis s’est déplacée vers la gauche et a traversé la ligne jaune au centre de la route en s’approchant du chemin Golf Club. La distance entre la camionnette et le véhicule de police de l’AT no 1 augmentait à ce moment-là.

La camionnette s’est alors approchée d’une courbe vers la gauche sur la route, et la distance entre la camionnette et le véhicule de police de l’AT no 1 a augmenté davantage. D’après le GPS, l’AT no 1 roulait à 145 km/h à ce moment‐là.

La camionnette a continué vers le nord et est passée devant le détachement de Rideau Lakes de la PPO et a dépassé deux véhicules qui se trouvaient devant elle en se mettant à gauche de la double ligne jaune continue, dans la voie en direction sud de l’autoroute 15. Les deux véhicules civils ont viré à droite sur l’accotement en gravier, alors que l’AT no 1 s’approchait d’eux. Puis, le véhicule de police de l’AT no 1 a ralenti à moins de 80 km/h, alors qu’il dépassait l’un des véhicules civils, puis s’est placé derrière le véhicule civil qui menait.

À 22 h 49, l’AT no 1 a éteint ses feux d’urgence et a tourné son véhicule de police vers la droite pour s’arrêter sur l’accotement en gravier. On entend l’AT no 1 à la radio, alors qu’il fournit le numéro et le kilométrage de son véhicule de police. Puis, on voit le véhicule de police conduit par l’AI passer à gauche de la voiture de patrouille de l’AT no 1 et poursuivre son chemin vers le nord sur l’autoroute 15. Les feux d’urgence du véhicule de l’AI ne sont pas allumés. Le véhicule de police de l’AT no 1 s’approche d’un véhicule civil se dirigeant vers le nord sur l’autoroute 15 et ses feux d’urgence sont activés.

Le véhicule civil a viré vers la droite pour se mettre sur l’accotement en gravier de la route et l’AT no 1 s’est avancé sur l’accotement en gravier pour ensuite retourner sur la chaussée et continuer vers le nord. Après que le véhicule de police de l’AI avait dépassé le véhicule civil, l’AI a de nouveau éteint ses feux d’urgence. L’AT no 1 est resté derrière le véhicule civil en se déplaçant à une vitesse moyenne de 75 km/h.

À 22 h 50, l’AT no 1 s’est approché du chemin Progress. Juste au sud de l’intersection en forme de T, on voit le véhicule de police de l’AI immobilisé sur l’accotement en gravier au côté droit de la route. Le chemin Progress va vers l’est à partir de l’autoroute 15. L’AT no 1 a placé son véhicule de police le long du côté du conducteur du véhicule de police de l’AI et s’est arrêté tout en pointant son véhicule dans la même direction.

Puis, on entend l’AI et l’AT no 1 dire dans la radio qu’ils retourneront à la résidence sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1 pour vérifier comment elle va. On voit une camionnette à une courte distance devant eux sortir du chemin Progress et tourner à gauche pour se rendre en direction sud sur l’autoroute 15 vers l’endroit où se trouvent les véhicules de police arrêtés. La camionnette fait un grand virage vers la gauche et se déplace sur l’accotement en gravier du côté ouest, puis se rend vers le sud en passant à côté des deux véhicules de police, alors que ses pneus droits se trouvent sur la ligne blanche et qu’ils s’approchent de l’accotement en gravier de la voie en direction sud.

On entend l’AT no 1 demander à l’AI si la camionnette qui s’approche est celle de leur suspect, avant de confirmer qu’il s’agit bel et bien de lui. L’AT no 1 fait demi-tour et se dirige vers le sud sur l’autoroute 15, alors que la camionnette passe à sa gauche. À 22 h 51, l’AT no 1 allume ses feux d’urgence et vire à droite sur l’accotement en gravier de la route afin de permettre à l’AI de passer à côté de lui sur la gauche.

Puis, l’AI est passé à côté de la voiture de patrouille de l’AT no 1, tout en activant les feux d’urgence de son véhicule de police. L’AT no 1 est retourné sur la route et a suivi le véhicule de police de l’AI vers le sud sur l’autoroute 15. On ne pouvait plus voir la camionnette à ce moment‐là. Juste au nord du détachement de Rideau Lakes de la PPO, l’AI et l’AT no 1 ont éteint leurs feux d’urgence respectifs.

À 22 h 52, juste au nord du chemin Golf Club, le véhicule de police de l’AI est passé de la chaussée à l’accotement en gravier à droite et s’est arrêté. L’AT no 1 a de nouveau placé son véhicule de police à côté de la voiture de patrouille de l’AI et s’est arrêté, en pointant son véhicule dans la même direction.

Dans la vidéo, on entend l’AI informer le répartiteur de son kilométrage et de l’endroit où il se trouve. Puis, on l’entend dire à l’AT no 1 qu’ils ne sont plus autorisés à continuer la poursuite. On entend l’AT no 1 dire à l’AI qu’il faut qu’ils se rendent tous les deux à la maison sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1 pour vérifier son état.

À 22 h 53, la voiture de patrouille de l’AI est retournée sur la chaussée et s’est dirigée vers le sud sur l’autoroute 15, et l’AT no 1 se trouvait directement derrière lui. Les feux d’urgence des deux véhicules de police n’étaient pas activés. Puis, l’AI et l’AT no 1 ont tourné vers la gauche sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1 à partir de l’autoroute 15 et se sont dirigés vers l’est à 40 km/h. Puis, on voit un véhicule s’approcher avec ses phares allumés.

À ce moment-là, les feux d’urgence des deux voitures de patrouille de la police ont été réactivés et le véhicule de police de l’AI s’est déplacé lentement vers la gauche et a chevauché la ligne du centre et s’est arrête. L’AT no 1 a également tourné son véhicule de police vers la gauche et est entré dans la voie ouest du chemin où habitait l’appelante au 9‐1-1, se plaçant à gauche et légèrement derrière la voiture de patrouille de l’AI. Le véhicule venant dans l’autre sens, la camionnette, a viré à droite, d’abord sur l’accotement en gravier puis sur l’herbe, et est passé à la gauche des deux véhicules de police. La camionnette a frôlé la voiture de patrouille de l’AT no 1. Puis, on entend l’AT no 1 signaler que la camionnette vient juste d’entrer en collision avec l’une des voitures de patrouille du SPSF.

À 22 h 54, l’AT no 1 a fait marche arrière avec son véhicule de police vers la droite et a avancé vers l’avant tout en tournant son volant vers la gauche, pour se déplacer en direction ouest sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1. On voit que le véhicule de police de l’AT no 2 précédait celui conduit par l’AT no 1. On voit la camionnette se déplacer vers l’ouest sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1 vers l’autoroute 15, dans la voie est. Les feux d’urgence du véhicule de police de l’AT no 2 sont activés.

La camionnette a alors braqué fortement vers la droite et est retourné dans la voie ouest devant la voiture de patrouille de l’AT no 2, puis a tourné à droite sur l’autoroute 15. La camionnette ne s’est pas arrêtée au panneau d’arrêt et s’est dirigée ensuite vers le nord sur l’autoroute 15 à partir du chemin où habitait l’appelante au 9-1-1.

On voit la voiture de patrouille de l’AT no 2 directement derrière la camionnette. L’AT no 1 a tourné à droite sur l’autoroute 15 et s’est dirigé vers le nord derrière l’AT no 2. La camionnette et le véhicule de police de l’AT no 2 se dirigeaient vers le nord sur l’autoroute 15 dans la voie de virage en direction sud vers le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1. Puis, le véhicule de police de l’AT no 1 est passé par-dessus plusieurs déchets éparpillés sur la route considérés comme provenant de la caisse de la camionnette, et par‐dessus la barre de protection en aluminium endommagée qui était tombée de l’avant de la voiture de patrouille de l’AT no 2.

À ce moment-là, le véhicule de police de l’AT no 1 se déplaçait à 120 km/h, selon les données enregistrées par le GPS. On voit la camionnette passer par le chemin Golf Club, et la distance augmenter entre la camionnette et la voiture de patrouille de l’AT no 2. Juste au nord du chemin Golf Club, le véhicule de l’AT no 2 a rapidement décéléré et a viré vers la droite sur l’accotement en gravier. Puis, l’AT no 1 est passé à gauche de l’AT no 2 et a continué de se diriger vers le nord sur l’autoroute 15.

On ne peut plus voir la camionnette sur la vidéo à ce moment-là, et on ne voit aucun feu arrière plus loin. À 22 h 56, juste au nord du détachement de Rideau Lakes de la PPO, l’AT no 1 est entré dans un long virage vers la droite et a ralenti. On peut voir de grosses traces de pneus noires sur l’asphalte, qui commencent dans la voie nord, traversent la ligne jaune au centre, continuent dans la voie sud et puis sur l’accotement en gravier du côté ouest jusque dans un profond fossé.

Puis, on voit un faisceau lumineux d’un projecteur venant du véhicule de police de l’AT no 1 et éclairer le fossé et l’accotement en gravier du côté ouest de l’autoroute 15. Des phares sont visibles dans le champ à l’ouest du fossé qui longe la route, et on voit le véhicule de police de l’AT no 1 s’arrêter sur l’accotement en gravier du côté ouest de la voie sud, tout en faisant face au nord.

Témoignage d’expert

Rapport de reconstitution de la collision

Selon le rapport de reconstitution de la collision de l’UES, le plaignant a perdu le contrôle de la camionnette qu’il conduisait dans un long virage vers la droite à la pente ascendante, ce qui a causé la rotation antihoraire du véhicule, qui a quitté la voie nord pour traverser la voie sud de l’autoroute 15 et est entré dans un profond fossé au côté ouest de l’autoroute 15. Le sillon causé par le véhicule dans le fossé se trouvait à 7,5 mètres à l’ouest de la limite ouest de la voie sud de l’autoroute 15 et au côté sud du chemin en gravier qui se dirige vers l’ouest à partir de l’autoroute 15.

Lorsqu’on examine les traces de pneus sur les lieux de l’incident et analyse le rapport du module de gestion de la puissance, il est manifeste que le plaignant a perdu le contrôle de la camionnette et est entré dans le fossé à une vitesse élevée. D’après ce même rapport, la vitesse de la camionnette était constante et se situait entre 159 et 161 km/h, cinq secondes avant le « point zéro » (le point d’impact). L’accélérateur était entièrement enfoncé et l’interrupteur de freinage n’était pas activé au moment de la perte de contrôle de la camionnette, ce qui montre que le plaignant accélérait à plein régime pendant qu’il était dans le virage vers la droite.

Les éléments de preuve relatifs à la chaussée n’étaient d’aucune utilité pour la détermination de la vitesse à laquelle se déplaçait la camionnette avant de pénétrer dans le fossé et en heurter la berge. La camionnette accélérait au moment de la perte de contrôle et tournait dans le sens antihoraire à travers les voies de circulation. D’après les données fournies par le module de gestion de la puissance, la camionnette se déplaçait à une vitesse constante de 159 km/h lorsqu’elle est entrée dans le virage vers la droite, ce qui a fait perdre le contrôle du véhicule au plaignant.

On a pris des mesures de l’endroit où était venue se reposer la camionnette, mais on ne pouvait toutefois pas déterminer, à partir des éléments de preuve sur les lieux, où la camionnette était entrée en contact initialement avec le sol ou avait atterri après avoir touché la berge du fossé.

Enregistrements des communications

Les enquêteurs ont obtenu et examiné les enregistrements de l’appel au 9-1-1 et des transmissions radio de la police et les ont jugés conformes aux déclarations fournies et la vidéo filmée dans la voiture de police.

Éléments obtenus du service de police

L’UES a demandé à obtenir et a examiné les éléments et documents suivants du détachement de Rideau Lakes de la PPO (comté de Leeds) et du SPSF :

  • rapport d’arrestation du plaignant
  • enregistrements de l’appel au 9-1-1 et des communications de la police
  • chronologies (x2)
  • rapport général d’incident
  • liste des personnes impliquées
  • rapport d’accident de la route
  • notes des AT nos 1-3 et de l’AI
  • vidéo des caméras dans les trois véhicules en cause du SPSF
  • données du GPS et du système de localisation automatique du véhicule (LAV) provenant du véhicule de police de l’AI
  • CD des communications de la PPO
  • Procédure de la PPO : Poursuites visant l’appréhension de suspects

L’UES a obtenu et examiné les documents suivants provenant d’autres sources :

  • dossiers médicaux du plaignant

Dispositions législatives pertinentes

Articles 1-3 du Règlement de l’Ontario 266/10, Loi sur les services policiers – Poursuites visant l’appréhension de suspects

1. (1) Pour l’application du présent règlement, une poursuite visant l’appréhension de suspects a lieu lorsqu’un agent de police tente d’ordonner au conducteur d’un véhicule automobile de s’immobiliser, que le conducteur refuse d’obtempérer et que l’agent poursuit, en véhicule automobile, le véhicule en fuite afin de l’immobiliser ou de l’identifier ou d’identifier un particulier à bord du véhicule

(2) La poursuite visant l’appréhension de suspects est interrompue lorsque les agents de police ne poursuivent plus un véhicule automobile en fuite afin de l’immobiliser ou de l’identifier ou d’identifier un particulier à bord du véhicule.

2. (1) Un agent de police peut poursuivre ou continuer de poursuivre un véhicule automobile en fuite qui ne s’immobilise pas :

  1. soit s’il a des motifs de croire qu’une infraction criminelle a été commise ou est sur le point de l’être
  2. soit afin d’identifier le véhicule ou un particulier à bord du véhicule

(2) Avant d’amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects, un agent de police s’assure qu’il ne peut recourir à aucune des solutions de rechange prévues dans la procédure écrite, selon le cas :

  1. du corps de police de l’agent, établie en application du paragraphe 6 (1), si l’agent est membre d’un corps de police de l’Ontario au sens de la Loi de 2009 sur les services policiers interprovinciaux
  2. d’un corps de police dont le commandant local a été avisé de la nomination de l’agent en vertu du paragraphe 6 (1) de la Loi de 2009 sur les services policiers interprovinciaux, si l’agent a été nommé en vertu de la partie II de cette loi
  3. du corps de police local du commandant local qui a nommé l’agent en vertu du paragraphe 15 (1) de la Loi de 2009 sur les services policiers interprovinciaux, si l’agent a été nommé en vertu de la partie III de cette loi

(3) Avant d’amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects, l’agent de police décide si, afin de protéger la sécurité publique, le besoin immédiat d’appréhender un particulier à bord du véhicule automobile en fuite ou le besoin d’identifier le véhicule ou le particulier l’emporte sur le risque que peut présenter la poursuite pour la sécurité publique.

(4) Pendant une poursuite visant l’appréhension de suspects, l’agent de police réévalue continuellement la décision prise aux termes du paragraphe (3) et interrompt la poursuite lorsque le risque que celle-ci peut présenter pour la sécurité publique l’emporte sur le risque pour la sécurité publique que peut présenter le fait de ne pas appréhender immédiatement un particulier à bord du véhicule automobile en fuite ou de ne pas identifier le véhicule ou le particulier.

(5) Nul agent de police ne doit amorcer une poursuite visant l’appréhension de suspects pour une infraction non criminelle si l’identité d’un particulier à bord du véhicule automobile en fuite est connue.

(6) L’agent de police qui entreprend une poursuite visant l’appréhension de suspects pour une infraction non criminelle interrompt la poursuite une fois que le véhicule automobile en fuite ou le particulier à bord du véhicule est identifié.

(1) Un agent de police avise un répartiteur lorsqu’il amorce une poursuite visant l’appréhension de suspects.

(2) Le répartiteur avise un surveillant des communications ou un surveillant de la circulation, s’il y en a un de disponible, qu’une poursuite visant l’appréhension de suspects a été amorcée.

Articles 219 et 221 du Code criminel – Négligence criminelle causant des lésions corporelles

219 (1) Est coupable de négligence criminelle quiconque :

  1. soit en faisant quelque chose
  2. soit en omettant de faire quelque chose qu’il est de son devoir d’accomplir

montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.

(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.

221 Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans quiconque, par négligence criminelle, cause des lésions corporelles à autrui.

Article 249 du Code criminel – Conduite dangereuse

(1) Commet une infraction quiconque conduit, selon le cas :

  1. un véhicule à moteur d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, y compris la nature et l’état du lieu, l’utilisation qui en est faite ainsi que l’intensité de la circulation à ce moment ou raisonnablement prévisible dans ce lieu; [...]

(3) Quiconque commet une infraction mentionnée au paragraphe (1) et cause ainsi des lésions corporelles à une autre personne est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans.

Article 249.1 du Code criminel – Fuite de la police

249.1 (1) Commet une infraction quiconque, conduisant un véhicule à moteur alors qu’il est poursuivi par un agent de la paix conduisant un véhicule à moteur, omet, sans excuse raisonnable et dans le but de se soustraire, d’arrêter le véhicule dès que les circonstances le permettent.

(2) Quiconque commet une infraction mentionnée au paragraphe (1) est coupable :

  1. soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de cinq ans
  2. soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure

(3) Commet une infraction quiconque cause des lésions corporelles à une autre personne ou la mort d’une autre personne en conduisant un véhicule à moteur de la façon visée à l’alinéa 249(1)a) dans le cas où il est poursuivi par un agent de la paix conduisant un véhicule à moteur et, sans excuse raisonnable et dans le but de fuir, omet d’arrêter son véhicule dès que les circonstances le permettent.

(4) Quiconque commet une infraction visée au paragraphe (3) est coupable d’un acte criminel passible :

  1. s’il a causé des lésions corporelles à une autre personne, d’un emprisonnement maximal de quatorze ans
  2. s’il a causé la mort d’une autre personne, de l’emprisonnement à perpétuité

Article 333.1 du Code criminel – Vol d’un véhicule à moteur

333.1 (1) Quiconque commet un vol est, si l’objet volé est un véhicule à moteur, coupable d’une infraction passible, sur déclaration de culpabilité :

  1. par mise en accusation, d’un emprisonnement maximal de dix ans, la peine minimale étant de six mois dans le cas d’une troisième infraction prévue au présent paragraphe ou de toute autre récidive subséquente
  2. par procédure sommaire, d’un emprisonnement maximal de dix-huit mois

Analyse et décision du directeur

Le 27 août 2017, vers 23 h 10, le plaignant a été impliqué dans une collision d’un seul véhicule au cours de laquelle la camionnette qu’il conduisait a fait un tonneau après avoir quitté la chaussée, l’éjectant du véhicule. Il a ensuite fallu extraire le plaignant, qui était coincé sous la camionnette, et le transporter à l’hôpital où il a reçu dix points de suture pour fermer une plaie à l’arrière de la tête et où il a reçu des soins en raison d’une fracture à l’extrémité inférieure de l’os droit du pubis et d’une fracture médiale à la cheville gauche.

Le plaignant avait provoqué les agents de police du détachement de Rideau Lakes de la Police provinciale de l’Ontario (PPO) et du Service de police de Smiths Falls (SPSF) afin qu’ils le prennent en chasse et avait réussi à s’échapper à eux lors de trois poursuites véhiculaires distinctes, avant de perdre le contrôle de son véhicule et d’avoir un accident, qui était à l’origine de ses blessures.

Le but de cette enquête était de déterminer si les blessures subies par le plaignant étaient attribuables aux actes de la police et si les poursuites véhiculaires entamées par la police équivalaient à une conduite criminelle de leur part.

Au cours de l’enquête, malgré le fait que le plaignant a refusé de fournir une déclaration et que les deux TC interviewés possédaient uniquement de l’information concernant des faits n’étant pas reliés directement aux poursuites proprement dites, grâce aux données abondantes et complètes provenant du GPS et du système de localisation automatique du véhicule (LAV) dans les véhicules du SPSF, les séquences filmées par les caméras dans ces mêmes véhicules et les enregistrements des appels au 9-1-1 et des communications radio de la police, tant de la PPO que du SPSF, il n’y a aucune contestation ni ambiguïté quant aux faits.

Les données saisies par les enquêteurs de l’UES corroborent pleinement le témoignage des quatre agents de police en cause, y compris de l’agent impliqué, qui ont tous fourni leurs notes de service et des déclarations complètes aux enquêteurs de l’UES. La séquence des événements qui suit repose sur les éléments de preuve non contestés et fiables qui ont été obtenus et analysés.

Le 27 août 2017, vers 23 h 43, l’AI, appartenant au détachement de Rideau Lakes de la PPO, a répondu à un appel concernant une course en taxi non payée. Apparemment, le chauffeur du taxi avait amené son client à une adresse sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1 dans le comté de Rideau Lakes, lequel client avait pris la fuite en courant, sans payer. L’enquête a permis d’établir que cette personne était le plaignant. Quand l’AI n’a pas réussi à trouver le plaignant, il a demandé l’aide du SPSF et il est allé rencontrer l’AT no 1 et l’AT no 2.

Puis, la police s’est présentée à une adresse dans la ville de Smiths Falls, où le chauffeur du taxi avait amené initialement le plaignant et a parlé au résident, qui a indiqué que plus tôt, cette journée-là, le plaignant s’était rendu à la résidence de son ex-épouse (du résident) sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1. Son ex-épouse avait communiqué avec lui et lui avait dit que le plaignant s’était présenté chez elle en état d’ébriété et qu’elle l’avait conduit, dans la camionnette F-150 de couleur noire appartenant au résident, à Carleton Place, où elle l’avait déposé pour se débarrasser de lui.

Pendant qu’il interrogeait ce résident, l’AT no 1 a été informé par le centre des communications qu’une femme en pleurs venait d’appeler au 9-1-1, mais que l’appel avait été déconnecté avant qu’elle ne puisse fournir des renseignements au répartiteur. Le numéro de téléphone avait été retracé au résident avec lequel l’AT no 1 s’entretenait, et le résident a répondu que son téléphone cellulaire était en possession de son ex-épouse, qui habitait sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1. Par conséquent, l’AI et l’AT no 1 se sont rendus chacun dans leur voiture de patrouille à l’adresse sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1 pour enquêter sur la raison de l’appel. Pendant qu’ils se rendaient à l’adresse, l’équipement d’urgence des deux véhicules était activé, mais les agents l’ont éteint dès qu’ils sont arrivés sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1.

Cet élément de preuve est confirmé par la vidéo dans le véhicule de l’AT no 1, où l’on voit que, vers 22 h 43, celui-ci roulait derrière l’AI à Smiths Falls, alors que les agents quittaient la ville et se dirigeaient vers le sud sur l’autoroute 15, et on les voit arriver au sud du chemin Golf Club à 22 h 46 et désactiver les feux d’urgence de leurs véhicules respectifs et tourner sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1.

Alors que l’AI et l’AT no 1 s’approchaient de l’adresse sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1, ils ont vu une camionnette de couleur noire sortir de l’entrée de la résidence en faisant marche arrière.

Puis, l’AI a placé son véhicule de police au centre de la chaussée et en partie dans la voie oust du chemin où habitait l’appelante au 9-1-1 dans l’intention d’immobiliser la camionnette. La voiture de patrouille de l’AT no 1 était située directement derrière la voiture de patrouille de l’AI à ce moment-là. La camionnette est passée à côté de la voiture de patrouille de l’AI, du côté du conducteur, en empruntant le fossé peu profond au nord, et a presque heurté le véhicule de police et puis est passée à côté du VUS de l’AT no 1, en la heurtant presque du côté gauche également.

Cet élément de preuve est confirmé entièrement par les séquences filmées par les caméras dans les véhicules.

L’AT no 1 a expliqué que le chemin sur lequel habitait l’appelante au 9-1-1 n’était pas un cul‐de-sac et que la camionnette noire aurait facilement pu quitter le chemin et le secteur sans se déplacer vers l’ouest et sans passer à côté des véhicules de police. Il s’agissait toutefois de la première de nombreuses manÅ“uvres faites apparemment par le conducteur de la camionnette, le plaignant, pour lancer un défi à la police.

On a observé qu’au moment de l’incident, les routes étaient en bon état et sèches.

Dès que la camionnette était passée près d’eux, l’AT no 1 et l’AI ont chacun fait demi-tour avec leur véhicule pour la suivre, et l’AT no 1 menait cette fois-ci. Puis, les agents ont vu le plaignait omettre de s’arrêter au panneau d’arrêt de l’autoroute 15 et s’engager sur celle‐ci en accélérant rapidement, et l’AT no 1 et l’AI se sont lancés à sa poursuite. Puis, les deux agents ont réactivé leurs feux d’urgence et sirènes. Cet élément de preuve a entièrement été saisi par la caméra dans le véhicule de police de l’AT no 1.

La circulation sur l’autoroute 15 était légère, et la limite de vitesse affichée était de 80 km/h.

Puis, l’AI a envoyé un message par la radio de la police pour informer le Centre des communications de la PPO qu’il s’était lancé à la poursuite de la camionnette, qu’il a décrite comme ayant frôlé son véhicule de police et comme ayant un lien avec l’appel au 9-1-1 qui venait de l’adresse sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1. L’AI a décrit la camionnette comme se déplaçant à une vitesse très élevée et comme se trouvant assez loin devant le véhicule de police.

L’AT no 1 a également envoyé un message radio à son répartiteur et a demandé que des agents placent des bandes à clous sur l’autoroute 15 au sud de Smiths Falls. Alors que la camionnette s’approchait du chemin Golf Club et du chemin Bay, l’AT no 1 l’a vu virer vers la ligne blanche à des vitesses d’environ 135 km/h et il a immédiatement décéléré.

Les données provenant du GPS et du système LAV dans le véhicule de police de l’AT no 1 ont confirmé qu’il se déplaçait à une vitesse de 130 km/h à ce moment-là, juste avant de ralentir et, que par la suite, la distance entre la camionnette et la voiture de patrouille de l’AT no 1 avait commencé à augmenter.

À 22 h 48, l’AT no 1 est passé à côté du détachement de Rideau Lakes de la PPO sur l’autoroute 15, en direction nord, et il a vu que la camionnette s’approchait d’un certain nombre de véhicules civils devant lui. L’AT no 1 a vu la camionnette traverser la ligne continue au centre et dépasser ces véhicules, tout en continuant d’accélérer vers le nord.

À ce moment-là, l’AT no 1 a mis fin à la poursuite pour des raisons de sécurité publique et s’est mis sur l’accotement où il s’est arrêté. Puis, il a informé le répartiteur de son kilométrage.

La vidéo provenant de la caméra dans le véhicule de l’AT no 1 confirme qu’au moment où il s’approchait des deux véhicules civils, ceux-ci s’étaient rangés près de l’accotement à droite. Le véhicule de l’AT no 1 avait alors ralenti à moins de 80 km/h et avait dépassé le premier des véhicules civils et s’était placé derrière le second. À 22 h 49, l’AT no 1 a désactivé ses feux d’urgence et s’est mis sur l’accotement et a immobilisé son véhicule. La vidéo provenant de la caméra dans le véhicule révèle que la voiture de patrouille de l’AI est alors passé à côté du véhicule de l’AT no 1 sans que ses feux d’urgence soient activés, mais que lorsqu’il s’est approché d’un véhicule civil, l’AI a allumé ses feux d’urgence, a dépassé le véhicule et les a immédiatement éteints.

L’AI est passé par la voiture de patrouille arrêtée, conduite par l’AT no 1, et a poursuivi son chemin vers le nord sur l’autoroute 15 en laissant ses feux d’urgence et ses sirènes allumés pendant une courte période, avant de communiquer également avec le répartiteur pour l’informer que la camionnette était trop loin devant et qu’il mettait fin à la poursuite. L’AI a alors éteint les systèmes d’urgence de sa voiture de patrouille et s’est placée sur le côté de la route, c’est-à-dire sur l’accotement en gravier, d’où il a informé le répartiteur de son kilométrage par radio.

L’AT no 1 est retourné sur l’autoroute et a continué vers le nord, à une vitesse nettement moins élevée, et puis s’est placé à côté de l’AI. Les données du GPS et du système LAV confirment que l’AT no 1 se déplaçait à une vitesse moyenne qui était de seulement 75 km/h avant de se ranger à côté de l’AI à 22 h 50.

La vidéo confirme que l’AT no 1 et l’AI ont tous les deux parlé à leurs répartiteurs respectifs par radio et qu’ils les ont informés qu’ils retournaient à l’adresse sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1 pour vérifier son état.

Tandis que l’AI et l’AT no 1 étaient toujours arrêtés au bord de la route, avant de faire demi-tour pour retourner au chemin où habitait l’appelante au 9-1-1, la même camionnette de couleur noire est revenue vers le sud sur l’autoroute 15 vers les deux véhicules de police arrêtés, à côté desquels elle est alors passée à un taux de vitesse élevé. Cet élément de preuve est clair dans la vidéo provenant du véhicule de police de l’AT no 1 et montre que le plaignant avait intentionnellement fait demi-tour et avait rebroussé chemin vers les deux véhicules de police apparemment pour les encourager à reprendre leur poursuite, alors que les deux agents avaient décidé d’y mettre fin pour protéger le public.

Quand la camionnette est de nouveau passée par les véhicules de police, l’AI et l’AT no 1 ont tous deux fait demi-tour pour se rendre en direction sud sur l’autoroute 15 et pour poursuivre à nouveau la camionnette. La vidéo provenant de la caméra dans le véhicule de l’AT no 1 confirme qu’à 22 h 51, une deuxième poursuite a été entamée et que les deux agents ont de nouveau activé leurs feux d’urgence et leurs sirènes. Il est estimé qu’à ce moment-là la camionnette roulait entre 160 et 170 km/h, alors qu’elle s’approchait du chemin Golf Club. Une fois que les deux véhicules de police avaient fait demi-tour pour se diriger vers le sud, ils avaient de nouveau perdu de vue la camionnette, et les deux agents se sont remis sur l’accotement de la route et ont mis fin à la seconde poursuite. Les séquences filmées par la caméra dans le véhicule confirment que cela s’est produit à 22 h 52.

L’AI a communiqué avec le répartiteur de la PPO et l’a informé qu’il mettait fin à la poursuite pour des raisons de sécurité publique, tandis que l’AT no 1 a informé son répartiteur qu’ils retournaient à l’adresse sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1 pour voir comment elle allait. On peut entendre ces communications dans la vidéo.

Puis, on entend l’AT no 1 demander à l’AT no 2 et à l’AT no 3 de se rendre à la résidence et de vérifier comment se porte l’appelante au 9-1-1. Pendant qu’ils se dirigeaient vers le sud sur l’autoroute 15, l’AT no 2 et l’AT no 3 ont rattrapé l’AT no 1 et l’AI, et les quatre véhicules de police se sont rapprochés du chemin où habitait l’appelante au 9-1-1, l’un après l’autre, et les agents ont tous désactivé leur équipement d’urgence alors qu’ils tournaient sur le chemin. Cela est confirmé également par les images vidéo comme s’étant produit à 22 h 53, tandis que les données des GPS et systèmes LAV montrent que la vitesse des voitures de police à ce moment-là n’était que de 40 km/h et qu’aucun équipement d’urgence n’était activé.

Alors qu’ils s’approchaient de l’adresse sur le chemin où habitait l’appelante au 9-1-1, ils ont de nouveau vu la même camionnette de couleur noire sortir de l’entrée et se diriger directement vers leurs véhicules de police. L’AI était le premier dans la file dans la voie est, et l’AT no 1 a placé son véhicule dans la voie ouest, afin de bloquer la chaussée et d’empêcher la camionnette de continuer.

La camionnette a alors continué d’accélérer vers les véhicules de police, et l’AI et l’AT no 1 ont tous deux réactivé leurs feux d’urgence. Au même moment, le répartiteur a informé les agents que la camionnette qu’ils avaient poursuivie avait été volée de l’appelante au 9-1-1, qui avait également été victime d’une agression sexuelle perpétrée par la personne qui était au volant de la camionnette.

L’AT no 2 s’est placé derrière le VUS de l’AT no 1 du côté gauche pour bloquer l’accotement nord du chemin et empêcher la camionnette de contourner le véhicule de l’AT no 1. La camionnette s’est alors dirigée à la gauche du véhicule de l’AT no 1 sur l’accotement nord, et a accéléré vers la voiture de patrouille de l’AT no 2. L’AT no 2 s’est préparé à l’impact, et la camionnette a heurté de front sa voiture de patrouille, après quoi la camionnette a contourné l’AT no 2 et s’est dirigée vers l’AT no 3, qui se trouvait directement derrière l’AT no 2. Dans la vidéo filmée par la caméra dans son véhicule, on entend l’AT no 1 dire au répartiteur que la camionnette venait de percuter l’une des voitures de patrouille du SPSF.

L’AT no 3 a alors braqué rapidement vers la droite pour essayer de s’ôter du chemin, puisqu’il voyait la camionnette venir vers lui et qu’il pensait qu’elle allait le heurter de front.

L’AT no 3 a tourné son volant vers la gauche et a dirigé son véhicule de police vers le panneau latéral arrière de la camionnette pour tenter de lui rentrer dedans et de la forcer à s’arrêter. La voiture de patrouille de l’AT no 3 a percuté la roue et le pneu arrière gauche de la camionnette, ce qui a causé le déploiement du sac gonflable du volant de l’AT no 3 et a neutralisé sa voiture de patrouille. L’AT no 3 a indiqué que sa vitesse était de 15 à 20 km/h tout au plus lorsqu’il a heurté le côté de la camionnette et il a affirmé qu’il avait agi ainsi pour éviter une autre poursuite et afin de protéger le public et d’empêcher que la camionnette retourne sur l’autoroute 15, où elle aurait pu tuer quelqu’un.

Lorsqu’il a percuté la camionnette, celle-ci a tourné sur elle-même et a continué son chemin derrière son véhicule de police puis vers l’autoroute. L’AT no 2 a immédiatement fait demi-tour et a vu que la camionnette reculait de l’endroit où elle était entrée en collision avec la voiture de patrouille de l’AT no 3. L’AT no 2 a conduit sa voiture de patrouille contre la portière de la camionnette du côté du conducteur pour essayer de l’arrêter. L’AT no 2 a indiqué qu’il craignait que le conducteur de la camionnette essaye de coincer l’AT no 3 dans la portière ouverte du côté du conducteur s’il tentait de sortir de sa voiture de patrouille, et il craignait aussi que la camionnette réussisse à retourner sur l’autoroute 15, où elle aurait posé un risque pour les autres automobilistes.

La vidéo provenant de la caméra dans son véhicule confirme qu’à 22 h 54, l’AT no 1 a fait marche arrière avec son véhicule pour suivre la camionnette et qu’il s’était placé derrière la voiture de patrouille de l’AT no 2, dont les feux d’urgence étaient activés.

La camionnette, bien qu’elle ait maintenant été impliquée dans trois collisions automobiles, a poursuivi son chemin et a accéléré vers l’ouest sur le chemin où habitait l’appelante au 9‐1-1, puis vers le nord sur l’autoroute 15. L’AT no 2 se trouvait directement derrière la camionnette et a heurté le côté passager arrière avec le coin avant du côté du conducteur de sa voiture de patrouille, en espérant faire perdre le contrôle au conducteur de la camionnette. Sa tentative a toutefois échoué et a fait tomber la barre de protection avant de sa voiture de patrouille et a gravement endommagé son véhicule et l’a forcé à se mettre sur l’accotement.

L’AT no 1, au volant de son VUS de la police, conduisait derrière l’AT no 2, tandis que l’AI était plus loin derrière. L’AI a précisé qu’il est encore plus loin derrière lorsqu’il est entré sur l’autoroute 15. L’AI estimait que la vitesse de la camionnette était d’environ 160 km/h, tandis que son propre véhicule roulait à 130 km/h. Les données du GPS et du système LAV du VUS de l’AT no 1 confirment qu’il se déplaçait à 120 km/h lorsqu’il est passé à gauche du véhicule de police de l’AT no 2.

Puis, pour la troisième fois, l’AI a informé le Centre des communications de la PPO qu’il mettait fin à la poursuite, et il lui a fourni de l’information sur les conditions routières et la circulation. Il avait vu l’AT no 2 se ranger sur l’accotement et puis l’AT no 1 se placer à côté de l’AT no 2 pour s’assurer qu’il allait bien. Ensuite, l’AT no 1 a continué vers le nord dans la direction de la camionnette, et l’AI l’a suivi avec son équipement d’urgence activé.

L’AI a informé le répartiteur de la vitesse de la camionnette et que la poursuite avait été arrêtée.

L’AT no1 a continué vers le nord sur l’autoroute 15 en respectant la limite de vitesse pendant un autre kilomètre lorsqu’il a vu des phares se déplacer dans les buissons, ce qui lui a fait comprendre que le véhicule avait quitté la chaussée et s’était rendu dans les buissons.

La vidéo de la caméra dans le véhicule de l’AT no 1 confirme que celui-ci s’était engagé dans le long virage vers la droite juste au nord du détachement de Rideau Lakes de la PPO à 22 h 56, quand son véhicule de police a ralenti. La vidéo montre des grosses traces de pneus de couleur noire sur l’asphalte, commençant dans la voie nord et traversant la ligne jaune au centre et puis la voie sud et l’accotement en gravier vers l’ouest pour finir au bord d’un profond fossé. Puis, on voit un faisceau lumineux venant du véhicule de police de l’AT no 1 illuminer le fossé et l’accotement en gravier. On voit des phares dans le champ à l’ouest du fossé et le véhicule de l’AT no 1 s’arrêter sur l’accotement.

L’AT no 1 s’est approché de la camionnette accidentée et a vu que le plaignant était couché sur le dos et avait une coupure à la tête, et l’AT no 1 a immédiatement demandé qu’on fasse venir une ambulance.

L’AI, qui se trouvait derrière l’AT no 1, a vu un gros nuage de poussière devant lui, sur le côté ouest de la route, et a constaté que l’AT no 1 s’était rangé sur le côté. L’AI s’est mis derrière l’AT no 1 et a vu que la camionnette de couleur noire qui, apparemment, avait fait un tonneau, était couchée sur son côté gauche dans le fossé. L’AT no 1 était déjà sorti de son véhicule et criait des ordres au plaignant lorsque l’AI est arrivé.

L’AI est sorti de son véhicule et a procédé à l’arrestation du plaignant, qui avait été éjecté de la camionnette.

L’AT no 2, après avoir entendu le message envoyé par l’AT no 1 par la radio selon lequel la camionnette s’était écrasée, s’est également rendu sur les lieux de la collision et y est arrivé juste après l’AI. Le plaignant a été transporté à l’hôpital, où il a été évalué et soigné.

Sur la foi de cette preuve, il est clair que la police, lorsqu’elle avait observé initialement le plaignant dans la camionnette volée, répondait à un appel de détresse au 9-1-1 et tentait d’empêcher un coupable potentiel de fuir les lieux. Quand le plaignant a conduit la camionnette directement vers les véhicules de police et puis autour de ceux-ci, malgré le fait qu’il aurait pu quitter les lieux en se rendant dans la direction opposée sans jamais entrer en contact avec la police, il est clair également que le plaignant avait l’intention d’inciter la police à jouer à un quelconque jeu du chat et de la souris.

Tant en raison de l’appel au 9-1-1 qu’en raison du style de conduite du plaignant, la police avait déjà à ce moment-là des motifs raisonnables d’immobiliser la camionnette et d’enquêter sur son conducteur. Ainsi, lorsqu’ils ont initialement pris en chasse le plaignant, poursuivant à grande vitesse un suspect possible dans le cadre d’une enquête criminelle, ils agissaient légalement et dans les limites de leurs fonctions. De plus, vu la manière de conduire du plaignant, il était évident qu’il constituait une menace réelle et imminente, non seulement pour les agents de police en cause, mais aussi pour les autres automobilistes, et il incombait à la police d’arrêter le plaignant et d’essayer d’éliminer la menace qu’il posait.

Au cours de l’interaction de la police avec le plaignant à bord de sa camionnette, les agents ont eu recours à de nombreuses stratégies pour essayer de l’immobiliser, consistant notamment à bloquer son véhicule avec leurs véhicules, à heurter violemment son véhicule, à demander que des bandes à clous soient placées sur la chaussée et à entamer trois poursuites véhiculaires, qui étaient toutes de courte durée et qui ont été interrompues pratiquement tout de suite, la priorité étant accordée à la sécurité du public plutôt qu’au besoin d’arrêter le plaignant.

Il convient également de souligner que chaque fois que la police mettait fin à une poursuite du véhicule, le plaignant, délibérément et avec détermination, revenait à l’endroit où se trouvaient les véhicules de police et continuait de conduire dangereusement, manifestement dans l’espoir d’amener la police à reprendre la poursuite. Je fais remarquer toutefois que chaque fois, l’AI et l’AT no 1 se sont entièrement conformés au Règlement de l’Ontario 266/10, pris en application de la Loi sur les services policiers de l’Ontario, intitulée Poursuites visant l’appréhension de suspects, en ce sens qu’ils ont informé leurs centres de communications respectifs de ce qui se passait et étaient constamment en contact avec eux, qu’ils ont continuellement fourni de l’information à jour quant à l’endroit où se trouvaient la camionnette et leurs propres véhicules de police et la vitesse à laquelle ces différents véhicules se déplaçaient, qu’ils ont eu recours à des solutions de rechange autres que des poursuites pour essayer d’immobiliser le plaignant et qu’ils ont constamment réévalué la décision d’amorcer une poursuite et le bien-fondé de sa continuation, si le danger auquel elle risquait d’exposer le public l’emportait sur le risque pour le public si le conducteur à bord du véhicule automobile en fuite n’était pas appréhendé immédiatement.

Bien que j’aie des motifs raisonnables de croire que tous les agents de police en cause se sont entièrement conformés à la Politique sur les poursuites visant l’appréhension de suspects, conformément à la Loi sur les services policiers de l’Ontario, il reste à déterminer, selon ces faits, s’il y a des motifs raisonnables de croire que l’un ou l’autre des agents de police impliqués dans la poursuite du plaignant a commis une infraction criminelle, et plus particulièrement, si la conduite est devenue dangereuse et, par conséquent, était en contravention du paragraphe 249(1) du Code criminel et a ainsi causé des lésions corporelles contraires au paragraphe 249(3) ou s’il s’agissait d’une négligence criminelle contraire à l’article 221 du Code criminel et a ainsi causé des lésions corporelles.

La décision de la Cour suprême du Canada dans R. c. Beatty, [2008] 1 R.C.S. 49, nous dit que, pour que l’article 249 puisse être invoqué, il faut établir que la personne conduisait « d’une façon dangereuse pour le public, eu égard à toutes les circonstances, y compris la nature et l’état du lieu, l’utilisation qui en est faite ainsi que l’intensité de la circulation à ce moment ou raisonnablement prévisible dans ce lieu » et que cette façon de conduire constituait « un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans la même situation que l’accusé »; dans le cas de l’infraction visée par l’article 221, il faut qu’il y ait [traduction] « un écart marqué et important par rapport à la norme de diligence que respecterait un conducteur raisonnable dans les circonstances » où l’accusé [traduction] « a manifesté un mépris téméraire pour la vie et la sécurité d’autrui » (R. c. Sharp (1984), 12 C.C.C. (3d) 428 (C.A. de l’Ont.)).

Après avoir examiné l’ensemble de la preuve, bien qu’il soit clair que les agents se déplaçaient parfois à des vitesses supérieures à la limite de vitesse affichée, j’accepte que les prises en chasse du plaignant étaient toutes de courte durée et qu’elles se sont terminées presque immédiatement, que la vitesse des véhicules de police était bien inférieure à celle du plaignant, que les routes étaient en bon état et sèches et que la circulation était légère.

Je constate, par ailleurs, que les données des GPS/systèmes LAV et les séquences vidéo filmées par la caméra dans l’un des véhicules de police a confirmé que lorsque les agents se rapprochaient de véhicules civils, ils ont réduit leur vitesse et ont activé leur équipement d’urgence afin d’alerter les conducteurs, qui se sont alors mis sur le côté de la route pour permettre aux véhicules de police de passer et lorsque la vitesse de la camionnette a continué d’augmenter ou était conduite de façon plus imprévisible et plus dangereuse, ils ont mis fin aux poursuites plutôt que de continuer et de peut-être causer un danger dans la collectivité. Par conséquent, je conclus qu’il n’y a aucune preuve que la conduite automobile de l’un ou l’autre des agents de police a créé un danger pour les autres utilisateurs de la chaussée ou qu’ils ont nui à la circulation.

J’accepte également que, bien que le style de conduite du plaignant constituait un danger immédiat et considérable pour les autres personnes, il semble que cette conduite dangereuse n’ait pas été exacerbée par la police, mais qu’au lieu de cela, chaque fois que la police mettait fin à une poursuite, le plaignant la provoquait délibérément en conduisant vers les agents à des vitesses excessives afin de les forcer à le poursuivre à nouveau.

Il est clair également, non seulement en raison de la vitesse du véhicule de police de l’AT no 1 juste avant son arrivée sur les lieux de la collision, mais également parce qu’il avait désactivé ses feux d’urgence et sa sirène, et parce qu’il avait informé le répartiteur qu’il avait mis fin à la poursuite, qu’il ne poursuivait plus la camionnette au moment où le plaignant en a perdu le contrôle et s’est écrasé.

En outre, la vidéo provenant de la caméra dans le véhicule de police de l’AT no 1 prouve qu’il était le premier à arriver sur les lieux de l’accident et qu’il n’avait pas vu la camionnette quitter la chaussée et s’écraser. Par conséquent, étant donné que l’AT no 1 était le premier à arriver sur les lieux et qu’il était seulement arrivé après la collision, il est également évident que ni l’AI ni l’AT no 2 n’aurait pu causer la perte de contrôle de la camionnette par le plaignant, puisque ces deux agents s’étaient déjà rangés sur le côté de la route plus tôt. L’AT no 2 s’y était rangé quand sa voiture avait fait défaut, et l’AI s’y était range et avait mis fin à la poursuite par souci pour la sécurité publique.

En me basant sur l’ensemble de la preuve qui m’a été présenté, je ne peux trouver aucun lien entre les actions de la police, qui tentait d’arrêter le plaignant, et l’accident d’un seul véhicule qui s’est produit. L’accident a clairement été causé par la vitesse excessive à laquelle roulait le plaignant, alors qu’il tentait de négocier une courbe dans la chaussée, ce qu’il a fait seulement après que les agents avaient déjà mis fin à la poursuite et, dans le cas de l’AI et de l’AT no 2, s’étaient rangés au bord de la route, et dans le cas de l’AT no 1, après qu’il avait désactivé son équipement d’urgence et avait fortement décéléré, ayant ainsi perdu de vue le plaignant et la camionnette.

Dans cette affaire, il est clair que le plaignant a décidé de conduire d’une manière qui causait un danger pour les autres et qu’il ne se souciait aucunement du risque de blessure ou de perte de vie auxquels il s’exposait et exposait les autres. Par ailleurs, pour ce motif, n’ayant trouvé aucun lien de causalité entre la conduite des trois véhicules de police et la collision impliquant uniquement la camionnette, je ne peux conclure qu’il y avait un lien entre les actions de la police et les blessures subies par le plaignant.

Bien qu’il soit malheureux que la police n’ait pas été en mesure d’arrêter le plaignant avant qu’il n’écrase son véhicule, compte tenu de l’ensemble de la preuve, j’accepte que tous les agents de police qui ont tenté d’immobiliser le plaignant aient fait de leur mieux dans une situation dynamique qui évoluait très rapidement, sans avoir beaucoup de temps pour réfléchir à des stratégies. Malheureusement, leurs efforts n’ont pas suffi pour arrêter le plaignant.

Me fondant sur ces preuves, je conclus que la façon de conduire des agents de police ayant participé aux poursuites et aux tentatives d’immobiliser le plaignant et d’enquêter sur lui ne constituaient pas « un écart marqué par rapport à la norme » et encore moins « un écart marqué et important de la norme » et il n’y a pas de preuve qu’il y avait un lien causal entre les actions des agents participant aux poursuites et la collision automobile qui était à l’origine des blessures du plaignant.

Il ressort clairement de l’ensemble de la preuve que le plaignant avait l’intention de jouer un jeu dangereux avec la police et qu’il était à lui seul responsable de l’accident qui a suivi et des blessures qui en ont résulté. Dans cette affaire, il est clair que, malgré le désir du plaignant d’inciter la police à entreprendre plusieurs poursuites dangereuses, les agents ont fait preuve de sagesse et ont mis fin à chaque poursuite avant qu’elle se termine par une catastrophe, et chaque agent a constamment réévalué la situation et a agi dans le l’intérêt supérieur de la sécurité publique.

Par conséquent, je conclus qu’il n’y a aucune preuve sur laquelle je peux me fonder pour en arriver à des motifs raisonnables de croire qu’une infraction criminelle a été commise par l’un ou l’autre des agents de police dans leurs efforts d’arrêter le plaignant, de sorte qu’il n’y a aucune raison de porter des accusations criminelles.

Date : 28 juin 2018

Original signé par

Tony Loparco
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

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