Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 23-OVI-348

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par une femme de 58 ans (la « plaignante »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 26 août 2023, à 3 h 53 du matin, le Service de police de Hamilton (SPH) a contacté l’UES et communiqué les renseignements suivants.
Le 25 août 2023, à 23 h 48, l’AI conduisait dans le secteur de l’avenue Birch et de la rue Burlington, à Hamilton, lorsqu’il a vu un véhicule s’arrêter à un feu rouge à une intersection. Lorsque le feu est passé au vert, le véhicule n’a pas bougé. L’AI a activé ses gyrophares et le véhicule s’est éloigné à une vitesse de 80 à 90 km/h. Le véhicule a viré à droite sur la rue Barton Est, puis a effectué un autre virage rapide à droite sur l’avenue Fullerton. Une fois sur l’avenue Fullerton, l’AI a vu une femme tomber. Il s’est arrêté pour lui venir en aide. La femme – la plaignante – s’est identifiée. Elle a dit à l’AI qu’elle avait été heurtée par le véhicule qu’il poursuivait. Les services paramédicaux ont été appelés. La plaignante a été conduite à l’hôpital où on lui a diagnostiqué une fracture d’un pied.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 26 août 2023 à 13 h 06

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 28 août 2023 à 16 h 02

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 0

Personne concernée (la « plaignante ») :

Femme de 58 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

La plaignante a participé à une entrevue le 29 août 2023.


Témoins civils (TC)

TC A participé à une entrevue

Le témoin civil a participé à une entrevue le 30 août 2023.

Agent impliqué

AI A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées

L’agent impliqué a participé à une entrevue le 28 septembre 2023.


Éléments de preuve

Les lieux

Les événements en question se sont produits sur un tronçon de route qui commençait sur la rue Burlington Est, à l’est de l’avenue Birch, continuait vers le sud sur l’avenue Birch, puis vers l’ouest sur la rue Barton Est et enfin vers le nord sur une courte distance sur l’avenue Fullerton.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [1]


Enregistrements des communications de la police

Au début de l’enregistrement, l’AI signale une berline bleue qui a ignoré son instruction de s’arrêter. Il précise qu’il se trouve à l’intersection de la rue Barton Est et de l’avenue Birch. L’AI ajoute que le véhicule a heurté une femme [la plaignante] qui, sous le coup, est tombée à la renverse sur la chaussée. Le véhicule a tourné sur l’avenue Fullerton à vive allure et a continué sans s’arrêter après avoir heurté la plaignante. L’AI demande une ambulance.
 

Vidéo du 601 rue Barton Est

Le 6 septembre 2023, l’UES a reçu une vidéo du 601 rue Barton Est, à Hamilton.

Le 25 août 2023, à 23 h 47 min 58 s, on peut voir une berline à quatre portes qui se dirige vers le sud sur l’avenue Birch, avec ses feux de freinage allumés.
 
Vers 23 h 48 min 1 s, un véhicule portant les inscriptions du service de police, ses gyrophares allumés, entre dans le champ de la caméra. Il se dirige aussi vers le sud sur l’avenue Birch et ses feux de freinage sont allumés.

À 23 h 48 min 2 s, la berline à quatre portes tourne lentement sur la rue Barton Est et sort du champ de vision de la caméra.
 
À 23 h 48 min 5 s, le véhicule de police suit la berline et tourne à son tour lentement sur la rue Baron Est, ses gyrophares toujours allumés.

Aucun autre véhicule n’est visible immédiatement devant ou derrière la berline et le véhicule de police. On ne voit pas de feux ou autres moyens de contrôle de la circulation à l’intersection de l’avenue Birch et de la rue Barton Est sur la vidéo.

Données du système de positionnement global (GPS) du véhicule de police de l’AI

Les données GPS commencent à 23 h 45 min 8 s, au 422, rue Burlington Est, et se terminent à 23 h 58 min 31 s, au 23, avenue Fullerton. La distance totale parcourue est de 2,3 kilomètres. [2]

À 23 h 45, le véhicule de police roule sur la rue Burlington Est à une vitesse comprise entre 39 et 55 km/h.

À 23 h 47 min 20 s, le véhicule de police vire vers le sud sur l’avenue Birch. Il accélère et atteint une vitesse maximale de 97 km/h à 23 h 47 min 39 s.

À 23 h 47 min 49 s, le véhicule de police passe sous le pont ferroviaire de l’avenue Birch [où l’AI a déclaré avoir activé ses gyrophares]. Au dernier point enregistré sur l’avenue Birch, le véhicule roule à 69 km/h.
 
À 23 h 48 min 13 s, l’AI est sur l’avenue Fullerton. Sa vitesse est de 23 km/h.
 
À 23 h 48 min 31 s, le véhicule de police de l’AI est arrêté.

Éléments obtenus auprès du service de police

Sur demande, le SPH a remis à l’UES les éléments et documents suivants entre le 31 août et le 28 septembre 2023 :
  • Enregistrement des communications;
  • Rapport de répartition assistée par ordinateur;
  • Rapport général d’incident;
  • Rapport de collision de véhicule automobile;
  • Données GPS du véhicule de police de l’AI;
  • Déclaration de témoin au SPH – plaignante;
  • Déclaration de témoin au SPTTC;
  • Dossier de formation de l’AI;
  • Notes de l’AI;
  • Politique – poursuite en vue de l’appréhension d’un suspect.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a obtenu les éléments suivants auprès d’autres sources le 6 septembre 2023 :
  • Vidéo du 601 rue Barton Est;
  • Dossier médical de la plaignante à l’Hôpital général de Hamilton.

Description de l’incident

La séquence d’événements suivante découle des éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment des entrevues avec la plaignante et avec l’AI ainsi que d’une vidéo qui montre certaines parties de l’incident.

Dans la soirée du 25 août 2023, l’AI, au volant d’un véhicule portant les inscriptions du service de police, roulait sur la rue Burlington Est lorsqu’une berline à quatre portes a attiré son attention. Le véhicule venait de continuer tout droit dans une voie de virage. L’agent a décidé de l’arrêter pour une infraction au Code de la route.

L’AI a suivi la berline qui a viré vers le sud sur l’avenue Birch et a remarqué qu’elle accélérait au sud de la rue Brant. L’agent a accéléré à son tour, a rattrapé la berline à la hauteur d’un pont ferroviaire et a activé ses gyrophares (mais pas sa sirène). Au lieu de s’arrêter, la berline a continué vers le sud sur plusieurs centaines de mètres avant de tourner à droite sur la rue Barton Est, puis à droite sur l’avenue Fullerton. Alors qu’il tournait pour suivre la berline sur l’avenue Fullerton, l’AI a remarqué qu’une femme était tombée sur la chaussée. Il s’est arrêté pour lui porter secours tandis que la berline poursuivait sa route vers le nord et hors de vue.

La femme était la plaignante. Elle traversait la rue lorsque la berline a roulé sur son pied droit. L’AI est resté avec la plaignante jusqu’à l’arrivée des ambulanciers paramédicaux. La plaignante a été conduite à l’hôpital où on lui a diagnostiqué une fracture du pied.

Dispositions législatives pertinentes

Article 320.13, Code criminel – Conduite causant des lésions corporelles

320.13 (1) Commet une infraction quiconque conduit un moyen de transport  d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances.

(2) Commet une infraction quiconque conduit un moyen de transport d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, et cause ainsi des lésions corporelles à une autre personne.


 

Analyse et décision du directeur

La plaignante a été grièvement blessée lorsqu’un véhicule a roulé sur son pied droit le 25 août 2023. Comme ce véhicule était poursuivi par un agent du SPH à ce moment-là, l’UES a été avisée et a ouvert une enquête. L’agent du SPH a été désigné en tant qu’agent impliqué (AI). L’enquête est maintenant terminée. Après avoir évalué les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI ait commis une infraction criminelle en lien avec la blessure de la plaignante.

L’infraction à prendre en considération est la conduite dangereuse causant des lésions corporelles, en contravention du paragraphe 320.13 (2) du Code criminel. S’agissant d’une infraction de négligence criminelle, un simple manque de prudence ne suffira pas à engager la responsabilité. En effet, cette infraction repose, en partie, sur une conduite qui constitue un écart marqué par rapport à la norme de prudence dont une personne raisonnable aurait fait preuve dans les circonstances. En l’espèce, il faut donc déterminer si l’AI, dans la manière dont il a conduit son véhicule de police, a causé la blessure de la plaignante, ou y a contribué, et a fait preuve d’un manque de prudence suffisamment flagrant pour justifier une sanction pénale. À mon avis, ce n’est pas le cas.

Je suis convaincu que l’AI exerçait ses fonctions légales quand il a décidé d’arrêter un véhicule qu’il venait de voir commettre une infraction au Code de la route.

Je suis également convaincu que l’AI s’est comporté avec la prudence et le respect nécessaires pour la sécurité publique tout au long de sa brève intervention en lien avec la berline ¬– moins d’une minute sur environ 500 mètres. L’agent a atteint une vitesse maximale d’environ 100 km/h sur l’avenue Birch, mais a roulé à cette vitesse très brièvement et sans sembler mettre directement en danger des véhicules tiers. De plus, selon le dossier de preuve, l’AI a activé ses gyrophares dès le début de la poursuite, alertant ainsi de sa présence les véhicules à proximité. Enfin, il convient de noter que la poursuite a ralenti vers la fin. Par conséquent, même si c’est peut-être la présence du véhicule de police qui a incité le conducteur de la berline à s’éloigner rapidement, la preuve est loin de suggérer que l’AI ait transgressé les limites de prudence prescrites par le droit criminel.

Pour les raisons exposées ci-dessus, il n’y a aucun motif de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.


Date : 21 décembre 2023

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les éléments de preuve suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties pertinentes des enregistrements sont résumées ci-après. [Retour au texte]
  • 2) D’après Google Maps. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.