Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 23-PVI-296

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur les blessures graves subies par un homme de 59 ans (plaignant).

L’enquête

Notification de l’UES [1]

À 9 h 36 le 28 juillet 2023, la Police provinciale de l’Ontario, soit son détachement de Kawartha Lakes, a avisé l’UES que le plaignant avait été blessé.

D’après la Police provinciale de l’Ontario, à 2 h 30 le 28 juillet 2023, l’agent impliqué (AI) conduisait le plaignant au détachement de Kawartha Lakes de la Police provinciale à partir du poste du Service de police de Kawartha Lakes après avoir fait effectuer une évaluation d’expert en reconnaissance de drogues (ERD). L’AI a perdu la maîtrise de son véhicule à l’intersection entre Greenfield Road et la rue Harvest à Kawartha Lakes et a fait une collision mettant en cause une seule voiture. Le plaignant a été conduit à l’Hôpital Ross Memorial, à Lindsey, où plusieurs fractures au visage ont été diagnostiquées. Il a aussi eu des agrafes à la tête, huit à l’avant et quinze à l’arrière.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : Le 28 juillet 2023, à 10 h 13

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : Le 28 juillet 2023, à 12 h 30

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Nombre de spécialistes de la reconstitution des collisions assignés : 1

Personne concernée (« plaignant ») :

Homme de 59 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés.

Le plaignant a participé à une entrevue le 29 juillet 2023.

Agent impliqué

AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

Éléments de preuve

Les lieux

L’incident a débuté sur un tronçon de Greenfield Road pendant que le véhicule roulait en direction nord et approchait de l’intersection entre la rue Harvest, à Lindsey, et il s’est poursuivi jusqu’à un point à 38 mètres au nord de l’intersection.

Greenfield Road esit une route à deux voies avec une limite de vitesse de 50 km/h. À l’intersection avec la rue Harvest, Greenfield Road décrit une courbe à 90 degrés vers la droite.

Le 28 juillet 2023, un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES s’est rendu sur place et a pris des photos. Il n’y avait pas d’éléments de preuve matériels à recueillir.

Une reconstitution de la collision a été effectuée par l’UES.


Figure 1 – Path of the cruiser into the grass area
Figure 1 – Parcours suivi par la voiture de police jusqu’au gazon

Figure 2 – Path of the cruiser in the grass area
Figure 2 – Parcours suivi par la voiture de police sur le gazon

Figure 3 – The SO’s cruiser
Figure 3 – La voiture de police de l’AI

Éléments de preuves médicolégaux

Données du GPS de la voiture de police de l’AI

La Police provinciale a fourni aux enquêteurs de l’UES les données de GPS de la voiture de police en cause. Elles ont à la fois été examinées par le spécialiste de la reconstitution des collisions de l’UES et incluses dans le présent rapport [2].

Témoignage d’expert

Rapport de reconstitution de collision de l’UES

Le 28 juillet 2023, le spécialiste de la reconstitution des collisions de l’UES s’est rendu sur les lieux de la collision et a procédé à une enquête, qui a abouti aux conclusions ci-dessous.

On a trouvé des traces de pneu sur l’accotement en gravier du côté ouest et une paire de traces de pneu sur l’asphalte, juste au sud du bord du gazon. Ces traces se poursuivaient sur le gazon jusqu’à deux grosses buttes dans le champ. La deuxième butte correspondait à l’endroit où le véhicule avait fini par s’immobiliser.

Figure 4 – Aerial photograph of the area of the collision
Figure 4 – Photo aérienne du lieu de la collision


Figure 5 – The vehicle’s path towards and into the grass field
Figure 5 – Parcours suivi par la voiture jusqu’au champ, puis sur le gazon

La voiture de police était munie d’un enregistreur de données routières, qui contenait les données sur les événements ayant précédé l’impact. Celles-ci indiquaient que 6 secondes avant l’impact, la voiture de police roulait à environ 90 km/h. Elle allait en direction nord sur Greenfield Road et se trouvait à 75 mètres de l’intersection avec la rue Harvest et à approximativement 50 mètres du début de la courbe vers la droite. Puis, à 4 secondes avant l’impact, la voiture de police roulait à environ 90 km/h et était à 25 mètres de l’intersection à peu près. Elle se trouvait dans la courbe vers la droite de la route. Pourtant, le volant n’a pas été tourné par le conducteur. À 3 secondes avant l’impact, la voiture de police roulait à environ 90 km/h et se trouvait dans l’intersection avec la rue Harvest, à environ 10 mètres du bord du gazon, du côté nord de la courbe de la route. Les pneus gauches de la voiture venaient de passer sur l’accotement de gravier du côté ouest de Greenfield Road. À 2 secondes avant l’impact, la voiture de police était sortie de la route et avait pénétré dans le champ sur une distance d’environ 10 mètres. Elle roulait alors à environ 72 km/h, et le conducteur a enfoncé vigoureusement le frein en tournant légèrement le volant vers la gauche. À 1 seconde avant l’impact, la voiture de police a cogné le sol à la première butte. Elle avançait alors à environ 55 km/h. Au moment de l’impact, sa vitesse a chuté à approximativement 26 km/h et elle se trouvait à environ 40 mètres de l’entrée du champ.

Auparavant, le conducteur roulait en direction nord sur Greenfield Road à une vitesse constante d’à peu près 90 km/h. Le régulateur de vitesse était activé et réglé à une accélération de 22 % (soit autour de 90 km/h). Il a raté la courbe vers la droite pendant qu’il continuait vers le nord. Lorsque les pneus gauches de la voiture sont passés sur le gravier de l’accotement du côté ouest à l’intersection avec la rue Harvest, le conducteur a enfoncé le frein vigoureusement, puis le véhicule a continué d’avancer vers le nord, tandis que le dessous du véhicule est entré en contact avec le sol à deux reprises avant l’arrêt complet.

Les mouvements et les réactions du conducteur portent à croire qu’il s’est endormi au volant et qu’il s’est réveillé lorsque les pneus gauches sont entrés en contact avec le gravier de l’accotement.

Rapport de reconstitution de la collision établi par la Police provinciale

La Police provinciale a remis aux enquêteurs de l’UES le rapport de reconstitution de la collision établi par ses agents.

Les enquêteurs de l’UES ont examiné ce rapport et ont conclu que le contenu était semblable à celui du rapport de reconstitution de la collision établi par le spécialiste de l’UES.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [3]

Enregistrements de la caméra interne de la voiture de police[4]

Le 1er août 2023, la Police provinciale a remis à l’UES les enregistrements de la caméra interne de la voiture de police de l’AI. Il y avait deux enregistrements vidéo, l’un montrant le devant de la voiture et la route, et l’autre, la banquette arrière du véhicule.

À 4 h 6 min 39 s le 28 juillet 2023, l’enregistrement débute par une vue sur la route de comté et sur le plaignant sur la banquette arrière.

À 4 h 15 min 17 s, l’AI a indiqué au plaignant qu’il était en état d’arrestation pour conduite avec facultés affaiblies et possession de substances désignées.

À 4 h 23 min 20 s, l’AI est parti en direction du poste du détachement de Peterborough, où il est arrivé à 5 h 5 min 11 s. Les deux hommes sont ensuite entrés dans le poste.

À 6 h 6 min 40 s, l’AI et le plaignant sont retournés dans la voiture de police. Le plaignant ne portait plus de menottes et il n’a pas bouclé sa ceinture de sécurité.

À 6 h 8 min 41 s, l’AI est parti du poste de police. Pendant qu’il roulait, l’AI a eu une conversation téléphonique concernant le résultat négatif de l’ERD et les accusations de possession. L’appel a pris fin à 6 h 21 min 30 s. À quelques reprises après cet appel, le véhicule a empiété sur la mauvaise voie de la route. L’AI a bâillé quelques fois.

À 6 h 41 min 14 s, l’AI a tourné à gauche sur Greenfield Road, qu’il a empruntée en direction nord. Le plaignant s’endormait et se réveillait par intermittence sur la banquette arrière.

À 6 h 41 min 46 s, la voiture est arrivée à une courbe prononcée vers la droite, et la voiture de l’AI a continué tout droit pour entrer dans un champ au milieu de la courbe. Elle a traversé des buissons pour finir par s’immobiliser. Le plaignant a tendu les bras vers les sièges avant. Une secousse l’a fait lever de son siège et l’a poussé vers l’avant et il s’est cogné la tête contre la paroi de plexiglas et les sièges avant, ce qui a eu comme effet de le faire retomber vers l’arrière, puis de le projeter de nouveau vers l’avant, où il s’est encore une fois cogné le visage sur le plexiglas et les sièges avant. Il est retombé vers l’arrière en se cognant le visage sur la banquette arrière. Il a ensuite été projeté en l’air une autre fois et est retombé le visage sur la banquette. L’AI lui a demandé : [Traduction] « Ça va? » Le plaignant n’a pas répondu et a émis un grognement guttural qui a duré plusieurs minutes. L’AI a fait un appel téléphonique. Il a dit : [Traduction] « (inaudible) je viens de faire une collision. Je n’étais pas bien concentré. Je suis littéralement sur Greenfield Road. Ouais, le gars va en avoir besoin. Il fait des sons. Est-ce que ça va, Monsieur? Oh! Il s’est cogné fort à la tête. Puis, l’AI a poursuivi en disant : [Traduction] Oh! mon Dieu! Ouais, je suis sorti de la route… Je viens d’avoir un accident et je crois que j’ai peut être, j’ai manqué de concentration. J’ai perdu mes lunettes. Il y a un prisonnier avec moi. » Le plaignant s’est assis et son visage était couvert de sang. L’AI a dit à un agent : [Traduction] « Je peux vous dire tout de suite que je n’étais pas au téléphone ni rien… (inaudible). » Un agent a prodigué les premiers soins au plaignant.

À 6 h 50 min 43 s, on a fait sortir le plaignant de la voiture de police. Il s’est rendu à l’arrière de la voiture de police sans aide.

À 6 h 51 min 5 s, l’AI a dit ceci : [Traduction] « C’est ma faute. Je suis désolé. »

Documents obtenus du service de police

L’UES a examiné les éléments et documents suivants que lui a remis, à sa demande, la Police provinciale de l’Ontario entre le 31 juillet 2023 et le 28 août 2023 :
  • les enregistrements de caméra interne de véhicule;
  • les données du système de répartition assisté par ordinateur;
  • les données tirées du système d’extraction de données pour la voiture de l’AI;
  • les rapports d’incident général;
  • les données du GPS de la voiture de police de l’AI;
  • le rapport de reconstitution de la collision;
  • les renseignements relatifs au remorquage;
  • les notes de l’agent no 1;
  • les notes de l’agent no 2;
  • les notes de l’agent no 3.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a obtenu les documents et éléments suivants d’autres sources entre le 9 et le 29 août 2023 :
  • Les dossiers médicaux du plaignant du Centre Sunnybrook des sciences de la santé et de l’Hôpital Ross Memorial.

Description de l’incident

Le scénario qui suit ressort des éléments de preuve recueillis par l’UES, y compris une entrevue avec le plaignant et les enregistrements vidéo ayant capté des images d’une partie de l’incident. L’AI a refusé de participer à une entrevue de l’UES et de fournir ses notes, comme la loi les y autorise.

Dans la matinée du 28 juillet 2023, le plaignant se trouvait sur la banquette arrière de la voiture conduite par l’AI. L’agent, qui avait arrêté le plaignant pour conduite avec facultés affaiblies et l’avait conduit au détachement de Peterborough de la Police provinciale pour une évaluation d’expert en reconnaissance de drogues, était en train de l’emmener au détachement de Kawartha Lakes de la Police provinciale en raison d’une accusation de possession de drogues. L’AI roulait en direction nord sur Greenfield Road et il se trouvait à 300 mètres du poste de détachement lorsqu’il a perdu la maîtrise de sa voiture. Il avait raté la courbe vers la droite à l’intersection avec la rue Harvest. La voiture a traversé la rue Harvest et a fait une collision dans un champ du côté nord de la route.

Le plaignant n’avait pas bouclé sa ceinture de sécurité. Son corps a subi l’effet de secousses dans le compartiment arrière de la voiture pendant qu’elle roulait sur un terrain bosselé dans un champ avant de s’immobiliser. Une fois le patient à l’hôpital, il a reçu un diagnostic de blessures graves, y compris une fracture de la clavicule et des fractures au visage.

Dispositions législatives pertinentes

Article 320.13, Code criminel – Conduite dangereuse causant des lésions corporelles

320.13 (2) Commet une infraction quiconque conduit un moyen de transport d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, et cause ainsi des lésions corporelles à une autre personne.

Analyse et décision du directeur

Le plaignant a été grièvement blessé dans une collision mettant en cause un seul véhicule à Lindsey le 28 juillet 2023. Il était alors sous garde, assis sur la banquette arrière d’une voiture de police. Le conducteur, soit l’AI, a été désigné comme l’agent impliqué durant l’enquête de l’UES qui a suivi. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation des éléments de preuve, il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que l’AI a commis une infraction criminelle ayant un lien avec la collision et les blessures du plaignant.

La seule infraction potentielle à prendre en considération est celle de conduite dangereuse ayant causé des lésions corporelles interdite par le paragraphe 320.13(2) du Code criminel. Puisque l’infraction relèverait de la négligence criminelle, un simple manque de diligence n’est pas suffisant pour donner lieu à une responsabilité en vertu de cette disposition. Le fait qu’il y ait ou non une infraction dépend, en partie, de l’existence d’une conduite représentant un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans la même situation. Ce qu’il faut déterminer dans ce dossier, c’est si l’AI a fait preuve de négligence dans la manière de conduire sa voiture de police et a ainsi pu causer la collision ou y contribuer et si cela constitue de sa part un manquement grave au point de mériter une sanction criminelle. À mon avis, ce n’est pas le cas.

Même s’il y a des aspects de la manière dont l’AI a conduit qui peuvent mériter d’être examinés de près, je n’ai pas de motifs raisonnables de conclure que l’agent n’a pas respecté les normes de diligence prescrites par le droit criminel. Par exemple, il semblerait que l’AI roulait à bien plus que la limite de vitesse de 50 km/h soit à environ 90 km/h, à l’approche de la rue Harvest, pendant qu’il allait en direction nord sur Greenfield Road. Rien ne l’obligeait à rouler aussi vite. Il semblerait aussi que la voiture de police ait empiété sur la mauvaise voie à quelques reprises pendant qu’il se dirigeait vers le poste du détachement de Kawartha Lakes de la Police provinciale. La cause pouvait fort bien être la fatigue. Il semble en effet que ce soit à cause de la fatigue que l’AI n’a pas réussi à négocier le virage. Les paroles qu’il a prononcées après la collision et les preuves médicolégales indiquant qu’il n’a pas tenté de tourner le volant du véhicule donnent aussi cette impression. Par contre, il n’y a aucun autre problème à signaler dans la conduite de l’AI pendant le trajet jusqu’à destination. Il ne semble pas non plus, compte tenu du peu de véhicules sur la route à cette heure, que d’autres automobilistes aient été mis en danger par la vitesse à laquelle roulait l’agent et par le fait qu’il a brièvement empiété quelques fois sur la mauvaise voie. Bref, la cause immédiate de la collision semble être un manque de concentration momentané. Au vu du dossier, même si la conduite du véhicule par l’AI a laissé à désirer par moments, je n’ai pas la conviction qu’elle se démarquait considérablement de la norme de diligence raisonnable dans les circonstances.

En définitive, il n’y a pas lieu de déposer des accusations dans cette affaire, et le dossier est donc clos.


Date : 24 novembre 2023

Signature électronique


Joseph Martino
Directeur
des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les renseignements contenus dans cette section reflètent les informations reçues par l’UES au moment de la notification et ne reflètent pas nécessairement les conclusions de fait de l’UES à la suite de son enquête. [Retour au texte]
  • 2) Détails dans la section « Témoignage d’expert ». [Retour au texte]
  • 3) Les enregistrements contiennent des renseignements personnels confidentiels qui ne peuvent être divulgués, conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les renseignements utiles pour l’enquête sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]
  • 4) Les heures indiquées dans l’enregistrement de la caméra interne semblent avoir environ quatre heures d’avance par rapport à l’heure réelle. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.