Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 23-PCI-047

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 64 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES [1]

Le 16 février 2023, à 9 h 23, le plaignant a communiqué avec l’UES pour signaler un incident, survenu le 17 octobre 2022, qui impliquait des membres de la Police provinciale de l’Ontario et lui avait causé une blessure permanente à l’œil. À 10 h 12, un responsable de l’UES a rappelé le plaignant qui a fourni les renseignements suivants.

Le 17 octobre 2022, la fille du plaignant a été impliquée dans un incident conjugal avec son conjoint de fait à London, en Ontario. La fille du plaignant était dans un grand magasin et a donné le numéro de téléphone du plaignant à un employé. Mis au courant de la situation, le plaignant a demandé au magasin d’appeler le Service de police de London pour venir en aide à sa fille. Un certain temps s’est écoulé, sans réponse du SPL. Comme il se trouvait à ce moment-là à sa résidence de Wasaga Beach, le plaignant a contacté la Police provinciale via le 9-1-1, et a demandé leur aide pour contacter le SPL. Un peu plus tard, comme le plaignant était toujours sans nouvelles du SPL, il a rappelé la Police provinciale et on lui a dit que le SPL avait environ 200 appels en attente ce jour-là. Le plaignant a passé ses frustrations sur l’opératrice de la Police provinciale et a raccroché. Vers 23 h, deux agents de la Police provinciale sont allés au domicile du plaignant pour enquêter sur la violence verbale subie par l’opératrice du 9-1-1. Le plaignant a dit que sa femme, la TC no 1, avait laissé les agents entrer chez eux et que ces derniers l’avaient confronté au sujet de la façon dont il avait parlé à l’opératrice du 9-1-1. Le plaignant était plus préoccupé par la situation de sa fille à London et a demandé aux agents de partir. Il est allé ouvrir la porte et un des agents l’a attaqué par-derrière. Une lutte s’est ensuivie et le plaignant a été poussé contre le mur, jeté à terre et frappé à plusieurs reprises. Le plaignant a été arrêté et accusé de multiples infractions. Le plaignant a subi de multiples blessures, dont des lésions oculaires permanentes.

Les agents en cause ont été identifiés comme étant l’agent témoin (AT) no 2 et l’agent impliqué (AI) du détachement de Huronia Ouest.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 16 février 2023 à 13 h 47

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 17 février 2023 à 11 h 57

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 0

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 64 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

Le plaignant a participé à une entrevue le 6 mars 2023.

Témoins civils (TC)

TC no 1 A participé à une entrevue
TC no 2 A participé à une entrevue
TC no 3 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à une entrevue entre le 6 mars et le 24 mars 2023.

Agent impliqué (AI)

AI A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées

L’agent impliqué a participé à une entrevue le 7 juin 2023.

Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à une entrevue entre le 3 mars et le 15 mars 2023.

Éléments de preuve

Les lieux

Compte tenu du délai qui s’était écoulé entre l’incident et son signalement, l’UES ne s’est pas rendue sur les lieux à Wasaga Beach. Cette maison unifamiliale a une porte d’entrée à double battant et un petit hall d’entrée, d’environ deux mètres sur deux mètres. Six marches mènent au rez-de-chaussée; à droite du vestibule, six autres marches mènent au sous-sol. À droite et au centre du vestibule, un couloir mène au garage.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [2]

Appels téléphoniques

Le 8 mars 2023, l’UES a reçu une copie des enregistrements des communications pertinentes de la Police provinciale.

Le 17 octobre 2022, vers 22 h 53 min 46 s, le plaignant parle à une téléphoniste du centre d’appels d’urgence de la Police provinciale et demande l’aide de la police à London. L’appel est transféré au centre des communications de la Police provinciale à Orillia. N’ayant pas reçu de réponse du plaignant, une répartitrice tente en vain de le rappeler. La téléphoniste du centre d’appels d’urgence dit que le plaignant a demandé la police.

Vers 22 h 54 min 40 s, la répartitrice du 9-1-1 laisse un message vocal au numéro du plaignant et lui demande de recomposer le 9-1-1 en cas d’urgence. Elle appelle ensuite Bell Canada pour demander des renseignements sur l’abonné. On lui donne les noms de la TC no 1 et du plaignant, ainsi qu’un deuxième numéro où les contacter.

Vers 23 h 00 min 14 s environ, la répartitrice du 9-1-1 compose ce deuxième numéro et reçoit un avis de numéro « hors service ».

Vers 23 h 00 min 41 s, la répartitrice du 9-1-1 rappelle le numéro principal du plaignant et parle avec lui. Le plaignant lui répond en disant [traduction] : « Vous vous foutez de moi ou quoi ? », puis ajoute : « J’ai appelé il y a une putain d’heure, hostie. Allez vous faire foutre. » Quand on lui demande s’il y avait une urgence, le plaignant répond qu’il y avait une urgence une heure plus tôt. La répartitrice du 9-1-1 ajoute qu’ils ont reçu d’autres appels au 9-1-1 et, au bout de quelques secondes, l’appel est déconnecté alors que la répartitrice essaie de continuer de parler avec le plaignant.

Vers 23 h 05 min 14 s, la répartitrice du 9-1-1 rappelle le plaignant pour s’assurer qu’il n’y a pas d’urgence, car il y a eu plusieurs appels au 9-1-1. Le plaignant répond : [traduction] « Qu’est-ce que vous voulez? ». Le plaignant dit à la répartitrice que personne ne lui a fourni de mise à jour et qu’aucun agent n’a été envoyé en réponse à l’appel initial qu’il a fait une heure auparavant. Quand le plaignant lui donne l’adresse de l’urgence à London, la répartitrice lui explique que cela ne relève pas de leur territoire de compétence et que des agents se rendraient chez lui pour s’assurer que tout le monde est en sécurité. Le plaignant réagit en lui disant [traduction] : « Oui, bien sûr. Au revoir » et raccroche.
 

Transmissions radio

Vers 23 h 01 min 43 s, l’AT no 2 et l’AI sont en route vers une adresse, à Wasaga Beach, suite à un appel au 9-1-1 interrompu provenant de cet endroit. Une répartitrice a dit que le plaignant avait proféré des grossièretés avant de raccrocher. Elle a par la suite précisé que l’appel provenait de la résidence du plaignant, à Wasaga Beach.

Vers 23 h 10 min 47 s, l’AT no2 annonce par radio [traduction] : « Lutte avec un homme ».

Vers 23 h 11 min 22 s, l’AT no 2 annonce que le plaignant est sous garde. L’AI communique par radio son kilométrage de départ avec le plaignant à bord pour le transport au détachement. Il communique ensuite par radio son kilométrage final.

Le 18 octobre 2022, vers 0 h 09 min 34 s, un agent non identifié dit à [nom expurgé] que l’AI a été égratigné au cou durant une altercation physique avec le plaignant.

Vidéo de la salle d’enregistrement au poste

Le 3 mars 2023, l’UES a reçu une copie de la vidéo pertinente de la Police provinciale concernant la détention du plaignant le 17 octobre 2022.

Le 17 octobre 2022, vers 23 h 21 min 39 s, un véhicule de police banalisé [maintenant connu pour être conduit par l’AI] arrive dans l’entrée sécurisée du poste.

Vers 23 h 22 min 30 s, le plaignant, menotté dans le dos, sort du véhicule de police et est escorté par l’AT no 2 et l’AI jusqu’à l’aire d’enregistrement du poste. Il est pieds nus et porte un t-shirt et un pantalon de pyjama noir. Le plaignant a des lacérations sur la tempe droite et au-dessus de la pommette gauche.

Vers 23 h 25 min 8 s, l’AI fouille rapidement le plaignant.

Vers 23 h 29 min 48 s, l’AT no 2 et l’AI font entrer le plaignant dans une cellule.

Le 18 octobre 2022, à 1 h 33 min 41 s, l’AT no 2 escorte le plaignant jusqu’à la salle des empreintes digitales. Le plaignant semble avoir une enflure sous l’œil droit.

Vers 1 h 59 min 37 s, l’AT no 2 ramène le plaignant dans la cellule.

Vers 2 h 15 min 55 s, le plaignant signe les documents de sa libération et disparaît du champ de vision de la caméra, escorté par l’AT no 2.

Éléments obtenus auprès du service de police

Sur demande, la Police provinciale a remis à l’UES les éléments et documents suivants entre le 1er mars et le 7 juin 2023 :
• Enregistrements des communications;
• Vidéo de la garde;
• Rapport d’enregistrement d’arrestation;
• Rapport général;
• Sommaire du dossier de la Couronne;
• Déclaration du dénonciateur;
• Contravention;
• Rapports du Centre d’information de la police canadienne;
• Registre des infractions (décisions);
• Rapport de victime – AT no 2;
• Rapport de victime – AI;
• Notification de preuve numérique à la Couronne;
• Avis de comparution – le plaignant;
• Affidavit de délivrance d’un avis de comparution à l’accusé;
• Tribunal virtuel de gestion des causes d’adultes de Collingwood;
• Notes de l’AT no 1;
• Notes de l’AI;
• Notes de l’AT no 2;
• Photo du plaignant;
• Rapport de garde de prisonnier;
• Vérification de la sécurité de prisonnier;
• Feuille de vérification de la garde;
• Échéancier – dossier de cause;
• Détails de l’événement;
• Réception de plainte;
• Sommaire de la déclaration de l’AT no 1;
• Résumé de l’incident.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES examiné les dossiers suivants obtenus d’autres sources entre le 17 février et le 14 avril 2023 :
• Curriculum Vitae du plaignant ;
• Déclaration écrite dactylographiée du plaignant ;
• Déclaration écrite dactylographiée de l’ex-conjointe du plaignant ;
• Déclaration écrite dactylographiée de la TC no 1;
• Photographies des blessures du plaignant prises par la TC no 1;
• Dossiers médicaux – Collingwood Optometry (rédigé par le TC no 2);
• Dossiers médicaux – Collingwood Optometry (rédigé par un médecin);
• Dossiers médicaux – Soins de la vue - Ophtalmic Consultant Center Inc);
• Dossiers médicaux – First Optical ;
• Dossier médical – TC no 2;
• Dossiers médicaux – optométristes d’Orangeville;
• Lettre d’excuses du plaignant à la répartitrice;
• Lettre du TC no 3 concernant les blessures du plaignant;
• Engagement à maintenir la paix;
• Directive de résolution pour l’engagement de ne pas troubler l’ordre public.

Description de l’incident

Le scénario suivant découle des éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment des entrevues avec le plaignant, l’AI, un autre agent et un témoin civil des événements en question.

Le 17 octobre 2022, en fin de soirée, l’AI et l’AT no 2 ont été dépêchés à une résidence à Wasaga Beach, à la suite de plusieurs appels au 9-1-1 interrompus en provenance de cette résidence plus tôt dans la journée.

Le plaignant était l’auteur des appels au 9-1-1. Inquiet pour le bien-être de sa fille à la suite d’une dispute conjugale signalée dans un magasin de London, en Ontario, le plaignant avait contacté la police pour s’assurer qu’elle allait bien. Frustré par la mauvaise connexion et par le manque apparent d’action de la police, le plaignant a proféré des grossièretés à la préposée au 9-1-1.

Les agents sont arrivés à la résidence peu après 23 h et l’épouse du plaignant, la TC no 1, les a laissés entrer. Le plaignant a rencontré les agents dans le hall d’entrée. Les agents lui ont expliqué qu’ils étaient là pour s’assurer que tout le monde allait bien en raison des appels interrompus au 9-1-1. Ils ont également mis le plaignant en garde au sujet de sa violence verbale à l’égard de la préposée au 9-1-1. Toujours inquiet pour sa fille et frustré par l’intervention de la police, le plaignant s’est énervé. Il a commencé à gesticuler en direction des agents et leur a demandé de s’en aller. Il est devenu encore plus frustré quand les agents ont continué de parler des appels au 9-1-1. Pour ouvrir la porte aux agents, le plaignant s’est approché de la porte, le bras gauche tendu en avant. L’AT no 2, qui était près de la porte, a craint que le plaignant, déjà très énervé, devienne plus agressif, et a levé la main gauche pour se défendre. Il s’en est suivi une altercation physique entre les parties qui est contestée dans la preuve. Il n’est pas contesté que l’AI a donné plusieurs coups de poing au plaignant, quand ils étaient encore debout puis quand la lutte s’est poursuivie à terre, avant que les deux agents menottent le plaignant dans le dos.

Le plaignant a refusé de recevoir des soins médicaux après son arrestation, mais est allé voir son médecin de famille le lendemain après sa remise en liberté. Il a finalement reçu un diagnostic de blessure à l’œil.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le 17 octobre 2022, le plaignant a été grièvement blessé lors de son arrestation par des agents de la Police provinciale. Un des agents qui a procédé à son arrestation a été désigné comme étant l’agent impliqué (AI) aux fins de l’enquête de l’UES. L’enquête est maintenant terminée. Après avoir évalué le dossier de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI ait commis une infraction criminelle en lien avec l’arrestation et la blessure du plaignant.

En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les agents de police sont exonérés de toute responsabilité criminelle pour le recours à la force dans l’exécution de leurs fonctions, à condition que cette force soit raisonnablement nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou autorisé de faire en vertu de la loi.

La présence de l’AI et de l’AT no 2 au moment de l’arrestation du plaignant à son domicile était légale. Les agents avaient été dépêchés pour enquêter sur les appels au 9-1-1 interrompus provenant de cette adresse. La TC no 1, l’une des propriétaires, leur a ouvert la porte et les a laissés entrer. De plus, je suis convaincu que quand le plaignant leur a demandé de partir, avant son arrestation, l’AI et l’AT no 2 n’ont pas indûment retardé leur départ au point que leur présence puisse constituer une intrusion. Enfin, bien que la preuve soit contradictoire sur cette question, je suis incapable de conclure raisonnablement que les agents n’avaient aucun motif de croire que le plaignant les avait agressés – l’infraction pour laquelle ils l’ont arrêté. Étant donné la colère et l’agitation du plaignant, il est tout à fait possible que les agents aient interprété – raisonnablement, à mon avis – l’acte du plaignant quand il a tendu un bras dans leur direction comme un acte de voies de fait, que le plaignant les ait effectivement touchés ou non. Selon eux, c’est essentiellement ce qui s’est produit, et je ne peux pas écarter leur témoignage avec certitude.

Ce qui a suivi était une altercation décrite de manière différente par les parties. D’une part, selon certains éléments de preuve, les agents ont battu le plaignant alors qu’il ne représentait aucune menace pour eux. Le plaignant a reçu plusieurs coups de poing et a été plaqué à terre. D’autre part, l’AI et l’AT no 2 soutiennent que le plaignant était l’agresseur durant toute l’altercation. Il avait non seulement repoussé la main de l’AT no 2 pour déclencher la confrontation, mais il avait ensuite frappé le cou de l’AI de la main droite et avait commencé à lui serrer le cou avant que l’agent ne réagisse en lui assénant des coups de poing à la tête. Par la suite, l’AT no 2 a fait tomber le plaignant et la lutte s’est poursuivie par terre où l’AI a donné d’autres coups de poing au plaignant quand ce dernier a refusé de se laisser menotter. Une fois le plaignant menotté, aucun autre coup ne lui a été asséné. Sur ce dossier, il semble aussi probable qu’improbable que cette version de l’incident par les agents représente ce qui s’est réellement passé. Leur récit, qui comprend un placage à terre et une série de coups de poing pour maîtriser le plaignant qui était belligérant et violent, ne donne pas l’apparence d’un recours déraisonnable à la force.

En conséquence, bien que j’accepte que le plaignant ait subi sa blessure lors de l’interaction qui a marqué son arrestation, je ne peux pas raisonnablement conclure que cette blessure ait été attribuable à une conduite illégale de la part des agents. Il n’y a donc pas de raison de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.


Date : 16 juin 2023


Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les renseignements contenus dans cette section reflètent les informations reçues par l’UES au moment de la notification et ne reflètent pas nécessairement les conclusions de fait de l’UES à la suite de son enquête. [Retour au texte]
  • 2) Les éléments de preuve suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties importantes des enregistrements sont résumées ci-après. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.