Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 22-OCI-302

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 26 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES [1]

Le 26 novembre 2022, à 15 h 17, le Service de police de Timmins (SPT) a avisé l’UES d’une blessure subie par le plaignant.

Selon le SPT, ce matin-là, à 8 h 55, l’agent impliqué (AI) tentait d’arrêter le plaignant dans le stationnement d’un commerce du boulevard Algonquin Ouest, à Timmins. Comme le plaignant lui résistait vigoureusement, l’agent a dû le plaquer à terre. Le plaignant a subi une blessure au nez et a été conduit à l’Hôpital de Timmins et du district, où on lui a diagnostiqué une fracture du nez. À sa sortie de l’hôpital, le plaignant a été replacé sous la garde du SPT, puis remis en liberté sur avis de comparution avant que l’UES ne soit contactée.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 26 novembre 2022 à 16 h 10

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 26 novembre 2022 à 20 h 39

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 0

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 26 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

Le plaignant a participé à une entrevue le 29 novembre 2022.

Témoins civils

TC no 1 N’a pas participé à une entrevue
TC no 2 N’a pas participé à une entrevue (a refusé)
TC no 3 A participé à une entrevue
TC no 4 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à une entrevue le 1er et le 14 décembre 2022.

Agent impliqué

AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué; ses notes ont été reçues et examinées

Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à une entrevue le 30 novembre 2022.

Éléments de preuve

Les lieux

Les événements en question se sont produits sur le stationnement ouest d’un commerce situé sur le boulevard Algonquin Ouest, à Timmins, et aux environs immédiats.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [2]

Enregistrements des communications du SPT

Le 29 novembre 2022, à 19 h 04, l’UES a reçu une copie des enregistrements des communications du SPT concernant l’incident. Ce qui suit est un résumé des renseignements pertinents tirés de ces enregistrements.

Le 26 novembre 2022, à 8 h 51 min 26 s, une femme [maintenant connue comme étant la TC no 3] demande à la police de venir à une adresse du boulevard Algonquin Ouest pour faire partir un homme [maintenant connu comme étant le plaignant] qu’elle a trouvé en train de dormir dans le stationnement et qui refusait de quitter les lieux. La TC no 3 a verrouillé la porte du commerce, car elle se sentait menacée par le plaignant, qui l’avait accusée d’avoir volé son vélo. Il avait aussi uriné près des fenêtres de l’immeuble.

À 8 h 53 min 17 s, deux agents [maintenant connus comme étant l’AI et l’AT no 2] sont dépêchés sur les lieux. L’AI arrive sur place à 8 h 53 min 34 s et repère le plaignant derrière un conteneur d’entreposage sur la propriété. À 8 h 56 min 39 s, un autre agent [maintenant connu pour être l’AT no 1] annonce qu’il est en route.

La TC no 3 rappelle la police pour signaler que l’AI a besoin d’aide à cause du comportement du plaignant.

À 8 h 57 min 25 s, l’AT no 2 est en route.
À 8 h 58 min 58 s, l’AI annonce par radio [traduction] : « Agression d’un agent de police, résiste, intrusion, cause des troubles. »

À 9 h 00 min 32 s, l’AT no 1 et l’AT no 2 arrivent sur les lieux.

À 9 h 03 min 45 s, on fait assoir le plaignant dans le véhicule de police de l’AT no 1 pour le conduire au poste de police.

À 9 h 06 min 46 s, l’AT no 1 arrive au poste du SPT.
 

Vidéosurveillance

Le 29 novembre 2022, à 19 h 04, le SPT a transmis à l’UES une copie d’une vidéo de surveillance d’un commerce. Le 5 décembre 2022, l’UES a également reçu une copie de la même vidéo que la TC no 3 lui a remise; cette dernière avait utilisé son téléphone pour copier la vidéo de surveillance à partir d’un écran d’ordinateur. Ce qui suit est un résumé des renseignements pertinents tirés de cette vidéo.

La vidéo commence le 26 novembre 2022, vers 8 h 43 min 59 s Une fourgonnette blanche à deux portes [maintenant connue pour être celle conduite par la TC no 3] entre dans le champ de vision de la caméra et se gare dans le stationnement. La TC no 3 sort de son véhicule et se dirige vers un homme [maintenant connu comme étant le plaignant] qui est allongé par terre près d’une porte latérale.

À 8 h 45 min 57 s, la TC no 3 sort du champ de vision de la caméra; elle porte quelques sacs.

À 8 h 52 min 33 s, la TC no 3 ouvre la portière côté conducteur de sa fourgonnette et klaxonne continuellement. À 8 h 55 min 22 s, le plaignant réagit au son du klaxon en soulevant la tête, puis se lève.

À 8 h 56 min 9 s, la TC no 3 fait signe au plaignant de s’en aller. Le plaignant se dirige vers le côté passager de la fourgonnette, et semble parler à la TC no 3.

À 8 h 57 min 17 s, le plaignant retourne vers la porte de l’immeuble, à l’endroit où il se trouvait initialement, tandis que la TC no 3 disparaît du champ de vision de la caméra. Le plaignant marche le long du bâtiment jusqu’à un espace entre le bâtiment et un conteneur d’entreposage.

À 9 h 01 min 6 s, une camionnette Ford de couleur foncée [maintenant connue pour être conduite par le TC no 4] entre dans le champ de vision de la caméra et se gare dans le stationnement, face au magasin.

À 9 h 02 min 28 s, la TC no 3 et un agent en uniforme [maintenant connu comme étant l’AI] entrent dans le champ de vision de la caméra. L’AI se dirige vers le conteneur d’entreposage et repère le plaignant entre le bâtiment et le conteneur. La TC no 3 sort du champ de vision de la caméra.

À 9 h 03 min 20 s, l’AI guide le plaignant vers un tas de palettes à côté du bâtiment. L’AI semble avoir de la difficulté à maîtriser le plaignant et lui donne apparemment un coup de poing au haut du corps. Alors que l’AI lui tient le bras gauche, le plaignant tire pour s’éloigner des palettes et se diriger vers le stationnement. Tout en maintenant le bras gauche du plaignant et en avançant dans le stationnement, l’AI fait tomber le plaignant par terre, en tirant sur sa veste vers le sol. Le plaignant atterrit sur les fesses. L’AI, qui est derrière lui, lui donne deux coups de poing à la tête. Le plaignant se retrouve face contre terre, sur ses mains et ses genoux. L’AI place son genou gauche sur le bas du corps du plaignant pour lui saisir les mains. Le plaignant tente de se relever tandis que l’AI tente de le maintenir au sol en utilisant le poids de son corps. Le plaignant essaye de se relever en poussant contre l’AI au moins deux fois; l’AI utilise son genou gauche l’empêcher de se relever. L’AI semble donner un petit coup de poing de la main droite au haut du corps du plaignant à ce moment-là.

À 9 h 05 min 37 s, un véhicule portant les inscriptions du service de police [maintenant connu pour être conduit par l’AT no 1] arrive sur les lieux, ses gyrophares activés. L’AT no 1 sort du véhicule et le contourne sur le devant pour se diriger vers l’AI, qui est parvenu à maîtriser le plaignant au sol. L’AT no 1 et l’AI, respectivement à gauche et à droite du plaignant, maintiennent ce dernier allongé par terre pour permettre à l’AI de le menotter.

À 9 h 06 min 49 s, l’AI et l’AT no 1 aident le plaignant, maintenant menotté dans le dos, à se relever et le font assoir à l’arrière, côté passager, du véhicule de police de l’AT no 1.

La vidéo prend fin à 9 h 07 min 22 s
 

Vidéo du système de caméras à bord du véhicule de police de l’AI

Le 29 novembre 2022, à 19 h 04, l’UES a reçu une copie d’une vidéo en lien avec l’incident enregistrée par le système de caméras du véhicule de police de l’AI. Cette vidéo était horodatée et en couleur, mais sans audio. Ce qui suit est un résumé de la vidéo enregistrée par la caméra frontale.

La vidéo commence le 26 novembre 2022, à 8 h 48 min 6 s

À 8 h 53 min 55 s, l’AI arrive au commerce du boulevard Algonquin Ouest à Timmins. Un camion de couleur foncée et une fourgonnette blanche sont garés dans le stationnement.

Les images suivantes n’avaient pas de valeur pour l’enquête sur l’incident, car la caméra frontale pointait vers un commerce voisin.

L’AI quitte les lieux à 9 h 04 min 15 s
 

Vidéo de la caméra du véhicule de l’AT no 1

Le 29 novembre 2022, à 19 h 04, l’UES a reçu une copie de la vidéo liée à l’incident enregistrée par le système de caméras du véhicule de police de l’AT no 1. Cette vidéo était horodatée et en couleur. Ce qui suit est un résumé des images enregistrées par les caméras orientées vers l’avant et vers l’arrière du véhicule.

La vidéo commence le 26 novembre 2022, à 8 h 55 min 51 s

À 8 h 57 min 29 s, l’AT no 1 arrive sur les lieux. Le plaignant est à genoux dans le stationnement; l’AI est debout à côté de lui.

À 8 h 57 min 50 s, on entend l’AI et l’AT no 1 ordonner au plaignant de mettre les mains dans le dos.

À 8 h 59 min 5 s, un agent dit : [traduction] « Arrête de cracher ».

À 8 h 59 min 36 s, on fait assoir le plaignant, menotté dans le dos, sur le siège passager arrière. Il saigne du nez et de la bouche.

À 9 h 02 min 50 s, l’AT no 1 dit au plaignant qu’il est en état d’arrestation. L’audio est alors désactivée.

À 9 h 03 min 51 s, le plaignant déclare : [traduction] « Je me suis fait défoncer mon chum. La plupart des gars seraient assommés à terre avec ça. J’ai vraiment besoin d’aller à l’hôpital. » L’AT no 1 répond en disant [traduction] : « On va s’en occuper plus tard. » Après que le plaignant a déclaré qu’il avait été agressé, l’AT no 1 dit : [traduction] « Eh bien, ne résiste pas à l’arrestation et ne crache pas du sang ».

À 9 h 04 min 17 s, le plaignant dit [traduction] : « J’ai pas résisté. Vous voulez que je fasse quoi? J’ai mal. On m’a déjà cogné au visage et merde. Je ne peux même pas parler, alors? » Puis, il ajoute : « Ça me met en colère ce que tu m’as fait, mon chum, parce que c’est effrayant. Le gars sait comment se battre. Que veux-tu que je fasse? Je viens juste de me réveiller. On aurait pu juste me donner une contravention et rentrer à la maison. On m’a cassé la gueule. »

À 9 h 06 min 50 s, l’AT no 1 arrive au poste de police et couvre la tête du plaignant d’une cagoule anti-crachat, puis escorte le plaignant dans l’aire d’enregistrement du poste.

La vidéo prend fin à 9 h 15 min
 

Vidéo de la caméra du véhicule de l’AT no 2

Le 29 novembre 2022, à 19 h 04, l’UES a reçu une copie de la vidéo liée à l’incident enregistrée par le système de caméras du véhicule de police de l’AT no 1. Cette vidéo ne contenait aucun élément utile pour l’enquête.

Vidéo de la garde

Le 29 novembre 2022, à 19 h 04, le SPT a transmis à l’UES une copie de la vidéo de la garde au poste. De multiples efforts ont été faits pour obtenir une copie horodatée des enregistrements, sans succès. Les minutes et secondes indiquées ci-dessous correspondent au temps écoulé depuis le début de la vidéo. En voici un résumé :

À sept minutes et deux secondes, un véhicule de police conduit par l’AT no 1 entre dans l’entrée sécurisée pour véhicules du poste de police. L’AT no 1 et un agent spécial font sortir le plaignant, qui a une cagoule blanche anti-crachat sur la tête, du côté passager arrière du véhicule et l’escorte jusqu’à la salle d’enregistrement. Le plaignant porte un manteau noir, un pantalon de neige camouflage et des chaussures rouges.

À huit minutes et 49 secondes, le plaignant est amené devant le sergent. Au cours de son enregistrement au poste, le plaignant demande une ambulance en disant qu’on lui a cassé la gueule. On l’escorte ensuite jusqu’à une cellule. Le plaignant obéit quand on lui demande d’enlever son manteau et son pantalon. On le fouille avant de lui retirer les menottes.

À 13 minutes et 20 secondes, le plaignant demande qu’on le conduise à l’hôpital.

À 18 minutes et 53 secondes, l’AI dit au plaignant qu’une ambulance est en route. Le plaignant répond [traduction] : « Franchement! Tu m’as cassé la gueule sans raison, mon chum. »

À 19 minutes et huit secondes, le plaignant demande où est son vélo volé, puis accuse l’AI de l’avoir traîné et roué de coups.

A 22 minutes et 10 secondes, les SMU arrivent au poste. Trois ambulanciers paramédicaux sont escortés jusqu’à la cellule. L’un d’eux remarque qu’il y a du sang dans la cellule.

À 27 minutes et 39 secondes, le plaignant dit aux ambulanciers paramédicaux que quand il s’est réveillé, il s’est aperçu qu’on lui avait volé son vélo. Il s’était assis derrière une benne à ordures et l’AI l’avait tiré pour le faire sortir de là. Quelques secondes plus tard, une ambulancière paramédicale dit au plaignant qu’ils sont là pour lui prodiguer des soins médicaux, et non pour l’écouter décrire ce qui s’est passé plus tôt.

À 28 minutes et trois secondes, le plaignant demande qu’on le conduise à l’hôpital, car il soupçonne qu’il pourrait avoir subi une commotion cérébrale en tombant de son vélo sur du verglas la nuit précédente. Les ambulanciers paramédicaux prodiguent des soins au plaignant.

À 34 minutes et 21 secondes, les ambulanciers sortent de l’aire des cellules et attendent qu’un agent les aide pour le transport.

À 43 minutes et 12 secondes, on escorte le plaignant jusqu’à l’ambulance. L’ambulance quitte le poste peu après.

Éléments obtenus auprès du service de police

Sur demande, le SPT a remis à l’UES les éléments et documents suivants entre le 29 novembre 2022 et le 14 février 2023.
  • Rapport d’enregistrement d’arrestation;
  • Rapport d’arrestation;
  • Enregistrements des communications;
  • Vidéo du bloc cellulaire;
  • Dossier de garde;
  • Sommaire de garde;
  • Détails de l’événement;
  • Rapport général d’incident;
  • Enregistrements de la caméra à bord du véhicule de police;
  • Photo du plaignant;
  • Notes de l’AT no 1;
  • Notes de l’AT no 2;
  • Notes de l’AI;
  • Résumé de l’incident;
  • Incident concernant une personne (le plaignant);
  • Procédure ¬– usage de la force;
  • Procédure – arrestation de personnes;
  • Vidéo de la caméra de surveillance d’un commerce;
  • Dossier de formation de l’AI;
  • Engagement – le plaignant.
  • Calendrier de formation sur le recours à la force;
  • Rapport de victime;
  • Déclaration de témoin – TC no 3.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a examiné les éléments suivants obtenus auprès d’autres sources :
  • Dossiers médicaux du plaignant de l’Hôpital de Timmins et du district;
  • Vidéo de caméra de surveillance de la TC no 3.

Description de l’incident

Les éléments de preuve recueillis par l’UES ont permis d’établir clairement la séquence d’événements résumée ci-après. L’AI n’a pas consenti à participer à une entrevue avec l’UES, comme c’était son droit, mais a autorisé la communication de ses notes sur l’incident.

Le matin du 26 novembre 2022, le plaignant, qui s’était endormi dans le stationnement d’un commerce du boulevard Algonquin Ouest, à Timmins, a été réveillé par la TC no 3 qui arrivait au travail. Le plaignant a refusé de quitter la propriété quand la TC no 3 le lui a demandé et a commencé à uriner contre un mur extérieur du commerce. Il a continué à flâner dans le secteur et a fini par se frayer un chemin entre une autre partie du mur extérieur et un conteneur d’entreposage. C’est à cet endroit qu’un agent du SPT l’a confronté.

L’agent en question était l’AI. Il avait été dépêché sur les lieux à la suite de l’appel de la TC no 3 à la police qui signalait la présence d’une personne indésirable sur sa propriété. L’AI a saisi le plaignant par le bras gauche et l’a escorté entre le mur et le conteneur vers un tas de palettes dans le stationnement. Le plaignant a physiquement résisté aux efforts de l’agent, qui a réagi en lui assénant un coup de poing au torse.

La lutte s’est poursuivie dans le stationnement. L’AI a tenté de forcer le plaignant au sol et le plaignant a cherché à se libérer de l’emprise de l’agent. L’AI lui a asséné deux autres coups de poing à la tête tout en le plaquant au sol. Une lutte s’est ensuivie – le plaignant essayait de se relever et l’AI s’efforçait de l’en empêcher. L’AI a asséné un autre coup de poing de la main droite. L’AT no 1 est arrivé peu après, alors que l’AI était sur le plaignant qui était sur le sol. Les deux agents sont parvenus à menotter le plaignant sans autre incident.

Le plaignant a été conduit au poste de police puis à l’hôpital, où on lui a diagnostiqué une fracture du nez.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Paragraphe 2(1) de la Loi sur l’entrée sans autorisation -- L’entrée sans autorisation est une infraction

2 (1) Est coupable d’une infraction et passible, sur déclaration de culpabilité, d’une amende d’au plus 10 000 $ quiconque n’agit pas en vertu d’un droit ou d’un pouvoir conféré par la loi et :

a) sans la permission expresse de l’occupant, permission dont la preuve incombe au défendeur :
i. ou bien entre dans des lieux lorsque l’entrée en est interdite aux termes de la présente loi
ii. ou bien s’adonne à une activité dans des lieux lorsque cette activité est interdite aux termes de la présente loi
b) ne quitte pas immédiatement les lieux après que l’occupant des lieux ou la personne que celui-ci a autorisée à cette fin le lui a ordonné

Paragraphe 9(1), Loi sur l’entrée sans autorisation – Arrestation sans mandat sur les lieux

9 (1) Un agent de police, l’occupant des lieux ou une personne que ce dernier a autorisée à cet effet, peut arrêter sans mandat une personne qu’il croit, pour des motifs raisonnables et probables, être sur les lieux en contravention de l’article 2. 

Analyse et décision du directeur

Le 26 novembre 2022, le plaignant a été grièvement blessé au cours de son arrestation par des agents du SPT. Cet agent a été désigné comme étant l’agent impliqué (AI) aux fins de l’enquête de l’UES. L’enquête est maintenant terminée. Après avoir évalué le dossier de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI ait commis une infraction criminelle en lien avec l’arrestation et la blessure du plaignant.

En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les agents de police sont exonérés de toute responsabilité criminelle pour le recours à la force dans l’exécution de leurs fonctions, à condition que cette force soit raisonnablement nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou autorisé de faire en vertu de la loi.

Le plaignant se trouvait illégalement sur la propriété et avait refusé de partir quand on lui en avait donné l’ordre. Dans les circonstances, son arrestation était justifiée en vertu des articles 2 et 9 de la Loi sur l’entrée sans autorisation.

En ce qui concerne la force utilisée par l’AI pour procéder à l’arrestation du plaignant, soit quatre coups de poing donnés au cours d’une lutte entre les deux hommes, je ne peux pas raisonnablement conclure qu’elle n’était pas légalement justifiée. Comme il l’avait fait avec la TC no 3, le plaignant, colérique et combatif, avait clairement montré à l’AI qu’il n’était pas disposé à quitter les lieux de son plein gré. Par la suite, quand l’AI lui a saisi le bras gauche, le plaignant a tenté de se dégager de son emprise; l’agent a alors donné son premier coup de poing. À mon avis, la tactique de l’AI était raisonnable puisqu’elle faisait suite à une période de lutte et que le plaignant continuait de résister. Les deuxième, troisième et quatrième coups de poing étaient également raisonnables pour les mêmes raisons; ils ont tous été assénés alors que le plaignant continuait de lutter. Aucune autre force n’a été utilisée une fois le plaignant menotté.

En conséquence, bien que j’accepte que le plaignant ait subi sa fracture du nez durant l’altercation qui a marqué son arrestation, il n’y a aucun motif raisonnable de croire que la blessure était attribuable à une conduite illégale de la part de l’AI. Il n’y a donc aucune raison de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.


Date : 24 mars 2023

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les renseignements contenus dans cette section reflètent les informations reçues par l’UES au moment de la notification et ne reflètent pas nécessairement les conclusions de fait de l’UES à la suite de son enquête. [Retour au texte]
  • 2) Les éléments de preuve suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties importantes de ces éléments de preuve sont résumées ci-après. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.