Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 22-TCI-244

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur une blessure grave subie par un homme de 20 ans (« le plaignant »)

L’enquête

Notification de l’UES

Le 17 septembre 2022, à 10 h 58, le Service de police de Toronto (SPT) a communiqué à l’UES les renseignements suivants.

Le 17 septembre 2022, à 4 h 49 du matin, des agents ont intercepté une BMW argentée à l’intersection des avenues Victoria Park et Sheppard pour une infraction au Code de la route. Le plaignant et un inconnu étaient à bord de la BMW. L’agent a tenté d’arrêter les hommes après avoir aperçu une arme à feu dans la BMW. Une lutte s’est ensuivie et une arme à impulsions a été déchargée sur le plaignant. Le plaignant a été appréhendé et emmené à l’Hôpital Grace de Scarborough, où on lui a diagnostiqué une fracture de l’os nasal.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 17 septembre 2022 à 11 h 15

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 17 septembre 2022 à 12 h 20

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 20 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

Le plaignant a participé à une entrevue le 17 septembre 2022.


Témoins civils

TC A participé à une entrevue

Le TC a participé à une entrevue le 17 septembre 2022.
 

Agents impliqués

AI A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées

L’AT 1 a été participé à une entrevue le 24 octobre 2022.


Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue
AT no 3 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à une entrevue le 18 septembre 2022.
 

Éléments de preuve

Les lieux

L’incident s’est déroulé au coin sud-est de l’intersection contrôlée par des feux de circulation de l’avenue Victoria Park et de l’avenue Sheppard Est.

Éléments de preuve matériels

Figure 1 – Photographie du pistolet

Figure 1 – Photographie du pistolet


Figure 2 – Photographie de l’arme à impulsions

Figure 2 – Photographie de l’arme à impulsions

Éléments de preuves médicolégaux


Données de l’arme à impulsions de l’AT no 1

Ce qui suit est un résumé des données téléchargées à partir de l’arme à impulsions utilisée au cours des événements en question.

A 5 h 12 min 13 s [1], on a appuyé sur le bouton « Arc » de l’arme à impulsions pendant une seconde.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [2]


Communications radio

Le 27 septembre 2022, le SPT a fourni à l’UES une copie de l’enregistrement de toutes les communications radio liées à l’incident du 17 septembre 2022. En voici un résumé :

Vers 4 h 43 min 50 s, l’AI et l’AT no 1 sont à l’intersection de l’avenue Victoria Park et de l’avenue Sheppard Est, où ils ont arrêté une BMW dont la plaque d’immatriculation n’est pas affixée et où se trouvent deux personnes. Ils demandent qu’on envoie une autre unité de police.

Vers 4 h 44 min 19 s environ, l’AT no 2 et l’AT no 3 se portent volontaires pour se rendre sur les lieux en renfort.

Entre environ 4 h 58 min 13 s et 4 h 58 min 32 s, un agent annonce [traduction] : « Il court vers le sud sur Victoria Park. Il a un pistolet! »

À partir d’environ 4 h 58 min 49 s, on entend quelqu’un dire : [traduction] « AT no 2, reviens, il a un pistolet ! »

Vers 4 h 59 min 46 s, on signale que l’AI et l’AT no 1 ont une personne sous garde.


Vidéos de caméras corporelles

Le 19 septembre 2022, le SPT a remis à l’UES les vidéos de caméras corporelles liées à l’incident. En voici un résumé :


Caméra corporelle de l’AT no 1

Entre environ 4 h 43 min 45 s et 4 h 43 min 57 s, l’AT no 1 demande au plaignant s’il a une pièce d’identité. L’AT no 1 explique aux occupants la raison du contrôle routier, à savoir des « plaques non fixées/non enregistrées ».

Vers 4 h 44 min 5 s, le plaignant explique qu’il vient d’acheter la voiture et qu’il n’a pas eu le temps d’enregistrer les plaques, mais qu’il a une assurance. Il remet l’attestation de propriété à l’AT no 1.

Vers 4 h 45 min 37 s, l’AI retourne à son véhicule de police.

Vers 4 h 48 min 5 s, l’AT no 2 et l’AT no 3 arrivent et se garent directement derrière la BMW.

Vers 4 h 48 min 16 s, l’AT no 1 explique à l’AT no 2 et l’AT no 3 pourquoi ils ont arrêté la BMW.

Vers 4 h 50 min 7 s, l’AI revient du côté conducteur de la BMW et rappelle aux occupants qu’ils sont sous enregistrement audio et vidéo.

Entre environ 4 h 50 min 12 s et 4 h 50 min 21 s, l’AI éclaire l’intérieur de la BMW avec sa lampe de poche et demande s’il y a de la marijuana dans le véhicule parce qu’il peut en sentir l’odeur. Le plaignant lui tend un sachet contenant de la marijuana. L’AI explique que le conducteur avait donc accès à de la marijuana.

Vers 4 h 52 min 23 s, les agents disent au plaignant et au TC de sortir du véhicule, qu’ils ne sont pas en état d’arrestation et que les agents ont le droit de les fouiller et de fouiller le véhicule.

Entre environ 4 h 52 min 39 s et 4 h 53 min 10 s, le plaignant sort du véhicule et pose ses mains sur la voiture, comme on le lui demande. L’AI fouille le plaignant en l’avisant qu’il veut voir s’il y a d’autres quantités de marijuana.

Vers 4 h 53 min 29 s, le plaignant se souvient qu’il a aussi de la marijuana sur le siège arrière.

Vers 4 h 57 min 15 s, l’AI demande au plaignant comment ouvrir le coffre. Le plaignant met en doute le pouvoir de l’agent de fouiller le coffre sans mandat de perquisition.

Vers 4 h 57 min 32 s, l’AT no 1, l’AI et le plaignant sont derrière la BMW et regardent le coffre en train de s’ouvrir.

Entre environ 4 h 57 min 38 s et 4 h 57 min 52 s, l’AI demande ce qu’il y a dans le coffre. Le plaignant répond : [traduction] « Rien. » Le plaignant pointe du doigt pour montrer que le coffre est vide. L’AI soulève le couvercle du compartiment de la roue de secours.

Entre environ 4 h 57 min 57 s et 4 h 58 min 4 s, l’AI sort un petit sac noir et demande au plaignant s’il contient un pistolet. Le plaignant répond par la négative. Pendant que l’AI éteint sa lampe de poche, le plaignant tend le bras dans le coffre pour prendre le sac noir.

Entre environ 4 h 58 min 13 s et 4 h 58 min 25 s, une lutte éclate et le plaignant crie : [traduction] « Pourquoi me frappez-vous ? » Un agent lui crie : [traduction] « Mets tes mains en l’air, lâche l’arme. Je vais te taser. »

Vers 4 h 58 min 27 s, une arme à impulsions est déployée.

Vers 4 h 58 min 37 s, l’AI donne un coup de poing au plaignant, tandis que l’AT no 1 dit qu’il lui tient les mains.

Vers 4 h 58 min 42 s, l’AI retire le sac que le plaignant avait sous lui et le jette à quelques pieds de là.

Entre environ 4 h 58 min 48 s et 4 h 58 min 57 s, on entend un agent appeler l’AT no 2 et lui dire : [traduction] « Reviens, il a un pistolet ». Le plaignant demande à plusieurs reprises : « Pourquoi me frappez-vous ? » Le plaignant est menotté dans le dos.


Caméra corporelle de l’AI

Vers 4 h 43 min 5 s, l’AI dit par radio qu’ils ont intercepté un véhicule, précise leur emplacement et demande qu’une autre unité vienne en renfort.

Vers 4 h 44 min 52 s, l’AI tient les documents que lui remet le plaignant et utilise son téléphone cellulaire pour vérifier les renseignements concernant l’assurance.

Vers 4 h 45 min 56 s, l’AI retourne dans le véhicule de police, où il utilise l’ordinateur et imprime des documents.

Vers 4 h 49 min 47 s, l’AI et l’AT no 1 discutent de l’odeur de marijuana provenant de la BMW.
Vers 4 h 50 min 17 s, l’AI demande au plaignant : [traduction] « Est-ce que c’est de la marijuana? » et ajoute qu’il peut en déceler l’odeur. Le plaignant répond : [traduction] « Non, non, ce n’est qu’un sachet ».

Vers 4 h 50 min 21 s, l’AI déclare : [traduction] « C’est à portée de main, n’est-ce pas? »

Vers 4 h 52 min 11 s, l’AI explique aux occupants de la BMW que le fait d’avoir de la marijuana à portée de main est une infraction qui justifie une fouille et qu’il va les fouiller et fouiller la voiture.

Vers 4 h 52 min 44 s, le plaignant sort de la BMW et pose ses mains sur la voiture.

Vers 4 h 52 min 47 s, l’AI commence à fouiller le plaignant.

Vers 4 h 53 min 30 s, le plaignant dit qu’il vient juste de se souvenir qu’il y a aussi de la marijuana sur le siège arrière de la voiture.

Vers 4 h 53 min 44 s environ, l’AI et l’AT no 3 commencent à fouiller l’intérieur de la voiture. Ils retirent un sac contenant de la marijuana du siège arrière de la voiture.

Vers 4 h 57 min 14 s, l’AI demande comment ouvrir le coffre. Le plaignant demande s’ils n’ont pas besoin d’un mandat pour le coffre.

Vers 4 h 57 min 33 s, le coffre est ouvert.

Vers 4 h 57 min 38 s, l’AI demande ce qu’il y a dans le coffre et le plaignant lui répond qu’il n’y a rien.

Vers 4 h 57 min 52 s, l’AI soulève le couvercle du compartiment de la roue de secours et repère un petit sac de couleur sombre. Il le sort et demande au plaignant si c’est un pistolet. Le plaignant répond par la négative.

Vers 4 h 58 min 4 s, le plaignant fonce en avant et saisit le sac dans le coffre pendant que l’AI éteint sa lampe de poche. L’AI crie : « Il essaie de prendre le pistolet! »

À 4 h 58 min 15 s, la vidéo montre la tête de l’AI (sa caméra corporelle est tombée par terre). Il balance le bras droit pour asséner un coup et le plaignant lui demande pourquoi il le frappe.

À 4 h 58 min 16 s, l’AI donne cinq coups de poing de la main droite.

À 4 h 58 min 20 s, l’AI assène trois autres coups de poing tout en disant à l’AT no 1 de sortir son « taser ».

Vers 4 h 58 min 24 s, l’AI dit : « Lâche l’arme », tout en assénant trois autres coups de poing de la main droite.

Vers 4 h 58 min 30 s, l’AI donne quatre autres coups de poing de la main droite tout en disant : [traduction] « Il a un pistolet, tase-le ».
Vers 4 h 58 min 37 s, l’AI donne deux autres coups de poing tandis que le plaignant continue de lui demander pourquoi il le frappe.

Vers 4 h 58 min 45 s, le plaignant est menotté. L’AI s’assied, puis ramasse sa caméra et la remet en place dans son support sur son torse.

Vers 5 h 00 min 4 s, on fait rouler le plaignant sur le dos, on l’aide à se relever et on l’escorte vers le véhicule de police.

Vers 5 h 01 min 50 s, l’AI explique au plaignant : [traduction] « Tu as essayé de t’emparer du pistolet, tu avais les mains sur le pistolet, tu ne voulais pas lâcher prise, nous t’avons dit de lâcher le pistolet et c’est pourquoi je t’ai frappé. »


Vidéo – Ville de Toronto

Le 19 septembre 2022, la ville de Toronto a remis à l’UES des photos extraites de vidéos enregistrées par des caméras de la ville à proximité de l’incident. Ces images ne présentaient aucun intérêt pour l’enquête.


Séquence vidéo – Commission de transport de Toronto (CTT)

Le 28 septembre 2022, la CTT a fourni une vidéo enregistrée par la caméra d’un autobus. Ces images ne présentaient aucun intérêt pour l’enquête.

Éléments obtenus auprès du service de police

Le SPT a remis les documents suivants à l’UES entre le 17 et le 23 septembre 2022 :
  • Rapport général d’incident;
  • Notes de l’AT no 1;
  • Notes de l’AI;
  • Notes de l’AT no 2;
  • Notes de l’AT no 3;
  • Données d’arme à impulsions;
  • Politique – arrestation;
  • Politique – intervention lors d’un incident;
  • Politique – armes à impulsions;
  • Enregistrements des communications;
  • Vidéos de caméras corporelles;
  • Photographies.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a examiné les éléments suivants obtenus auprès d’autres sources :
  • Rapports d’appel d’ambulance des Services médicaux d’urgence (SMU).
  • Rapport sommaire d’incident des SMU ;
  • Rapport d’incident des SMU;
  • Dossiers médicaux – Hôpital Birchmount;
  • Images extraites de vidéo de Victoria Park et Sheppard (municipalité de Toronto);
  • Séquence vidéo – CTT.

Description de l’incident

La séquence d’événements suivante découle des éléments de preuve recueillis par l’UES, dont les entrevues avec le plaignant et avec l’AI et des vidéos de caméras corporelles qui montrent certaines parties de l’incident.

Le 17 septembre 2022, au petit matin, le plaignant a été arrêté par l’AI et son partenaire, l’AT no 1. Le plaignant était au volant d’une BMW qu’il venait d’acheter et roulait vers le nord, sur l’avenue Victoria Park, quand la police lui a fait signe de s’arrêter, dans la voie en bordure, juste avant l’intersection de l’avenue Sheppard Est. Le TC, une de ses connaissances, était son passager.

Les agents roulaient vers le sud sur l’avenue Victoria Park à bord d’un véhicule de patrouille lorsqu’ils ont aperçu un véhicule – la BMW du plaignant – qui semblait rouler à une vitesse excessive vers le nord. L’AI, au volant du véhicule de patrouille, a fait demi-tour après avoir croisé la BMW, a réduit la distance qui le séparait de la BMW, a activé ses gyrophares et sa sirène et positionné son véhicule de police devant la BMW du plaignant quand celle-ci s’est immobilisée.

L’AT no 1 a parlé avec le plaignant par la fenêtre ouverte de la portière du conducteur et a remarqué du cannabis qui dépassait de la poche avant gauche de son chandail. Il en a avisé l’AI, qui a informé le plaignant qu’ils allaient le fouiller et fouiller sa voiture en vertu de la Loi sur le contrôle du cannabis. Le plaignant est sorti de la BMW et l’AI a commencé à le fouiller. Le plaignant a dit à l’agent qu’il y avait une autre quantité de la substance sur le siège arrière du véhicule. L’AI a fouillé les sièges arrière et a saisi la drogue. Les agents ont demandé au TC de sortir de la BMW et l’ont fouillé, après quoi ils lui ont demandé de s’asseoir sur le trottoir.

Quand les agents ont eu terminé de le fouiller et de fouiller l’habitacle de son véhicule, le plaignant s’est opposé à la fouille du coffre sans mandat. L’AI lui a expliqué que la perquisition était autorisée et qu’il n’avait pas besoin de mandat. Le coffre du véhicule a été ouvert et le plaignant est resté debout à côté de l’AI qui a commencé à fouiller le coffre. Le plaignant a dit qu’il n’y avait pas de drogue dans le coffre. L’AI a alors ouvert le couvercle du compartiment de la roue de secours. Il n’y avait pas de pneu dans le compartiment, mais un petit sac. L’agent a tâté le sac et a demandé au plaignant s’il contenait un pistolet. Le plaignant a nié qu’il s’agissait d’une arme à feu. L’AI a ensuite placé le sac sur le plancher du coffre. Quelques secondes plus tard, le plaignant, qui était à gauche de l’arrière du véhicule, a tendu la main dans le coffre et saisi le sac.

L’AI et l’AT no 1 ont agrippé le plaignant dès qu’il a saisi le sac et l’ont plaqué à terre. Une lutte s’est ensuivie au cours de laquelle l’AI, qui était près du torse du plaignant, lui a donné plusieurs coups de poing à la tête. L’AT no 1, qui était près de la taille du plaignant, lui a tiré une décharge dans le dos avec son arme à impulsions. Les agents sont alors parvenus à maîtriser les bras du plaignant et à le menotter dans le dos.

Le sac contenait un pistolet Glock chargé.

Après son arrestation, le plaignant a été conduit à l’hôpital où il a été constaté qu’il avait une fracture du nez.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 12 (3) de la Loi sur le contrôle du cannabis – Fouille d’un véhicule

12 (1) Nul ne doit conduire un véhicule ou un bateau ni en avoir la garde ou le contrôle, qu’ils soient en marche ou non, lorsque du cannabis se trouve à leur bord.

(3) L’agent de police qui a des motifs raisonnables de croire que du cannabis se trouve à bord d’un véhicule ou d’un bateau en contravention au paragraphe (1) peut, en tout temps et sans mandat, y monter et y perquisitionner, et fouiller toute personne qui se trouve à son bord.


Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Article 139 du Code criminel – Entrave à la justice

139 (1) Quiconque volontairement tente de quelque manière d’entraver, de détourner ou de contrecarrer le cours de la justice dans une procédure judiciaire :
a) soit en indemnisant ou en convenant d’indemniser une caution de quelque façon que ce soit, en totalité ou en partie;
b) soit étant une caution, en acceptant ou convenant d’accepter des honoraires ou toute forme d’indemnité, que ce soit en totalité ou en partie, de la part d’une personne qui est ou doit être mise en liberté ou à l’égard d’une telle personne,
est coupable :
c) soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de deux ans;
d) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
(2) Quiconque intentionnellement tente de quelque manière, autre qu’une manière visée au paragraphe (1), d’entraver, de détourner ou de contrecarrer le cours de la justice est coupable :
a) soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de dix ans;
b) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.

 

Article 86, Code criminel - Usage négligent d’une arme à feu

86 (1) Commet une infraction quiconque, sans excuse légitime, utilise, porte, manipule, expédie, transporte ou entrepose une arme à feu, une arme prohibée, une arme à autorisation restreinte, un dispositif prohibé, des munitions ou des munitions prohibées d’une manière négligente ou sans prendre suffisamment de précautions pour la sécurité d’autrui.

(2) Commet une infraction quiconque contrevient à un règlement pris en application de l’alinéa 117 h) de la Loi sur les armes à feu régissant l’entreposage, la manipulation, le transport, l’expédition, l’exposition, la publicité et la vente postale d’armes à feu et d’armes à autorisation restreinte.

(3) Quiconque commet l’infraction prévue au paragraphe (1) ou (2) est coupable :
a) soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal :
(i) de deux ans, dans le cas d’une première infraction,
(ii) de cinq ans, en cas de récidive;
b) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.

Analyse et décision du directeur

Le 17 septembre 2022, le plaignant a été grièvement blessé au cours de son arrestation par des agents du SPT. Un de ces agents a été désigné comme étant l’agent impliqué (AI) aux fins de l’enquête de l’UES. L’enquête est maintenant terminée. Après avoir évalué le dossier de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI ait commis une infraction criminelle en lien avec l’arrestation et la blessure du plaignant.

En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les agents de police sont exonérés de toute responsabilité criminelle pour le recours à la force dans l’exécution de leurs fonctions, à condition que cette force soit raisonnablement nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou autorisé de faire en vertu de la loi.

La fouille du plaignant et de son véhicule était légalement autorisée en vertu du paragraphe 12 (3) de la Loi sur le contrôle du cannabis. Après avoir constaté, lors des premières étapes du contrôle routier, que le plaignant avait du cannabis sur lui, dans un sachet dont le haut était déchiré, les agents avaient des motifs raisonnables de croire qu’il y avait possiblement d’autres quantités de cannabis dans le véhicule, en contravention de la Loi.

Quand le plaignant s’est emparé du sac et a tenté de s’enfuir, son arrestation était aussi justifiée pour des infractions criminelles, notamment « entrave à la justice » et « usage négligent d’une arme à feu », en contravention des articles 139 et 86 du Code criminel, respectivement.

En ce qui concerne la force utilisée pour faciliter l’arrestation du plaignant, à savoir un placage à terre suivi de multiples coups de poing par l’AI sur le côté gauche de la tête du plaignant et une décharge d’arme à impulsion par l’AT no 1 dans le dos du plaignant, je ne peux pas raisonnablement conclure qu’elle n’était pas légalement justifiée. Le placage à terre était une tactique légitime. Les agents avaient des raisons de croire que le plaignant tentait de s’enfuir avec une arme à feu – un risque clair et urgent pour la sécurité publique. Dans les circonstances, ils étaient en droit de contrecarrer rapidement et de manière décisive les intentions du plaignant en le mettant à terre. Le nombre de coups de poing assénés par l’AI était considérable – environ 17 coups à la tête alors que le plaignant était allongé sur la chaussée. L’agent a dit qu’il craignait que le plaignant tente de s’emparer du pistolet qui était dans le sac et qu’il lui a asséné ces coups pour l’empêcher de le faire. Dans les vidéos de l’altercation enregistrées par les caméras corporelles, on peut entendre le plaignant demander à plusieurs reprises pourquoi il recevait des coups de poing et protester qu’il ne tenait « rien ». Néanmoins, dans son entrevue avec l’UES, le plaignant a laissé entendre qu’il avait en fait lutté quelque peu avec les agents jusqu’à ce qu’il « abandonne » après avoir reçu la décharge électrique de l’arme à impulsions. Dans ce dossier, la preuve ne permet pas d’établir raisonnablement que les craintes de l’AI étaient excessives. Ceci étant, la nature et l’intensité de la force qu’il a utilisée se situaient dans la fourchette de ce qui était raisonnable dans les circonstances pour empêcher qu’une arme létale puisse être utilisée. On peut arriver à la même conclusion en ce qui concerne la décharge de l’arme à impulsions par l’AT no 1. En fait, c’est peu après cette décharge que le plaignant a dégagé son bras gauche de sous son corps et qu’il a été menotté dans le dos.

En conséquence, bien que j’accepte que la fracture du nez du plaignant résulte des coups de poing assénés par l’AI, je suis convaincu que l’agent s’est comporté dans les limites du droit criminel tout au long de son intervention. Il n’y a donc aucune raison de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.


Date : 13 janvier 2023


Approuvé par voie électronique par


Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) L’heure est dérivée de l’horloge interne de l’arme à impulsions, qui n’est pas nécessairement synchronisée avec l’heure réelle. [Retour au texte]
  • 2) Les éléments de preuve suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties importantes de ces éléments de preuve sont résumées ci-après. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.