Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 22-PVI-227

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur les blessures graves subies par un jeune de 17 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 3 septembre 2022, à 9 h 14, la Police provinciale de l’Ontario (la Police provinciale) a informé l’UES d’une blessure subie lors d’une collision avec un véhicule de la Police provinciale.

Le 3 septembre 2022, vers 4 h 30, l’hélicoptère de la Police régionale de York (PRY) aurait repéré un véhicule roulant à environ 200 km/h sur l’autoroute 401. L’équipage de l’hélicoptère a signalé la situation à son centre de communication et a suivi le véhicule depuis les airs. Le véhicule s’est arrêté à un dépanneur Circle K situé à l’intersection des routes Dean Park et Meadowvale, à Scarborough. Un véhicule de la PRY est entré dans le stationnement, et l’agent à bord a vu qu’il y avait quatre occupants à l’intérieur du véhicule en question, et qu’ils portaient tous un masque. Lorsque le conducteur du véhicule a vu le véhicule de la PRY, il a pris la fuite en direction de l’autoroute 401.

Des agents de la Police provinciale se sont engagés sur l’autoroute 401 et ont tenté de bloquer le véhicule, mais sans succès. Le véhicule en question a pris la fuite en direction ouest sur l’autoroute 401, poursuivi par trois véhicules de la Police provinciale.

Le véhicule a quitté l’autoroute à la hauteur de la route Avenue et est entré dans un quartier résidentiel. Il a circulé dans une rue se terminant par un cul-de-sac, puis a fait demi-tour pour partir. La Police provinciale est arrivée et a bloqué la rue, et le véhicule est entré en collision avec un véhicule de la Police provinciale.

L’un des occupants du véhicule a pris la fuite à pied. Les trois autres occupants sont restés dans le véhicule et ont été arrêtés. Ils ont tous été légèrement blessés. Le jeune homme qui s’est enfui – le plaignant – est sorti des buissons où il s’était caché; il était en détresse médicale. Il a été transporté à l’hôpital.

L’incident est survenu à l’intersection de la route Tresillian et de l’avenue Bombay, à Toronto.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 3 septembre 2022 à 9 h 44

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 3 septembre 2022 à 11 h

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 2
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 3
Nombre de spécialistes de la reconstitution des collisions assignés : 1

Personne concernée (« plaignant ») :

Homme de 17 ans; a participé à une entrevue

Le plaignant a participé à une entrevue le 26 septembre 2022.

Témoins civils

TC no 1 A participé à une entrevue
TC no 2 A participé à une entrevue
TC no 3 N’a pas participé à une entrevue [1]
TC no 4 A participé à une entrevue
TC no 5 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à des entrevues entre le 3 et le 12 septembre 2022.

Agents impliqués

AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué

Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue
AT no 3 A participé à une entrevue
AT no 4 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées
AT no 5 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées
AT no 6 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées
AT no 7 A participé à une entrevue
AT no 8 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées

Les notes de service de tous les agents témoins désignés ont été examinées. Seuls les agents qui étaient présents dans le secteur au moment de la collision ont participé à une entrevue.

Les agents témoins ont participé à des entrevues entre le 9 septembre 2022 et le 11 octobre 2022.

[Remarque : Un agent témoin est un agent ou une agente (agent de police, agent spécial employé par la Commission des parcs du Niagara ou agent de la paix du Service de sécurité de l’Assemblée législative) qui, de l’avis du directeur de l’UES, est en cause dans l’incident faisant l’objet de l’enquête, sans toutefois être un agent impliqué à l’égard de l’incident.

À la demande de l’UES, les agents témoins ont l’obligation légale, en vertu de la Loi sur l’UES, de participer à une entrevue avec les enquêteurs de l’UES et de répondre à toutes leurs questions, dans la mesure où elles sont raisonnables. L’UES a aussi le droit d’obtenir une copie de leurs notes.]

Éléments de preuve

Les lieux

Le quartier où la collision est survenue est résidentiel et accessible par la route Avenue en direction nord, juste au nord de l’autoroute 401.

Le quartier a une forme ovale et est composé de plusieurs rues orientées nord sud qui rejoignent l’avenue Bombay au sud et Sandringham Drive au nord.

La collision s’est produite juste au nord de l’intersection de la route Tresillian et de l’avenue Bombay. À cet endroit, plusieurs grands arbres matures empêchaient de voir les lieux de la collision depuis les airs.

Une Honda Accord blanche se trouvait du côté est de la route Tresillian et en partie sur la bordure de celle-ci. Elle était orientée vers le sud. Un véhicule Ford Explorer aux couleurs de la Police provinciale était orienté vers le nord-est, et le devant de ce véhicule était en contact avec le devant de la Honda Accord. Les deux véhicules ont été détruits par un incendie.

Une marque de pneu relevée sur la chaussée au nord du lieu de la collision correspondait au mouvement de la Honda Accord, qui circulait dans la voie en direction sud, puis s’est déplacée dans la voie en direction nord.

La Police provinciale a signalé qu’un sac contenant un pistolet à air comprimé a été récupéré sur les lieux et remis à la PRY, qui enquêtait sur un vol qualifié présumé.

Figure 1 – Image of scene incident
Figure 1 – Image des lieux de l’incident


Figure 2 – Frontal vehicle damage to Honda Accord
Figure 2 – Dommages au devant de la Honda Accord

Figure 3 – Honda Accord vehicle damage
Figure 3 – Dommages à la Honda Accord

Schéma des lieux


Éléments de preuve matériels

Le Service de police de Toronto (SPT) a récupéré le module de commande de coussin gonflable du véhicule de la Police provinciale conduit par l’AI.

La PRY a obtenu les éléments suivants parmi les articles personnels des jeunes concernés et les articles qui se trouvaient dans la Honda Accord :

• un pistolet à air comprimé (récupéré sur les lieux par la Police provinciale);
• le portefeuille et le permis de conduire d’un tiers non impliqué;
• un tournevis;
• un certain nombre de télécommandes de démarrage pour automobiles;
• un programmeur de clé AutoProPAD BASIC (utilisé pour programmer des clés électroniques d’automobiles) [2];
• un couteau de poche;
• des devises et de nombreuses cartes de crédit prépayées;
• des vêtements;
• des téléphones cellulaires;
• un dispositif HMKIS Diamond Selector (pour l’authentification des diamants).

Éléments de preuves médicolégaux

Données GPS

Deux ensembles de données ont été générés par les véhicules de la Police provinciale : des données MPSGate et des données GPSGate. L’un des ensembles de données a été enregistré par le poste de travail mobile à bord du véhicule, tandis que l’autre ensemble a été transmis au Centre de communication de la Police provinciale à titre de mesure de gestion du parc automobile et de sécurité des agents.

Les données MPSGate comprenaient un point de données enregistré sur la route Tresillian. À 4 h 0 min 27 s, le véhicule conduit par l’AI circulait en direction nord sur la route Tresillian à 45 km/h.

Les données GPSGate comprenaient des points de données supplémentaires enregistrés sur la route Tresillian. À 4 h 0 min 26 s, le point de données 147 indique que l’AI vient de tourner sur la route Tresillian et circule à une vitesse de 37 km/h à une orientation de 308 degrés (nord-ouest). Le point de données 148 indique qu’il circule à une vitesse de 75 km/h en direction nord. Le point de données suivant, soit le point 149, montre que son véhicule est arrêté.

Témoignage d’expert

Rapport du spécialiste de la reconstitution des collisions

L’UES a pris des mesures, par l’intermédiaire de la Police provinciale, pour qu’un spécialiste de la reconstitution des collisions à la retraite spécialisé dans le travail avec les données sur les collisions examine le module de commande de coussin gonflable endommagé du véhicule conduit par l’AI. Ce spécialiste a effectué son examen le 5 décembre 2022. Les données sur la collision tirées du module indiquent ce qui suit :

• cinq secondes avant la collision, l’AI roulait à 23 km/h et a effectué un virage brusque vers la droite, ce qui correspond au moment où il tournait sur la route Tresillian depuis l’avenue Bombay;
• quatre secondes avant la collision, l’AI achevait son virage et roulait à 29 km/h;
• trois secondes avant la collision, l’AI roulait à 42 km/h en changeant peu ou pas sa direction;
• deux secondes avant la collision, l’AI roulait à 50 km/h et il a légèrement braqué à droite;
• une seconde avant la collision, l’AI a effectué un virage brusque vers la droite;
• au moment de la collision, l’AI roulait à 26 km/h et braquait légèrement à gauche.

Aucune donnée du module de commande de coussin gonflable n’était disponible pour la Honda Accord.

Le spécialiste de la reconstitution des collisions de l’UES a déterminé que les dommages causés par la collision à l’avant du véhicule de la Police provinciale et de la Honda Accord étaient modérés. Il a déterminé qu’avant la collision, la Honda Accord circulait en direction ouest sur Sandringham Drive et a effectué un virage pour ensuite circuler sur la route Tresillian en direction sud.

L’AI a circulé en direction ouest sur l’avenue Bombay, a tourné à droite sur la route Tresillian, puis a commencé à accélérer normalement.

Deux secondes avant la collision, l’AI a freiné et a commencé à braquer vers la droite.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [3]

L’UES a examiné les enregistrements vidéo captés par l’hélicoptère de la PRY, Air2, ainsi que les enregistrements vidéo captés par les systèmes de surveillance des propriétaires des maisons situées dans le secteur où est survenue la collision.

Les enregistrements vidéo captés par l’hélicoptère Air2 de la PRY ont permis de documenter la conduite dangereuse du conducteur de la Honda Accord. Ils ont également permis de documenter les efforts de la Police provinciale, qui a tenté de bloquer la Honda Accord alors qu’elle circulait sur l’autoroute 401. Malheureusement, à l’endroit où est survenue la collision, des arbres obstruaient la vue depuis les airs.

On a examiné les enregistrements vidéo des résidences situées dans le secteur où est survenue la collision. L’enregistrement de la résidence no 1 est celui qui a été le plus utile pour comprendre les événements. Il est résumé ci-dessous.

Enregistrement vidéo capté par l’hélicoptère Air2 de la PRY

À 3 h 5 le 3 septembre 2022, l’agent de police à bord de l’hélicoptère Air2 signale qu’il voit un véhicule dont le conducteur a possiblement les facultés affaiblies. Il dit que le véhicule circulait en direction est sur l’autoroute 407 à environ 200 km/h et est presque entré en collision avec un autre véhicule. Le véhicule en question [une voiture Honda Accord blanche] est ensuite sorti de l’autoroute pour circuler à grande vitesse dans les rues de Scarborough. L’agent à bord d’Air2 signale que l’arrestation du conducteur pour conduite dangereuse est fondée, puisque celui-ci circule à une vitesse correspondant au double de la limite permise et qu’il passe très près d’autres véhicules.

À 3 h 19, la Honda s’arrête à un centre commercial situé au 30, route Dean Park, à Scarborough, et les quatre occupants sortent de la voiture et se dirigent vers l’entrée d’un dépanneur. Lorsqu’ils arrivent à l’entrée du commerce, ils font demi-tour et retournent au véhicule en courant.

La Honda est ensuite filmée circulant à une vitesse élevée dans Scarborough. L’agent à bord d’Air2 signale que le véhicule a omis de s’arrêter à un feu rouge à l’intersection de l’avenue Sheppard et circule à environ 185 km/h. Le véhicule circule dans des secteurs résidentiels en maintenant des vitesses élevées.

À 3 h 27, la Honda s’engage dans les voies en direction ouest de l’autoroute 401. L’agent à bord d’Air2 demande que l’on avise la Police provinciale. Il signale que le véhicule circule à des vitesses atteignant 200 km/h. L’inspecteur de service de la PRY autorise d’autres agents de la PRY à aider Air2 pour tenter de régler la situation.

La Honda sort de l’autoroute à la hauteur de la route Markham, puis revient sur l’autoroute 401 et circule en direction est. Un agent à bord d’un véhicule de patrouille signale que le véhicule en question est une Honda Accord blanche.

La Honda quitte l’autoroute 401 à la hauteur de la route Whites, et l’agent à bord d’Air2 demande à être remplacé par l’hélicoptère du Service de police régional de Durham (SPRD), Air1. La Honda revient ensuite dans les voies en direction ouest de l’autoroute 401.

L’agent à bord d’Air2 suggère que les agents qui se trouvent plus à l’ouest pourraient envisager de déployer des dispositifs permettant de crever les pneus, mais l’inspecteur de service de la PRY interdit la prise d’une telle mesure.

À 3 h 53, l’agent à bord d’Air2 signale avoir vu des véhicules de la Police provinciale circuler en direction ouest, de l’autre côté de la route Neilson. À 3 h 54, les systèmes de communication de la Police provinciale et de la PRY sont connectés. On signale que le véhicule roulait en direction ouest à une vitesse d’environ 170 km/h et est maintenant de l’autre côté de la route Kennedy.

À 3 h 57, l’agent à bord d’Air2 signale aux agents de la Police provinciale que les occupants du véhicule s’apprêtent à commettre un vol qualifié, et leur conseille donc de faire preuve de prudence.

À 3 h 58, la Honda Accord blanche ralentit tandis qu’elle s’approche de véhicules qui circulent lentement en raison d’un contrôle routier effectué par des agents de la Police provinciale. La Honda Accord se dirige vers l’accotement de droite de l’autoroute 401 et contourne la circulation ralentie ainsi que les véhicules de la Police provinciale. Les trois véhicules de la Police provinciale se lancent ensuite à la poursuite de la Honda Accord.

À 3 h 59, la Honda Accord quitte l’autoroute pour emprunter la route Avenue en direction nord. Elle tourne ensuite pour circuler en direction ouest sur l’avenue Bombay. La Honda effectue un virage vers le nord pour rejoindre le boulevard Ridley (la rue à l’est de la route Tresillian Road) et circule en direction nord jusqu’à Sandringham Drive, où elle tourne vers l’ouest. Sandringham Drive courbe vers le sud et devient la route Tresillian. La Honda emprunte cette courbe et se retrouve sur la route Tresillian. Elle est dans la voie en direction sud, mais au moment où l’AI effectue un virage sur la route Tresillian pour circuler en direction nord, la Honda se place dans la voie en direction nord.

La collision entre la Honda Accord et le véhicule conduit par l’AI s’est produite sous le feuillage d’arbres matures, ainsi, elle n’est pas visible dans l’enregistrement.

Enregistrements des communications de la police

Les enregistrements des communications fournis par la PRY correspondent aux enregistrements vidéo captés par l’hélicoptère Air2 de la PRY.

Lorsque les quatre jeunes sortent du véhicule, au dépanneur situé sur la route Dean Park, l’agent à bord du véhicule de la PRY signale avoir vu les occupants du véhicule en question à un dépanneur dans le secteur du chemin Dean Park et dit croire que les occupants sont sur le point de commettre un vol qualifié.

À 19 min 42 dans l’enregistrement, on connecte le système de communications de la PRY à celui de la Police provinciale pour que les agents des deux services puissent communiquer.

En ce qui concerne les enregistrements des communications de la Police provinciale, ceux ci commencent lorsque la PRY téléphone à la Police provinciale pour l’informer de la situation. La PRY signale que la Honda en question circulait à 200 km/h et que les occupants avaient possiblement l’intention de commettre un vol qualifié. Elle signale que les occupants portent un masque, qu’ils sont peut-être armés et que leur arrestation pour conduite dangereuse est justifiée. La PRY rapporte qu’un dispositif permettant de crever les pneus a été déployé et qu’un des pneus de la Honda a été endommagé. Des agents de la PRY suivent le véhicule, mais ne sont pas à sa poursuite.

Un agent de la Police provinciale qui est à Whitby est dépêché pour aider la PRY sur l’autoroute 401. Le répartiteur de la Police provinciale signale aux agents que les occupants portent un masque, sont soupçonnés d’être impliqués dans un vol qualifié et sont possiblement armés et dangereux.

Plus tard, lorsque l’on rapporte que la Honda Accord circule en direction ouest dans Toronto, l’AI demande au répartiteur de l’ajouter à l’appel. L’AI organise une tentative de blocage sur l’autoroute 401.

Un agent de la Police provinciale signale qu’il voit la Honda dans le secteur de la route Markham. On entend une voix d’homme correspondant à celle de l’AI dire « n’activez pas vos gyrophares, nous effectuons une tentative de blocage devant vous ».

Un agent signale une vitesse de 30 km/h, et une agente [l’AT no 3] signale ensuite que la Honda vient de la dépasser « à toute vitesse ». Elle donne le numéro de la plaque d’immatriculation de la Honda. L’AI lui ordonne de suivre la Honda avec ses gyrophares allumés.

Une fois que la Honda Accord a quitté l’autoroute, un agent signale que le véhicule se dirige vers le nord sur le boulevard Ridley et s’approche de Sandringham Drive. Un agent signale ensuite que la Honda a été impliquée dans une collision et que plusieurs personnes prennent la fuite à pied.

L’AI a plus tard parlé avec le personnel du Centre des communications de la Police provinciale par téléphone. Il a dit que c’était son véhicule qui avait été impliqué dans la collision. Il a expliqué « ils sont arrivés vers moi, il s’agit d’une collision frontale ». Il a dit qu’il avait une blessure au poignet et de la douleur au cou et à la tête, et qu’il se rendrait à l’hôpital.

Dans l’enregistrement des communications du SPT, on entend la PRY aviser le SPT de la situation en cours impliquant la Honda Accord dans le secteur de la route Dean Park. Aucun agent du SPT n’a répondu à l’appel. Lorsque la Honda Accord est revenue sur l’autoroute 401, la PRY a signalé qu’elle communiquerait avec la Police provinciale.

À 4 h 8, une femme appelle le SPT depuis son domicile pour signaler une collision et un incendie impliquant un véhicule de police.

Enregistrement vidéo de la résidence no 1

Un enregistrement d’une caméra de sécurité fourni par un homme montre la Honda Accord blanche passer à grande vitesse en direction sud devant l’entrée de la résidence de l’homme à 4 h 0 min 26 s. Le véhicule de la Police provinciale de l’AI semble avoir effectué un virage depuis l’avenue Bombay pour emprunter la route Tresillian. Tandis que la Honda Accord blanche s’est déplacée dans la voie en direction nord, le véhicule de l’AI s’est déplacé vers la droite (vers l’est), devant la Honda Accord qui arrivait. Les véhicules sont ensuite entrés en collision.

Documents obtenus du service de police

Sur demande, l’UES a obtenu les éléments suivants de la part de la Police provinciale entre le 8 septembre 2022 et le 19 octobre 2022 :
• copie des communications radio et téléphoniques connexes;
• données GPS du véhicule de la Police provinciale impliqué dans la collision;
• photographies des lieux;
• rapport d’incident général;
• rapport sur les dommages causés aux véhicules;
• notes de service des agents témoins;
• enregistrements de la caméra de sécurité de la résidence no 1;
• enregistrement capté par un téléphone cellulaire depuis la résidence (x2).

L’UES a obtenu les éléments suivants de la part de la PRY entre le 8 septembre 2022 et le 24 novembre 2022 :
• rapport tiré du système Versadex;
• résumé de l’intervention des agents;
• notes de service des agents témoins désignés;
• enregistrements des communications;
• photographies des lieux et des biens récupérés;
• enregistrements des caméras à bord des voitures;
• enregistrements de l’hélicoptère Air2 de la PRY.

L’UES a obtenu les éléments suivants de la part du SPT entre le 12 septembre 2022 et le 22 septembre 2022 :
• rapport d’accident de véhicules automobiles;
• notes de l’inspecteur;
• enregistrements des communications;
• photographies des lieux.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a obtenu les éléments suivants auprès d’autres sources et les a examinés :
• enregistrement du téléphone cellulaire d’un témoin civil;
• enregistrements des caméras de sécurité de résidences (x3);
• enregistrements des caméras de sécurité du TC no 5 et photos prises par ce dernier.

L’UES a également obtenu, de la part de l’avocat du plaignant, un sommaire de congé du Centre Sunnybrook des sciences de la santé.

Description de l’incident

Les éléments de preuve recueillis par l’UES, y compris les entrevues menées avec les témoins de la police et civils ainsi que les séquences vidéo qui ont capté en partie l’incident, permettent d’établir le scénario suivant. Comme la loi l’y autorise, l’AI a choisi de ne pas participer à une entrevue avec l’UES et de refuser que l’on communique ses notes concernant l’incident.

Peu après 3 h le 3 septembre 2022, un agent de la PRY à bord d’un hélicoptère a vu une voiture circulant en direction est sur l’autoroute 407 à environ 200 km/h. Outre sa vitesse, la voiture passait dangereusement proche d’autres véhicules. L’hélicoptère a suivi la voiture jusqu’à Scarborough, où elle est sortie de l’autoroute et a circulé dans les rues de la ville à une vitesse élevée. Un agent à bord de l’hélicoptère a communiqué par radio que l’arrestation du conducteur de la voiture pour conduite dangereuse était fondée.
La voiture en question était une Honda Accord volée. Quatre jeunes étaient à bord : le TC no 1, le plaignant, le TC no 2 et le TC no 3. La voiture s’est rendue à un commerce – un dépanneur Circle K – situé au 30, route Dean Park, juste à côté de la route Meadowvale, au nord de l’autoroute 401.
 
L’agent à bord de l’hélicoptère avait suivi la Honda jusqu’au commerce et signalé son emplacement aux unités au sol. Un ou plusieurs véhicules de la PRY se sont rendus sur place, avec les gyrophares et sirènes activés.

Les quatre jeunes sont sortis de la Honda et s’apprêtaient à entrer dans le dépanneur lorsque leur attention a été attirée par des voitures de police qui arrivaient dans le secteur. Ils sont rapidement retournés à la Honda et ont fui les lieux.

Toujours suivie par l’hélicoptère, la Honda s’est engagée sur les voies en direction ouest de l’autoroute 401, sa vitesse atteignant 200 km/h. La Honda est sortie de l’autoroute à la route Markham, puis y est retournée, circulant cette fois en direction est. La voiture a parcouru environ 11 kilomètres, puis à la route Whites, elle est sortie de l’autoroute pour s’y engager de nouveau en direction ouest.
 
Environ à ce moment-là, la PRY a alerté la Police provinciale au sujet des déplacements de la Honda et de ce qui a été décrit comme un vol qualifié interrompu au dépanneur. Les systèmes de communication des deux services ont été connectés et des véhicules de la Police provinciale se sont rendus sur l’autoroute 401 pour intercepter la Honda.

Peu avant 4 h, l’AI, au volant d’un VUS de la police, s’est engagé sur les voies en direction ouest de l’autoroute 401 depuis la route Leslie. L’AT no 3 et l’AT no 2, chacun au volant de leur propre véhicule, se sont joints à lui. Lorsque l’agent à bord de l’hélicoptère a avisé les agents sur l’autoroute que la Honda s’approchait d’eux, l’AI a organisé une manœuvre de blocage. Essentiellement, les trois véhicules de police, circulant côte à côte dans les voies rapides de l’autoroute, ont commencé à ralentir la circulation derrière eux dans l’intention de forcer la Honda à s’arrêter. Le plan a échoué lorsque la Honda a effectué une série de changements de voie et a dépassé les véhicules des agents par l’accotement de droite de l’autoroute.
Vers 3 h 59, la Honda a quitté l’autoroute pour circuler en direction nord sur la route Avenue. À ce moment-là, elle était poursuivie par les véhicules de l’AI, de l’AT no 3 et de l’AT no 2, dont les gyrophares et sirènes étaient tous activés. La Honda a tourné à gauche pour circuler en direction ouest sur l’avenue Bombay, puis a tourné à droite sur le boulevard Ridley, à gauche sur Sandringham Drive puis, enfin, à gauche sur la route Tresillian. Tandis que la voiture roulait en direction sud sur la route Tresillian vers l’avenue Bombay, elle a commencé à s’approcher du véhicule de l’AI, qui avait effectué un virage à droite depuis l’avenue Bombay et circulait en direction nord. À environ 50 mètres au nord de l’avenue Bombay, une collision frontale est survenue entre les deux véhicules du côté droit (est) de la route.

La Honda s’est arrêtée juste après la collision, orientée vers le sud-ouest et empiétant partiellement sur la bordure du côté est de la route Tresillian. Le véhicule de police s’est également arrêté après l’impact, au centre de la route, orienté vers le nord-est. Les devants des véhicules étaient toujours en contact.

Le TC no 1 et le plaignant sont sortis de la Honda et ont pris la fuite à pied. Des agents les ont retrouvés et arrêtés peu après. Le TC no 3 et le TC no 2 sont restés dans le véhicule et ont également été mis sous garde.
Le plaignant a été transporté à l’hôpital, où l’on a déterminé qu’il avait un poumon collabé et une fracture de la clavicule.

Dispositions législatives pertinentes

Article 320.13, Code criminel – Conduite causant des lésions corporelles

320.13 (1) Commet une infraction quiconque conduit un moyen de transport  d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances.

(2) Commet une infraction quiconque conduit un moyen de transport d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, et cause ainsi des lésions corporelles à une autre personne.


Analyse et décision du directeur

Le plaignant a subi une blessure grave lors d’une collision avec un véhicule de la Police provinciale le 3 septembre 2022. Le conducteur du véhicule – l’AI – a été désigné comme agent impliqué aux fins de l’enquête de l’UES. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation de la preuve, il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI a commis une infraction criminelle relativement à la collision.

L’infraction possible à l’étude est la conduite dangereuse causant des lésions corporelles aux termes du paragraphe 320.13(2) du Code criminel. Pour qu’il y ait infraction de négligence criminelle, un simple manque de diligence ne suffit pas. L’infraction repose en partie sur une conduite qui équivaut à un écart marqué par rapport au niveau de prudence qu’une personne raisonnable aurait exercé dans des circonstances similaires. Dans l’affaire qui nous concerne, la question est de savoir s’il y a eu un manque de diligence dans la manière dont l’AI a conduit son véhicule qui aurait causé la collision ou contribué à celle-ci et, le cas échéant, s’il est suffisamment grave pour justifier des sanctions criminelles. À mon avis, ce n’est pas le cas.
L’AI exerçait ses fonctions légitimes lorsqu’il est intervenu dans les efforts en cours de la police visant à localiser et immobiliser la Honda. Le conducteur de celle-ci roulait à des vitesses très élevées, ce qui constituait un danger pour les autres usagers de la route. On avait également signalé que les occupants du véhicule avaient été impliqués dans un vol qualifié interrompu dans un dépanneur. Dans ces circonstances, il était nécessaire, du point de vue de la sécurité publique, de faire en sorte que la Honda quitte la route et d’arrêter ses occupants.
 
Bien que la manière dont l’AI a intercepté la Honda puisse, à certains égards, mériter un examen approfondi, je suis également convaincu que les éléments de preuve ne permettent pas d’établir que l’agent a transgressé les limites prescrites par le droit criminel. Par exemple, on pourrait remettre en question la décision d’impliquer à leur insu des automobilistes dans la tentative de blocage, ce qui s’est produit lorsque l’agent a décidé de ralentir la circulation derrière lui. Cette tactique aurait pu blesser gravement des personnes innocentes. Tout compte fait, la Honda a pu contourner facilement le blocage. En outre, cette opération n’a aucunement contribué à la collision survenue sur la route Tresillian, qui a directement causé les blessures du plaignant.

 
En ce qui concerne la collision, il est difficile d’affirmer avec certitude que l’AI est intentionnellement entré en collision avec la Honda. Il me semble tout aussi probable que l’agent se plaçait simplement dans la bonne voie sur la route après son virage depuis l’avenue Bombay lorsque la Honda s’est déplacée dans la voie en direction nord et a heurté le véhicule de l’AI. Je ne suis pas non plus nécessairement convaincu qu’une tentative, de la part de l’AI, d’entrer en collision avec la Honda constituerait un écart marqué par rapport au niveau de prudence qu’une personne raisonnable aurait exercée dans ces circonstances. Bien que le règlement régissant les poursuites en Ontario limite cette tactique aux situations dans lesquelles il est nécessaire dans l’immédiat d’immobiliser un véhicule en fuite pour éviter des pertes de vie ou des lésions corporelles graves [4], on peut soutenir que la conduite dangereuse de la Honda constituait une telle situation, ou que la situation présentait un danger suffisant pour la sécurité publique pour que la conduite de l’agent ne soit pas considérée comme criminelle.

En conclusion, compte tenu des éléments de preuve recueillis, puisque je ne suis pas en mesure de conclure, sur la base de motifs raisonnables, que l’AI ne s’est pas comporté avec diligence et égard pour la sécurité publique tout au long de l’incident, il n’y a aucun motif de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.



Date : 30 décembre 2022

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Le TC no 3 était l’un des jeunes qui étaient à bord de la voiture Honda Accord concernée. On a communiqué avec lui par téléphone et il a accepté de parler à l’UES, mais il souhaitait que sa mère soit présente, et elle n’était pas à la maison à ce moment-là. Il a accepté de communiquer avec l’enquêteur lorsqu’elle serait de retour. Il ne l’a pas fait. On a tenté de le rappeler à de nombreuses reprises, mais il n’a pas répondu. [Retour au texte]
  • 2) Cet appareil est utilisé par les serruriers et les voleurs pour programmer des clés de véhicules. [Retour au texte]
  • 3) Les enregistrements en question contiennent des renseignements personnels de nature délicate et ne sont donc pas divulgués, aux termes du paragraphe 34(2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties importantes de ces enregistrements sont résumées ci-dessous. [Retour au texte]
  • 4) Règl. de l’Ont. 266/10, par. 9 (2) [Retour au texte]

Note:

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