Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 22-OVI-214

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur les blessures subies par un homme de 23 ans (le plaignant no 1) et par une femme de 22 ans (la plaignante no 2).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 23 août 2022, vers 12 h 33, la Police régionale de York (PRY) a avisé l’UES de la blessure subie par le plaignant no 1.
Selon la PRY, le 22 août 2022, vers 15 h 21, l’agent impliqué (l’AI) se rendait sur les lieux d’une collision pour aider à l’arrestation d’un conducteur aux facultés affaiblies. L’AI, au volant d’un véhicule de police banalisé, roulait vers le sud sur la rue Dufferin, avec ses gyrophares et sa sirène activés, quand une Tesla devant lui s’est rangée sur le bord de la route. L’AI a franchi la ligne médiane pour dépasser une Audi qui se dirigeait également vers le sud quand l’Audi a tourné devant lui. Les deux véhicules se sont retrouvés dans le fossé. Les occupants des véhicules ont été emmenés au Centre régional de santé Southlake (« l’hôpital Southlake »), où on ne leur a diagnostiqué aucune blessure grave. Le spécialiste de la reconstitution des collisions de la PRY avait terminé l’enquête sur la collision la veille.

Le 23 août 2022, à 12 h 15, le père du plaignant no 1 s’est présenté à un poste de la PRY pour dire que son fils se trouvait alors à l’Hôpital Cortellucci de Vaughan avec une possible fracture de la hanche.
 

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 23 août 2022 à 13 h 41.

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 23 août 2022 à 14 h 02.

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 5
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 0
Nombre de spécialistes de la reconstitution des collisions assignés : 1
 

Personne concernée (le « plaignant ») :

Plaignant no 1 Homme de 23 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés
Plaignante no 2 Femme de 22 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

Les plaignants ont participé à une entrevue le 14 septembre 2022.


Témoins civils (TC)

TC no 1 N’a pas participé à une entrevue (proche parent)
TC no 2 A participé à une entrevue

Le témoin civil a participé à une entrevue le 25 août 2022.
 

Agent impliqué

AI A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

L’agent impliqué a participé à une entrevue le 23 septembre 2022.


Éléments de preuve

Les lieux

La collision s’est produite près d’une allée privée, l’impact ayant eu lieu dans la voie en direction nord de la rue Dufferin.

Le plaignant no 1 conduisait une Audi A3 2018.

L’AI conduisait une Dodge Charger 2021.

Les deux véhicules étaient de couleur noire.

La circulation dans le secteur n’était contrôlée par aucun panneau ni feux de circulation. Il faisait jour. La chaussée était droite et de niveau, avec un marquage bien visible.

Le coin avant droit du véhicule de police de l’AI a percuté le panneau arrière gauche de l’Audi 2018 du plaignant no 1.


Véhicule de l’AI (endommagé sur le devant)

Figure 1 – Véhicule de l’AI (endommagé sur le devant)

Témoignage d’expert

Ce qui suit est un résumé des conclusions auxquelles est parvenu un spécialiste de la reconstitution des collisions de l’UES.


Rapport d’enquête technique sur la collision

L’AI roulait vers le sud et avait activé sa signalisation d’urgence. Il a tenté de dépasser un véhicule sur la gauche en franchissant la ligne médiane et en roulant sur la voie nord. Le plaignant no 1 roulait aussi vers le sud et tentait de tourner à gauche pour entrer dans une allée devant le véhicule de l’AI. L’AI n’a pas pu éviter la collision et son véhicule de police a frappé le côté conducteur du véhicule du plaignant no 1, qui a capoté dans le fossé.


Rapport d’enregistrement de données d’accident

Le 30 août 2022, un membre de l’unité d’enquête sur les collisions majeures de la PRY a téléchargé les données du module de contrôle des coussins gonflables (CCG) du véhicule de police de l’AI. Les coussins gonflables ne se sont pas déployés lors de la collision, mais un « événement de non-déploiement » a été enregistré, avec les données suivantes.

Entre quatre et cinq secondes avant la collision, l’AI roulait à 92 km/h puis 87 km/h. La pédale d’accélérateur n’était pas enfoncée. Le frein était activé. Trois secondes avant la collision, l’AI roulait à 79 km/h. La pédale d’accélérateur était enfoncée à 21 % et le frein était activé. Deux secondes avant la collision, l’AI roulait à 80 km/h. La pédale d’accélérateur était enfoncée à 87 % et le frein était relâché. À 1,1 seconde avant la collision, l’AI a freiné. Le système de freinage antiblocage s’est activé. Au moment de la collision, l’AI roulait à 58 km/h. Le frein était activé.

Le 29 septembre 2022, la PRY a téléchargé les données du CCG de l’Audi du plaignant no 1. Le module a enregistré le déploiement des coussins gonflables avec les données suivantes.

Entre quatre secondes et une seconde avant la collision, le plaignant no 1 a ralenti de 65 km/h à 21 km/h. La pédale de frein était enfoncée. La pédale d’accélérateur n’a pas été activée. À partir d’environ deux secondes avant la collision, le plaignant no 1 a commencé à braquer vers la gauche. Une seconde avant la collision, le plaignant no 1 a levé le pied de la pédale de frein. Il a appuyé à 100 % sur la pédale d’accélérateur et sa vitesse était d’environ 23 km/h au moment de l’impact. Le plaignant no 1 et sa passagère avant, la plaignante no 2, n’avaient pas bouclé leurs ceintures de sécurité.


Conclusions

L’AI, ses gyrophares et sa sirène activés, roulait vers l’est sur 17 th Side Road, puis vers le sud sur la rue Dufferin à une vitesse supérieure à la limite de vitesse affichée.

Arrivé à la hauteur de l’allée d’une maison, le plaignant no 1 a freiné et ralenti en se préparant à tourner à gauche pour s’engager dans l’allée. Le TC no 2 a freiné et ralenti derrière lui. L’AI approchait de la Tesla du TC no 2. L’AI a freiné et ralenti. Les véhicules qui roulaient vers le nord se sont déplacés sur la droite vers l’accotement en gravier pour céder le passage à l’AI dans la voie nord. Les gyrophares et la sirène du véhicule de l’AI étaient activés. L’AI a aussi utilisé son klaxon. Il a accéléré et franchi la ligne médiane pour dépasser le TC no 2 et le plaignant no 1.

L’AI commençait à dépasser le TC no 2 quand il a vu le plaignant no 1 dans la voie nord en train de tourner à gauche, en travers de la trajectoire que l’AI s’apprêtait à suivre vers le sud. L’AI a immédiatement freiné à fond, mais n’a pas pu éviter une collision.

Éléments de preuves médicolégaux

Données du système de positionnement global (GPS) du véhicule de police de l’AI

Ce qui suit est un résumé de ces données.

Entre 15 h 15 et 15 h 18, le véhicule de l’AI était immobile sur 17 th Side Road, à environ 1,3 kilomètre à l’ouest de la rue Dufferin. À 15 h 19, l’AI roulait vers l’est sur 17 th Side Road à 91 km/h, puis à 89 km/h jusqu’à la rue Dufferin. Sa vitesse moyenne était de 86 km/h dans un secteur où la limite affichée était de 50 km/h.

À 15 h 20, l’AI roulait vers le sud sur la rue Dufferin, sur environ 1,2 kilomètre, à des vitesses enregistrées de 95 km/h, 118 km/h, 116 km/h, puis 83 km/h. Il a maintenu une vitesse moyenne de 92 km/h dans le secteur où la limite de vitesse était de 80 km/h.

A 15 h 20 min 53 s, le véhicule de l’AI s’est immobilisé sur le lieu de la collision, où il est resté.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies


Communications de la police

À 15 h 22 min 25 s, la plaignante no 2 appelle le 9-1-1 pour signaler une collision impliquant un véhicule de police. Elle ajoute qu’au moment où ils tentaient de tourner à gauche pour rentrer chez eux et roulaient à environ 30 km/h, le véhicule de police impliqué a frappé de plein fouet le côté de leur véhicule et l’a fait capoter. Elle demande ensuite de l’aide pour un homme – le plaignant no 1 – qui est coincé dans le véhicule.

À 15 h 30 min 36 s, une femme appelle le 9-1-1 pour signaler une collision entre deux véhicules dont l’un a fait un tonneau sur la rue Dufferin, au nord de King. Un des véhicules impliqués est un Dodge Charger, dont les feux d’urgence étaient activés. La femme ajoute qu’on a extirpé un homme [maintenant connu comme étant le plaignant no 1] d’un véhicule et qu’un agent s’occupe de lui.

La femme a appris que la plaignante no 2 et le plaignant no 1 étaient les seules personnes à bord du véhicule et que celui-ci effectuait un virage quand le véhicule de police l’a percuté. Elle croit que la plaignante no 2 et le plaignant no 1 sont blessés.


Vidéo de la caméra de tableau de bord de la Tesla

Le 25 août 2022, à 13 h 30, la PRY a remis à l’UES une copie de la vidéo enregistrée par le système de caméras de la Tesla, modèle 3, que conduisait le TC no 2. L’enregistrement de 59 secondes contient des images prises par les caméras avant et arrière, ainsi que par les caméras latérales.


Caméra frontale de la Tesla

Au début de la vidéo, on peut voir une Tesla [conduite par le TC no 2] derrière une Audi de couleur foncée [conduite par le plaignant no 1] sur un tronçon rectiligne de route rurale à deux voies, entourée d’arbres et de buissons et bordée d’accotements pavés très étroits. Il fait nuageux et la chaussée est sèche.

À 10 secondes du début de la vidéo, plusieurs véhicules en direction nord semblent se ranger sur le bord de la route pour laisser le passage libre.

À 21 s du début de la vidéo, le plaignant no 1 freine. À 22 secondes, le plaignant no 1 active son clignotant gauche. La médiane centrale est une double ligne continue. À 31 secondes, le plaignant no 1 tente de virer à gauche. À 32 secondes, le véhicule du plaignant no 1 disparaît du champ de vision de la caméra.

À 35 secondes, le TC no 2 immobilise son véhicule sur l’accotement droit.


Caméra gauche

Entre 11 et 20 secondes du début de la vidéo, trois véhicules circulant vers le nord sur la rue Dufferin se rangent sur l’accotement.

À 24 secondes du début de la vidéo, on peut voir au loin les gyrophares d’un véhicule de police (conduit par l’AI) qui approche.

À 29 secondes, l’AI franchit la ligne médiane double et roule dans la voie en sens inverse. À 31 secondes, l’AI dépasse le TC no 2 sur la gauche, passant juste entre lui et un VUS de couleur foncée qui est sur l’accotement en direction nord.

À 31 secondes, le véhicule de l’AI disparaît du champ de vision de la caméra.

À 34 secondes, le TC no 2 ralentit.

À 36 secondes, l’AI entre en collision avec le véhicule du plaignant no 1, qui fait un tonneau et s’immobilise sur le toit.

À 41 secondes, le TC no 2 immobilise son véhicule sur l’accotement.


Vue de la caméra arrière

À 24 secondes du début de la vidéo, on peut voir au loin les gyrophares d’un véhicule de police qui approche. À 29 secondes, l’AI franchit la ligne médiane double et roule dans la voie en sens inverse puis dépasse le TC no 2 sur la gauche.

À 31 secondes, le véhicule de l’AI disparaît du champ de vision de la caméra.


Vidéo du système de caméra à bord du véhicule de police de l’AI

Cette vidéo permet de voir devant le véhicule de police conduit par l’AI – une Dodge Charger 2021 banalisée de la PRY, de couleur noire, équipée de gyrophares et d’une sirène.

Le 22 août 2022, à 19 h 19 min 5 s, l’AI roulait vers l’est sur 17 th Side Road, à King, dans un secteur où la vitesse est limitée à 50 km/h. Sa sirène est activée. 17 th Side Road est une route pavée à deux voies séparées par une seule ligne jaune continue. À 19 h 19 min 37 s, l’AI s’engage sur la voie en direction ouest pour dépasser un VUS gris, puis poursuit sa route dans la voie est.

À 19 h 19 min 48 s, l’AI approche d’un panneau d’arrêt à l’intersection de la rue Dufferin. Il s’engage dans la voie ouest de 17 th Side Road et dépasse un VUS blanc, côté conducteur, qui s’est immobilisé à l’intersection. L’AI tourne à droite et roule vers le sud sur la rue Dufferin, une route pavée à deux voies avec un accotement en gravier et une limite de vitesse de 80 km/h. Il s’agit d’une zone rurale avec quelques allées privées. La sirène du véhicule de l’AI est toujours en marche sur la rue Dufferin, mais la vidéo ne permet pas de voir si les gyrophares sont activés.

De 19 h 19 min 50 s à 19 h 20 min 25 s, l’AI roule vers le sud sur la rue Dufferin. Deux véhicules en direction nord se rangent sur la droite, sur l’accotement, ce qui suggère que les gyrophares de l’AI sont activés. L’AI franchit légèrement la ligne médiane, et roule partiellement dans la voie nord. À 19 h 20 min 30 s, on peut entendre une voix masculine dire [traduction] : « Homme non menotté », le répartiteur de la police répète la même chose. Deux véhicules [maintenant connus pour être une Tesla grise conduite par le TC no 2 et une Audi 2018 conduite par le plaignant no 1] sont devant le véhicule de police, dans la voie sud.

À 19 h 20 min 32 s, on peut voir une Lexus et une Toyota s’écarter sur la droite de la route, avec leurs roues gauches sur la ligne blanche qui délimite la chaussée. Plusieurs longueurs de voiture derrière le TC no 2, on peut entendre un avertisseur pneumatique en plus de la sirène. Les feux de freinage arrière du TC no 2 s’allument. Un VUS de couleur foncée dans la voie nord-est partiellement sorti de la chaussée et roule sur l’accotement en gravier du côté est, juste au nord d’une allée privée à l’est de la route.

À 19 h 20 min 34 s, à environ une longueur de voiture derrière le TC no 2, l’AI s’engage dans la voie nord. Le plaignant no 1 commence à virer vers le sud-est en direction de l’allée privée. L’AI passe entre le TC no 2 et le VUS de couleur foncée qui est en direction nord. Le plaignant no 1 poursuit son virage à gauche vers le sud-est, et est maintenant dans la voie en direction nord.

À 19 h 20 min 35 s, l’avant droit du véhicule de police de l’AI percute la custode et la portière arrières gauches de l’Audi. L’Audi du plaignant no 1 est propulsée vers le sud-est, hors de la chaussée. Il se renverse sur le côté droit et s’immobilise sur le toit immédiatement au sud de l’allée privée.

L’AI avise le centre de répartition de la police de la collision et demande les Services médicaux d’urgence. Il sort ensuite de son véhicule et, avec l’aide d’autres personnes, vient en aide au plaignant no 1, qui est coincé sous l’Audi.

Onze minutes après la collision, une femme demande à l’AI ce qui est passé et s’il avait essayé d’arrêter le véhicule. L’AI répond [traduction] : « Je roulais vers le sud, avec mes gyrophares et sirènes allumés pour me rendre là-bas. Les véhicules qui roulaient vers le sud se déplaçaient sur le côté pour me laisser passer. Je rattrape deux voitures, elles ralentissent et je commence à les dépasser, pensant que la voiture de devant va aussi me laisser passer, mais il me coupe la route devant moi, alors je le frappe sur le côté et bien entendu, je l’ai poussé et la voiture s’est retournée. »

La vidéo se poursuit jusqu’à 23 h 18, sans aucun autre événement pertinent.

Éléments obtenus auprès du service de police

Sur demande, la PRY a remis à l’UES les éléments et documents suivants entre le 24 août et le 3 octobre 2022 :
  • Enregistrements des communications;
  • Historique de l’appel;
  • Rapport général d’incident;
  • Vidéo de la caméra à bord du véhicule de l’AI;
  • Notes d’agent (x17);
  • Données du module de CCG de l’Audi;
  • Examen mécanique de la Dodge;
  • Examen du véhicule Dodge;
  • Données du module de CCG de la Dodge (voiture de police);
  • Rapport d’accident de véhicule automobile;
  • Schéma de collision de véhicule automobile;
  • Schémas 3D;
  • Vidéos de véhicule (Tesla);
  • Photographies de la scène, examen du véhicule et examen mécanique de la Dodge;
  • Déclaration de témoin – témoin civil (x2);
  • Déclaration de témoin (TC no 2);
  • Historique de l’appel;
  • Renseignements sur le véhicule de police – mécanique ;
  • Renseignements sur le véhicule de police – examen de la Dodge;
  • Données GPS de véhicule de police;
  • Rapport d’incident.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a examiné les éléments suivants obtenus auprès d’autres sources :
  • Dossiers médicaux de l’Hôpital Southlake (plaignant no 1)
  • Dossiers médicaux de l’Hôpital Cortellucci de Vaughan (plaignant no 1)
  • Dossiers médicaux de l’Hôpital Southlake (plaignante no 2)
  • Dossiers médicaux de l’Hôpital Cortellucci de Vaughan (plaignante no 2)

Description de l’incident

Les événements importants en question ressortent clairement des éléments de preuve recueillis par l’UES, dont les entrevues avec le plaignant no 1, avec la plaignante no 2 et avec l’AI, les déclarations de témoins civils et des vidéos qui montrent l’incident.

Le jour en question, vers 15 h 20, le plaignant no 1 conduisait une berline Audi en direction sud sur la rue Dufferin, avec sa partenaire – la plaignante no 2 – comme passagère. Ils rentraient chez eux après être sortis pour déjeuner. Comme ils approchaient de leur maison, le plaignant no 1 a activé son clignotant et a ralenti, presque jusqu’à un arrêt complet, avant d’amorcer un virage à gauche pour traverser la voie nord et entrer dans son allée. Au même moment, une voiture de police qui roulait vers le sud a percuté le côté conducteur de l’Audi du plaignant no 1.

L’AI tentait de dépasser les véhicules en direction sud, y compris l’Audi, pour se rendre sur le lieux d’un appel de service pour « conducteur aux facultés affaiblies ». Auparavant, l’agent effectuait des contrôles routiers sur 17 th Side Road, entre les rues Keele et Dufferin, quand il a reçu l’instruction de répondre à l’appel. Il y avait une certaine urgence à se rendre sur place rapidement, car, selon les renseignements reçus, les agents déjà sur les lieux luttaient avec le conducteur aux facultés affaiblies et avaient du mal à le menotter. L’AI a allumé la signalisation d’urgence de son véhicule et s’est dirigé vers l’est sur 17 th Side Road, puis vers le sud sur la rue Dufferin. Voyant les véhicules en direction du nord se ranger sur le bord de la route à son approche, l’agent venait juste de doubler un véhicule en direction sud dans la voie nord lorsqu’il s’est trouvé face à l’Audi du plaignant no 1 qui tournait à gauche et lui barrait ainsi la route.

Sous le choc, l’Audi a été propulsée vers le sud-est et a fait un tonneau. Elle s’est finalement immobilisée dans le fossé du côté est de la route, au sud de la maison du plaignant no 1. Le plaignant no 1 s’est retrouvé coincé par son véhicule et incapable de se dégager jusqu’à ce que l’agent et des civils venus en aide parviennent à soulever suffisamment le véhicule pour le libérer. La plaignante no 2 a réussi à sortir du véhicule en rampant par une fenêtre arrière que l’AI avait brisée avec sa matraque.

Le plaignant no 1 et la plaignante no 2 ont été conduits à l’hôpital. Le plaignant no 1 a reçu un diagnostic de fracture de la hanche et de commotion cérébrale. La plaignante no 2 a subi une commotion cérébrale.

Dispositions législatives pertinentes

Article 320.13 du Code criminel – Conduite causant des lésions corporelles

320.13 (1) Commet une infraction quiconque conduit un moyen de transport  d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances.

(2) Commet une infraction quiconque conduit un moyen de transport d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, et cause ainsi des lésions corporelles à une autre personne.


 

Analyse et décision du directeur

Le 22 août 2022, le plaignant no 1 et la plaignante no 2 ont été grièvement blessés dans une collision de véhicules, à Aurora. Leur véhicule avait été heurté par un véhicule de police de la PRY. Le conducteur du véhicule de police a été identifié comme étant l’agent impliqué (AI) aux fins de l’enquête de l’UES. L’enquête est maintenant terminée. Après avoir évalué les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI ait commis une infraction criminelle en lien avec la collision.

L’infraction à prendre en considération est la conduite dangereuse causant des lésions corporelles, une infraction visée par le paragraphe 320.13 (2) du Code criminel. S’agissant d’une infraction de négligence criminelle, un simple manque de prudence ne suffira pas à engager la responsabilité. Cette infraction repose, en partie, sur une conduite qui constitue un écart marqué par rapport à la norme de prudence dont une personne raisonnable aurait fait preuve dans les circonstances. En l’espèce, il faut donc déterminer si l’AI, dans la manière dont il a conduit son véhicule de police, a causé la collision ou y a contribué, et a fait preuve d’un manque de prudence suffisamment flagrant pour justifier une sanction pénale. À mon avis, ce n’est pas le cas.

L’AI exerçait ses fonctions légitimes au moment de l’incident. Il avait reçu l’instruction de se rendre sur les lieux d’une bagarre entre des agents et un conducteur aux facultés affaiblies. Ne sachant pas exactement ce qui se passait, l’agent était en droit de vouloir se rendre rapidement sur les lieux.

En ce qui concerne la vitesse de l’agent, même si elle était parfois élevée, elle n’a pas mis indûment en danger la sécurité publique et ne constituait pas non plus un facteur important dans la collision elle-même. L’AI a dépassé la limite de vitesse, roulant pendant un certain temps à plus de 90 km/h sur 17 th Side Road (où la vitesse est limitée à 50 km/h) et à 118 km/h sur la rue Dufferin (où la vitesse est limitée à 80 km/h). Toutefois, il a roulé à cette allure avec son équipement de signalisation d’urgence activé, sur une chaussée sèche et par temps clair, avec une circulation routière modérée, et sans aucune preuve que sa vitesse a poussé d’autres véhicules prendre des mesures d’évitement. Au moment où il se dirigeait vers le sud à l’approche du lieu de la collision, l’AI roulait entre 80 et 90 km/h.

La manœuvre que l’AI a exécutée pour dépasser les autres véhicules justifie d’être examinée de près, mais là aussi, on ne peut pas établir que l’agent n’ait pas fait preuve de la prudence et du respect nécessaires pour la sécurité publique. Il ne semble pas que le plaignant no 1 ait commis beaucoup d’erreurs en lien avec la collision. Il a ralenti dans sa voie, a activé son clignotant et a attendu que la voie soit libre avant d’entamer son virage à gauche pour entrer dans son allée. Dans les circonstances, l’AI aurait peut-être dû faire preuve de davantage de prudence pour s’assurer de pouvoir dépasser les véhicules devant lui en toute sécurité avant de le faire. Cela dit, l’AI avait allumé sa sirène et ses gyrophares et avait vu les véhicules en direction nord se ranger sur le côté. Il aurait également semblé à l’AI, et c’est ce qu’il a pensé, que le plaignant no 1 ralentissait parce qu’il avait remarqué la présence de l’agent derrière lui. Ce n’est que lorsque le plaignant no 1 a viré à gauche que l’AI s’est rendu compte qu’il avait mal évalué la situation, mais il était alors trop tard.

En dernière analyse, lorsqu’on prend en considération la conduite de l’AI dans son ensemble, il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’agent ait transgressé les limites de prudence prescrites par le droit criminel. Il n’y a donc aucune raison de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.


Date : 21 décembre 2022


Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.