Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 22-OCI-190

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la blessure grave subie par un homme de 24 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 30 juillet 2022, vers 8 h du matin, la Police régionale de York (PRY) a avisé l’UES de la blessure subie par le plaignant.

Selon la PRY, le 30 juillet 2022, à 1 h 28, des agents de la PRY patrouillaient près de Portage Parkway et de l’avenue Buttermill, à Vaughan, lorsqu’ils ont vu un homme au comportement suspect dans un stationnement, près de voitures en stationnement. Lorsque l’homme [maintenant connu comme étant le plaignant] a vu les agents, il s’est enfui en courant. Les agents l’ont poursuivi et l’ont plaqué à terre. Le plaignant s’est plaint de douleurs à la mâchoire. Il a été conduit à l’Hôpital Cortellucci de Vaughan où on lui a diagnostiqué une fracture de la mâchoire. L’agent qui a procédé à l’arrestation est l’agent impliqué (AI) dans la présente enquête. Les agents témoins (AT) no 1, AT no 2 et AT no 3 étaient également sur les lieux au moment de l’incident.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 30 juillet 2022 à 8 h 39

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 30 juillet 2022 à 9 h 29

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 0

Un agent impliqué et trois agents témoins ont été désignés, dont un pour ses notes seulement.

Le plaignant a participé à une entrevue, mais n’a pas signé d’autorisation pour la communication de son dossier médical, de sorte que sa fracture de la mâchoire n’a pas été confirmée.

L’UES a demandé et obtenu une copie du rapport d’appel d’ambulance.

L’UES a aussi obtenu des copies des vidéos du système de caméra à bord de six véhicules de police et une copie des communications radio de la police.

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 24 ans, a participé à une entrevue

Le plaignant a participé à une entrevue le 3 août 2022.


Agent impliqué

AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.


Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
AT no 2 N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées.
AT no 3 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées

Les agents témoins ont participé à une entrevue le 5 août 2022.

Éléments de preuve

Les lieux

L’incident s’est déroulé au coin sud-est d’un stationnement situé au sud-est de l’intersection du boulevard Edgeley et d’Apple Mill Road, à Vaughan.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [1]

Enregistrements des communications de la police

Ce qui suit est un résumé des renseignements pertinents tirés de l’enregistrement des communications liées aux événements en question.

Le 30 juillet 2022, à 1 h 28 du matin, l’AI avise le centre de répartition qu’il a immobilisé son véhicule derrière un véhicule volé. Il précise que le véhicule volé est immobile. L’AI en décrit le conducteur comme un étant un homme blanc vêtu d’une veste de couleur claire. Dix secondes après son message initial, l’AI dit qu’il s’est lancé dans une poursuite à pied en direction d’un stationnement situé au 200 Apple Mill Road.

À 1 h 30, l’AI annonce qu’il a une personne sous garde.

À 1 h 32, l’AT no 3 dit qu’elle est à côté du véhicule volé : un VUS Mercedes Benz 2020, blanc.

À 1 h 36, l’AI demande qu’on appelle les services médicaux d’urgence (SMU) par mesure de précaution, car la personne arrêtée (le plaignant) a été plaquée à terre lors de son arrestation.

Vidéos de caméras à bord de véhicules

Ce qui suit est un résumé des images pertinentes enregistrées par les caméras de divers véhicules conduits des agents lors des événements en question.

Véhicule de l’AI
La vidéo du véhicule 1 de la PRY où était l’AI commence à 1 h 28 dans une zone commerciale qui comprend des tours et des terrains de stationnements. Le véhicule 1 circule autour d’îlots urbains; à 1 h 29, ses gyrophares s’activent. À 2 minutes 5 s du début de l’enregistrement, le véhicule 1 s’arrête derrière un VUS Mercedes. Une autre unité de police arrive sur le côté de la caméra et un agent de police fouille le Mercedes.


Véhicule de l’AT no 3
La vidéo du véhicule 2 conduit par l’AT no 3 commence à 1 h 28 du matin sur le boulevard Edgeley. À 1 h 29, l’AT no 3 entre dans un stationnement d’Apple Mill Road. On peut voir au loin, de l’autre côté du stationnement et d’Apple Mill Road, un homme vêtu d’une veste de couleur claire courir vers une voiture blanche et faire signe à la voiture de s’arrêter. La voiture continue sa route et l’homme est alors pris en chasse par un agent de police. L’agent [maintenant connu comme étant l’AI] plaque l’homme (le plaignant) à terre. On ne peut pas voir les détails du placage à terre à cause de la distance qui sépare la caméra de cet endroit.

Véhicule de l’AT no 2
La vidéo du véhicule 3 conduit par l’AT no 2 commence à 1 h 28 du matin. Après avoir roulé pendant un certain temps, le véhicule arrive dans un stationnement à 2 minutes 5 s du début de la vidéo. On peut voir le plaignant à plat ventre par terre, menotté dans le dos. L’AI est accroupi à côté de lui.

Éléments obtenus auprès du service de police

Sur demande, la PRY a remis à l’UES les éléments et documents suivants entre le 2 et le 17 août 2022 :
• Rapport sur l’historique de l’appel;
• Antécédents criminels du plaignant;
• Rapport général d’incident;
• Notes de l’AT no 1;
• Notes de l’AT no 3;
• Notes de l’AT no 2;
• Portail d’information de la police – le plaignant;
• Historique de la formation de l’AI;
• Enregistrements des communications;
• Vidéos de caméras à bord de véhicule de police;
• Procédure – arrestation et traitement d’un délinquant;
• Procédure – utilisation de la force.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a examiné les éléments suivants obtenus auprès d’autres sources :
• Dossiers des SMU.

Description de l’incident

Les événements importants en question ressortent clairement des éléments de preuve recueillis par l’UES, dont une entrevue avec le plaignant, et peuvent être brièvement résumés comme suit. L’AI n’a pas consenti à participer à une entrevue avec l’UES ni autorisé la communication de ses notes, comme il en avait le droit.

Vers 1 h 30, l’AI et l’AT no 1 étaient en patrouille à bord d’un véhicule de police banalisé lorsqu’ils ont repéré un VUS Mercedes s’arrêter maladroitement sur l’avenue Buttermill, au sud de Portage Parkway. L’AI a vérifié l’immatriculation du VUS et découvert qu’il s’agissait d’un véhicule dont le vol avait été signalé.

Le plaignant était au volant du VUS Mercedes. Il est sorti du VUS et a commencé à s’enfuir à pied.

L’AI, qui était le passager du véhicule de police, est sorti du véhicule et s’est lancé à pied à la poursuite du plaignant. Le plaignant a couru vers le nord, puis vers l’ouest, et finalement vers le sud-ouest en traversant les terrains de stationnement aux coins nord-est et sud-est de l’intersection du boulevard Edgely et d’Apple Mill Road. Il est tombé à une ou deux reprises et a finalement été plaqué à terre par l’AI qui était derrière lui. Sa mâchoire a heurté la chaussée, ce qui a causé sa fracture.

Quelques instants après avoir plaqué le plaignant, l’AI a été rejoint par son partenaire – l’AT no 1 – et par un autre agent. Le plaignant a été menotté dans le dos sans autre incident.

Après son arrestation, le plaignant a été conduit à l’hôpital où sa blessure a été constatée.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le 30 juillet 2022, le plaignant a subi une blessure grave lors de son arrestation par des agents de la PRY. Un agent a été désigné comme étant l’agent impliqué (AI) aux fins de l’enquête de l’UES. L’enquête est maintenant terminée. Après avoir évalué le dossier de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI ait commis une infraction criminelle en lien avec l’arrestation et la blessure du plaignant.

En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les agents de police sont exonérés de toute responsabilité criminelle pour le recours à la force dans l’exécution de leurs fonctions, à condition que cette force soit raisonnablement nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou autorisé de faire en vertu de la loi.

L’arrestation du plaignant était clairement justifiée au moment de la poursuite à pied et de son placage à terre puisqu’il était en possession d’un véhicule volé.

Je suis également convaincu que la force utilisée par l’AI – le placage – était légalement justifiée. Le plaignant était déterminé à éviter son appréhension par la police et avait entraîné l’agent dans une poursuite effrénée à travers des rues et des stationnements. Dans les circonstances, le placage semble constituer un recours à la force mesuré et proportionné pour arrêter le plaignant et le placer sous garde. Une fois à terre, le plaignant n’a opposé aucune résistance et a été menotté sans autre incident.

Au bout du compte, comme il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI se soit comporté autrement que légalement tout au long de son interaction avec le plaignant, il n’y a aucune raison de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.


Date : 22 novembre 2022


Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les éléments de preuve suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties importantes de ces éléments de preuve sont résumées ci-après. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.