Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 22-PVD-114

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur le décès d’un homme de 41 ans (le « plaignant »).Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur le décès d’un homme de 41 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 19 avril 2022, à 7 h 15, la Police provinciale de l’Ontario (la Police provinciale) a communiqué avec l’UES pour lui transmettre l’information suivante.

Le 19 avril 2022, vers 4 h, le témoin civil (TC) no 2 et un autre homme [on sait maintenant qu’il s’agissait du plaignant] ont commis une introduction par effraction dans le secteur de Hunstville et ont volé des cigarettes totalisant une valeur approximative de 30 000 $. Les deux personnes ont quitté les lieux à bord d’un véhicule, dont la description a été transmise aux agents de police qui se trouvaient dans le secteur. Peu de temps après, un agent de la Police provinciale de Bracebridge a localisé le véhicule en direction sud sur la route 11. Les agents ont tenté d’immobiliser le véhicule à l’aide d’une herse cloutée, en vain. Le véhicule a continué de circuler de façon erratique dans le secteur et les agents ont continué de tenter de l’intercepter à l’aide d’une herse cloutée, sans succès. Après un certain temps, le TC no 2 et le plaignant sont arrivés près d’une carrière où ils ont abandonné leur véhicule et en ont volé un autre qu’ils ont trouvé sur la propriété de la carrière. Ils ont continué de fuir les lieux et les policiers ont continué de suivre leur véhicule. Les policiers ont tenté à plusieurs autres reprises de déployer une herse cloutée et, finalement, ils ont réussi à en déployer une efficacement, ce qui a permis d’immobiliser le véhicule dans le secteur de la rue 8th Line et de la route secondaire 15/16 à Orillia, où le TC no 2 a été arrêté.

Le plaignant a volé un véhicule de la Police provinciale et s’est enfui.

Le plaignant et le véhicule ont été retrouvés un peu plus loin, près des rues 5th Line et 6th Line et de la route secondaire 15/16, où le véhicule avait fait plusieurs tonneaux. Le plaignant a été transporté à l’Hôpital Royal Victoria où, à 7 h 39, son décès a été constaté.

Le TC no 2 a été mis en état d’arrestation et aucune blessure n’a été signalée.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 19 avril 2022, à 10 h 10

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 19 avril 2022, à 11 h 40

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 5
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 2
 

Personne concernée (« plaignant ») :

Homme de 41 ans, décédé


Témoins civils

TC no 1 N’a pas participé à une entrevue (plus proche parent)
TC no 2 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue

Agents impliqués

AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué


Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue
AT no 3 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à des entrevues le 25 avril 2022 et le 18 juillet 2022.


Éléments de preuve

Les lieux

Les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES sont arrivés sur les lieux et ont commencé à les examiner le 19 avril 2022, à 11 h 40. À ce moment, le temps était frais et de la neige mouillée était tombée au sol. La chaussée était mouillée.

La route secondaire 15/16, à l’ouest de la rue 6th Line, est une route pavée orientée (principalement) d’est en ouest et celle ci est suffisamment large pour accueillir une voie de circulation dans chaque direction. Une partie de la route pavée est marquée d’une ligne jaune continue séparant la voie de circulation en direction est de celle en direction ouest.

Il s’agit d’un secteur rural, des résidences se trouvent des deux côtés de la route et sont entourées de champs. Le secteur est principalement constitué de champs.

La route est longée par deux accotements de gravier meuble adjacents à des fossés gazonnés des deux côtés.

Cinq véhicules se trouvaient sur les lieux :

Le véhicule de police no 1 était un Dodge Charger. Il s’agissait d’un véhicule aux couleurs de la police, orienté vers l’ouest, situé en partie sur l’accotement du côté nord de la route et en partie dans la voie en direction ouest. L’extérieur du véhicule a été examiné et on n’a trouvé aucun dommage causé par une collision récente.

Le véhicule de police no 2 était un Ford Interceptor. Il s’agissait d’un véhicule aux couleurs de la police et il était orienté vers le sud ouest dans la voie en direction est. L’extérieur du véhicule a été examiné et on n’a trouvé aucun dommage causé par une collision récente.

Le véhicule de police no 3 était un Dodge Charger. Il s’agissait d’un véhicule aux couleurs de la police et il était orienté vers l’ouest dans la voie en direction est. L’extérieur du véhicule a été examiné et on n’a trouvé aucun dommage causé par une collision récente.

Le véhicule de police no 4 était une Ford Taurus. Il s’agissait d’un véhicule aux couleurs de la police et il était orienté vers le sud dans le fossé sud. Ce véhicule reposait sur son flanc du côté conducteur et était gravement endommagé. Les dommages correspondaient à ceux créés lorsqu’un véhicule effectue plusieurs tonneaux. Les marques de pneu associées au véhicule indiquaient que ce dernier se dirigeait en direction ouest sur la route secondaire 15/16 lorsque les roues du côté droit ont quitté la partie pavée de la route, sont passées sur l’accotement du côté nord, puis ont quitté la route à l’ouest de l’entrée de cour de la résidence située au 430, route secondaire 15/16. Le véhicule a ensuite traversé la route et continué de rouler jusque sur l’accotement sud, puis dans le fossé sud, où il a fait des tonneaux. Des débris du véhicule étaient jonchés dans le fossé sud, y compris la barre de gyrophares, auparavant installée sur le toit du véhicule, et le pare chocs arrière du véhicule de police.

Le véhicule de police no 5, un Ford Explorer banalisé, était orienté vers l’est dans la voie en direction est. L’extérieur du véhicule a été examiné et on n’a trouvé aucun dommage causé par une collision récente.


Figure 1 – Photographie des lieux

Figure 1 – Photographie des lieux


Figure 2 – Véhicule de police accidenté

Figure 2 – Véhicule de police accidenté


Figure 3 – Photographie des lieux

Figure 3 – Photographie des lieux

Trajet et vidéo du trajet

Les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES ont produit une vidéo du trajet commençant sur la route secondaire 15/16 à la hauteur de la rue 8th Line, soit là où le plaignant s’est emparé du véhicule de police no 4. À cet endroit, la route secondaire 15/16 est pavée et longée par des accotements de gravier meuble adjacents à des fossés gazonnés. La route est orientée (principalement) est ouest et est suffisamment large pour accueillir une voie de circulation dans chaque direction. Il s’agit d’un secteur rural où les résidences sont peu nombreuses et dispersées le long de la route. À cette intersection, les véhicules sur la route secondaire 15/16 ont le droit de passage, la circulation à l’intersection de la rue 8th Line étant contrôlée par un panneau d’arrêt.

Plus à l’ouest sur la route secondaire 15/16, un panneau indique que la limite de vitesse est de 80 km/h. En se dirigeant toujours vers l’ouest, on s’approche d’une intersection avec la rue 7th Line. L’église Grace United Church se situe au coin nord est. La circulation à cette intersection est contrôlée par des panneaux d’arrêt dans toutes les directions. Toujours en direction ouest, après le panneau d’arrêt, on s’approche de l’intersection entre la route secondaire 15/16 et la rue 6th Line. Les véhicules sur la route secondaire 15/16 ont le droit de passage pour traverser cette intersection. En continuant en direction ouest, des panneaux signalent des sorties cachées et des bosses sur la chaussée. Le trajet prend fin sur les lieux de l’accident.

L’image ci dessous montre les lieux et le véhicule de police no 4, là où il a fini sa course, et la caméra pointe vers l’ouest.


Figure 4 – Capture d’écran de la vidéo du trajet

Figure 4 – Capture d’écran de la vidéo du trajet


Schéma des lieux

Schéma des lieux

Éléments de preuves médicolégaux


Résultats du Centre des sciences judiciaires

Toutes les observations du Centre des sciences judiciaires ont été faites par le médecin légiste. Le résultat de toute analyse est subordonné à la réception du rapport d’autopsie.


Données téléchargées du système mondial de localisation (GPS) et du système d’extraction de données sur les collisions

Les données du système GPS relatives aux huit véhicules de police qui sont intervenus à un moment ou à un autre le 19 avril 2022 auprès du plaignant ont été demandées le 19 avril 2022 et reçues par l’UES le 22 avril 2022, puis elles ont été examinées. Ces données étaient relevées à tous les 250 mètres lorsqu’un véhicule était en mouvement et à toutes les 20 secondes approximativement lorsqu’un véhicule était immobile.

Environ 80 secondes s’écoulent entre le moment où le plaignant commence à conduire le véhicule de police no 4 et le moment où l’accident se produit.

Le véhicule de police no 4 était immobilisé sur la route secondaire 15/16, environ 125 mètres à l’ouest de la rue 8th Line Nord. C’est à cet endroit que la camionnette dans laquelle prenaient place le TC no 2 et le plaignant a été interceptée. Les données du système GPS indiquent que le véhicule de police s’est immobilisé pendant environ 90 secondes, jusqu’à 6 h 4 min 30 s, avant de se diriger vers l’ouest sur la route secondaire 15/16 [1].

À 6 h 4 min 31 s, une seconde après que le plaignant a commencé à se diriger vers l’ouest dans le véhicule de police no 4, le véhicule de police no 5, conduit par l’AI, circule en direction ouest sur la route secondaire 15/16 Est, à environ 425 mètres à l’est de la rue 8th Line Nord et, par conséquent à environ 550 mètres à l’est de l’endroit où le plaignant s’est emparé du véhicule de police no 4.

Entre 6 h 4 min 30 s et 6 h 4 min 46 s, le plaignant accélère jusqu’à une vitesse de 150 km/h en direction ouest, environ 450 mètres à l’ouest de l’endroit où il s’est emparé du véhicule de police no 4.

À 6 h 4 min 51 s, 21 secondes après que le plaignant se soit enfui dans le véhicule de police no 4, l’AI ralentit à 51 km/h à l’endroit où le véhicule de police no 4 était immobilisé. Elle accélère ensuite en direction ouest sur la route secondaire 15/16.

À 6 h 5 min 1 s, 31 secondes après que le plaignant a commencé à conduire le véhicule de police no 4, il se dirige vers l’ouest vers l’intersection où la circulation est contrôlée par des panneaux d’arrêt dans toutes les directions entre la route secondaire 15/16 et la rue 7th Line Nord. La vitesse du plaignant est de 151 km/h 68 mètres avant cette intersection, ce qui laisse croire qu’il n’a pas ralenti et qu’il ne s’est pas arrêté au panneau d’arrêt. En fait, il s’engage dans l’intersection à une vitesse près de deux fois supérieure à la limite de vitesse affichée dans cette zone.

À 6 h 5 min 27 s, un peu moins d’une minute après s’être emparé du véhicule de police no 4, le plaignant se situe 350 mètres à l’est de la rue 6th Line Nord. À cette intersection, la circulation est contrôlée par un panneau d’arrêt sur la rue 6th Line Nord, le plaignant a donc le droit de passage. Il passe à une vitesse de 188 km/h et poursuit sa route en direction ouest.

À 6 h 5 min 36 s, 35 secondes après le passage du plaignant, l’AI traverse l’intersection entre la route secondaire 15/16 et la rue 7th Line Nord en direction ouest. Elle circule à une vitesse de 114 km/h. La vitesse maximale enregistrée par l’AI est de 146 km/h. La vitesse maximale enregistrée par le plaignant sur la même portion de route est de 188 km/h.

À 6 h 5 min 44 s, le plaignant se trouvait à l’ouest de la rue 6th Line Nord et a rencontré un léger virage à droite. Il accélère pour atteindre une vitesse de 179 km/h au moment de s’engager dans le virage. À peu près au même moment, l’AI se trouve tout juste à l’ouest de la rue 7th Line Nord, environ 1,5 km derrière le plaignant, et circule à 142 km/h. Le plaignant négocie ensuite un léger virage à gauche. À 6 h 5 min 47 s, 3 secondes après avoir franchi le premier virage, le plaignant est à l’ouest de l’entrée de cour de la résidence située au 430, route secondaire 15/16, et circule à 160 km/h.

Après 6 h 5 min 47 s, le véhicule de police no 4 n’enregistre plus les points de données du système GPS. À la lumière de la façon dont les points de données sont enregistrés, l’absence de données concorde avec le fait que l’accident s’est produit moins de 250 mètres à l’ouest du dernier point de données GPS et moins de 20 secondes après l’enregistrement de celui ci.

Entre 6 h 4 min 46 s et 6 h 5 min 47 s, soit 61 secondes au total, le plaignant circule vers l’ouest sur la route secondaire 15/16 à des vitesses comprises entre 150 km/h et 188 km/h.

À 6 h 5 min 50 s, l’analyse des données du système GPS et du système d’extraction de données sur les collisions indique que l’accident impliquant le véhicule de police no 4 s’est produit du côté sud de la route, environ 200 mètres à l’ouest de l’entrée de cour de la résidence située au 430, route secondaire 15/16. À ce moment, l’AI se dirige vers l’ouest sur la route secondaire 15/16, elle circule à 140 km/h et se trouve environ à mi chemin entre la rue 6th Line Nord et la rue 7th Line Nord, soit à 1,8 km à l’est de l’accident. En raison de la distance et de la configuration de la route, cette distance est probablement supérieure à la distance minimale qui aurait permis à l’AI ou à l’AT no 3 d’être témoin de l’accident.

L’AI continue à se diriger vers l’ouest à des vitesses comprises entre 140 km/h et 163 km/h, puis elle ralentit à 100 km/h à l’approche des lieux de l’accident. À 6 h 6 min 38 s, 48 secondes après l’accident du plaignant, l’AI immobilise son véhicule de police.

L’AI atteint une vitesse maximale de 163 km/h lorsqu’elle circule vers l’ouest sur la route secondaire 15/16, tandis que le plaignant atteint une vitesse maximale de 188 km/h. Cela signifie que l’AI a eu besoin de plus de temps pour parcourir la même distance.

À 6 h 7 min 19 s, 90 secondes après l’accident, un véhicule de police, conduit par l’AT no 1 accompagné de l’AT no 2 comme passager, arrive sur les lieux de l’accident et, 5 secondes plus tard, le véhicule de police no 1, conduit par un autre agent, arrive.

Selon les données du système d’extraction de données sur les collisions, deux coussins gonflables se sont déployés dans le véhicule de police no 4 à quatre secondes d’intervalle et ils ont été détectés par plusieurs capteurs du système dans le véhicule de police. Les ceintures de sécurité n’étaient pas attachées au moment de l’accident.

Neuf secondes de données relatives à la vitesse du véhicule de police no 4, à l’utilisation des pédales d’accélérateur et de frein et au mouvement du volant ont été récupérées. Au cours de ces 9 secondes, la vitesse du véhicule de police diminue de façon constante, passant de 169 km/h à 7 km/h, avant et pendant l’accident. Les pédales d’accélérateur et de frein n’ont pas été enfoncées. Le volant a été tourné vers la gauche, puis vers la droite. Environ 3 secondes avant le premier déploiement de coussins gonflables, la vitesse du véhicule de police était de 160 km/h, ce qui correspond sur le plan du temps et de la distance au dernier point de données du système GPS du véhicule de police enregistré avant l’accident.

Témoignage d’expert


Rapport du spécialiste de la reconstitution des collisions

Le spécialiste de la reconstitution des collisions de l’UES a examiné les rapports soumis par les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES, les photographies des lieux, les mesures prises, le schéma à l’échelle des lieux et le rapport de collision de véhicules automobiles du ministère des Transports préparé par la Police provinciale, puis a fait les constatations suivantes.

Le plaignant a conduit le véhicule de police no 4 en direction ouest sur la route secondaire 15/16. Après avoir négocié deux légers virages sur la route, à l’ouest de la rue 6th Line Nord, il a perdu le contrôle près de l’entrée de cour de la résidence située au 430, route secondaire 15/16. Le véhicule de police a quitté la partie pavée de la route et a roulé en partie dans l’accotement en gravier, du côté nord de la route, sur environ 55 mètres. Il a ensuite traversé la route, couvrant une distance supplémentaire de 35 mètres avant de s’engager sur l’accotement du côté sud de la route secondaire 15/16. Il a roulé sur l’accotement sud sur une distance d’environ 50 mètres avant de se renverser et de faire des tonneaux sur environ 42 mètres de plus.

Le plaignant, qui ne portait pas sa ceinture de sécurité, a été éjecté du véhicule de police lorsque ce dernier a fait des tonneaux.


Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [2]


Enregistrements des communications de la police

Les enregistrements ont été demandés le 19 avril 2022, puis reçus par l’UES le 22 avril 2022.


Communications radio et téléphoniques

Aux fins du présent rapport, le résumé des enregistrements porte spécifiquement sur les interactions des policiers qui ont suivi la mise hors d’état de circuler de la camionnette à l’aide d’un dispositif permettant de crever les pneus près de l’intersection entre la route secondaire 15/16 et la rue 8th Line.

L’un des enregistrements a capté un appel effectué par un superviseur (l’agent no 1) s’adressant à un homme. L’agent no 1 dit : « ils ont volé un véhicule de police, je ne sais pas c’est le véhicule de qui, mais nous allons le suivre. Nous enverrons l’hélicoptère dans la matinée et nous vous tiendrons informés ».

Un deuxième enregistrement contient un appel téléphonique destiné à un sergent (l’agent no 2), qui se trouve là où le véhicule de police est renversé. L’agent no 2 indique qu’ils traitent la route secondaire 15/16 comme une seule grande scène de crime, à partir de l’endroit initial jusqu’au lieu de l’accident, et qu’une fois que la gravité des blessures sera déterminée, ils communiqueront avec l’agent de liaison de l’UES.

Dans l’enregistrement d’un troisième appel, effectué par un autre sergent (l’agent no 3) du Centre provincial des opérations, on entend l’agent no 3 parler à une femme. Il indique qu’un agent de liaison de l’UES est requis pour communiquer avec l’UES, car l’homme en état d’arrestation a une jambe cassée.

Lors d’un quatrième appel, un autre agent (l’agent no 4) demande à l’agent no 3 des détails sur l’incident. L’agent no 3 répond : « au départ, il s’agissait d’une introduction par effraction à Hunstville. Je ne sais pas comment ils ont obtenu la description du véhicule ou de la camionnette, une unité de Bracebridge a vu la camionnette se diriger vers le sud sur la route 11, elle s’est approchée et a activé ses gyrophares, mais rien, l’unité ne s’engage pas dans une poursuite et ne fait que suivre la camionnette, puis finalement le sergent du Centre de communication de la Police provinciale lui dit de s’éloigner parce que l’homme conduit d’une manière dangereuse. Donc, les agents d’Orillia à ce moment là étaient déjà prêts à déployer une herse, mais ils ne réussissent pas et le conducteur de la camionnette s’enfuit par une route secondaire, la poursuite est encore interrompue parce qu’il commence à aller dans la mauvaise direction, vers le nord, dans la voie en direction sud sur la route 11 pendant un moment. Tout le monde cesse de le suivre et se fait dire de rester où ils sont jusqu’à nouvel ordre. De l’endroit où les agents sont arrêtés, ils le voient emprunter une autre route secondaire, une route secondaire sans issue qui mène à une carrière quelque part à Hawkins Corners. Ils installent un périmètre de sécurité et font venir un chien et une EIU [3], mais ne réussissent pas à le trouver. Ensuite, l’une des unités responsables du périmètre de sécurité signale qu’une camionnette quitte la carrière et retourne vers la route 11. Une unité, qui se trouvait sur la route 11, voit la camionnette, n’essaie pas de l’arrêter et la suit en restant à environ un demi kilomètre derrière elle, les hommes roulent à près de 100 km/h sur la route. Le conducteur de la camionnette commence alors à accélérer et à conduire comme un idiot, alors j’ordonne à toutes nos unités de s’arrêter. Deux unités qui se trouvaient au sud de lui, près de la route Old Barrie Road et de la route 11, réussissent à atteindre ce deuxième véhicule volé avec une herse cloutée. Le conducteur se dirige ensuite en direction de la route secondaire 15/16. Il commence à rouler en sens inverse de la circulation alors, encore une fois, je dis aux unités de s’arrêter. Je dis ensuite aux unités qu’elles peuvent reprendre leur patrouille vers la dernière direction où il a été aperçu. Ils le font et, quelques minutes plus tard, trouvent la camionnette stationnée sur la route secondaire 15/16, mais elle est maintenant sur deux roues. Une courte poursuite à pied s’ensuit, ils attrapent le conducteur, mais pendant ce temps l’autre homme vole [le véhicule de police no 4]. La prochaine chose que j’entends à la radio, c’est qu’une unité roule à 160 km/h derrière la voiture de police volée, alors je prends la radio et lui dis de s’immobiliser et d’abandonner la poursuite. Au moment où je dis cela, j’entends un tas de cris incohérents disant qu’il s’agit d’une arrestation armée, puis le reste des véhicules de police arrivent tous en même temps et les agents arrêtent l’homme. La seule partie qui constitue une poursuite est quand ils sont derrière la voiture de police volée, c’est déplorable parce qu’ils n’avaient pas besoin de s’engager dans une poursuite. »

L’agent no 3 a ensuite appelé le Centre provincial des opérations et a indiqué que la personne arrêtée à la suite de l’accident était décédée à l’Hôpital Royal Victoria.

Documents obtenus du service de police

L’UES a obtenu les éléments suivants auprès de la Police provinciale entre le 20 avril 2022 et le 24 mai 2022 :
  • rapport de collision;
  • rapport du Centre d’information de la police canadienne concernant le plaignant;
  • données du système GPS;
  • dossiers d’entretien du véhicule de police no 4;
  • notes de l’AT no 2;
  • notes de l’AT no 3;
  • notes de l’AT no 1;
  • rapport du système de répartition assistée par ordinateur;
  • rapport du système d’extraction de données sur les collisions du véhicule de police no 4;
  • ordonnance – poursuite visant l’appréhension de suspects;
  • enregistrements des communications de la police;
  • renseignements de l’Unité de la circulation routière.

Description de l’incident

Il est possible d’établir clairement les principaux événements qui se sont produits en fonction des éléments de preuve recueillis par l’UES et de les résumer brièvement. Comme la loi l’y autorise, l’AI n’a pas consenti à participer à une entrevue avec l’UES ni à divulguer ses notes.

Tôt dans la matinée du 19 avril 2022, la Police provinciale a poursuivi de manière intermittente le plaignant et son associé, le TC no 2. Les deux personnes ont été vues en train de commettre une introduction par effraction à Hunstville et de quitter le secteur pour fuir vers le sud à bord d’une camionnette, sur la route 11. Les agents de police ont suivi la camionnette jusqu’à une carrière près de la rue Nichols Line et de la route Cambrian, où les deux personnes ont abandonné leur véhicule (apparemment endommagé par une herse cloutée qui avait été déployée), volé une autre camionnette et repris la fuite vers le sud sur la rue Nichols Line en direction de la route 11. Les pneus de ce véhicule ont également été endommagés lorsqu’ils sont passés sur une autre herse cloutée déployée par les policiers à l’intersection de la route 11 et de la route Old Barrie. Le plaignant et le TC no 2 ont continué vers la rue 13th Line Nord, où ils ont tourné vers le nord, puis vers la gauche pour se diriger vers l’ouest sur la route secondaire 15/16. Des véhicules de police ont engagé une poursuite.

À un point à l’ouest de la rue 8th Line, la camionnette s’est arrêtée. Le TC no 2 est sorti du véhicule et s’est enfui en courant vers le sud, dans un champ. Il a été poursuivi par des agents et a été mis en état d’arrestation. Pendant que les agents étaient occupés avec le TC no 2, le plaignant est sorti de la camionnette, est entré dans l’un des véhicules de police qui étaient immobilisés derrière la camionnette (une Ford Taurus aux couleurs de la police) et a accéléré à toute vitesse vers l’ouest.

Conduisant une voiture de patrouille aux couleurs de la police et étant accompagnée de l’AT no 3 comme passager, l’AI a aperçu le convoi de véhicules immobilisé à l’ouest de la rue 8th Line. Elle a été informée que le plaignant était à bord du véhicule de police volé plus loin devant et elle s’est mise à sa poursuite à grande vitesse. Après environ trois kilomètres et demi, les agents ont aperçu le véhicule. Il reposait sur le flanc du côté conducteur dans le fossé du côté sud. Le plaignant se trouvait à une courte distance du véhicule et les agents ont procédé à son arrestation en le menaçant avec leurs armes à feu, sans incident.

Le plaignant avait roulé en direction ouest sur la route secondaire 15/16 à des vitesses fulgurantes. À la suite d’une courbe dans la route à l’ouest de la rue 8th Line, il a perdu la contrôle du véhicule de police qu’il avait volé et est entré dans le fossé du côté nord, puis dans le fossé du côté sud, où le véhicule a fait des tonneaux avant de s’immobiliser. Le plaignant a été éjecté du véhicule pendant l’accident.

Le plaignant a été transporté depuis les lieux de l’accident jusqu’à l’hôpital, où il est ensuite décédé.


Cause du décès

À la lumière de l’autopsie, le médecin légiste a établi une constatation préliminaire, à savoir que le décès du plaignant était attribuable à de multiples traumatismes contondants correspondant à un accident de véhicule automobile.

Dispositions législatives pertinentes

Article 320.13, Code criminel – Conduite causant des lésions corporelles ou la mort

(3) Commet une infraction quiconque conduit un moyen de transport d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, et cause ainsi la mort d’une autre personne.
 

Analyse et décision du directeur

Le plaignant est décédé le 19 avril 2022, à la suite de blessures subies lors d’un accident de véhicule automobile. Puisque des agents de la Police provinciale poursuivaient le plaignant au moment de l’accident, l’UES a été avisée et a entrepris une enquête. L’AI a été désignée en tant qu’agente impliquée. L’enquête est maintenant terminée. Après avoir examiné les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI a commis une infraction criminelle relativement au décès du plaignant.

L’infraction possible à l’étude est la conduite dangereuse causant la mort aux termes du paragraphe 320.13(3) du Code criminel. L’infraction est fondée, en partie, sur une conduite constituant un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans les mêmes circonstances. Dans l’affaire qui nous concerne, la question est de savoir s’il y a eu, de la part de l’AI, un manque de diligence, suffisamment grave pour justifier des sanctions criminelles, qui aurait causé l’accident ou contribué à celui ci. À mon avis, ce n’est pas le cas.

L’AI exerçait ses fonctions légitimes lorsqu’elle a décidé de poursuivre le plaignant sur une courte distance sur la route secondaire 15/16. Il existait des raisons de croire que le plaignant avait commis une introduction par effraction et qu’il venait de voler un véhicule de police.

Je suis également d’avis que l’agente s’est comportée avec diligence et égard pour la sécurité publique, y compris la sécurité du plaignant. Rien n’indique, par exemple, que l’AI a poussé le plaignant hors de la route soit directement ou en exerçant des pressions inutiles et en l’empêchant de modifier sa trajectoire. Le plaignant était résolu à s’échapper et avait accéléré à une vitesse d’environ 150 km/h avant même que l’agente ne s’engage dans la courte poursuite. Il y avait également toujours une distance importante entre les deux véhicules, soit plus d’un kilomètre. Même si l’état des routes n’était pas idéal pour une poursuite à grande vitesse – les routes étaient mouillées – aucune preuve n’indique qu’une tierce partie circulant sur la route a été directement mise en péril par la vitesse de l’AI. Dans ce dossier, les éléments de preuve ne permettent pas d’établir que la conduite de l’AI ait été dangereuse, encore moins que sa conduite ait contribué à l’accident.

En conclusion, puisqu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI a enfreint les limites de diligence prescrites par le droit criminel, il n’y a aucun motif de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.



Date : 17 août 2022
Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) À 6 h 4 min 30 s, le plaignant conduit ce véhicule de police. [Retour au texte]
  • 2) Les enregistrements en question contiennent des renseignements personnels de nature délicate et ne sont donc pas divulgués, aux termes du paragraphe 34(2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les parties importantes de ces enregistrements sont résumées ci dessous. [Retour au texte]
  • 3) Équipe d’intervention en cas d’urgence. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.