Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 22-OCI-058

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur les blessures graves qu’un homme de 43 ans (le « plaignant ») a subies.

L’enquête

Notification de l’UES

Le 26 février 2022, à 22 h 17, le service de police de Windsor (SPW) a informé l’UES d’une blessure que le plaignant avait subie.

Selon le SPW, le plaignant a été impliqué dans un incident survenu le 26 février 2022 dans un magasin Walmart à Windsor. L’agent impliqué (AI), ayant aperçu le plaignant un peu plus loin, soit au 3090, avenue Dougall, a tenté de l’arrêter, mais une lutte s’est engagée. L’agent de police a donc déchargé son arme à impulsions, mais en vain. Il a alors frappé le plaignant au visage avec son arme à impulsions et a réussi à le maîtriser à 14 h 56. Le plaignant a été transporté à l’Hôpital régional de Windsor et, à 21 h 26, il a reçu un diagnostic de fracture de l’os du nez. Il a été placé sous garde en vertu de la Loi sur la santé mentale.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 26 février 2022 à 23 h 5

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 26 février 2022 à 23 h 15

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Personne concernée (le « plaignant ») :

A participé à une entrevue; ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

Le plaignant a participé à une entrevue le 27 février 2022.

Témoins civils

TC n° 1 A participé à une entrevue
TC n° 2 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à une entrevue le 2 avril 2022.

Agent impliqué

AI n° 1 N’a pas participé à une entrevue, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué; ses notes ont été reçues et examinées

Agents témoins (AT)

AT A participé à une entrevue

L’agent témoin a participé à une entrevue le 11 mars 2022.

Éléments de preuve

Les lieux

L’incident s’est produit dans le côté nord du stationnement d’un restaurant Baskin-Robbins situé au 3090, avenue Dougall, à Windsor.


Figure 1 — Photo tirée de la vidéo de surveillance montrant l’interaction entre le plaignant et l’AI dans le stationnement du restaurant Baskin-Robbins.

Éléments de preuve matériels

Données téléchargées de l’arme à impulsions

Le 1er mars 2022, un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES a reçu une arme à impulsions Taser de modèle X2 du SPW. Il a photographié l’arme et téléchargé ses données. La date indiquait que l’arme à impulsions avait été déployée trois fois, chaque fois pendant une seconde, soit à 15 h 12 min 9 s, 15 h 12 min 10 s et 15 h 12 min 12 s.


Figure 2 – L’arme à impulsions de type X2 Taser.

Rapport de la répartition assistée par ordinateur

Le 28 février 2022, l’UES a demandé au SPW de lui fournir le rapport de la répartition assistée par ordinateur montrant l’interaction avec le plaignant. Le 1er mars 2022, le SPW a fourni à l’UES les renseignements demandés, dont voici un résumé.

Le SPW avait reçu deux appels de service distincts, qui ont abouti aux accusations suivantes contre le plaignant aux termes du Code criminel du Canada : port d’arme dans un dessein dangereux pour la paix publique, agression armée, profération de menaces de causer la mort, résistance à un agent de la paix, omission de se conformer à une ordonnance de mise en liberté et défaut de se conformer à une ordonnance de probation.

Premier appel de service

Le 26 février 2022, à 14 h 22, un agent de communication du SPW a reçu un appel non urgent d’une personne qui se trouvait à Walmart. L’appelant signalait que le plaignant criait sur les clients et qu’on l’avait fait sortir du magasin. Lorsque l’appelant s’est approché du plaignant à l’extérieur du magasin, le plaignant a montré une petite lampe à souderet a dit à l’appelant de ne pas s’approcher de lui.

L’appel de service a été classé comme « chaotique » pour qu’un contrôle du secteur soit effectué.
À 14 h 26 min 55 s, l’AI a été dépêché sur les lieux de l’appel et, à 14 h 38, l’AI a traité l’appel.

Second appel de service

Le 26 février 2022, à 14 h 58 min 35 s, un agent des communications du SPW a reçu un appel au 9-1-1 d’une femme, qui signalait que le plaignant regardait un écran. Elle pensait que le plaignant avait une arme dans sa main. Elle n’a pas pu le confirmer, mais a senti que quelque chose n’était pas en règle.

L’appel de service a été classé comme « Armes à feu — Personne avec une arme ». Le répartiteur a indiqué que la description fournie correspondait à celle de l’homme avec un briquet à barbecue à la main décrit au cours de l’appel précédent. La femme a précisé que le plaignant avait quitté les lieux.

À 15 h 1 min 20 s, l’AT et un agent, qui n’ont pas été identifiés comme agent impliqué ou agent témoin dans le cadre de l’enquête, ont été dépêchés sur place.

À 15 h 3, la femme a indiqué que le plaignant se dirigeait vers l’est dans le stationnement. Elle allait discuter avec l’AI.

À 15 h 4, devant le magasin TELUS, on a demandé une autre unité. Plusieurs agents de police ont donc été dépêchés sur les lieux.

À 15 h 7, on a signalé que le plaignant avait été mis sous garde.

À 15 h 7 min 14 s, l’AT est arrivé sur les lieux.

À 15 h 8, des vérifications ont été effectuées sur le plaignant.

À 15 h 13, un deuxième agent non identifié est arrivé sur les lieux.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [1]

Communications radio de la police

Le 28 février 2022, l’UES a demandé au SPW de lui fournir les enregistrements des communications radio en rapport avec leur interaction avec le plaignant. Les enregistrements reçus le 2 mars 2022 duraient cinq minutes et 14 secondes. En voici un résumé.

L’AI dit au répartiteur du SPW : « Mettez mon statut à libre, je vais retourner sur Dougall… Je vois que notre priorité est sur Dougall, je peux y retourner ». Le répartiteur du SPW dit à l’AI que les deux appels sont liés; ils concernent le plaignant et une femme qui pensait que le plaignant était en possession d’une arme à feu.

Le répartiteur du SPW dit à l’AI : « Selon l’appel précédent, c’était juste un briquet ». Plusieurs autres agents de police avaient également été dépêchés sur les lieux pour donner suite à l’appel prioritaire. L’AI arrive e indique par radio : « Il est devant le magasin TELUS maintenant, je vais sortir pour m’entretenir avec lui ».

Alors que l’AI poursuit le plaignant, il demande par radio qu’une autre unité soit dépêchée sur place et le répartiteur du SPW demandé à l’AT : « Pouvez-vous accélérer, il demande une autre unité ».

L’AT est le deuxième agent de police à arriver au 3090, avenue Dougall. Elle dit au répartiteur, « L’homme a été mis sous garde ». Le répartiteur du SPW dit aux autres agents de police en route de ralentir, car le plaignant est sous garde. L’AT dit au répartiteur, à propos de l’AI, « Oui, il est [code de police censé signifier « ok »] ». L’AT effectue des contrôles sur le plaignant.

Le premier agent non identifié, qui avait été dépêché sur les lieux avec l’AT, demande une ambulance. Le répartiteur du SPW indique qu’une ambulance et deux sergents sont en route.

Le premier agent non identifié accompagne le plaignant à l’hôpital avec les ambulanciers paramédicaux.

Un agent de police demande une fourgonnette de police pour transporter le plaignant de l’hôpital à l’établissement du SPW.

Séquence vidéo du restaurant Baskin-Robbins situé au 3090, avenue Dougall

Le 28 février 2022, l’UES a demandé au SPW de lui fournir des séquences vidéo de son interaction avec le plaignant. Le 1er mars 2022, le SPW a fourni à l’UES des séquences vidéo pertinentes de l’interaction entre l’AI et le plaignant, dont voici un résumé.

À 15 h 4 min 21 s, un véhicule de police identifié traverse un stationnement. Son ’équipement d’urgence n’est pas activé. Le plaignant fuit l’AI en s’accrochant à un chariot. Le plaignant dit « Ne t’approche pas de moi » et continue à s’éloigner de l’AI.

À 15 h 4 min 41 s, le plaignant lâche le chariot et s’enfuit. Le plaignant tombe ensuite au sol, le dos tourné vers le trottoir. L’AI se met au sol pour appréhender le plaignant. À 15 h 4 min 46 s, une lutte s’ensuit. L’agent de police se trouve par-dessus le plaignant au sol. À 15 h 4 min 37 s, l’AI dit : « Arrête, ne bouge pas ».

À 15 h 4 min 49 s, l’AI donne plusieurs coups (avec sa main) au plaignant. L’AI dit au plaignant : « Mets tes mains derrière toi ».
À 15 h 5 min 57 s, l’AI saisit une arme à impulsions et la déploie. L’AI frappe alors le plaignant avec l’arme à trois ou quatre reprises au niveau de la tête, puis il remet l’arme dans son étui et donné deux autres coups de poing au plaignant.

L’AI se repositionne et retournée le plaignant sur le ventre. L’AI se trouve sur le dos du plaignant. Le plaignant continue à crier : « Je n’ai rien fait de mal, aide-moi à me relever ».

L’AT arrive. Il est le deuxième agent de police à arriver sur les lieux — son équipement d’urgence est activé. L’AT court vers l’AI et se met au sol pour l’aider. Plusieurs autres agents de police arrivent, tous dans des véhicules de police identifiés. On peut les voir en train de parler entre eux et avec l’AI.

À 15 h 18, une ambulance arrive et des ambulanciers paramédicaux prennent en charge le plaignant. Un agent de police lui tient le bras gauche et un ambulancier le bras droit. Ils accompagnent le plaignant jusqu’à l’ambulance.

Éléments obtenus du service de police

L’UES a obtenu et examiné les éléments et documents suivants que lui a remis, à sa demande, le SPW :
  • Fiche d’enregistrement du plaignant
  • Dossiers de la répartition assistée par ordinateur
  • Résumé de l’accusation
  • Enregistrements des communications
  • Rapport du service judiciaire — photos des blessures
  • Rapport de propriété — saisie d’un chalumeau et d’un briquet
  • Demande de séquences vidéo du magasin Walmart
  • Séquences vidéo du magasin Walmart — rapport supplémentaire
  • Hôpital — rapport supplémentaire
  • Agent ayant besoin d’aide — rapport supplémentaire
  • Rapport sur la le congé de l’hôpital, le transport et la notification des frais
  • Présence sur les lieux — rapport supplémentaire
  • Restitution des biens du magasin Walmart — rapport supplémentaire
  • Hôpital — rapport supplémentaire
  • Escorte à l’hôpital — rapport supplémentaire
  • Saisie d’un chalumeau et d’un briquet
  • Rapport de supervision
  • Notification de l’UES — rapport supplémentaire
  • Unité de détention — rapport supplémentaire
  • Notification de remise en liberté — rapport supplémentaire
  • Description de l’incident par l’AT
  • Description écrite de l’incident
  • Notes de l’AT et de l’AI
  • Résumé audio-vidéo du témoin
  • Déclaration du témoin.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

Le 26 février 2022, le plaignant a signé un formulaire d’autorisation de divulgation de ses renseignements médicaux. Le 4 mars 2022, l’UES a reçu ses dossiers médicaux. Le plaignant avait reçu un diagnostic de fracture du nez et d’hématome à l’orbite.

Description de l’incident

Le scénario suivant se dégage des preuves recueillies par l’UES, qui comprenaient des entrevues avec le plaignant et deux témoins civils qui ont vu l’incident. L’enquête a également été renforcée par des séquences vidéo de l’incident captées par une caméra installée dans le secteur. Comme il en avait le droit, l’AI a choisi de ne pas s’entretenir avec l’UES. Il a toutefois autorisé la diffusion de ses notes.

Le plaignant n’était pas sain d’esprit dans l’après-midi du 26 février 2022. Il s’était rendu au magasin Walmart de l’avenue Dougall où il aurait crié sur les clients et aurait été prié de quitter le magasin. Un agent de sécurité qui s’occupait du plaignant a communiqué avec la police après que ce dernier ait pointé une petite lampe à souder dans sa direction. Peu de temps après, le plaignant est entré dans le restaurant Baskin-Robbins, situé dans la plaza au nord du magasin Walmart. Une femme a alors composé le 9-1-1 pour signaler que le plaignant avait ce qui lui semblait être une arme à feu dans les mains.

L’AI, qui avait entendu les appels radio concernant les deux incidents, s’est dirigé vers le stationnement de la plaza au nord du magasin Walmart. C’est à cet endroit-là qu’il a aperçu le plaignant. Ce dernier venait de sortir du magasin TELUS situé à l’extrémité est de la plaza et poussait un chariot. L’agent a tenté d’arrêter le plaignant, qui a fui en direction ouest dans le stationnement, tout en poussant le chariot. L’AI l’a poursuivi à pied.

Alors qu’ils s’approchaient du stationnement situé au nord du restaurant Baskin-Robbins, le plaignant a lâché le chariot, puis est tombé près du côté conducteur arrière d’un véhicule garé. L’AI s’est précipité sur lui.

Il s’en est suivi une lutte au cours de laquelle l’AI a frappé le plaignant à plusieurs reprises à la tête (plus d’une douzaine de fois), notamment à l’aide de son arme à impulsions, et a tenté de l’assommer avec cette dernière. Le plaignant a agité ses bras vers l’agent pendant la majeure partie du combat. Au bout d’un certain temps, l’AI a placé le plaignant sur le ventre, a maîtrisé ses bras derrière son dos et, avec l’aide d’un autre agent qui était arrivé sur les lieux, l’a menotté.

Après son arrestation, le plaignant a été transporté à l’hôpital où il a reçu un diagnostic de fracture du nez et d’hématome à l’orbite.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le 26 février 2022, le plaignant a subi une blessure grave au cours de son arrestation par un agent de SPW. L’agent, soit l’AI, a été identifié comme étant l’agent impliqué aux fins de l’enquête de l’UES qui a suivi. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation des preuves, il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que l’AI a commis une infraction criminelle en rapport avec l’arrestation et la blessure du plaignant.

En vertu de l’article 25(1) du Code criminel, les agents de police sont exonérés de toute responsabilité criminelle pour la force utilisée dans l’exercice de leurs fonctions, à condition que cette force soit raisonnablement nécessaire à l’exécution d’un acte qu’ils étaient tenus ou autorisés de faire par la loi.

Je ne conteste pas la légitimité de la décision de l’agent de police d’arrêter le plaignant. Compte tenu de ce que l’agent savait à la suite des appels de service que la police avait reçus, et de ce qu’il a pu vérifier lui-même en parlant brièvement avec une personne au restaurant Baskin-Robbins à son arrivée dans le stationnement de la plaza, qui lui a montré le plaignant, je suis convaincu que le plaignant a été arrêté légalement pour une infraction liée aux armes.

Je suis également convaincu que le degré de force utilisé par l’agent de police, bien qu’élevé, se situait dans les limites de la force légalement justifiée. L’agent avait en effet des raisons de croire que le plaignant était en possession d’une arme à feu et que, par conséquent, il était impératif de l’arrêter le plus rapidement possible. Dans ces circonstances, lorsque le plaignant, sur le dos, a agité ses bras en direction de l’agent, ce dernier était en droit de répondre par une mesure de force pour affaiblir et maîtriser le plaignant. L’utilisation de l’arme à impulsions pour frapper le plaignant à la tête - l’agent l’a utilisé à trois ou quatre reprises - a posé le plus grand problème. Cependant, l’arme à impulsions était dans la main de l’AI après qu’il l’ait saisie pour tenter d’assommer le plaignant afin qu’il se rende, mais en vain. De plus, l’AI semble avoir utilisé l’arme à impulsions pour frapper le plaignant juste après que le bras gauche du plaignant se soit trouvé à proximité de l’arme, ce qui suggère que l’agent craignait qu’il ne la saisisse. Au vu de ce dossier, je ne peux pas raisonnablement conclure que le recours à l’arme à impulsions de cette manière était excessif, d’autant plus que le plaignant a continué à se débattre après que l’agent a rengainé l’arme. En arrivant à cette conclusion, je suis conscient que l’on ne s’attend pas à ce que les agents qui font face à des situations instables et dangereuses mesurent leur force de réaction avec précision; ce qu’il faut, c’est une réaction raisonnable, pas une réaction exigeante : R. c. Nasogaluak, 2010 CSC 6, [2010] 1 R.C.S. 206; R. c. Baxter (1975) 27 C.C.C. (2d) 96 (C.A. de l’Ont.).

Pour les raisons qui précèdent, bien que la fracture du nez du plaignant soit le résultat de la force utilisée par l’agent de police, il n’y a aucun motif raisonnable de croire que la blessure est attribuable à une conduite illégale de la part de l’agent. Par conséquent, il n’y a pas lieu de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.


Date : 24 juin 2022
Approuvé électroniquement par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels délicats et ne sont pas divulgués en vertu du paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les éléments importants des documents sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.