Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 21-OFD-363

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur la mort d’un homme de 29 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 28 octobre 2021, à 4 h 54, le service de police de London (SPL) a informé l’UES d’un décès lié à une arme à feu. À 3 h 46, des agents avaient donné suite à un appel concernant une introduction par effraction à l’angle des rues George et de Mill. Trois hommes ont été vus en train de fuir les lieux. Dans une allée qui se trouve derrière le 660, rue Richmond, les agents ont aperçu l’un des hommes. Une lutte s’est engagée pour arrêter l’homme qui a commencé à étrangler l’un des agents. À 3 h 51, l’un des agents a tiré une seule fois sur l’homme avec son arme à feu et l’a touché. L’homme [connu maintenant comme étant le plaignant] a été transporté à l’Hôpital Victoria et sa mort a été constatée à 4 h 24. L’un des agents a été soigné pour ses blessures.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : Le 28 octobre 2021 à 5 h 37

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : Le 28 octobre 2021 à 6 h 15

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 8

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 29 ans, décédé

Témoins civils (TC)

TC n° 1 N’a pas participé à une entrevue (plus proche parent)
TC n° 2 N’a pas participé à une entrevue (plus proche parent)
TC n° 3 A participé à une entrevue
TC n° 4 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à une entrevue les 28 et 29 octobre 2021.

Agents impliqués (AI)

AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué

Agents témoins (AT)

AT n° 1 A participé à une entrevue
AT n° 2 N’a pas participé à une entrevue ; notes reçues et examinées
AT n° 3 A participé à une entrevue
AT n° 4 A participé à une entrevue
AT n° 5 A participé à une entrevue
AT n° 6 A participé à une entrevue
AT n° 7 A participé à une entrevue
AT n° 8 A participé à une entrevue
AT n° 9 A participé à une entrevue
AT n° 10 N’a pas participé à une entrevue ; notes reçues et examinées
AT n° 11 N’a pas participé à une entrevue ; notes reçues et examinées
AT n° 12 A participé à une entrevue
AT n° 13 A participé à une entrevue
AT n° 14 A participé à une entrevue
AT n° 15 A participé à une entrevue
AT n° 16 A participé à une entrevue
AT n° 17 A participé à une entrevue
AT n° 18 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à une entrevue entre le 1er novembre et le 20 décembre 2021.

Éléments de preuve

Les lieux

Le lieu de l’incident se trouvait dans le parc de stationnement arrière du 660, rue Richmond. Une voie piétonne orientée vers l’est et accessible depuis la rue se trouvait entre les unités 6 et 7 du 660, rue Richmond. Cette allée aboutissait dans le parc de stationnement à l’arrière des bâtiments.



Figure 1 – L’entrée de la voie piétonne depuis la rue Richmond.



Figure 2 – Le parc de stationnement arrière du 660, rue Richmond.

Schéma des lieux

Éléments de preuve matériels

Voici les éléments de preuve recueillis sur les lieux :
  • Douille
  • Tuque grise
  • Gant gauche
  • Paire de menottes
  • Sac hermétique et trousse de rasage avec des effets personnels
  • Carte de Tim Hortons
  • Déchets médicaux
  • Pince en plastique cassée
  • Prélèvement d’une marque sur le capot du véhicule de l’AT n° 1
  • Verre de lunettes cassé
  • Tige de lunettes


Figure 3 – Douille



Figure 4 – Paire de menottes


Figure 5 – Marque sur le capot du véhicule de police de l’AT n° 1

Éléments de preuve médicolégaux

L’UES a remis au Centre des sciences judiciaires (CSJ) le pistolet semi-automatique de l’AI, un Glock modèle 45 de calibre 9 mm, le chargeur Glock et une douille de 9 mm. De plus, des prélèvements de sang et d’urine ont été effectués sur le plaignant. Ces prélèvements ont ensuite été soumis au CSJ.

Le 17 janvier 2022, l’UES a reçu le rapport sur les armes à feu du CSJ confirmant que la seule douille tirée provenait du Glock de l’AI.


Figure 6 – L’arme à feu et le chargeur de l’AI

Témoignage d’expert

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [1]

Enregistrements des communications du SPL

Le SPL a fourni une copie des enregistrements de ses communications relatives à l’incident. Voici un résumé des renseignements qu’ils contiennent.

À 3 h 32, les AT n° 3 et n° 2 ont reçu l’ordre d’annuler un appel de service de type « assistance à une agence » et de donner suite à un appel de type « personne suspecte » sur la rue Oxford à la place.

À 3 h 45 min 51 s, l’AT n° 2 a signalé qu’il y avait beaucoup d’hommes qui couraient dans le secteur et qui avaient vraisemblablement commis une introduction par effraction sur la rue St. George. L’AT n° 2 a dit que trois hommes avaient placé une échelle sur une maison à l’angle des rues St. George et de Mill. Les hommes s’étaient enfuis en courant vers le nord. L’AT n° 3 n’était pas dans le véhicule de police et l’AT n° 2 conduisait vers le nord.

Le répartiteur a signalé que les trois hommes étaient à pied et qu’ils étaient en train de s’introduire par effraction à l’angle des rues St. George et Mill. L’AT n° 3 a précisé que les hommes avaient couru jusqu’à la rue John. L’un des hommes portait un T-shirt gris. L’AT n° 3 a perdu l’homme de vue près du 170, rue John.
L’AT n° 2 a dit à l’AT n° 3 que l’homme avait été vu en train de sortir et qu’il devrait être dans l’îlot.

Les agents ont reçu l’ordre d’établir un périmètre de sécurité entre les rues John et Richmond jusqu’aux rues St. George et Richmond. Les agents ont été informés des postes qu’ils allaient occuper. Le répartiteur a demandé une description des suspects et on lui a dit que tous les hommes semblaient avoir une vingtaine d’années. L’un des hommes portait un t-shirt gris et les autres étaient minces ou de petite taille et portaient des vêtements foncés. L’AT n° 2 a dit que l’un des hommes était sorti sur la rue John, mais ne l’avait pas traversée. On pensait que les trois hommes n’avaient pas quitté l’îlot. L’AT n° 3 a dit qu’il avait poursuivi l’homme aux vêtements gris jusqu’au 170, rue John. On ne savait pas où les autres hommes étaient allés.

À 3 h 51 min 1 s, l’AT n° 1 a dit, « Coups de feu » et qu’il fallait appeler une ambulance. L’AT n° 1 a affirmé que les agents allaient bien et que la fusillade avait eu lieu près de Station Park [l’hôtel Park, anciennement l’hôtel Station Park]. On a précisé que l’emplacement était à l’arrière du restaurant Oscar Taylor’s. L’AT n° 4 a dit qu’il y avait assez d’agents sur place et a conseillé aux autres agents de garder le périmètre de sécurité en place. L’AT n° 4 a dit que le plaignant commençait à se faire examiner par un médecin. Quelqu’un a demandé si l’un des hommes portait un sac à dos et l’AT n° 3 a répondu qu’il ne pouvait pas le confirmer.

À 3 h 53, l’AT n° 4 a précisé qu’on essayait de réanimer l’homme. L’AT n° 8 a dit qu’ils avaient commencé les compressions.

À 3 h 54, l’AT n° 4 a dit que le plaignant avait couru en direction est en face du Tim Hortons sur la rue Richmond. Un autre agent a affirmé qu’il avait vu un homme portant un sac à dos marcher vers le nord.

À 3 h 56, l’AT n° 4 a dit aux services médicaux d’urgence (SMU) qu’il y avait une balle dans le cou du plaignant, mais qu’il n’y avait aucune blessure de sortie apparente.

À 3 h 57, l’AT n° 4 a demandé d’appeler une deuxième ambulance pour l’AT n° 1, qui avait peut-être des côtes cassées.

À 3 h 58, l’AT n° 4 a ordonné que toutes les ressources quittent les lieux de l’introduction par effraction et qu’elles se rendent au lieu de la fusillade.

À 4 h 24, on a signalé que la mort du plaignant avait été constatée.

Vidéo du commerce n° 1 de la rue Richmond

L’UES a récupéré des séquences vidéo captées par une caméra du commerce n° 1 situé sur la rue Richmond, à London.

Le 28 octobre 2021, à 3 h 46, un homme [connu comme étant le plaignant] marche en direction sud sur le trottoir, côté ouest, de la rue Richmond. Le plaignant se trouve autour du commerce Robert Image Studio, Tattoo & Piercing situé au 691, rue Richmond. À 3 h 47, le plaignant passe devant le panneau du commerce Farhi Holdings et un véhicule de police roulant en direction sud sur la rue Richmond dépasse l’homme. Le plaignant s’arrête et regarde dans une vitrine.

À 3 h 48, le plaignant se trouve à côté des bacs de recyclage. Il porte des vêtements foncés, une veste dont le capuchon est relevé sur sa tête et un masque contre la COVID. Le plaignant continue à marcher, met quelque chose dans sa bouche, puis met sa main droite dans un sac banane qu’il porte sur le côté droit de la taille.

À 3 h 48 min 31 s, le plaignant sort du champ de vision de la caméra. Environ huit secondes plus tard, un deuxième véhicule de police se dirige vers le sud dans la voie adjacente au trottoir sur la rue Richmond. Dans les cinq secondes qui suivent, on voit la réflexion de lumières d’urgence sur le bâtiment.

À 3 h 48 min 59 s, la vidéo prend fin.

Vidéo du commerce n° 2 de la rue Richmond

L’UES a reçu une copie des séquences vidéo captées par une caméra du commerce n° 2 de la rue Richmond. La séquence a été horodatée une heure avant l’heure réelle.

Le 28 octobre 2021, un homme [connu comme étant le plaignant] marche en direction sud sur le trottoir, côté ouest, de la rue Richmond. Le plaignant se trouve à côté de deux commerces au 723, rue Richmond. Le plaignant traverse la rue Piccadilly et continue en direction sud au-delà du 717, rue Richmond. Le plaignant continue à marcher jusqu’au restaurant London Pizza, situé au 711, rue Richmond, au nord de la voie ferrée qui traverse la rue Richmond.

Vidéo d’un commerce de la rue Pall Mall

L’UES a reçu une copie des séquences vidéo captées par une caméra d’un commerce de la rue Pall Mall.

À 3 h 48, on aperçoit des gyrophares en direction nord sur la rue Richmond. À 3 h 49 min 50 s, un VUS de police du SPL fait face à l’ouest sur la rue Pall Mall à l’intersection de la rue Richmond. Ses gyrophares sont allumés. À 3 h 51 min 32 s, le véhicule de police fait marche arrière et se dirige vers l’est sur la rue Pall Mall. Environ cinq secondes plus tard, le véhicule de police tourne à droite dans l’allée à l’extrémité est de l’hôtel. Au cours des 13 secondes suivantes, quatre véhicules de police (des berlines) et un VUS du SPL se dirigent vers l’est sur la rue Pall Mall et tournent à gauche dans l’allée. À 3 h 54, quatre véhicules de police reviennent sur la rue Pall Mall et s’engagent sur la rue Richmond.

Vidéo d’une résidence de la rue St. George

L’UES a reçu une séquence vidéo captée par une caméra d’une résidence de la rue St. George. La vidéo a capté deux hommes courant vers le sud à travers l’arrière-cour de la propriété. On voit un agent de police muni d’une lampe de poche les suivre après qu’ils ont quitté le champ de vision de la caméra.

Caméras municipales installées à l’intersection des rues Richmond et Pall Mall — Séquence vidéo

L’UES a reçu des séquences vidéo captées par des caméras municipales installées à l’intersection des rues Richmond et Pall Mall.

À 3 h 42 min 30 s, l’une des caméras a filmé un taxi jaune circulant en direction nord dans la rue Pall Mall et s’arrêtant près du trottoir, côté est. Le conducteur reste dans le taxi. À 3 h 47 min 27 s, un véhicule de police (une berline) roule vers le sud sur la rue Richmond alors qu’un homme [connu comme étant le plaignant] marche en direction sud sur le trottoir ouest de la rue Richmond. À 3 h 48 min 15 s, le véhicule de police fait marche arrière entre les rues Richmond et Pall Mall dans la voie sud de la rue Richmond. À 3 h 48 min 42 s, le véhicule de police tourne à droite sur la rue Mill alors que le plaignant s’en approche. À 3 h 48 min 44 s, un autre véhicule de police (une berline) se dirige vers la rue Mill et s’arrête avant de tourner à droite. Une seconde plus tard, les gyrophares s’allument – le plaignant se tient à proximité et fait face au véhicule de police. À 3 h 48 min 57 s, le véhicule de police avance et tourne à droite sur la rue Mill, hors du champ de vision de la caméra.

Un VUS de la police se dirige vers le nord sur la rue Richmond et allume ses gyrophares. Le plaignant reste sur le trottoir. À 3 h 49 min 11 s, le plaignant s’engage sur la rue Richmond et la traverse. On aperçoit les phares d’un véhicule illuminant à l’extrémité sud de la voie ferrée.

À 3 h 49 min 21 s, le plaignant est partiellement bloqué par le coin avant gauche du taxi jaune stationné près du trottoir, côté est, de la rue Richmond. Environ deux secondes plus tard, le plaignant quitte la route pour s’engager sur le trottoir. Le véhicule en direction sud se trouve au Tim Hortons et le VUS du SPL fait demi-tour. Deux secondes plus tard, un VUS du SPL [on sait maintenant qu’il était conduit par l’AT n° 1] se dirige vers le nord sur la rue Richmond en traversant l’intersection de l’avenue Pall Mall.

À 3 h 49 min 31 s, les feux de freinage du véhicule de police de l’AT n° 1 s’allument et s’éteignent dans la voie piétonne à côté du commerce Cloud 29. Environ deux secondes plus tard, le véhicule de police tourne dans la voie piétonne. À 3 h 49 min 36 s, le véhicule de police disparait dans la voie piétonne.

À 3 h 49 min 41 s, un VUS du SPL dépasse la voie piétonne en direction sud et continue vers l’ouest sur la rue Pall Mall. Le devant du véhicule se trouve maintenant dans la voie piétonne. À 3 h 51 min 34 s, le véhicule de police fait marche arrière et se dirige vers l’est sur la rue Pall Mall. Entre 3 h 51 min 33 s et 3 h 52 min 6 s, six véhicules de police tournent vers l’est sur la rue Pall Mall.

À 3 h 47 min 28 s, une autre caméra capte un véhicule de police (une berline) circulant sur la voie adjacente au trottoir et traversant l’intersection, au sud de la rue Richmond. Environ dix secondes plus tard, le véhicule de police s’arrête sur la voie adjacente au trottoir. À 3 h 48 min 1 s, le véhicule de police active ses gyrophares et fait marche arrière vers la rue Mill. À 3 h 48 min 18 s, le véhicule de police disparait du champ de vision de la caméra.

À 3 h 48 min 57 s, un autre VUS du SPL traverse l’intersection en direction nord.

À 3 h 49 min 11 s, alors que le plaignant s’engage dans la rue Richmond, on voit les phares du véhicule de police de l’AT n° 1 qui circule sur la rue Richmond en direction nord près du 644, rue Richmond. À 3 h 49 min 21 s, alors que le plaignant finit de traverser la rue Richmond, le véhicule de police de l’AT n° 1 se trouve juste au sud de la rue Pall Mall, près du panneau du restaurant Chuck’s Roadhouse. À 3 h 49 min 44 s, le véhicule de police de l’AT n° 1 traverse l’intersection.

À 3 h 52 min 4 s, un VUS du SPL entre par l’arrière du 660, rue Richmond, près de l’avenue Pall Mall, suivi de six véhicules de police. À 3 h 56 min 19 s, une ambulance se dirige en direction ouest sur la rue Pall Mall et entre dans l’allée à l’arrière du 660, rue Richmond.

Vidéo du commerce n° 3 de la rue Richmond

L’UES a reçu une copie des séquences vidéo captées par des caméras installées sur le commerce n° 3 de la rue Richmond.

Caméra 1

À 3 h 36, un taxi jaune s’arrête sur le trottoir, côté est, de la rue Richmond [on sait maintenant qu’il s’agit du dépanneur Station Park].

À 3 h 41 min 55 s, un véhicule de police (une berline) roule en direction sud sur la rue Richmond et, à 3 h 42 min 7 s, un véhicule de police s’immobilise. Ses gyrophares sont allumés. Le véhicule fait ensuite marche arrière sur la rue Mill dans la voie sud. À 3 h 42 min 41 s, le véhicule tourne à droite sur la rue Mill.

À 3 h 42 min 52 s, on aperçoit des phares au sud de la rue Richmond à la hauteur de la rue Mill et le reflet des gyrophares. Environ 18 secondes plus tard, les gyrophares disparaissent et on voit un VUS de police roulant vers le nord sur la rue Richmond dépassant la caméra. On aperçoit des phares au sud de la rue Pall Mall, en direction nord sur la rue Richmond.

À 3 h 43 min 29 s, on voit un homme [connu comme étant le plaignant] (la partie inférieure de son corps) s’engager dans la voie adjacente au trottoir de la rue Richmond en direction de l’ouverture située à côté du commerce Cloud 29. Le plaignant semble ralentir et, trois secondes plus tard, il se trouve sur le trottoir. Le plaignant fait une quinzaine de pas vers l’arrière du commerce Cloud 29 et, à 3 h 43 min 40 s, il disparait du champ de vision de la caméra. Un VUS de la police [on sait maintenant que son conducteur était l’AT n° 1] roule sur la rue Richmond dans la voie adjacente au trottoir jusqu’à l’ouverture de l’allée. Le véhicule de police de l’AT n° 1 avance lentement et, deux secondes plus tard, tourne dans l’allée. À 3 h 43 min 47 s, le véhicule de police de l’AT n° 1 disparait dans l’allée.

Un deuxième VUS de la police roule en direction sud sur la rue Richmond et tourne à gauche sur la rue Pall Mall. Ses gyrophares sont allumés. À 3 h 45 min 54 s, de nombreux véhicules de police circulent dans la rue Pall Mall.

À 3 h 46 min 43 s, un agent de police court vers le nord sur le trottoir, s’engage dans l’allée, allume sa lampe de poche et disparait du champ de vision de la caméra.

À 3 h 48 min 27 s, un VUS de la police arrive à l’avant de l’allée. Deux agents descendent l’allée vers l’arrière.

Caméra 2

À 3 h 43 min 25 s, sur la voie centrale de la rue Richmond, on voit les pieds du plaignant alors qu’il traverse la rue vers le côté est. Le plaignant marche sur le trottoir et disparait du champ de vision. L’ombre du plaignant est filmée alors qu’il marche vers l’est dans l’allée à côté du commerce Cloud 29. Un VUS de la police [connu maintenant comme étant celui de l’AT n° 1] tourne dans l’allée. À 3 h 43 min 46 s, le véhicule de police de l’AT n° 1 disparait dans l’allée.

Caméra 3

À 3 h 43 min 48 s, le plaignant s’engage dans l’allée. Il regarde dans la direction d’où il venait et se tient immobile. À 3 h 44, on voit l’ombre d’une autre personne se diriger vers l’épaule gauche du plaignant. Deux secondes plus tard, l’AI met sa main droite sur le bras gauche du plaignant et guide ce dernier vers le mur du commerce Cloud 29, au-delà du champ de vision de la caméra. À 3 h 44 min 4 s, on peut voir une partie du dos d’un agent de police. Deux secondes plus tard, l’agent de police sort du champ de vision de la caméra. À 3 h 44 min 32 s, on peut voir une partie de l’uniforme d’un agent de police. Entre 3 h 44 min 34 s et 3 h 44 min 39 s, les pieds des deux agents de police sont visibles et les agents ont une prise sur le haut du corps du plaignant. Le plaignant semble se débattre, mais reste sur ses pieds. Le plaignant et les agents sortent du champ de vision de la caméra.

À 3 h 45 min 4 s, une botte noire dont la cheville droite était orientée vers le haut et le bout reposait contre le trottoir apparait puis disparait après deux secondes. À 3 h 45 min 8 s, un objet [peut-être un gant] se trouve sur le sol et, à 3 h 45 min 18 s, on aperçoit rapidement un uniforme de police. À 3 h 46 min 31 s, des ombres et une lumière [peut-être une lampe de poche] apparaissent sur le mur de ciment, suivies d’un scintillement de gyrophares. Vers 3 h 51, le pied d’un agent de police se déplace hors du champ de vision de la caméra et l’objet au sol n’est plus visible.

Vidéo du commerce n° 4 de la rue Richmond

L’UES a reçu des séquences vidéo captées par une caméra du commerce n° 4 sur la rue Richmond.

À 3 h 48 min 24 s, on aperçoit un véhicule de police en train de faire marche arrière sur la voie sud de la rue Richmond. À ce moment-là, un homme [connu comme étant le plaignant] marche vers le sud sur le trottoir, côté ouest, de la rue Richmond. Il est partiellement bloqué par des piliers de briques alors qu’il marche vers le coin.

À 3 h 48 min 30 s, le véhicule de police s’arrête dans l’intersection et tourne à droite sur la rue Mill.

À 3 h 48 min 36 s, le plaignant se trouve sur le trottoir et, à 3 h 48 min 40 s, un deuxième véhicule de police se dirige vers le sud sur la rue Richmond jusqu’à la rue Mill. Avant de tourner sur la rue Mill, le véhicule de police s’arrête. Ses gyrophares sont allumés. On ne peut pas voir le côté passager du véhicule de police en raison d’un poteau électrique situé du côté sud de la rue Mill. Le plaignant s’arrête et regarde vers le véhicule de police.

À 3 h 48 min 55 s, le plaignant se dirige vers le véhicule de police, mais reste sur le trottoir. À 3 h 48 min 56 s, le véhicule de police tourne à droite sur la rue Mill alors qu’un troisième véhicule de police se dirige vers le nord sur la rue Richmond. Ses gyrophares sont allumés. À 3 h 49, le véhicule de police qui roule sur la rue Mill sort du champ de vision de la caméra. Le plaignant se trouve sur le trottoir, côté ouest, de la rue Richmond, près d’un conteneur à ordures.

À 3 h 49 min 10 s, le plaignant s’engage dans la rue Richmond et fait environ six pas, puis il accélère le pas vers le milieu de la rue Richmond. Alors qu’il s’approche de l’autre côté de la rue Richmond, le plaignant ralentit. À 3 h 49 min 22 s, il monte sur le trottoir et fait deux pas vers l’allée.

À environ 3 h 49 min 25 s, un véhicule de police [on sait maintenant qu’il était conduit par l’AT n° 1] se dirige vers le nord sur la rue Richmond. Le plaignant est sur le trottoir et s’engage dans l’allée. À 3 h 49 min 28 s, les feux de freinage du véhicule de police de l’AT n° 1 s’allument. Le plaignant s’engage dans l’allée. À 3 h 49 min 33 s, l’AT n° 1, à bord de son véhicule, tourne lentement à droite et s’engage également dans l’allée. À 3 h 49 min 36 s, le véhicule de police de l’AT n° 1 disparait dans l’allée.

À 3 h 50 min 30 s, un véhicule de police circule en direction est sur la rue Mill, s’arrête, puis s’engage lentement sur la rue Richmond.

À 3 h 51 min 22 s, un véhicule de police fait demi-tour, se déplace vers l’ouest sur la rue Mill et arrive sur le trottoir nord. Environ 22 secondes plus tard, le véhicule de police, qui vient d’allumer ses gyrophares, fait marche arrière et se dirige vers le sud.

À 3 h 51 min 55 s, un véhicule de police se dirige vers l’est sur la rue Mill et tourne à droite sur la rue Richmond. Un autre véhicule de police le suit environ deux secondes plus tard.

Photographies du SPL montrant le cou de l’AT n° 1

Le SPL a fourni à l’UES des photographies [2] prises le 28 octobre 2021 des blessures de l’AI et de l’AT n° 1. D’après les photographies fournies, il ne semble pas y avoir de blessures visibles au cou de l’AT n° 1. Les dossiers médicaux de l’AT n° 1 provenant du London Health Sciences Centre (LHSC) et datés du 28 octobre 2021 ont également été obtenus par l’UES avec l’autorisation de l’AT n° 1.

Documents obtenus du service de police

L’UES a examiné les éléments et documents suivants que lui a remis, à sa demande, le SPL entre le 29 octobre et le 20 décembre 2021 :
  • Autorisation de divulgation des renseignements médicaux de l’AT n° 1
  • Notes et déclarations de l’AT n° 17
  • Résumé détaillé de l’appel
  • Rapport d’incident général
  • Agents impliqués
  • Notes et déclarations de l’AT n° 15
  • Notes de l’AT n° 18
  • Politique sur le recours à la force
  • Procédure sur les arrestations
  • Procédure sur la détention pour enquête
  • Déclaration de l’AT n° 2
  • Déclaration (récit) et notes de l’AT n° 8
  • Déclaration (récit) et notes de l’AT n° 1
  • Déclaration (récit) et notes de l’AT n° 6
  • Déclaration (récit) et notes de l’AT n° 11
  • Déclaration (récit) et notes de l’AT n° 3
  • Déclaration (récit) et notes de l’AT n° 12
  • Déclaration (récit) et notes de l’AT n° 13
  • Déclaration (récit) et notes de l’AT n° 4
  • Déclaration (récit) et notes de l’AT n° 14
  • Déclaration (récit) de l’AT n° 5
  • Déclaration (récit) de l’AT n° 10
  • Déclaration (récit) de l’AT n° 9
  • Déclaration (récit) de l’AT n° 1
  • Dossiers de formation de l’AI
  • Sommaire de déposition de l’AT n° 15
  • Sommaire de déposition de l’AT n° 7
  • Enregistrements des communications
  • Photographies d’identification
  • Vidéo de surveillance
  • Séquences vidéo captées dans la municipalité

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a obtenu et examiné les éléments suivants provenant d’autres sources :
  • Dossiers des SMU – Rapport d’appel d’ambulance et rapports d’incidents
  • Dossiers médicaux du plaignant – LHSC
  • Dossiers médicaux de l’agent impliqué – LHSC
  • Dossiers du TC n° 2 concernant le plaignant
  • Rapport d’autopsie du Bureau du coroner
  • Séquences vidéo captées à l’aide de plusieurs caméras installées à proximité des lieux de l’incident

Description de l’incident

Le scénario suivant se dégage des preuves recueillies par l’UES, qui comprenaient une entrevue avec l’un des deux agents de police présents au moment de l’incident en question, soit l’AT n° 1. Comme il en avait le droit, l’AI a refusé de s’entretenir avec l’UES ou d’autoriser la diffusion de ses notes.

Le 28 octobre 2021, très tôt le matin, le plaignant marchait vers le sud sur la rue Richmond. Il a traversé la rue Piccadilly et a continué vers l’intersection de la rue Mill. Juste avant la rue Mill, le plaignant est passé du côté ouest au côté est de la rue Richmond.

À peu près au même moment où le plaignant se dirigeait vers le sud sur la rue Richmond, des agents du SPL donnaient suite à un appel concernant une introduction par effraction en cours à l’angle des rues St. George et Mill. L’AT n° 2 avait signalé l’incident par radio. Lui et son partenaire, soit l’AT n° 3, avaient croisé trois hommes qui tentaient d’utiliser une échelle pour s’introduire dans une maison. Les hommes s’étaient enfuis à la vue des agents et l’AT n° 3 en poursuivait deux à pied. Une description des suspects a été fournie – deux d’entre eux auraient été vêtus de noir.

L’AI et l’AT n° 1 à bord d’un VUS identifié étaient parmi les agents qui intervenaient dans le secteur. Alors qu’ils se déplaçaient vers le nord sur la rue Richmond, ils ont vu un homme, soit le plaignant, traverser la route au nord de la rue Mill. Soupçonnant que l’homme pouvait être l’un des suspects, l’AT n° 1 a ralenti pendant que l’AI a appelé le plaignant. [En fait, le plaignant n'avait pas été impliqué dans l’introduction par effraction signalée, mais la police ne l’a su qu’après l'incident.] 

Le plaignant a continué à marcher vers l’est, sur le trottoir du côté est de la rue Richmond et en empruntant une voie piétonne entre les commerces Cloud 29 et Miso Sushi. La voie piétonne débouchait sur un parc de stationnement servant aux utilisateurs d’établissements du secteur. Le plaignant venait de dépasser la voie piétonne lorsqu’il s’est arrêté pour confirmer qu’il avait bien vu le VUS de la police derrière lui.

L’AT n° 1 à bord de son véhicule avait tourné dans la voie piétonne pour suivre le plaignant. Une vingtaine de mètres plus loin, il a immobilisé son véhicule et l’AI en est sorti. L’agent a expliqué au plaignant qu’il était détenu dans le cadre d’une enquête sur une introduction par effraction et lui a demandé s’il avait des armes sur lui. L’AT n° 1 a rejoint son coéquipier et le plaignant. Il avait sorti ses menottes et comptait les placer sur le plaignant pendant qu’ils le fouillaient pour vérifier s’il était en possession d’armes.

Les agents ont demandé au plaignant de se tourner vers l’ouest, dos à eux. Cependant, quelques instants plus tard, alors que l’AT n° 1 s’approchait, menottes à la main, le plaignant s’est libéré de l’emprise de l’AI et s’est enfui. Il avait fait plusieurs pas quand les agents l’ont rattrapé, chacun agrippant l’un de ses bras. Les trois ont lutté pendant un certain temps debout avant que les agents ne mettent le plaignant au sol.

L’AT n° 1 a atterri sur le ventre et a senti les deux autres personnes tomber sur lui. Son microphone s’est détaché dans la chute. Il l’a récupéré et a essayé de rapporter ce qui se passait, mais il y avait trop de conversations sur les ondes pour que son message ne puisse passer. Peu de temps après, l’AT n° 1 a été victime de ce qu’il a décrit comme une « prise arrière nue avec étranglement » de la part du plaignant.
Le plaignant avait enroulé un bras autour du cou de l’AT n° 1 et resserrait la prise. Il a maintenu la prise pendant environ 45 à 60 secondes, et n’a lâché prise qu’après avoir reçu une balle dans le cou.

L’AI, conscient que l’AT n° 1 se faisait étrangler par le plaignant, a tiré à bout portant. Il a annoncé à la radio que des « coups de feu » avaient été tirés.
Le plaignant a rapidement perdu connaissance et l’AT n° 1 a commencé à faire des compressions thoraciques. D’autres agents répondant à la diffusion des « coups de feu » sont arrivés sur place et ont aidé à prodiguer les premiers soins.

Des ambulanciers paramédicaux se sont rendus sur les lieux et ont pris en charge les soins primaires du plaignant. Ce dernier a été transporté à l’hôpital où les efforts en vue de le réanimer se sont avérés vains. À 4 h 24, la mort du plaignant a été constatée.
 

Cause du décès

Lors de l’autopsie, le médecin légiste a attribué le décès du plaignant à une « blessure par balle au cou et à la poitrine ». Il a observé que le coup de feu était entré par la partie antérieure droite du bas du cou et était ressorti par le haut du dos, côté droit. Dans la section « Résumé et opinion » de son rapport final, le médecin légiste a noté que « le noircissement de la peau autour de la blessure d’entrée par balle représentait un dépôt de suie qui avait passé au travers des vêtements et provenant de la bouche de l’arme à feu après que la balle ait été déchargée » [Traduction]. De l’avis du médecin légiste, la balle qui a causé la blessure a été déchargée d’une « courte distance et avait passé à travers les vêtements ». 
Le rapport d'autopsie contenait un rapport toxicologique du Centre des sciences judiciaires indiquant que le plaignant n'était pas sous l’influence de drogues ou d’alcool au moment de sa mort.

Dispositions législatives pertinentes

Article 34 du Code criminel -- Défense -- emploi ou menace d’emploi de la force

34 (1) N’est pas coupable d’une infraction la personne qui, à la fois :
a) croit, pour des motifs raisonnables, que la force est employée contre elle ou une autre personne ou qu’on menace de l’employer contre elle ou une autre personne
b) commet l’acte constituant l’infraction dans le but de se défendre ou de se protéger -- ou de défendre ou de protéger une autre personne -- contre l’emploi ou la menace d’emploi de la force
c) agit de façon raisonnable dans les circonstances
(2) Pour décider si la personne a agi de façon raisonnable dans les circonstances, le tribunal tient compte des faits pertinents dans la situation personnelle de la personne et celle des autres parties, de même que des faits pertinents de l’acte, ce qui comprend notamment les facteurs suivants :
a) la nature de la force ou de la menace
b) la mesure dans laquelle l’emploi de la force était imminent et l’existence d’autres moyens pour parer à son emploi éventuel
c) le rôle joué par la personne lors de l’incident
d) la question de savoir si les parties en cause ont utilisé ou menacé d’utiliser une arme
e) la taille, l’âge, le sexe et les capacités physiques des parties en cause
f) la nature, la durée et l’historique des rapports entre les parties en cause, notamment tout emploi ou toute menace d’emploi de la force avant l’incident, ainsi que la nature de cette force ou de cette menace;
f.1) l’historique des interactions ou communications entre les parties en cause
g) la nature et la proportionnalité de la réaction de la personne à l’emploi ou à la menace d’emploi de la force
h) la question de savoir si la personne a agi en réaction à un emploi ou à une menace d’emploi de la force qu’elle savait légitime
(3) Le paragraphe (1) ne s’applique pas si une personne emploie ou menace d’employer la force en vue d’accomplir un acte qu’elle a l’obligation ou l’autorisation légale d’accomplir pour l’exécution ou le contrôle d’application de la loi, sauf si l’auteur de l’acte constituant l’infraction croit, pour des motifs raisonnables, qu’elle n’agit pas de façon légitime.

Analyse et décision du directeur

Le 28 octobre 2021, des agents du SPL ont tiré sur un homme et l’ont tué. L’agent, soit l’AI, a été identifié comme l’agent impliqué aux fins de l’enquête de l’UES. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation des preuves, il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que l’AI a commis une infraction criminelle relativement à la mort du plaignant.

Conformément à l’article 34 du Code criminel, la force utilisée pour se défendre ou défendre autrui contre une attaque raisonnablement appréhendée, qu’elle soit réelle ou une menace, est légalement justifiée à condition que la force elle-même soit raisonnable. Le caractère raisonnable de la force doit être évalué en fonction des circonstances du moment, notamment des facteurs tels que la nature de la force ou de la menace; la mesure dans laquelle l’usage de la force était imminent et l’existence d’autres moyens pour parer à son emploi éventuel; le rôle de la personne dans l’incident; la nature et la proportionnalité de la réaction de la personne à l’emploi ou à la menace d’emploi de la force. Le tir est conforme aux limites de la justification de l’article 34.

Dans l’affaire R. c. Mann, [2004] 3 R.C.S. 59, la Cour suprême du Canada a confirmé le pouvoir des agents de police de détenir brièvement des personnes aux fins d’enquête lorsqu’il existe des motifs raisonnables de soupçonner qu’elles sont impliquées dans un crime donné. Même si, comme il s’est avéré par la suite, le plaignant n'avait pas été impliqué dans l’introduction par effraction signalée, on peut avancer que ces motifs étaient valables dans le cas du plaignant, car il correspondait de manière générale à la description de l’une des parties vues en train de fuir les AT n° 2 et 3 (homme, petite taille, dans la vingtaine, portant des vêtements foncés), et se trouvait à proximité du lieu de l’introduction par effraction signalée.

En revanche, les agents étaient-ils en droit de fouiller le plaignant? Conformément à l’arrêt Mann, susmentionné, ils avaient le droit de le faire qu’à condition d’être convaincus que leur sécurité ou celle des autres était menacée. De plus, une telle fouille doit généralement se limiter à une fouille par palpation à but préventif. Le plaignant semblait d’abord accepter sa mise sous garde dans le parc de stationnement, mais lorsque les agents ont tenté de lui passer les menottes avant de le fouiller, le plaignant semblait hors de lui. Il aurait bien pu avoir raison. Comme rien n’indiquait que les suspects portaient des armes lors de l’introduction par effraction, les menottes auraient pu constituer un excès de la part des agents. Cela dit, même si le plaignant avait le droit de résister à ce qui aurait pu être une détention illégale, il n’avait pas le droit d’utiliser une force potentiellement mortelle. 

La preuve incontestée est que le plaignant utilisait la technique de contrôle par l’encolure contre l’AT n° 1, que l’AT n° 1 ne pouvait pas s’en libérer, était incapable de respirer et commençait à perdre connaissance lorsque l’AI a déchargé son arme. L’AT n° 1 a présenté la situation de la sorte et il n’y a aucune preuve pour le contredire [3]. Bien que l’AI ne se soit pas présenté pour une entrevue, il existe des preuves sous forme de déclarations qu’il a faites à d’autres agents à la suite de l’incident, selon lesquelles il avait tiré sur le plaignant, car ce dernier étouffait l’AT n° 1. Dans ces circonstances, je suis convaincu que l’AI a tiré avec son arme sur le plaignant dans l’intention de protéger l’AT n° 1 d’une agression raisonnablement appréhendée.

Je suis également convaincu que le recours aux tirs par l’AI était raisonnable. D’après les preuves disponibles, la vie de l’AT n° 1 était en jeu – sa respiration avait été coupée par la prise de contrôle par l’encolure du plaignant pendant une période prolongée et il était sur le point de perdre connaissance lorsque l’AI a tiré avec son arme. Mis en balance, l’usage de la force mortelle par l’agent n’était pas disproportionné par rapport au fait que l’AT n° 1 risquait éminemment de mourir ou de subir des lésions corporelles graves, car le plaignant était en train de l’étrangler.

Je ne suis pas non plus convaincu que la décharge de l’arme était déraisonnable d’un point de vue général. Dans ce cas, il faut se demander s’il était nécessaire de procéder ainsi pour protéger l’AT n° 1, ou si un usage atténué de la force aurait suffi. Par exemple, l’AI ne semble pas avoir utilisé son arme à impulsions ou son vaporisateur de poivre pour tenter de neutraliser le plaignant. De plus, il n’existe pas de preuve établissant de manière concluante que l’AI a eu recours à sa matraque ou a fait des efforts pour affaiblir physiquement la prise du plaignant sur l’AT n° 1. Si ces efforts avaient été déployés, ils auraient peut-être pu défendre l’AT n° 1. Cependant, en l’absence d’une déclaration de l’AI, il est difficile d’évaluer la réflexion qu’il a pu avoir sur ces méthodes. L’agent aurait pu avoir de bonnes raisons d’éviter d’utiliser son arme à impulsions ou son vaporisateur de poivre étant donné la dynamique de la lutte au sol entre l’AT n° 1 et le plaignant. Enfin, l’AI a peut-être tenté de dissuader le plaignant physiquement à l’aide de sa matraque ou d’une utilisation directe de la force. Bien que l’autopsie n’ait révélé aucun signe définitif de blessure qui aurait pu être infligée de cette manière, je suis convaincu que l’absence de preuve dans cet incident n’équivaut pas à une preuve d’absence. En effet, il est difficile de croire que l’AI aurait pu rester les bras croisés pendant un certain temps avant de décharger son arme alors que son partenaire – l’AT n° 1 – se faisait étrangler par terre. Sur la base de ce dossier, les preuves ne permettent pas de conclure raisonnablement que l’AI a agi précipitamment et sans justification légale lorsqu’il a décidé de répondre à une menace mortelle contre l’AT n° 1 en recourant à une force mortelle à son tour.

Par conséquent, étant donné qu’il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que l’AI s’est comporté de manière illégale en tirant sur le plaignant, il n’y a pas de base pour engager des poursuites criminelles dans cette affaire et le dossier est clos.


Date : 13 juin 2022


Approuvé électroniquement par


Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels délicats et ne sont pas divulgués en vertu du paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les éléments importants des documents sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]
  • 2) Les photographies ont été incluses dans le rapport d’incident du SPL. [Retour au texte]
  • 3) Malheureusement, l’UES n’a pas pu entendre le point de vue du plaignant, et il n’y avait pas d’autres témoins des événements ou des vidéos de la fusillade. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.