Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 21-OFI-419

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur les blessures graves qu’un homme de 25 ans (le « plaignant ») a subies.

L’enquête

Notification de l’UES

Le 15 décembre 2021, à 15 h 19, le service de police régional de York (SPRY) a informé l’UES que le plaignant avait été blessé par balle.

Le SPRY a indiqué que, le 15 décembre 2021, à 13 h 53, un vol s’était produit à la Banque Scotia située au 2900, avenue Steeles, à Markham. Un homme seul est entré dans la banque et s’est fait remettre une somme d’argent. La police s’est rendue à la succursale de la banque pour commencer son enquête. Peu de temps après, un policier effectuant des recherches dans le secteur [maintenant considéré comme étant l’agent impliqué (AI)] est entré en contact avec le plaignant, qui était armé d’une arme de poing et d’un couteau. L’AI a dégainé son pistolet et a tiré une balle sur le plaignant, qui a été transporté au Centre Sunnybrook des sciences de la santé (SBHSC). Il aurait été conscient et respirait.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : Le 15 décembre 2021 à 16 h 42

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : Le 15 décembre 2021 à 17 h 20

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3
 
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 2

Personne concernée (« plaignant ») :

homme de 25 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

Le plaignant a participé à une entrevue le 16 décembre 2021.

Témoins civils

TC n° 1 A participé à une entrevue
TC n° 2 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à une entrevue le 16 décembre 2021.

Agent impliqué

AI A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

L’agent impliqué a participé à une entrevue le 14 janvier 2022.

Agents témoins

AT n° 1 A participé à une entrevue
AT n° 2 A participé à une entrevue
AT n° 3 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à une entrevue entre le 17 et le 21 décembre 2021.

Éléments de preuve

Les lieux

Le 15 décembre 2021, à 17 h 55, les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES sont arrivés sur les lieux.

Les lieux étaient situés près du boulevard Simonston, qui était orienté d’est en ouest. Il y avait une aire de stationnement qui faisait partie d’un complexe de maisons en rangée. Un immeuble de bureaux de gestion immobilière était situé sur le terrain. Le parc de stationnement était situé entre le 449 et le 451 du boulevard Simonston. Il y avait un mur en brique sur le côté nord du stationnement, derrière le bureau. Le mur s’étendait d’est en ouest.

Un Ford Explorer du SPRY était garé dans la partie sud du stationnement. La voiture de police, orientée vers le nord-ouest, chevauchait le trottoir et reposait partiellement dans l’allée menant au stationnement. Un véhicule blanc, orienté vers l’ouest, occupait une place de stationnement dans le parc de stationnement.. Un ruban de sécurité jaune délimitait le périmètre.

La fusillade a eu lieu sur une allée ou un sentier et une aire gazonnée de l’autre côté du mur de briques. Cette allée et cette aire gazonnée permettaient aux piétons d’accéder aux parties arrière des maisons en rangée situées sur le boulevard Simonston et Dersingham Crescent. Dersingham Crescent était orienté d’est en ouest et se trouvait au nord du boulevard Simonston. Des lampadaires situés le long de ce chemin éclairaient l’allée. Des arbres et des aires gazonnées faisaient partie de l’allée.

Un seul lampadaire éclaire le lieu d’intérêt. Des objets d’intérêt étaient disposés sur l’allée et sur l’aire gazonnée, au nord du mur de briques : un couteau, une arme de poing noire (réplique d’un Glock), une sacoche, un sac en plastique contenant des billets de banque, un chapeau, une cagoule et trois téléphones cellulaires. Des débris médicaux et deux trousses de premiers soins reposaient à proximité. Ces objets ont été recueillis par les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES.

Les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES ont photographié le stationnement et les lieux de la fusillade.

Deux douilles ont été trouvées dans l’aire gazonnée près d’un mur de briques situé à l’arrière du 27, Dersingham Crescent.

Les enquêteurs de l’UES ont inspecté l’arme de poing noire avant de la placer dans un lieu sûr — une arme à balles BB (une réplique d’un pistolet Glock). L’arme à balles BB était munie d’un chargeur.
Le mur en briques situé près de l’endroit où les objets ont été recueillis a été examiné. Deux zones ont été désignées comme étant les endroits que les balles ont touchés. Dans l’une de ces zones, un fragment de cuivre enfoncé dans la brique a été recueilli. Ces zones étaient situées sur le côté nord du mur. Des photos supplémentaires ont été prises. Les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES ont continué à examiner les espaces situés près du mur en brique mentionné précédemment. Les zones au nord et à l’est de l’endroit où les objets ont été recueillis ont été examinées à la fois à l’œil nu et avec un détecteur de métaux. Aucune balle ni aucun projectile n’a été trouvé.

Figure 1 – The Complainant’s BB gun (Glock replica)
Figure 1 – L’arme à balles BB du plaignant (réplique d’un Glock)

Figure 2 – The Complainant’s knife
Figure 2 – Le couteau du plaignant


Schémas des lieux


Éléments de preuve matériels

Le pistolet et l’équipement de l’AI

Des photographies du pistolet ont été prises pendant le processus d’examen.

Le pistolet de l’AI était placé dans l’étui avec la glissière en position ouverte. Le pistolet, un Glock modèle 22, de calibre .40, a été retiré de l’étui et déclaré comme étant sans danger. Une boîte à fusil contenait une seule cartouche non tirée et un chargeur contenait des cartouches non tirées. On pense que ces articles avaient déjà été retirés du pistolet. Treize cartouches non tirées ont été extraites du chargeur. Les cartouches provenaient du même fabricant et étaient du même calibre. Les deux chargeurs de rechange ont été examinés, et chacun contenait 15 cartouches non tirées du même fabricant.

Le 10 janvier 2021, les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES se sont rendus au Centre des sciences judiciaires (CSJ) et ont soumis des articles à des fins d’enquête judiciaire et d’examen.

Figure 3 – The SO’s firearm
Figure 3 – L’arme à feu de l’AI


Figure 4 – The SO’s magazine
Figure 4 – Le chargeur de l’AI

Éléments de preuves médicolégaux

Soumissions et résultats du CSJ

Les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES ont remis au CSJ le pistolet Glock modèle 22 Gen 4 de calibre .40 de l’AI, le chargeur du pistolet Glock de l’AI, deux douilles de cartouches trouvées au 451, boulevard Simonston et le fragment de métal enfoncé dans un mur de briques situé à la même adresse afin que l’arme à feu soit analysée.

Au moment de la rédaction de ce rapport, le CSJ n’avait pas encore envoyé son rapport d’analyse de l’arme à feu et de Toolmark.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [1]

Appels au 9-1-1

Le premier appel a été enregistré le 15 décembre 2021. L’enregistrement audio, d’une durée de 7 minutes 47 secondes, n’est pas horodaté.

L’appelant était un employé de la Banque Scotia qui a demandé la présence de la police au 2900, avenue Steeles Est. Il a indiqué que la banque avait été cambriolée par un homme, qui avait remis au caissier une note indiquant qu’il tirerait sur lui s’il refusait de lui remettre de l’argent. L’appelant ne savait pas si l’homme était armé.

Un deuxième appel a été enregistré le 15 décembre 2021. L’enregistrement audio, d’une durée de 8 minutes 11 secondes, n’est pas horodaté.

L’appelant était un homme qui signalait un vol de banque sur Don Mills et l’avenue Steeles Est. Il se trouvait dans la banque et affirmait avoir vu un homme y entrer avec sa main dans la poche en disant qu’il allait tirer.
 

Enregistrements des communications

L’enregistrement date du 15 décembre 2021. L’enregistrement, d’une durée de 11 minutes 46 secondes, n’est pas horodaté.

À 0 min 1 s, le répartiteur informe les unités de police qu’un vol qualifié est en cours à la Banque Scotia dans le secteur de Don Mills et de l’avenue Steeles. Un homme portant un masque noir et des vêtements noirs avait commis un vol., puis avait quitté le centre commercial à pied. Il avait remis une note au caissier — aucune arme n’a été vue.

À 1 min 35 s, l’AI demande sur la radio de la police si le plaignant était sorti par le centre commercial afin de faire appel aux agents de sécurité du centre pour vérifier s’ils pouvaient voir le plaignant sur les caméras de sécurité. Au même moment, l’AT n° 2 demande que deux unités de police se rendent à la banque pour établir un périmètre de sécurité autour du centre commercial.

À 2 min 3 s, le répartiteur indique que l’homme n’a pas sorti d’arme, mais qu’il a déclaré au caissier qu’il tirerait si on ne lui remettait pas de l’argent. Le caissier pensait que le plaignant avait peut-être quelque chose dans sa ceinture.

A 3 min 22 s, l’AI indique sur sa radio de police qu’il marche dans le centre commercial. L’AI voit un membre du public lui faire signe que le plaignant est sorti par l’arrière du centre commercial. Le plaignant est sorti par la sortie nord, près de l’allée arrière, en direction des maisons en rangée. Le répartiteur indique avoir reçu des renseignements selon lesquels le plaignant pourrait se trouver sur Chumleigh Crescent.

À 6 min 1 s, l’AI signale par la radio de la police qu’il est en train de poursuivre le plaignant à pied. Le plaignant court en direction est. L’AI indique que le plaignant a une arme à la main et que, peu après, des coups de feu ont été tirés. L’AI indique qu’il pointe son arme sur le plaignant. Le plaignant a reçu une balle dans l’omoplate. L’AI indique qu’il va bien. Il indique qu’il se trouve au milieu des maisons en rangée.

À 7 min 36 s, l’AT n° 1 indique par radio que le plaignant est menotté et qu’une ambulance doit être dépêchée sur place parce que le plaignant est blessé par balle.

Vidéo captée à l’aide du système de caméra installé dans le véhicule de police — Transport du plaignant depuis l’hôpital

L’enregistrement a été capté le 15 décembre 2021 et montre le plaignant à l’arrière d’un véhicule de police après sa sortie de l’hôpital. Il n’a aucune valeur probante.

Documents obtenus du service de police

L’UES a reçu les éléments et documents suivants que lui a remis, à sa demande, le SPRY entre le 16 décembre 2021 et le 15 février 2022 :
  • Enregistrements des communications
  • Séquences captées à l’aide du système de caméra installé dans le véhicule de police
  • Casier judiciaire du plaignant
  • Rapport d’incident général
  • Registres de l’unité — AT no 1
  • Registres de l’unité — AI
  • Registres de l’unité — AT no 3
  • Registres de l’unité — AT no 2
  • Notes — AT no 1
  • Notes — AT no 2
  • Notes — AT no 3

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a examiné les éléments suivants obtenus d’autres sources :
  • Dossiers médicaux du SBHSC

Description de l’incident

Le scénario suivant se dégage du poids des preuves recueillies par l’UES, qui comprennent des entrevues avec le plaignant et l’AI.

Le 15 décembre 2021, peu avant 14 h, des agents du SPRY ont été dépêchés sur les lieux d’un vol en cours à la Banque Scotia située au 2900, avenue Steeles Est, à Markham. Un employé de la banque avait appelé la police pour signaler qu’un homme habillé en noir et portant un masque avait menacé de tirer sur un caissier avant de se faire remettre de l’argent dans un sac et de quitter les lieux. Le suspect a été vu pour la dernière fois alors qu’il se dirigeait vers le nord dans un centre commercial adjacent.

L’AI était l’un des agents qui se sont rendus sur les lieux. L’agent a appris que le suspect était sorti du centre commercial par la sortie nord. Il a alors commencé à effectuer une patrouille dans le secteur pour tenter de le retrouver. Ce faisant, l’AI a reçu des renseignements sur la direction dans laquelle se dirigeait le suspect. L’AI s’est donc rendu, à bord de son véhicule, sur le boulevard Simonston, à un pâté de maisons au nord du centre commercial. À cet endroit, il a vu un homme dont la description correspondait à celle du suspect.

L’homme en question était le plaignant. Il marchait vers l’ouest sur le côté nord du boulevard Simonston en direction de Don Mills Road lorsque, en voyant le véhicule de police, il a tourné à droite pour courir vers le nord dans l’allée du 449A, boulevard Simonston. La propriété servait de bureau au concierge d’un complexe de maisons en rangée du secteur. Le plaignant a alors sorti une arme à balles BB qu’il avait en sa possession et l’a pointé vers l’agent de police.

L’AI s’est engagé partiellement dans l’allée, est sorti et s’est mis à poursuivre le plaignant à pied. Il a crié au plaignant qu’il était en état d’arrestation et qu’il devait s’arrêter. L’agent a suivi le plaignant en contournant le bureau du concierge et en entrant dans une petite cour, puis en traversant la cour vers le nord, en direction de Dersingham Crescent.

Le plaignant a refusé de s’arrêter lorsque l’agent le lui a demandé et a continué à fuir vers l’ouest en direction de la dernière maison en rangée à l’ouest, soit 37 Dersingham Crescent, où il a tourné pour courir vers le sud, puis vers l’est derrière les maisons en rangée. Pendant la poursuite, il s’est retourné à plusieurs reprises vers l’agent, en pointant son arme vers lui et en menaçant de tirer. Après être revenu dans la cour, le plaignant a tourné au coin de la rue vers le sud et s’est caché derrière un buisson et un mur de briques.

Se doutant que le plaignant se cachait derrière le buisson et le mur de briques, l’agent a prudemment contourné le coin. Ce faisant, il est tombé face à face avec le plaignant. En quelques secondes, l’agent a dégainé son arme de poing et a tiré deux coups de feu en succession rapide.

Le plaignant s’était éloigné du mur pour faire directement face à l’agent. Il a sorti son arme de sa ceinture, l’a tenue à deux mains et l’a pointée vers l’AI lorsque ce dernier lui a tiré dessus. C’est alors qu’il a reçu deux projectiles et qu’il est tombé au sol.

L’AI a continué de pointer son arme vers le plaignant jusqu’à ce que d’autres agents arrivent sur les lieux. Il a alors menotté le plaignant et l’a aidé à recevoir les premiers soins en attendant l’arrivée des ambulanciers paramédicaux.

Le plaignant a été transporté à l’hôpital où il a reçu des soins pour une blessure par balle au niveau de l’épaule gauche et une éraflure à la partie supérieure du bras gauche.

Dispositions législatives pertinentes

Article 34 du Code criminel -- Défense -- emploi ou menace d’emploi de la force

34 (1) N’est pas coupable d’une infraction la personne qui, à la fois :
a) croit, pour des motifs raisonnables, que la force est employée contre elle ou une autre personne ou qu’on menace de l’employer contre elle ou une autre personne
b) commet l’acte constituant l’infraction dans le but de se défendre ou de se protéger -- ou de défendre ou de protéger une autre personne -- contre l’emploi ou la menace d’emploi de la force
c) agit de façon raisonnable dans les circonstances
(2) Pour décider si la personne a agi de façon raisonnable dans les circonstances, le tribunal tient compte des faits pertinents dans la situation personnelle de la personne et celle des autres parties, de même que des faits pertinents de l’acte, ce qui comprend notamment les facteurs suivants :
a) la nature de la force ou de la menace
b) la mesure dans laquelle l’emploi de la force était imminent et l’existence d’autres moyens pour parer à son emploi éventuel
c) le rôle joué par la personne lors de l’incident
d) la question de savoir si les parties en cause ont utilisé ou menacé d’utiliser une arme
e) la taille, l’âge, le sexe et les capacités physiques des parties en cause
f) la nature, la durée et l’historique des rapports entre les parties en cause, notamment tout emploi ou toute menace d’emploi de la force avant l’incident, ainsi que la nature de cette force ou de cette menace;
f.1) l’historique des interactions ou communications entre les parties en cause
g) la nature et la proportionnalité de la réaction de la personne à l’emploi ou à la menace d’emploi de la force
h) la question de savoir si la personne a agi en réaction à un emploi ou à une menace d’emploi de la force qu’elle savait légitime
(3) Le paragraphe (1) ne s’applique pas si une personne emploie ou menace d’employer la force en vue d’accomplir un acte qu’elle a l’obligation ou l’autorisation légale d’accomplir pour l’exécution ou le contrôle d’application de la loi, sauf si l’auteur de l’acte constituant l’infraction croit, pour des motifs raisonnables, qu’elle n’agit pas de façon légitime.

Analyse et décision du directeur


Le 15 décembre 2021, un agent du SPRY a tiré sur le plaignant et l’a grièvement blessé. L’agent, soit l’AI, a été désigné comme l’agent impliqué dans le cadre de l’enquête de l’UES qui a suivi. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation des preuves, il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que l’AI a commis une infraction criminelle en lien avec les coups de feu tirés.

L’article 34 du Code criminel traite du droit à la défense au Canada. Il prévoit que la force utilisée pour se défendre contre une attaque raisonnablement anticipée, réelle ou menaçante, est légalement justifiée si elle était raisonnable. Le caractère raisonnable de la force doit être évalué à la lumière des circonstances du moment, notamment les facteurs suivants : la nature de la force ou de la menace, la mesure dans laquelle l’emploi de la force était imminent et l’existence d’autres moyens pour parer à son emploi éventuel, la question de savoir si les parties en cause ont utilisé ou menacé d’utiliser une arme, et la nature et la proportionnalité de la réaction de la personne à l’emploi ou à la menace d’emploi à la force. Il est évident, d’après les preuves, que la force utilisée par l’AI correspondait aux critères définis dans l’article 34.

L’AI était placé légalement et exerçait ses fonctions durant les événements qui ont abouti au tir sur le plaignant. Compte tenu de ce qu’il avait appris au sujet du vol de banque récemment commis à proximité, soit la menace d’utilisation d’une arme à feu, l’agent était dans son droit en cherchant à arrêter le plaignant sur le boulevard Simonston. L’apparence du plaignant correspondait à la description générale du suspect diffusée par la radio de la police, le plaignant se trouvait à un endroit où les renseignements de la police laissaient supposer qu’il pouvait être, et il avait fui l’agent dès qu’il l’avait aperçu.

L’AI a indiqué qu’il avait tiré avec son arme par légitime défense parce qu’il craignait pour sa vie. Aucun élément de preuve ne permet de mettre en doute le témoignage de l’agent à cet égard. Même si le plaignant n’était pas en possession d’une arme à feu réelle, l’arme à balles BB qu’il brandissait semblait être une arme à feu mortelle pour toute personne raisonnable se trouvant dans les circonstances tendues du moment. Pour une raison quelconque, il semble que le plaignant souhaitait convaincre l’agent qu’il était sur le point de se faire tirer dessus avec une arme à feu réelle. Il a pointé l’arme vers l’AI à plusieurs reprises alors qu’il fuyait dans le complexe de maisons en rangée, menaçant de le tuer, et est sorti délibérément de sa cachette en pointant l’arme vers l’agent.

Pour les mêmes raisons, je suis convaincu que l’AI a agi raisonnablement lorsqu’il a décidé de tirer deux coups de feu sur le plaignant. Face à un individu qui avait clairement fait savoir qu’il n’avait pas l’intention de se rendre pacifiquement, et face à une arme qu’il croyait être une arme à feu en parfait état de marche capable d’infliger des lésions corporelles graves ou la mort, il est clair que l’AI a agi raisonnablement en recourant lui même à une force mortelle. En effet, l’agent ne semblait pas disposer d’autres options pour faire face à la situation en toute sécurité. Il n’était pas à plus de six ou sept mètres du plaignant à ce moment-là et il était totalement à découvert. Il ne pouvait donc en aucun cas se replier ou se mettre à l’abri. De plus, l’utilisation d’une force moindre, comme le gaz poivré, une arme à impulsions ou un combat physique, aurait mis la vie de l’agent en véritable danger si elle n’avait pas été immédiatement neutralisante — un risque déraisonnable dans les circonstances.

Par conséquent, étant donné qu’il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que l’AI s’est comporté de manière illégale au cours des événements qui ont mené au tir des coups de feu, il n’y a pas lieu d’engager des poursuites pénales contre l’agent. Le dossier est clos.


Date : 14 avril 2022

Approuvé électroniquement par


Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués en vertu du paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les éléments importants des documents sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.