Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 21-OCI-368

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  • des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  • les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES au sujet d’une blessure grave subie par un homme de 19 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 30 octobre 2021, la Police régionale de York (PRY) a avisé l’UES de la blessure subie par le plaignant.

La PRY a signalé que, le 29 octobre 2021, vers 20 h, des agents de la PRY ont arrêté le plaignant à une adresse située sur Intermodal Drive, à Brampton, dans le cadre d’une enquête pour vol d’automobile. Il a été transporté à l’Hôpital Cortellucci de Vaughan où on lui a diagnostiqué une fracture de l’os orbital.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 30 octobre 2021 à 10 h 23

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 1er novembre 2021 à 7 h 25

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3
 
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences
judiciaires de l’UES assignés : 1

Personne concernée (« plaignant ») :

Homme de 19 ans, a refusé de participer à une entrevue

Agents impliqués

AI A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

L’agent impliqué a participé à une entrevue le 12 novembre 2021.

Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à des entrevues le 4 novembre 2021.

Éléments de preuve

Les lieux

Aire de stationnement d’un bâtiment commercial situé sur Intermodal Drive, à Brampton.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [1]

Enregistrement vidéo fourni par le bâtiment commercial situé sur Intermodal Drive, à Brampton

L’enregistrement provient d’une caméra extérieure fixe qui fait face au nord. Les images ont été enregistrées le 29 octobre 2021, entre 19 h 59 min 40 s et 20 h 12 min.

À 19 h 59 min 49 s, l’AT no 2 gare une camionnette noire banalisée directement devant l’entrée principale du bâtiment commercial. À 20 h 4 min 50 s, une personne portant un chandail de couleur foncée, avec le capuchon relevé [on sait maintenant qu’il s’agissait du plaignant], traverse le parc de stationnement à pied, derrière la camionnette de l’AT no 2, et se dirige vers le sud-ouest. Il sort du champ de vision de la caméra. À 20 h 5 min 10 s, l’AT no 2 sort de son véhicule, court vers le sud-ouest, puis sort du champ de vision de la caméra.

À 20 h 9 min 12 s, on voit le plaignant se faire escorter, les mains menottées derrière le dos. L’AT no 2 et un autre agent de police le placent sur la banquette arrière de la camionnette de l’AT no 2.

Documents obtenus du service de police

L’UES a examiné les éléments et documents suivants que lui a fournis la PRY :
  • Rapport d’incident général
  • Politique relative aux arrestations
  • Politique sur l’emploi de la force
  • Notes des AT

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a également reçu et examiné l’enregistrement vidéo fourni par un commerce situé sur Intermodal Drive, à Brampton

Description de l’incident

Le scénario suivant se dégage de la preuve recueillie par l’UES, laquelle comprend des entrevues avec l’AI et les autres agents qui ont participé à l’arrestation du plaignant, soit l’AT no 1 et l’AT no 2. Les images vidéo captées juste avant l’arrestation du plaignant ont également été utiles à l’enquête. Le plaignant a refusé de faire une déclaration à l’UES et d’autoriser la communication de son dossier médical.

Le matin du 29 octobre 2021, une citoyenne a contacté la PRY pour signaler que l’on avait volé son véhicule dans son entrée pendant la nuit. Puisque le véhicule était muni d’un système de localisation GPS, la citoyenne a indiqué qu’il était à ce moment-là immobilisé près de l’intersection de Dixon Road et de Kipling Avenue, à Toronto. L’AI, l’AT no 1 et l’AT no 2 faisaient partie d’une équipe de surveillance déployée pour localiser le véhicule et arrêter les personnes associées au vol du véhicule.

Les agents ont localisé le véhicule et l’ont mis sous surveillance. En soirée, ils ont vu le plaignant se faire déposer non loin de là par un autre automobiliste. Il est ensuite monté dans le véhicule et s’est rendu à Brampton. Les agents de l’équipe de surveillance l’ont pris en filature. Il a garé le véhicule au nord et à l’est d’une aire de stationnement située sur Intermodal Drive. L’AI, l’AT no 1 et l’AT no 2 y ont stationné leurs propres véhicules banalisés dans des emplacements réservés.

Ne sachant pas qu’il avait été suivi, le plaignant est sorti du véhicule et s’est dirigé vers le sud-ouest en passant derrière les véhicules de police. Au moment où il passait derrière le véhicule de l’AI, qui se trouvait au milieu des trois véhicules de police, l’agent est sorti, s’est approché du plaignant et lui a dit qu’il était en état d’arrestation.

Le plaignant s’est mis à crier et a tenté de s’échapper alors que l’AI le tenait par les épaules. L’AI a porté deux coups de poing au plaignant. Le premier a atteint le plaignant sur le côté gauche du visage. Le second, qui a été porté au moment où les AT no 1 et no 2 arrivaient pour prêter main forte, semble également avoir atteint le plaignant à la tête. Après le deuxième coup de poing, le plaignant a été mis au sol où, après une autre période de lutte, les agents lui ont menotté les mains derrière le dos.

À l’hôpital, après son arrestation, on lui a diagnostiqué une fracture de l’os orbital gauche [2].

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions
est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le plaignant aurait subi une blessure grave lors de son arrestation le 29 octobre 2021. L’un des agents ayant participé à l’arrestation — l’AI — a été identifié comme étant l’agent impliqué aux fins de l’enquête de l’UES. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation de la preuve, je n’ai aucun motif raisonnable de croire que l’AI a commis une infraction criminelle en lien avec l’arrestation du plaignant et la blessure qu’il a subie.

En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les agents de police sont à l’abri de toute responsabilité criminelle s’ils doivent recourir à la force dans l’exercice de leurs fonctions, pourvu que cette force soit raisonnablement nécessaire à l’exécution d’un acte qu’ils étaient tenus ou autorisés à accomplir en vertu de la loi.

Au vu de la preuve recueillie par l’UES, rien ne laisse croire que l’arrestation du plaignant en lien avec l’automobile volée était illégale. Des agents ont vu le plaignant monter dans une automobile récemment déclarée volée par sa propriétaire et conduire cette automobile.

Quant à la force employée par l’AI, notamment les deux coups de poing, je ne peux raisonnablement conclure que la force employée n’était pas légitime. Le plaignant a vigoureusement résisté à son arrestation avant d’être mis au sol. Il a agrippé l’AI et a poussé et tiré violemment pour tenter d’échapper à l’emprise de l’agent. Dans de telles circonstances, il me semble justifiable que l’agent ait cherché à éviter toute autre agression en portant un premier coup de poing au plaignant et en lui portant un second coup de poing lorsqu’il a continué à résister. Bien que le plaignant ait été mis au sol, ce qui, selon la preuve, a été fait après le deuxième coup de poing sans recourir à une force excessive, et que les agents aient lutté avec le plaignant pour parvenir à maîtriser ses bras, aucun des agents n’a porté d’autres coups.

Par conséquent, bien que je reconnaisse qu’il est possible que le plaignant ait subi une fracture au visage en raison de l’un ou des deux coups de poings portés par l’AI, je n’ai aucun motif raisonnable de croire que l’agent impliqué s’est comporté de façon illégale. Il n’y a donc pas lieu de porter des accusations criminelles dans cette affaire et le dossier est clos.


Date : Le 25 février 2022


Approuvé électroniquement par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués, comme le prévoit le paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les principaux éléments des documents sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]
  • 2) Puisque le plaignant n’a pas autorisé la communication de son dossier médical, la nature et l’étendue de ses blessures n’ont pu être confirmées. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.