Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 21-OCI-277

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  •  des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  •  les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur les blessures graves qu’a subi un homme de 40 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 29 août 2021, à 12 h 50, le Service de police de Windsor (SPW) a informé l’UES de la blessure du plaignant.

Le SPW a indiqué que le 29 août 2021, à 6 h 5, des agents de police du SPW se sont rendus à une adresse sur l’avenue Lillian à Windsor pour donner suite à un appel au 9-1-1 qui avait été coupé, concernant une querelle de ménage. À leur arrivée sur les lieux, les agents de police ont trouvé la résidente, soit le témoin civil (TC). Le TC a déclaré qu’il avait été agressé et menacé par une connaissance identifiée comme étant le plaignant. Le TC a dit à la police que le plaignant se cachait dans sa maison. Les agents de police sont entrés et ont trouvé le plaignant caché sous un lit. Ils ont alors soulevé le lit et arrêté le plaignant.

Le plaignant a été transporté à l’hôpital régional de Windsor (HRW) où l’on a constaté qu’il avait une côte fracturée.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : Le 30 août 2021 à 7 h 51

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : Le 30 août 2021 à 8 h 31

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 2

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 0

Personne concernée (« le plaignant »)

Homme de 40 ans, a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

Le plaignant a participé à une entrevue le 31 août 2021.


Témoins civils

TC A participé à une entrevue

Le témoin civil a participé à une entrevue le 30 août 2021.

Agents impliqués (AI)

AI n° 1 N’a pas participé à une entrevue et n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.
AI n° 2    A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées
AI n° 3 A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

Les AI n° 2 et n° 3 ont respectivement participé à une entrevue le 10 novembre 2021 et le
8 octobre 2021.

Éléments de preuve

Les lieux

Les lieux étaient une chambre à coucher au deuxième étage d’une résidence de l’avenue Lillian.

Les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES ne se sont pas rendus sur les lieux et, par conséquent, aucun examen n’y a été effectué et aucun schéma n’a été dessiné.
 

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[1]

Appel au service 9-1-1

À 6 h 3 min 47 s, le TC a appelé le service 9-1-1 en pleurant. On pouvait entendre le plaignant en arrière-plan. Le TC appelait depuis une résidence de l’avenue Lillian à Windsor.

À 6 h 5 min, la ligne a été coupée.

À 6 h 5 min 40 s, la police a rappelé, et le plaignant a répondu en disant qu’il ne se passait rien.

À 6 h 6 min, la police a rappelé et a parlé au TC. Lorsqu’on le lui a demandé, le TC a refusé de fournir des renseignements à la personne chargée de l’appel et a raccroché.

À 6 h 7 min 13 s, la police a rappelé, et cette fois-ci, le TC a dit qu’il y avait des chiens dans la maison, et qu’il ne voulait pas ouvrir la porte parce qu’il avait peur.

À 6 h 7 min 18 s, la police a rappelé une fois de plus, et la ligne a été coupée.

Enregistrement des communications du SPW

À 6 h 5 min 4 s, l’AI n° 1 a été dépêché sur l’avenue Lillian.

À 6 h 11 min 39 s, l’AT n° 1 a informé le répartiteur que le TC ne coopérait pas avec la police.

À 6 h 14 min 46 s, l’AT n° 1 a indiqué qu’il y avait des chiens dans la maison.

À 6 h 15 min 7 s, l’AT n° 1 a signalé sur sa radio de police que le plaignant était sorti par la porte arrière. L’AT n° 1 a ensuite informé le répartiteur que le plaignant était retourné en courant à l’intérieur de la maison.

À 6 h 18 min 22 s, l’AT n° 1 a informé le répartiteur que le TC était blessé et faisait une crise de panique, et que ses médicaments se trouvaient à l’intérieur de la maison. L’AT n° 1 a dit que le TC avait été étranglé.

À 6 h 19 min 43 s, l’AI n° 1 a indiqué qu’il avait entendu le plaignant dans le grenier de la maison.

À 6 h 19 min 45 s, le répartiteur a indiqué qu’une ambulance était en route.

À 6 h 30 min 52 s, l’AI n° 1 a indiqué que le TC faisait sortir ses chiens de la maison.

À 6 h 31 min 52 s, le répartiteur a signalé que le plaignant avait reçu l’ordre de ne pas communiquer avec le TC.

À 6 h 34 min 33 s, l’AI n° 1 a signalé que les chiens étaient sortis de la maison.

À 6 h 34 min 45 s, l’AT n° 3 a demandé un réseau fermé.

À 6 h 37 min 4 s, l’AI n° 1 a dit que le plaignant était sous garde.

À 6 h 51 min 23 s, l’AI n° 2 a indiqué qu’on était en train de transporter le plaignant à l’hôpital.

Éléments obtenus auprès du service de police

L’UES a examiné les éléments et documents suivants que lui a remis, à sa demande, le SPW entre le 31 août 2021 et le 22 novembre 2021.
  • Notes - AT n° 3
  • Notes - AT n° 2
  • Notes - AI n° 2
  • Notes - AT n° 1
  • Rapport du superviseur - AT n° 3
  • Répartition assistée par ordinateur d’Intergraph
  • Enregistrements des communications
  • Rapport supplémentaire - AT n° 3
  • Rapport d’arrestation supplémentaire - AI n° 2
  • Directive sur le recours à la force
  • Directive sur l’arrestation
  • Directive sur la fouille des personnes
  • Exemplaire papier de l’appel

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a examiné les documents suivants obtenus d’autres sources le 31 août 2021 :
  • Dossiers médicaux – HRW

Description de l’incident

Le scénario suivant se dégage des preuves recueillies par l’UES, notamment des entrevues avec le plaignant et deux des agents impliqués. Comme il en avait le droit, le troisième agent impliqué, soit l’AI n° 1, a choisi de ne pas s’entretenir avec l’UES et de ne pas autoriser la diffusion de ses notes.

Vers 6 h 10, l’AI n° 1 a été l’un des premiers agents à se rendre à une adresse de l’avenue Lillian, à Windsor, à la suite d’un appel au service 9-1-1 provenant du domicile. Il a rapidement été rejoint par les AI n° 2 et n° 3. L’appel de service était lié à une soi-disant querelle de ménage impliquant un homme et une femme à l’intérieur de la résidence.

L’homme et la femme étaient le plaignant et sa partenaire dont il était séparé, le TC. En contravention d’une ordonnance judiciaire lui interdisant de la fréquenter, le plaignant avait rejoint le TC chez lui après s’être retrouvé la veille au soir chez une connaissance commune. Le couple s’était disputé lorsque le TC a communiqué avec la police.

Sachant que la police se trouvait à la résidence, le plaignant s’est enfui à l’étage et s’est caché sous le lit dans l’une des chambres. Il a ignoré les demandes répétées des agents de police qui se trouvaient à l’extérieur de la résidence afin qu’il sorte et se rende.

Les AI n° 1, n° 2 et n° 3 sont entrés dans la résidence vers 6 h 30 pour chercher le plaignant. Ils l’ont rapidement trouvé caché sous un lit au deuxième étage. Lorsque le plaignant a refusé de sortir de sa cachette, l’AI n° 1 l’a attrapé par les chevilles pour le faire sortir. Le plaignant a donné des coups de pied à l’agent et est resté sous le lit. Il a continué à résister lorsque les agents ont soulevé le lit, mais il a été rapidement maîtrisé et menotté, les mains derrière le dos.

À la suite de son arrestation, le plaignant s’est plaint de douleurs et a été transporté à l’hôpital. C’est là qu’on a constaté qu’il avait une fracture déplacée de la 12e côte.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

À la suite de son arrestation par des agents du SPW le 29 août 2021, le plaignant a été transporté à l’hôpital où l’on a constaté qu’il avait subi une blessure grave. Les agents ayant procédé à l’arrestation, soit les AI n° 1, n° 2 et n° 3, ont été identifiés comme étant les agents impliqués dans le cadre de l’enquête de l’UES qui a suivi. L’enquête est maintenant terminée. D’après mon évaluation des preuves, il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que les agents impliqués ont commis une infraction criminelle relativement à l’arrestation du plaignant et à sa blessure.

En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les agents de police sont exonérés de toute responsabilité criminelle pour la force employée dans l’exercice de leurs fonctions, à condition que cette force soit raisonnablement nécessaire à l’exécution d’un acte qu’ils étaient autorisés ou tenus de faire par la loi. Ayant parlé au TC sur les lieux à l’extérieur de la résidence et vu ses blessures au visage et au cou, et sachant que le plaignant n’avait pas respecté une condition de sa libération, je suis convaincu que les agents ont agi dans les limites de leurs droits en tentant de l’arrêter.

Je suis également convaincu que la force utilisée par les agents ne dépassait pas les limites autorisées par la loi. Il s’agissait de la force physique dont les agents s’étaient servis pour maîtriser le plaignant et de deux coups de poing droits donnés au visage du plaignant par l’AI n° 1. Comme les coups avaient été administrés au cours d’une lutte physique pendant laquelle le plaignant donnait des coups de pied aux agents et refusait de libérer ses bras placés sous son torse pour être menotté, je ne peux pas raisonnablement conclure qu’ils ont abusé de leur force dans les circonstances. Peu de temps après avoir donné des coups, les agents ont pu maîtriser le plaignant et lui passer les menottes et n’ont fait usage d’aucune force supplémentaire.

Pour les raisons qui précèdent, il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que les agents impliqués ne se sont pas comportés de manière légale lors de leur interaction avec le plaignant. Par conséquent, il n’y a aucune raison de porter des accusations criminelles dans cette affaire, et le dossier est clos.


Date : Le 20 décembre 2021

Approuvé électroniquement par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués, comme le prévoit le paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les principaux éléments des documents sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.