Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 21-TCI-268

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  •  des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  •  les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES au sujet d’une blessure grave subie par un homme de 27 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 21 août 2021, à 3 h 15, le Service de police de Hamilton (SPH) a signalé ce qui suit.

Le 20 août 2021, à 23 h, le SPH a reçu un appel pour une collision à Stoney Creek impliquant un seul véhicule motorisé. Le véhicule que conduisait le plaignant avait percuté un arbre.

Un agent du Service de police de Toronto (SPT) est sorti de son domicile pour venir en aide au plaignant. Lorsque l’agent du SPT a détecté une odeur d’alcool sur l’haleine du plaignant, celui-ci a tenté de s’enfuir. L’agent s’est identifié et a essayé de maîtriser le plaignant. L’épouse de l’agent est allée chercher les menottes de l’agent dans leur domicile et le plaignant a été menotté.

Le plaignant a été transporté à l’hôpital général de Hamilton (HGH) où on lui a diagnostiqué une fracture de la main. Il a reçu son congé de l’hôpital et la police l’a arrêté et accusé de voies de fait et de conduite avec facultés affaiblies.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 21 août 2021 à 3 h 59

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 21 août 2021 à 5 h 16

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 5

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 27 ans; a refusé de participer à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés.


Témoins civils

TC no 1 A participé à une entrevue
TC no 2 A participé à une entrevue
TC no 3 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à des entrevues le 21 août 2021.

Agents impliqués

AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.

L’agent impliqué a refusé de participer à une entrevue le 15 septembre 2021.


Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à des entrevues le 27 septembre 2021 et le 1er octobre 2021.

Éléments de preuve

Les lieux

La collision s’est produite à Stoney Creek [1].

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [2]

Le 26 août 2021, l’UES a reçu les photos de l’APTech (agent de la police technique) du SPH.

Le 16 septembre 2021, le SPH a fourni à l’UES cinq enregistrements provenant de transmissions radio et d’appels au 9-1-1. Les appels et les transmissions radio n’étaient pas horodatés. Voici un résumé des enregistrements :

Enregistrement audio du service de répartition de la Division 2 de la police (1 heure 32 minutes et 32 secondes)

Un répartiteur communique avec des agents de police pour les informer d’une collision impliquant un véhicule motorisé à Stoney Creek : [traduction] « C’est pour un véhicule qui a frappé un arbre. Quelqu’un maîtrise présentement le conducteur. Il tentait de s’enfuir. Ils pensent que le conducteur est ivre. Un passant le tient au sol. C’est un homme blanc dans la mi-trentaine. »

Un répartiteur signale qu’un deuxième appel a été reçu concernant un agent de police qui n’est pas en service : « Nous venons de recevoir un deuxième appel concernant un agent qui n’est pas en service et qui est aux prises avec une personne en état d’ébriété. Il semble que ce soit lié à cette blessure [3]. Il va y avoir une foule là-bas et une personne en état d’arrestation. C’est un agent de Toronto qui n’est pas en service. Les voisins sont avec lui. »

L’agent de police no 1 arrive sur les lieux et on indique à la radio qu’une personne est en garde à vue.

L’agent de police no 2 demande une vérification de la plaque d’immatriculation du véhicule impliqué dans la collision. Le répartiteur répond : « La plaque est associée à une Chevy Silverado 2005, enregistrée au nom du plaignant. Il y a une note « V » [4], armes à feu interdites, dans son dossier. »

L’agent de police no 3 demande qu’on envoie un technicien en alcootest et indique que l’AT no 2 allait monter dans l’ambulance avec le plaignant.

Enregistrement audio du premier appel au 9-1-1 (7 minutes 59 secondes)

[traduction]
Appelante : « Un accident de voiture vient de se produire. »
Opérateur du 9-1-1 : « Est-ce qu’il y a des blessés? »
Appelante : « Je ne suis pas sûre. Quelqu’un a percuté un arbre sur notre rue. Dans un camion. »
Opérateur du 9-1-1 : « Je vous passe l’ambulance et la police. »
Répartiteur des services d’ambulance : « Ambulance. Quelle est votre urgence? »
Appelante : « Euh, le conducteur d’un camion a percuté un arbre sur notre rue. »
Répartiteur des services d’ambulance : « Pouvez-vous voir si tout le monde est éveillé? »
Appelante : « Un instant. Je vais aller voir. Il est conscient. Oh, il est volatile. Il se débat. »
Répartiteur des services d’ambulance : « Il se débat contre qui ou contre quoi? »
Appelante : « Quelqu’un. Il l’a mis au sol. »
Répartiteur des services d’ambulance : « Donc, l’occupant du véhicule se débat avec le conducteur? »
Appelante : « Le conducteur voulait sortir. Il voulait s’enfuir. Quelqu’un l’a arrêté. Quelqu’un l’a mis au sol. »
Préposé aux appels — police : « Donc, il essayait de s’enfuir, le conducteur, et un passant l’a immobilisé au sol? »
Appelante : « Oui. »
Préposé aux appels — police : « Au cas où il s’enfuirait, à quoi ressemble-t-il? Quelle est la couleur de sa peau? »
Appelante : « Je ne peux pas voir. C’est un homme blanc, probablement dans la mi trentaine. »
Préposé aux appels — police : « Mi-trentaine? »
Appelante : « Je suis de l’autre côté de la rue, je ne veux pas m’approcher de lui. »
Préposé aux appels — police : « Oui, pas de problème. Il se débat avec eux? »
Appelante : « Oui, ils le maintiennent au sol. »
Préposé aux appels — police : « Il est seul? »
Appelante : « Oui, il est seul. »
Préposé aux appels — police : « D’accord. Est-il ivre? C’est pour ça qu’il essaie de s’enfuir? »
Appelante : « Je ne suis pas certaine. »
Préposé aux appels — police : « Avez-vous la plaque d’immatriculation du véhicule? »
Appelante : « Des gens crient, je ne peux pas vraiment m’approcher. »
Préposé aux appels — ambulance : « Madame, y a-t-il une personne coincée dans le véhicule ou qui a été éjectée du véhicule? »
Appelante : « Non, il vient juste de heurter le véhicule et je pense qu’il a essayé de s’enfuir et il y a des gens qui le maintiennent au sol. Oh, un agent de police qui n’est pas en service est avec lui. »
Préposé aux appels — police : « Vous dites qu’il y a un agent sur les lieux? »
Appelante : « Il semble qu’il y a un agent de police hors service avec lui maintenant. Qui lui dit de rester au sol. »
Préposé aux appels — police : « D’accord. Et ils aident? »
Appelante : « Ouais. Ouais. »
Préposé aux appels — police : « Comment savez-vous que c’est un agent qui n’est pas en service? »
Appelante : « Quelqu’un l’a dit. Je pense qu’il a dit qu’il était un agent hors service. »
Préposé aux appels — police : « D’accord. Est-ce qu’il se bagarre avec le gars? »
Appelante : « Non. Il est toujours cloué au sol cependant. Quelqu’un doit le garder au sol. Il essaie encore de se relever, je pense. C’est vraiment quelque chose. »
Préposé aux appels — police : « Qu’est-ce qui se passe en ce moment? »
Appelante : « Hum, pour l’instant, il y a juste beaucoup de gens autour. Il y a une personne avec lui. Qui essaie juste de s’assurer qu’il va bien et qu’il reste au sol calmement. Qui lui dit de rester calme. Oui, il y a des gens bouleversés. »
Préposé aux appels — police : « OK, nous sommes en chemin. »
Appelante : « Ok, ça, ça n’aide pas. »
Préposé aux appels — police : « Qu’est-ce qui se passe? »
Appelante : « Il y a un homme qui est très en colère contre lui. Parce qu’il conduisait de façon très erratique sur la rue. »
Préposé aux appels — police : « Alors, l’agent hors service est toujours, euh, il le tient encore au sol? »
Appelante : « Oui. Oui, ils argumentent… Quelqu’un s’est assis avec lui. Vraiment, je ne veux pas trop m’approcher. Il y a beaucoup de gens. Je pense que c’est un agent hors service, c’est ce que j’ai entendu dire. Mais je ne suis pas certaine. Il n’est pas combatif en ce moment. Je ne suis pas certaine. Je pense qu’ils essaient de voir s’il va bien. »
Préposé aux appels — police : « A-t-il l’air blessé? »
Appelante : « C’est dur à dire. Honnêtement, il faudrait se rapprocher un peu. Hum, non, non il n’a pas l’air si blessé. »
Préposé aux appels — police : « Il va bien? »
Appelante : « Je crois que oui. Je ne sais pas s’il peut marcher, mais je pense qu’il est OK… comme, je ne sais pas s’il peut se lever, il peut, comme, il est mobile, comme il n’est pas si blessé que ça. »
Préposé aux appels — police : « Il est toujours au sol? »
Appelante : « Oui, il est toujours au sol. »

Enregistrement audio du deuxième appel au 9-1-1 (3 minutes 24 secondes)

[traduction]

Opérateur du 9-1-1 : « Police, feu ou ambulance? »
Appelant : « Je crois que les deux seront nécessaires. »
Répartiteur des services d’ambulance : « Ambulance. Quelle est votre urgence? »
Appelant : « Bonjour, un véhicule vient de percuter un arbre, je pense. »
Répartiteur des services d’ambulance : « Combien de personnes sont impliquées dans l’accident? »
Appelant : « J’en vois deux. »
Préposé aux appels — ambulance : « Deux personnes, sont-elles toutes deux éveillées? »
Appelant : « Une personne est éveillée. Je n’arrive pas à voir l’autre. Attendez un instant. Non. C’est peut-être juste une personne. Je ne crois pas qu’il y ait quelqu’un à l’arrière. »
Préposé aux appels — ambulance : « Est-ce le conducteur qui a été éjecté? »
Appelant : « Possiblement. Il y a un chien à l’arrière. C’est ce que j’ai vu. La personne est au sol, ils essaient de la maintenir au sol. Il essaie de bouger. »
Préposé aux appels — ambulance : « D’accord. Il est éveillé en ce moment? »
Appelant : « Il est éveillé. »
Préposé aux appels — ambulance : « Respire-t-il normalement? »
Appelant : « Il respire, mais je ne peux pas dire s’il respire normalement, quelqu’un le tient au sol. »
Préposé aux appels — ambulance : « D’accord. Alors, dites-moi ce qui s’est passé. »
Appelant : « Non, je ne peux pas, ma fille l’a entendu, et nous sommes descendus et avons vu une voiture écrasée contre un arbre. Il a percuté l’arbre de plein fouet et a vraiment endommagé l’avant du véhicule. »
Préposé aux appels — ambulance : « D’accord. Et il a été éjecté de son véhicule? »
Appelant : « Je ne sais pas. Tout ce que je sais, c’est qu’il n’est plus dans le véhicule et que quelqu’un le tient au sol. »
Préposé aux appels — ambulance : « Voyez-vous des blessures? Saigne-t-il de quelque part?
Appelant : « Pas que je puisse voir. Il est sur la pelouse. »
Préposé aux appels — ambulance : « Et c’était juste un véhicule, c’est ça? »
Appelant : « C’est un seul véhicule et il est dans un arbre. »
Préposé aux appels — ambulance : « Y a-t-il d’autres blessés? »
Appelant : « Non. Pas que je puisse voir. Quelqu’un le tient au sol parce que je pense qu’il essaie de se lever et de partir ou quelque chose comme ça, c’est pour ça que quelqu’un doit venir rapidement. »

Enregistrement audio du troisième appel au 9-1-1 (3 minutes 29 secondes)

[traduction]
Opérateur du 9-1-1 : « Bonjour, votre téléphone vient de signaler le 9-1-1, avez-vous une urgence. »
Appelant : « Ouais, un abruti vient de foncer dans un arbre avec son camion. Il est blessé, et il a besoin d’une ambulance. »
Opérateur du 9-1-1 : « D’accord, je vous passe l’ambulance, OK? »
Répartiteur des services d’ambulance : « Bonjour. Ambulance. Quelle est votre urgence? »
Appelant : « Un gars vient de foncer dans un arbre sur [il indique où]. »
Répartiteur des services d’ambulance : « Savez-vous si tout le monde est éveillé? »
[Il y a un bruit de fond et on entend un homme crier, « Au sol. »]
Appelant : « Il est en douleur et quelqu’un essaie de le tenir au sol, s’il a consommé de la drogue ou autre chose, je ne sais pas ce qu’il a pris pour conduire comme ça. Il conduisait comme un parfait imbécile et a foncé dans un arbre. »
Répartiteur des services d’ambulance : « Semble-t-il respirer normalement? »
Appelant : « Est-ce qu’il respire? Il a vraiment mal. Il a besoin d’une ambulance. Pouvez vous envoyer quelqu’un s’il vous plaît? »
Répartiteur des services d’ambulance : « Oui, nous avons déjà reçu quatre ou cinq appels à ce sujet. »
Appelant : « C’est un foutu drogué ivre. Nous sommes en colère parce que c’est ridicule. »
Répartiteur des services d’ambulance : « D’accord. Donc, vous croyez qu’il a consommé de la drogue?"
Appelant : « Personne ne conduit comme ça. Personne. »
Répartiteur des services d’ambulance : « D’accord. Alors, était-il seul à l’intérieur? »
Appelant : « Je ne sais pas. Y a-t-il d’autres blessés? Juste une. Une personne. Nous avons juste besoin d’une ambulance, monsieur. »
Répartiteur des services d’ambulance : « Il roulait à 50 km/h ou plus? »
Appelant : « Il zigzaguait et a presque heurté les voitures garées sur le bord de la route. »
Répartiteur des services d’ambulance : « D’accord. Est-il pris à l’intérieur? »
Appelant : « Non, il est par terre. Des gens le retiennent. Il a heurté un arbre, qui est endommagé. Son véhicule est fini. Il ne semble pas avoir heurté quoi que ce soit d’autre. Juste un conducteur. »
Répartiteur des services d’ambulance : « Semble-t-il blessé quelque part? »
Appelant : « Oui, il semble blessé. Il est en douleur. Mais je ne veux pas m’approcher de lui. Mon chien est avec moi et il vient de se faire asperger par une mouffette donc… avant que tout ça arrive. Je passe vraiment une bonne soirée. »

Enregistrement audio du quatrième appel au 9-1-1 (6 minutes 28 secondes)

[traduction]
Opérateur du 9-1-1 : « 9-1-1. Avez-vous besoin de la police, du service des incendies ou d’une ambulance? »
AI : « Police et ambulance. On va avoir besoin d’un agent de police ici. »
Plaignant (gémissant) : « Aidez-moi. »
Répartiteur des services d’ambulance : « Ambulance. Quelle est votre urgence? À quel endroit doit-on envoyer l’ambulance? »
AI : « [Indique l’emplacement]. Je suis un agent de police. Je ne suis pas en service en ce moment. Je viens d’en arrêter un pour conduite avec facultés affaiblies. Et la foule grossit, s’il vous plaît. »
Répartiteur des services d’ambulance : « Et, je suis désolé, avez-vous dit que vous êtes un agent de police? »
AI : « Oui. Je suis un agent de police hors service. »
Répartiteur des services d’ambulance : « OK, êtes-vous blessé vous-même ou cette personne est-elle blessée? »
AI : « Non, juste le conducteur, mais il me donne du fil à retordre en ce moment. »
Répartiteur des services d’ambulance : « Il vous donne du fil à retordre en ce moment. D’accord. De l’aide est en route, d’accord. Et je vais informer votre répartiteur également. D’accord. Nous arrivons avec lumières et sirènes allumées, OK. »
AI : « OK, merci. Restez au sol. »
Interlocuteur de la police : « Restez en ligne. »
AI : « Restez au sol. »
Plaignant (gémissant) : « Putain. »
Interlocuteur de la police : « Monsieur, vous êtes toujours là? »
AI : « Ouais, je suis toujours là. »
Interlocuteur de la police : « Ici le service de répartition de la police. J’ai un appel prioritaire pour vous. Est-il en état d’arrestation? »
AI : « Oui. Il l’est en ce moment. »
AI : « Il se débattait, alors. Restez au sol. »
Plaignant : « Je n’en ai rien à foutre. »
AI : « Peux-tu aller chercher mes menottes sur mon ceinturon de service? (inintelligible). »
Interlocuteur de la police : « Quel est votre service d’attache? »
AI : « Toronto. »
Interlocuteur de la police : « Et vous êtes là tout seul? »
AI : « Eh bien, non, des voisins sont ici. »
Interlocuteur de la police : « D’accord. Des voisins vous aident maintenant? »
AI : « Ouais, je ne vous donne plus cette chance. »
Interlocuteur de la police : « Cet homme conduisait ou que faisait-il? »
AI : « Oui, il conduisait la camionnette qui a percuté l’arbre. »
Plaignant : « Peux-tu mettre ça dans ma poche? »
Interlocuteur de la police : « Beaucoup d’aide en chemin. »
AI : « Je les entends venir. »
Plaignant : « Je n’essaie pas de m’enfuir. »
AI : « Pouvez-vous l’entendre? Pour la preuve. »
Interlocuteur de la police : « L’appel est enregistré au complet et nous avons eu de nombreux appels à ce sujet. »
AI : « Je veux juste m’assurer que vous pouvez l’entendre, c’est tout. »
Plaignant : « Hé là, écoutez, savez-vous (inintelligible). C’est mon père, mon vieux. Parce que je suis son petit fils, mon vieux. Vous m’entendez? »
Voix masculine inconnue : « Pourquoi conduis-tu comme ça? Tu veux que j’aille chercher ton oncle tout de suite?
Plaignant : « S’il vous plaît, mec. »
Voix masculine inconnue : « Tu veux que j’aille chercher ton oncle? Parce que les flics s’en viennent. »
Plaignant : « Va te faire foutre. Yo, écoute, mec. Hé, c’est mon père, mon vieux. »
AI : « Mettez vos mains derrière votre dos. »
Plaignant : « Mais qu’est-ce que tu fais, mon vieux. »
AI : « Mettez vos mains derrière votre dos. »
Plaignant : « Je n’essaie pas de jouer au con, mon vieux. Je suis, c’est mon putain de père. Tu n’aimes pas ça. Tu te fous de moi, mec? Qu’est-ce que tu veux dire? C’est quoi ce bordel. »

Documents obtenus du service de police

L’UES a examiné les éléments et documents suivants que lui a remis le SPH :
  • Rapport général
  • Chronologie des événements
  • Enregistrements des communications
  • Rapport de collision de véhicules à moteur
  • Résultats de l’Intoxilyzer
  • Photographie du permis de conduire
  • Sommaire de la déposition (SPH)-AT no 2.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a examiné les éléments et documents suivants que lui ont remis d’autres sources :
  • Rapport d’appel d’ambulance — Services paramédicaux de Hamilton
  • Dossier médical — Hôpital général de Hamilton

Description de l’incident

Les éléments de preuve recueillis par l’UES, lesquels comprenaient des entrevues avec plusieurs témoins oculaires civils, dressent le portrait suivant de l’incident. Comme la loi l’y autorise, l’AI a choisi de ne pas participer à une entrevue avec l’UES et de ne pas autoriser la publication de ses notes.

Vers 22 h 45, le 20 août 2021, le plaignant, qui était en état d’ébriété, conduisait une camionnette de façon dangereuse à Stoney Creek. À l’approche d’une intersection, le véhicule du plaignant a grimpé la bordure de route et a percuté un arbre, s’immobilisant à l’angle nord-est de l’intersection. Peu après la collision, le plaignant a ouvert la porte du conducteur et est sorti du véhicule. Rapidement, des résidents du voisinage l’ont approché.

Parmi les personnes qui sont arrivées sur le lieu de l’accident, il y avait l’AI, un agent du SPT qui n’était pas en service à ce moment-là et qui habitait à proximité. Le plaignant est devenu belliqueux et a tenté de quitter les lieux. L’agent l’en a empêché (et possiblement d’autres personnes qui étaient sorties de leur domicile). L’AI avait détecté une odeur d’alcool sur l’haleine du plaignant et l’avait arrêté pour conduite en état d’ébriété.

L’AI a mis le plaignant au sol et l’y a maintenu puisque le plaignant s’opposait à son arrestation et offrait une certaine résistance. L’AI a communiqué avec le SPH et a demandé qu’on dépêche des agents.

L’AT no 2 est le premier agent à être arrivé sur les lieux. À ce moment-là, l’AI avait réussi à menotter la main gauche du plaignant, mais pas sa main droite. L’AT no 1 a pris ses propres menottes, puis a pris le bras droit du plaignant, a remplacé les menottes de l’AI par les siennes et a menotté les bras du plaignant derrière son dos.

Après son arrestation, des ambulanciers paramédicaux sont arrivés sur les lieux et ont transporté le plaignant à l’hôpital, où on lui a diagnostiqué une fracture de la main gauche.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le 20 août 2021, alors qu’il était sous la garde du SPH, une blessure grave a été diagnostiquée au plaignant. L’AI, un agent du SPT qui n’était pas en service à ce moment là, a été identifié comme étant l’agent impliqué aux fins de l’enquête de l’UES. D’après mon évaluation de la preuve, je n’ai aucun motif raisonnable de croire que l’AI a commis une infraction criminelle en lien avec l’arrestation et la blessure subie par le plaignant.

En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les agents de police sont à l’abri de toute responsabilité criminelle lorsqu’ils ont recours à la force dans l’exercice de leurs fonctions, pourvu que cette force soit raisonnablement nécessaire pour exécuter un acte qu’ils sont autorisés à accomplir ou tenus d’accomplir en vertu de la loi. Je suis convaincu que l’AI avait des motifs légitimes pour tenter d’arrêter le plaignant, car tout semblait indiquer que ce dernier était en état d’ébriété lorsqu’il a percuté un arbre avec son véhicule — il avait de la difficulté à articuler, il sentait l’alcool et il disait des choses incohérentes.

Au vu du dossier, rien n’indique non plus que l’AI a recouru à une force excessive lors de son interaction avec le plaignant. Par exemple, il n’y a aucune preuve que l’AI a utilisé une force excessive pour mettre le plaignant au sol ou que l’AI l’a frappé à un moment ou un autre. Tout au plus, l’agent a utilisé son poids et sa force pour maintenir le plaignant au sol en attendant l’arrivée des agents du SPH, ce qui constitue une utilisation mesurée et modérée de la force compte tenu du fait que le plaignant se débattait et avait démontré qu’il avait l’intention de quitter les lieux. Enfin, en ce qui concerne la main cassée du plaignant, il convient de noter que la blessure s’est très probablement produite lors de la collision, et non au cours de l’arrestation.

Pour les raisons qui précèdent, je n’ai aucun motif raisonnable de croire que l’AI s’est comporté autrement qu’en toute légalité durant son interaction avec le plaignant. Il n’y a donc pas lieu de porter des accusations criminelles contre l’agent dans cette affaire et le dossier est clos.


Date : 22 novembre 2021

Approuvé électroniquement par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Afin de protéger l’identité des parties concernées, l’endroit précis n’est pas divulgué. [Retour au texte]
  • 2) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués, comme le prévoit le paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les principaux éléments des documents sont résumés ci-dessous [Retour au texte]
  • 3) Lésion corporelle. [Retour au texte]
  • 4) Violent. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.