Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 21-OCI-278

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  •  des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  •  les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur les blessures graves subies par un homme de 30 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 29 août 2021, à 15 h 05, le Service de police de Hanover (SPH) a contacté l’UES et donné le rapport suivant :

Le 29 août 2021, à 3 h 45 du matin, des agents de la Police provinciale de l’Ontario (la Police provinciale) et du SPH ont été dépêchés à une adresse de la 7e Avenue, à Hanover, pour un homme qui aurait causé des dommages et tenté de s’introduire par effraction dans un commerce. L’appel de service initial était pour un magasin situé sur la 7e Avenue (territoire de compétence de la Police provinciale). À 4 h 02, des membres du SPH sont arrivés et ont repéré un homme dans le secteur (dans le territoire de compétence du SPH).

Des membres du SPH se sont approchés du plaignant. Il était très excité et agité. Il a brandi une pelle et une bouteille en direction des agents à leur arrivée et leur a demandé de lui tirer dessus.

Un des agents présents – l’agent impliqué (AI) no 1 – a déployé son arme à impulsions. Le plaignant a alors été placé sous garde et appréhendé en vertu de la Loi sur la santé mentale.

À 4 h 08, le plaignant s’est plaint d’une douleur au bras et a été conduit à l’Hôpital de Hanover et du district (HHD) pour y être examiné.

La Police provinciale n’a pas participé à l’appréhension du plaignant.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 30 août 2021 à 6 h 35

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 30 août 2021 à 14 h 40

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 2

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 1

Personne concernée (le « plaignant ») :

Homme de 30 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

Le plaignant a participé à une entrevue le 30 août 2021.


Témoins civils

TC no 1 A participé à une entrevue
TC no 2 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à une entrevue le 30 août 2021.

Agents impliqués

AI no 1 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées
AI no 2 A participé à une entrevue et ses notes ont été reçues et examinées

Les agents témoins ont participé à une entrevue le 10 septembre 2021.


Éléments de preuve

Les lieux

L’incident s’est déroulé sur la pelouse d’une adresse de la 7e Avenue, à Hanover.

Éléments de preuves médicolégaux

Un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES s’est rendu à Hanover le 30 août 2021 et a pris des photographies des deux adresses de la 7e Avenue.

À 11 h 10, cet enquêteur a examiné l’arme à impulsions de l’AI no 1 et a conclu qu’elle avait été déployée à 4 h 03 du matin, le 29 août 2021, pendant dix secondes.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies[1]

Rapport de répartition assistée par ordinateur (RAO) et enregistrement des communications

Le SPH a fourni le rapport de RAO le 30 août 2021 à 14 h 55.

L’UES a reçu l’enregistrement des communications le 13 septembre 2021 à 16 h 08.

Le TC no 1 a appelé le 9-1-1 pour signaler que son frère, le plaignant, était entré par effraction dans un magasin de la 7e Avenue. [Ce côté de la 7e Avenue relevait de la compétence de la Police provinciale de l’Ontario.] À 3 h 46, l’appel a été transféré à la Police provinciale, mais a ensuite été renvoyé au SPH lorsqu’on a appris que le plaignant était rentré chez lui, à une adresse qui relevait de la compétence du SPH.

Les AI no 1 et AI no 2 se sont rendus sur les lieux et ont interagi avec le plaignant de 3 h 50 à 4 h 02, heure à laquelle l’arme à impulsions a été déployée. Les notes d’appel indiquaient que le plaignant voulait « se suicider par la police ».

Le plaignant a été conduit à l’hôpital à 4 h 08 et laissé aux soins du personnel hospitalier à 4 h 33.

Éléments obtenus auprès du service de police

L’UES examiné les dossiers suivants que lui a remis le SPH :
• Notes des AIs;
• Enregistrement des communications;
• Rapports d’événement et rapport de RAO.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a examiné les éléments suivants obtenus auprès d’autres sources :
• Dossiers médicaux de l’Hôpital général de Hanover.

Description de l’incident

Les événements importants en question ressortent clairement des éléments de preuve recueillis par l’UES et peuvent être brièvement résumés comme suit.

Le 29 août 2021, vers 3 h 45 du matin, des agents du SPH ont été dépêchés à une adresse de la 7e Avenue à la suite d’un appel au 9-1-1 du TC no 1, le frère du plaignant. Le TC no 1 avait appelé pour signaler que son frère s’était introduit par effraction dans un magasin voisin. Le plaignant souffrait d’une maladie mentale et semblait être en proie à un épisode psychotique à ce moment-là.

L’AI no 1 et l’AI no 2 sont arrivés sur les lieux et ont confronté le plaignant, qui était alors retourné chez lui après avoir quitté le magasin. Le plaignant tenait une pelle. Quand l’AI no 1 lui a demandé de lâcher la pelle, le plaignant a refusé. Il a dit aux agents qu’il voulait qu’on l’abatte, soulignant qu’il avait une arme – la pelle. L’AI no 1 lui a affirmé qu’ils n’allaient pas lui tirer dessus, après quoi le plaignant a sorti une bouteille de bière de sa poche et l’a cassée contre la pelle. Tentant apparemment de provoquer une confrontation, le plaignant a brandi la bouteille de bière brisée en direction des agents. L’AI no 1 l’a averti qu’on le « taserait ». Ignorant cet avertissement, le plaignant s’est avancé vers l’agent qui a alors déployé son arme à impulsions, dont les sondes ont atteint le plaignant. Le plaignant s’est figé et est tombé.

L’AI no 1 avait déployé son arme à impulsions depuis une distance de quelques mètres. Une fois le plaignant à terre, l’AI no 1 et l’AI no 2 se sont approchés de lui et ont pu le menotter dans le dos sans autre incident.

Après son arrestation, le plaignant a dit qu’il avait mal au bras droit.

On l’a conduit à l’hôpital où il a été constaté par la suite qu’il avait une fracture au bras droit.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Article 17 de la Loi sur la santé mentale -- Intervention de l’agent de police

17 Si un agent de police a des motifs raisonnables et probables de croire qu’une personne agit ou a agi d’une façon désordonnée et qu’il a des motifs valables de croire que cette personne :
a) soit a menacé ou tenté de s’infliger des lésions corporelles ou menace ou tente de le faire
b) soit s’est comportée ou se comporte avec violence envers une autre personne ou de manière à lui faire craindre qu’elle lui causera des lésions corporelles
c) soit a fait ou fait preuve de son incapacité de prendre soin d’elle-même

et qu’en plus, il est d’avis que cette personne souffre, selon toute apparence, d’un trouble mental d’une nature ou d’un caractère qui aura probablement l’une des conséquences suivantes :
a) elle s’infligera des lésions corporelles graves
b) elle infligera des lésions corporelles graves à une autre personne
c) elle subira un affaiblissement physique grave

et qu’il serait dangereux d’agir selon les termes de l’article 16, il peut amener sous garde cette personne dans un lieu approprié afin qu’elle soit examinée par un médecin.

Analyse et décision du directeur

Le 29 août 2021, le plaignant a été grièvement blessé lors de son arrestation par des agents du SPH. Deux agents ont été désignés en tant qu’agents impliqués (AI) aux fins de l’enquête de l’UES. Après avoir évalué les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’un ou l’autre des agents impliqués ait commis une infraction criminelle en lien avec l’arrestation et la blessure du plaignant.

En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les agents de police sont exonérés de toute responsabilité criminelle lorsqu’ils ont recours à la force dans l’exécution de leurs fonctions, pour autant que cette force n’excède pas ce qui est raisonnablement nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou permis de faire en vertu de la loi. Selon tous les éléments de preuve, le plaignant était en état de détresse mentale au moment de ces événements et présentait un danger possible pour lui-même et pour d’autres personnes. Les agents étaient en droit d’appréhender le plaignant en vertu de l’article 17 de la Loi sur la santé mentale.

Je suis également convaincu que la force utilisée par les agents était légalement justifiée. Au moment où l’AI no 1 a déchargé son arme, le plaignant venait d’endommager des biens et brandissait une pelle et une bouteille de bière cassée. L’agent avait tenté en vain de désamorcer la situation verbalement. Il semble que le plaignant, dans l’état d’esprit où il se trouvait, avait l’intention de provoquer un échange violent avec les agents. Dans ces circonstances, confronté à un individu qui avançait vers lui avec des armes potentiellement dangereuses et menaçait de les utiliser, l’AI no 1 a agi raisonnablement en optant de neutraliser le plaignant à distance avec son arme à impulsions. En fait, c’est exactement ce qui s’est produit. Par la suite, il ne semble pas que l’un ou l’autre des agents ait eu recours à une force plus que légère ou modérée pour tirer les bras du plaignant dans son dos et le menotter.

En conséquence, bien que la blessure du plaignant soit probablement le résultat de sa chute causée par la décharge de l’arme à impulsions, il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI no 1 ou l’AI no 2 se soient comportés autrement que légalement tout au long de l’incident. Il n’y a pas donc lieu de déposer des accusations criminelles dans cette affaire, et le dossier est clos.


Date : 22 novembre 2021

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les éléments importants des documents sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.