Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 21-PCI-206

Attention :

Cette page affiche un contenu graphique pouvant choquer, offenser et déranger.

Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  •  des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  •  les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur les blessures graves subies par un homme de 53 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES
 

Le 2 juillet 2021, à 13 h 09, la Police provinciale de l’Ontario a avisé l’UES de la blessure du plaignant et donné le rapport suivant :

Le 1er juillet 2021, à 12 h 50, deux agents de la Police provinciale ont arrêté le plaignant pour manquement à un engagement, voies de fait et séquestration. Ils ont eu recours à une force minimale. En route vers le détachement de Dufferin de la Police provinciale, le plaignant s’est plaint d’une douleur à la main et à l’épaule. Il a été conduit au Headwater Health Care Center (HHCC) où on lui a diagnostiqué une fracture de la main. Le plaignant a affirmé qu’il avait subi cette blessure lors de son arrestation par des agents de la Police provinciale le 13 juin 2021, à 21 h 46, dans un appartement du secteur de la rue John et de Townline, à Orangeville. Le plaignant avait été renvoyé au centre correctionnel de Maplehurst pour les motifs de son arrestation du 13 juin 3021 et, une fois là, comme il se plaignait de douleurs à la poitrine, on l’a reconduit à l’hôpital.

L’équipe
 

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 2 juillet 2021 à 13 h 48

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 3 juillet 2021 à 11 h 01

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3

Le plaignant et quatre agents témoins ont participé à une entrevue. L’agent impliqué n’a pas consenti à participer à une entrevue.

Les dossiers médicaux ont été obtenus pour les incidents du 13 juin 2021 et du 1er juillet 2021.

Le rapport d’appel d’ambulance a été obtenu pour l’incident du 1er juillet 2021. L’incident du 13 juin 2021 n’a pas fait l’objet d’une enquête, car les dossiers médicaux indiquaient que la blessure était une ancienne blessure dégénérative. Elle ne relevait donc pas du mandat de l’UES.

Personne concernée (le « plaignant ») :


Homme de 53 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés

Le plaignant a participé à une entrevue le 3 juillet 2021.


Agents impliqués
 

AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue ni à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.


Agents témoins
 

AT no 1 A participé à une entrevue

AT no 2 A participé à une entrevue

AT no 3 A participé à une entrevue

AT no 4 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à une entrevue le 12 juillet 2021.


Éléments de preuve

Les lieux 
 

La blessure se serait produite dans une voiture de patrouille de la Police provinciale de l’Ontario pendant le trajet entre un endroit sur le boulevard Robb, à Orangeville, et le détachement de Dufferin de la Police provinciale au 506312 Ontario-89, à Shelburne.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies [1]


Police provinciale – Communication - 1er juillet 2021

À 11 h 55, l’AT no 1 avise le centre de communication que le plaignant et une femme lui ont fait signe pour lui dire qu’ils étaient à la recherche d’un refuge d’urgence. L’AT no 1 se rend au détachement pour vérifier les antécédents du plaignant.

À 12 h 47, l’AT no 1 téléphone au centre de communication pour l’aviser que le plaignant est recherché.

À 12 h 55, l’AT no 2 dit qu’ils ont le plaignant sous garde et qu’ils le conduisent au détachement de Primrose.

À 13 h 06, l’AT no 2 demande qu’une ambulance les attende au détachement, car le plaignant se plaint que ses doigts et son épaule se déboitent. L’AI dit qu’il est au détachement et qu’il y a une ambulance sur les lieux. Le sergent dit que le plaignant a une blessure à l’épaule qui n’est pas nouvelle. L’AI dit [traduction] : « On n’a pas perdu la tête, vous avez bien entendu, ce n’est pas quelque chose que j’ai fait. »

L’AT no 2 se rend à l’hôpital avec l’ambulance et le plaignant.

Éléments obtenus auprès du service de police 
 

L’UES examiné les dossiers suivants que lui a remis le détachement de Dufferin de la Police provinciale :

• Répartion assistée par ordinateur – rapport de détails d’événement;
• Enregistrements des communications;
• Notes des ATs;
• Rapports d’incident de la Police provincial.

Éléments obtenus auprès d’autres sources
 

L’UES a également obtenu les documents suivants de sources autres que la police :

• Dossiers médicaux du plaignant de Headwaters Healthcare;
• Rapports d’appel d’ambulance.

Description de l’incident

La séquence d’événements suivante découle des éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment des entrevues avec le plaignant et avec des agent témoins qui était présents au moment de l’arrestation du plaignant. L’AI n’a pas consenti à participer à une entrevue avec l’UES ni autorisé la communication de ses notes, comme c’était son droit.

Le 1er juillet 2021, en début d’après-midi, le plaignant a été arrêté sur le boulevard Robb, à Orangeville. Des agents – l’AI, l’AT no 1, l’AT no 2 et l’AT no 3 – s’étaient rendus à cet endroit pour placer le plaignant sous garde pour une voie de fait qu’il avait présumément perpétrée quelques jours plus tôt.

L’AI a menotté le plaignant dans le dos. Le plaignant a demandé qu’on le menotte sur le devant du corps parce qu’il avait mal à l’épaule. L’agent a refusé, mais a desserré les menottes quand le plaignant s’est plaint qu’elles étaient trop serrées.

Après son arrestation, le plaignant a été placé sur le siège arrière de la voiture de patrouille de l’AT no 3 et de l’AT no 2 et conduit au détachement de Dufferin pour y être enregistré. En route vers le détachement, le plaignant a dit que son épaule et sa main gauche se déboitaient. Il a demandé à plusieurs reprises qu’on lui retire les menottes. L’AT no 2 a appelé le détachement pour demander que des ambulanciers paramédicaux soient présents à leur arrivée afin que le plaignant puisse être examiné.

Le plaignant a été ensuite conduit en ambulance du détachement à l’hôpital. On lui a diagnostiqué une fracture à la main gauche.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le 1er juillet 2021, le plaignant a reçu un diagnostic de blessure grave à la suite de son arrestation par des agents de la Police provinciale à Orangeville. L’un des agents qui a procédé à l’arrestation a été désigné comme agent impliqué (AI) aux fins de l’enquête de l’UES. Après avoir évalué le dossier de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI ait commis une infraction criminelle en lien avec l’arrestation et la blessure du plaignant.

En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les agents de police sont exonérés de toute responsabilité criminelle lorsqu’ils ont recours à la force dans l’exécution de leurs fonctions, pour autant que cette force n’excède pas ce qui est raisonnablement nécessaire à l’accomplissement de ce qu’il leur est enjoint ou permis de faire en vertu de la loi. Le dossier de preuve ne soulève aucun doute quant à la légalité de l’appréhension du plaignant. Il était soupçonné d’avoir agressé une femme à Orangeville le 27 juin 2021 et avait été placé sous garde pour cet incident.

Rien ne suggère non plus dans les éléments de preuve que l’AI ou tout autre agent présent lors de l’arrestation du plaignant ait fait usage d’une force excessive. Le plaignant n’a pas résisté à son arrestation et les agents n’ont eu recours à aucune force contre lui, à part le contact nécessaire pour le menotter.

Il semble que le problème soit la possibilité que la blessure du plaignant ait résulté du fait que les menottes étaient trop serrées ou qu’on lui avait attaché les bras dans le dos. Là aussi, je ne suis pas en mesure de conclure raisonnablement que l’AI n’a pas rempli son devoir de diligence envers le plaignant. Le plaignant était arrêté pour une infraction avec violence et les agents étaient dans leur droit, à mon avis, de le menotter dans le dos pour le trajet jusqu’au détachement. De plus, il semble que certains accommodements ont été faits lorsque le plaignant a dit que les menottes étaient trop serrées : l’AI les a desserrées avant de le faire s’assoir dans la voiture de patrouille. Enfin, une fois dans le véhicule de police, le plaignant s’est plaint que son épaule et sa main gauche étaient douloureuses, des dispositions ont été prises pour qu’il reçoive rapidement des soins médicaux.

Au vu de ce qui précède, même si, dans une certaine mesure, la fracture de la main gauche du plaignant pourrait être attribuable à la conduite de l’AI, je ne suis pas convaincu que l’agent ait transgressé les limites de diligence prescrites par le droit criminel ou qu’il ait utilisé une force excessive à quelque moment que ce soit à l’égard du plaignant. Il n’y a pas donc lieu de déposer des accusations criminelles dans cette affaire, et le dossier est clos. [2]


Date : 28 octobre 2021

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) Les documents suivants contiennent des renseignements personnels délicats qui ne sont pas divulgués conformément au paragraphe 34 (2) de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales. Les éléments importants des documents sont résumés ci-dessous. [Retour au texte]
  • 2) Le dossier de preuve soulève la possibilité que la fracture du plaignant – décrite comme la fracture d’un boxeur – soit survenue avant l’intervention de la police. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.