Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 20-PFD-225

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (« LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :
  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
  • le nom de tout agent impliqué;
  • le nom de tout agent témoin;
  • le nom de tout témoin civil;
  • les renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel lié à la santé de personnes identifiables. 

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES concernant le décès d’un homme de 29 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES
 

Le 9 septembre 2020, à 14 h, la Police provinciale de l’Ontario (la Police provinciale) a avisé l’UES de la mort du plaignant. Selon ce qu’a rapporté la Police provinciale, le 9 septembre 2020, à 12 h 30, des agents de son service se sont rendus à une résidence sur la troisième rue, à Collingwood, pour donner suite au signalement d’un homme barricadé. Alors que les agents établissaient un périmètre de sécurité, l’homme [on sait maintenant qu’il s’agissait du plaignant] est sorti de la résidence avec un fusil de chasse. L’AI a fait face au plaignant et a déployé une arme à impulsions, sans succès. Puis, lorsque le plaignant a levé son fusil de chasse, l’AI a utilisé son arme à feu. Le plaignant a ensuite été transporté à l’hôpital Marine de Collingwood, où son décès a été constaté.

L’équipe
 

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés :     5

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés :     4

Il a fallu plus de temps qu’à l’habitude pour réaliser les entrevues avec les agents témoins en raison de la pandémie de coronavirus 19 (COVID 19) et des protocoles liés à l’emploi qui en ont découlé et qui ont été appliqués au cours de cette enquête.

Les enquêteurs de l’UES ont réalisé des entrevues auprès des témoins civils et de la police, en plus de ratisser le secteur où l’incident s’est produit à la recherche de témoins supplémentaires et de vidéos tirées de systèmes de télévision en circuit fermé.

Les enquêteurs de l’UES ont utilisé les médias sociaux afin de solliciter et d’obtenir la collaboration d’un civil qui avait informé un organe de presse électronique local de sa présence dans le secteur de l’incident au moment de celui-ci. Cependant, ce témoin civil potentiel a finalement choisi de ne pas coopérer avec l’UES.

Les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES ont pris des photos numériques et ont fait un dessin des lieux de l’incident, ont recueilli des éléments de preuve et ont utilisé les services d’un chien policier de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) pour aider dans la recherche de projectiles d’armes à feu qui, autrement, auraient été difficiles à voir et qui n’avaient pas déjà été trouvés par les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES dans le secteur des lieux de l’incident.

Les enquêteurs de l’UES ont obtenu des enregistrements – dont la qualité et la quantité étaient inconnues – d’un système de télévision en circuit fermé depuis un emplacement sur la troisième rue, tout près des lieux de l’incident. Cependant, au moment de la rédaction du présent rapport, les enquêteurs de l’UES n’avaient pas été en mesure d’extraire de ces enregistrements des images susceptibles d’avoir une valeur probante. Malgré les efforts déployés par les enquêteurs de l’UES pour récupérer les enregistrements du système de télévision en circuit fermé montrant l’interaction entre l’AI et le plaignant, qui pourrait très bien avoir été captée, il semble que ces enregistrements n’étaient plus sur la carte mémoire, ne pouvaient pas être visionnés ou n’existaient tout simplement pas.

Plaignant :


Homme de 29 ans, décédé



Témoins civils (TC)
 

TC no 1     A participé à une entrevue

TC no 2     A participé à une entrevue

TC no 3     A participé à une entrevue

TC no 4     A participé à une entrevue

TC no 5     A participé à une entrevue

TC no 6     A participé à une entrevue

TC no 7     A participé à une entrevue

TC no 8     A participé à une entrevue

TC no 9     A participé à une entrevue

TC no 10     A participé à une entrevue

TC no 11     A participé à une entrevue

TC no 12     A participé à une entrevue

TC no 13     A participé à une entrevue

TC no 14     A participé à une entrevue

TC no 15     A participé à une entrevue

TC no 16     A participé à une entrevue

TC no 17     A participé à une entrevue

TC no 18     A participé à une entrevue

TC no 19     A participé à une entrevue

TC no 20     A participé à une entrevue

TC no 21     A participé à une entrevue

Agents témoins (AT)
 

AT no 1     A participé à une entrevue

AT no 2     A participé à une entrevue

AT no 3     A participé à une entrevue

AT no 4     A participé à une entrevue

AT no 5     A participé à une entrevue

AT no 6     A participé à une entrevue

AT no 7     N’a pas participé à une entrevue, mais ses notes ont été reçues et examinées

AT no 8     A participé à une entrevue

AT no 9     A participé à une entrevue

AT no 10     A participé à une entrevue

AT no 11     A participé à une entrevue 
  
  


Agent impliqué (AI)
 

AI     A participé à une entrevue; notes reçues et examinées


Éléments de preuve

Les lieux
 

L’incident s’est produit sur un trottoir dans le secteur de la troisième rue et de la rue Beech, à Collingwood. De nombreux membres de la Police provinciale étaient sur les lieux pour restreindre la circulation des véhicules et des piétons. Le secteur est principalement composé de résidences unifamiliales.

Un véhicule de patrouille Tahoe aux couleurs de la Police provinciale [on croit qu’il s’agit du véhicule conduit par l’AI] se trouvait à l’intersection, orienté vers le sud. Un fusil de chasse à un coup de marque Cooey, modèle 84, une cartouche de fusil de chasse utilisable, un fil d’arme à impulsions avec une sonde y étant attachée et 11 cartouches vides de calibre .223 ont été retrouvés sur le trottoir, au coin nord ouest. Il y avait également des taches de sang sur le trottoir. À l’intérieur du véhicule de patrouille Tahoe de la Police provinciale, sur le siège du passager, se trouvait une arme à impulsions assignée à l’AI.

Figure one
Figure 1 – Fusil de chasse de marque Cooey, modèle 84.
De l’équipement laser a été installé dans le secteur depuis lequel les témoins civils avaient observé les événements pour qu’il soit plus facile de reproduire les trajectoires des projectiles et de repérer tout élément de preuve pertinent. Des détecteurs de métal et des râteaux ont également été utilisés pour chercher divers éléments de preuve comme des projectiles d’armes à feu ou leurs composants.

On a ratissé les lieux afin de relever les marques des projectiles. Une marque a été repérée en bordure de la chaussée et un projectile a été retrouvé à proximité. Une autre marque a été repérée sur une clôture, à l’extrémité d’une propriété résidentielle au coin sud ouest de la même intersection, et un fragment de projectile a été récupéré près de la clôture.

L’UES a demandé de pouvoir recourir aux services d’un chien policier du détachement de la GRC de l’Aéroport international Pearson. Un agent de la GRC (un maître chien) ainsi qu’un chien policier se sont rendus sur les lieux, mais n’ont pas été en mesure de trouver d’autres projectiles.

Éléments de preuves médicolégaux
 

Les éléments de preuve en lien avec le plaignant ont été soumis au Centre des sciences judiciaires (CSJ) :
• un fusil de chasse de marque Cooey, modèle 84, et une cartouche de fusil de chasse;
• les vêtements du plaignant;
• un échantillon d’acide désoxyribonucléique (ADN) de la personne ayant manié l’arme – le plaignant.

Le fusil de chasse de marque Cooey, modèle 84, et sa cartouche ont été envoyés au CSJ pour qu’on y détermine s’il y avait, sur la cartouche, des marques d’introduction et d’éjection qui correspondaient aux composants de la chambre et de l’extracteur du fusil, et pour qu’on y analyse l’ADN sur le fusil et sur la cartouche. On a aussi remis au CSJ les vêtements du plaignant aux fins de détermination de la distance par rapport aux projectiles tirés depuis la carabine C8 de l’AI.

De même, on a soumis au CSJ des éléments de preuve en lien avec l’AI :
• la carabine C8 de l’AI, pour qu’on en vérifie le fonctionnement et qu’on effectue des comparaisons avec les balles et les fragments de balles retrouvés en bordure de la chaussée et près de la clôture;
• les cartouches de la carabine C8 récupérées sur les lieux, pour qu’on relève les résidus de décharge d’arme à feu;
• trois prélèvements faits à partir de marques de balle possibles.

Figure two
Figure 2 – Carabine C8 de l’AI.
En ce qui a trait aux éléments de preuve soumis en lien avec le plaignant, le CSJ a fait savoir que le fusil de chasse, un fusil à un coup à charnière, fonctionnait correctement, qu’il n’y avait pas de marque identifiable sur la cartouche inutilisée et qu’il n’était donc pas possible d’établir si celle-ci avait ou non été tirée depuis le fusil de chasse, et qu’aucun résidu de décharge d’arme à feu n’avait été repéré autour des bris à l’arrière du jean du plaignant, près de la fesse gauche et près de la cuisse droite, aux fins de la détermination de la distance.

Le CSJ a également indiqué que le plaignant était la source de l’ADN masculin recueilli sur le projectile de calibre .223 retrouvé en bordure de la chaussée, du côté sud de la troisième rue. De plus, le CSJ a fait savoir que le plaignant ne pouvait être exclu comme source de l’ADN relevé au moyen des prélèvements faits sur la poignée et sur les mécanismes de chargement et d’armement du fusil de chasse retrouvé à côté du corps du plaignant, au coin nord ouest de l’intersection de la troisième rue et de la rue Beech.

En ce qui concerne les éléments de preuve soumis en lien avec l’AI, le CSJ a indiqué que la carabine C8 semi automatique de calibre .223 avec un chargeur détachable comprenant des cartouches était en état de tirer et qu’on l’avait mise à l’essai en utilisant le chargeur détachable; on a ainsi établi qu’elle fonctionnait correctement en tant que fusil semi automatique. On a examiné au microscope les balles tirées lors de l’essai avec la carabine C8 semi automatique de calibre .223 et on les a comparées avec la balle retrouvée en bordure de la chaussée; on a établi qu’il y avait une correspondance entre les balles provenant de l’essai et celle récupérée en bordure de la chaussée quant à la catégorie et aux caractéristiques individuelles. On a déterminé, dans les limites de la certitude pratique, que la balle ainsi récupérée avait été tirée depuis la carabine C8 semi automatique de calibre .223.

Enregistrements de communications
 

Appel au 9 1 1 de la TC no 10 débutant à 12 h 30 min 18 s

• Appel de la TC no 10 au Centre de communication de la Police provinciale (CCPP) au sujet du plaignant.
• La police a eu affaire au plaignant la veille à propos d’une querelle de ménage.
• Après le départ de la police, le plaignant s’est blessé avec du verre cassé et a passé une corde autour de son cou.
• Aujourd’hui, le plaignant est enfermé dans sa chambre avec un fusil de chasse démonté qui ne fonctionne pas et qui ne contient pas de balles.
• Le plaignant a bu et veut mettre fin à ses jours, même s’il ne s’est pas fait de mal aujourd’hui.
• La TC no 10 doit rencontrer les policiers à l’extérieur, devant la porte d’entrée.

Appel au 9 1 1 depuis une résidence sur la rue Beech commençant à 13 h 12 min 50 s

• Une personne sur la rue Beech a signalé par téléphone avoir entendu des coups de feu.
• La police se trouve à la résidence voisine au coin de la rue Beech et de la troisième rue. La personne ayant fait l’appel est couchée au sol et a besoin de savoir si la situation est sécuritaire.
• La femme ayant fait l’appel dit avoir entendu trois ou quatre coups de feu quatre minutes plus tôt.
• Un policier armé d’une mitraillette a dit à la femme ayant fait l’appel qu’il y avait un problème et qu’elle devait rester à l’intérieur, après quoi elle a entendu des coups de feu.
• On a demandé à la personne ayant appelé d’attendre que la police communique avec elle.

Appel du CCPP au personnel des communications du service d’ambulance débutant à 12 h 34 min 33 s

• Une ambulance est demandée sur les lieux, dans le secteur de la troisième rue et de la rue Maple.
• Le CCPP donne des détails sur la situation au personnel des communications du service d’ambulance.

Appel de suivi du CCPP à la TC no 10

• Le membre du personnel du CCPP rappelle la TC no 10 et lui demande de sortir de la résidence avec toute autre personne qui s’y trouve, sauf le plaignant.
• Le membre du personnel du CCPP dit que deux policiers sont sur les lieux et que d’autres sont en route.

Appels au répartiteur de la Police provinciale et de la part de celui-ci, à partir de 12 h 35 min 34 s

• Divers appels téléphoniques ont été faits par le répartiteur et à l’intention de celui ci; ces appels ne sont pas horodatés individuellement et il s’agit principalement de conversations tenues après les faits.
• Parmi les personnes ayant fait un appel figurent trois sergents de la police, qui ont discuté de la mise en œuvre du protocole de l’UES, et des policiers qui ont fait part de leurs allées et venues pour voir à la sécurité des lieux.
• Les communications ont pris fin à 10 h 25 min 41 s, le 10 septembre 2020.

Transmissions radio à partir de 12 h 31 min 37 s

• Des unités de police sont dépêchées à une résidence de la troisième rue en raison d’une personne suicidaire.
• On dit que le plaignant a trouvé un vieux fusil de chasse qui ne fonctionne pas.
• On donne des renseignements contextuels aux agents de police envoyés sur les lieux [selon l’information fournie par la TC no 10 lors de son appel au 9 1 1].
• On signale que l’ambulance se trouve dans le secteur.
• L’AT no 1 se rend sur les lieux.
• Un agent de police fait le point sur la possibilité qu’il y ait une personne barricadée, armée et ayant accès à des munitions.
• D’autres agents de police sont dépêchés et des mises à jour sont fournies.
• L’AT no 1 établit un périmètre de sécurité.
• Mention de l’AT no 10.
• Des renseignements supplémentaires sont donnés comme quoi le fusil de chasse est fonctionnel.
• L’AI mentionne à l’AT no 6 qu’il parle à l’AT no 1 et qu’il va déplacer son véhicule de patrouille vers le secteur de la troisième rue et de la rue Beech afin de les bloquer et de mettre son équipement.
• On demande la présence d’un commandant des opérations sur le lieu de l’incident critique.
• On entend quelqu’un qui indique que le plaignant a été aperçu avec une arme à feu et qui demande qu’on se mette à l’abri.
• On entend quelqu’un dire « aperçu du côté ouest, du côté nord ouest de la clôture » [traduction].
• On entend quelqu’un dire « maintenant » [traduction].
• On entend quelqu’un dire « des coups ont été tirés, envoyez une ambulance maintenant; des coups ont été tirés; un Taser a été déployé et des coups ont été tirés » [traduction].
• Transmissions concernant le confinement de la résidence et la possibilité qu’il y ait d’autres personnes à l’intérieur.
• L’AT no 2 transporte l’AI.
• Communications concernant les démarches pour vider la résidence.
• Des membres de la famille sont sur les lieux et on est en voie de les transporter.
• Diverses transmissions concernant la logistique.
• L’UES est sur place.

Conversation téléphonique du CCPP débutant à 13 h 52 s

• Un agent du CCPP appelle le commandant des opérations sur le lieu de l’incident critique.
• L’agent dit que des coups ont été tirés.
• L’information transmise au commandant des opérations sur le lieu de l’incident critique n’est pas exacte au départ, mais on semble recueillir peu à peu suffisamment d’information pour permettre un compte rendu plus juste.
• Une femme appelle l’AT no 1.
• L’agent appelle un homme qui a déjà appris de l’AT no 6 que l’AI a pris part à une fusillade.
• L’agent appelle un autre homme et indique que l’UES a été avisée.
• Des avis sont également donnés par deux autres agents du CCPP.
• Il y a de la confusion concernant l’agent ayant pris part à la fusillade et le confinement de la résidence.
• De nombreuses discussions ont lieu à savoir si la résidence sera vidée par les membres de l’équipe d’intervention d’urgence (EIU) ou l’unité d’intervention tactique.
• Il y a plusieurs autres communications.

Éléments obtenus auprès du Service de police
 

Sur demande, l’UES a obtenu les documents et éléments suivants de la Police provinciale, et les a examinés :

 
• enregistrements des communications audio;
• biographie de l’agent;
• rapport sur les détails de l’événement (4);
• rapport d’incident général (3);
• images des lieux produites à l’aide de Google Maps, assorties d’indications inscrites par les agents témoins;
• notes de l’AI et des AT nos 1 à 10;
• dossier de continuité de la Police provinciale;
• sommaire de l’entrevue de la Police provinciale avec la TC no 1;
• photographies de la Police provinciale relatives à l’incident;
• liste des biens de la Police provinciale;
• rapport de mort subite concernant le plaignant;
• transcription du dossier de formation de l’AI;
• déclaration d’un témoin.

Éléments obtenus auprès d’autres sources


Sur demande, l’UES a obtenu les documents et éléments suivants auprès de sources autres que la police, et les a examinés :


• rapport d’appel d’ambulance;
• enregistrements d’un système de télévision en circuit fermé de la troisième rue;
• images provenant d’un téléphone cellulaire;
• copie d’une note manuscrite;
• dessins faits par des témoins civils;
• courriel d’un témoin;
• rapports d’incident des services médicaux d’urgence;
• images produites à l’aide de Google Maps, assorties d’indications inscrites par un témoin;
• dossiers médicaux du plaignant;
• photographies prises par un témoin;
• photographie de notes prise par un témoin;
• photographies de dessins prise par un témoin et vidéo faite par celui-ci;
• captures d’écran de messages textes entre un témoin et le plaignant;
• rapport d’autopsie, daté du 11 décembre 2020, et reçu par l’UES le 16 août 2021 depuis le bureau du coroner.

Description de l’incident

Il est possible d’établir clairement les principaux événements qui se sont produits au moyen des éléments de preuve recueillis par l’UES, dont des entrevues avec plusieurs témoins civils, l’AI et d’autres agents qui ont participé à l’opération policière ayant pris fin avec le décès du plaignant, ainsi que les renseignements tirés de l’examen criminalistique des lieux et les autres éléments de preuve.

Peu après 13 h, le 9 septembre 2020, le plaignant a été tiré et abattu par l’AI alors qu’il se tenait au coin nord ouest de l’intersection de la troisième rue et de la rue Beech. Au total, l’AI a tiré 11 coups avec sa carabine C8. Le plaignant tenait un fusil de chasse pointé en direction de l’AI au moment où les coups de feu ont été tirés.

La fusillade a été le point culminant d’une série d’événements ayant débuté la veille. Le plaignant, qui habitait une résidence sur la troisième rue, s’était querellé avec la TC no 10. La situation est devenue hors de contrôle et la TC no 10 a appelé la police. Des agents se sont présentés sur les lieux et ont réussi à convaincre le plaignant de trouver un autre endroit pour passer la nuit. Il a ainsi quitté la résidence et s’est rendu à la maison de sa mère.

Le lendemain, vers 12 h 30, la TC no 10 a de nouveau appelé la police. Elle a alors fait savoir que le plaignant, suicidaire, qui était revenu de la maison de sa mère, s’était enfermé dans sa chambre avec un fusil de chasse non chargé qui était inutilisable. D’ailleurs, selon ce qu’a révélé l’enquête, on pouvait croire que le plaignant voulait se suicider par policier interposé.

Vers 12 h 30, des agents de police ont été dépêchés sur les lieux. Parmi eux, il y avait l’AT no 5 et l’AT no 8, qui se sont présentés à la résidence et qui en ont fait sortir les TC nos 1, 10, 17, ainsi qu’un autre résident. Alors qu’elle sortait de la résidence, la TC no 10 a dit aux agents que le fusil de chasse en la possession du plaignant était, en fait, chargé. L’AT no 5 a informé le Centre de communication de ce fait nouveau, ainsi qu’un sergent qui se rendait sur les lieux, l’AT no 1. On a ensuite communiqué cette information à tous les agents.

L’AI, un agent de l’EIU, est arrivé sur les lieux, a été informé de la situation par l’AT no 1 et a stationné son véhicule utilitaire sport de la police au milieu de l’intersection de la troisième rue et de la rue Beech. L’agent s’est dissimulé du côté passager du véhicule de patrouille de l’AT no 5, qu’elle avait stationné du côté est de la rue Beech, tout juste au nord de la troisième rue. Alors qu’il mettait son gilet pare balles rigide, l’AI a entendu par radio que le plaignant avait brièvement émergé de la maison avec une arme à la main. L’agent s’est emparé de sa carabine C8 et a pris position derrière le compartiment moteur du véhicule de patrouille de l’AT no 5, agenouillé pour demeurer caché.

Quelques secondes après les premiers signalements comme quoi le plaignant était sorti de son domicile, il en est sorti de nouveau, cette fois par une ouverture dans les haies qui bordaient le côté est de la propriété. Sa main droite près de la détente, le plaignant tenait un fusil de chasse parallèlement au sol. L’AI se trouvait directement face au plaignant, de l’autre côté de la rue. L’agent a pointé sa carabine C8 en direction du plaignant et lui a crié à plusieurs reprises de ne pas bouger et de jeter son arme. Le plaignant s’est montré indifférent. Il a levé sa main gauche en direction de l’agent, a fait un geste obscène et a dit « va te faire foutre » [traduction], après quoi il s’est tourné vers sa droite et a commencé à marcher vers le sud.

L’AI a cessé de crier des ordres et s’est rendu sur la rue Beech en contournant le devant du véhicule de patrouille de l’AT no 5. Sa carabine C8 dans sa main droite, la crosse appuyée sur son épaule droite, et en continuant de viser le plaignant, l’AI a pris son arme à impulsions avec sa main gauche. L’agent s’est approché à quatre ou sept mètres du plaignant, s’est arrêté et a utilisé l’arme. Les sondes de l’arme à impulsions n’ont pas atteint le plaignant, mais ont attiré son attention.

Le plaignant, qui se trouvait désormais sur une parcelle de gazon entre une borne d’incendie et un panneau d’arrêt à l’angle nord ouest de l’intersection, s’est retourné pour faire face à l’AI, qui était derrière lui. Il tenait toujours le fusil de chasse dans la même position, soit le canon pointé en direction de l’AI, lorsqu’il a arrêté son mouvement. L’AI a jeté de côté son arme à impulsions et a saisi sa carabine C8 avec ses deux mains. Toujours sur la chaussée, plusieurs mètres au nord du plaignant, l’agent a crié au plaignant de déposer son fusil. Le plaignant a dit à l’AI « va te faire foutre », après quoi l’agent a fait feu sur lui.

L’AI a tiré 11 coups de feu, dont huit ont atteint le plaignant.

L’AT no 1 et l’AT no 11 se sont précipités vers le plaignant et ont commencé à lui administrer les premiers soins. Les ambulanciers paramédicaux, qui étaient présents sur la troisième rue, à l’est de l’intersection, sont alors arrivés et ont entrepris de donner les soins au plaignant. Ce dernier a été transporté à l’hôpital; on a constaté son décès à 13 h 26.

Le plaignant tenait un fusil de chasse de marque Cooey, modèle 84. L’UES a retrouvé l’arme sur les lieux, en plus d’une cartouche de fusil de chasse. Les résultats des essais effectués par le CSJ ont permis de conclure que ce fusil de chasse à un coup à charnière fonctionnait correctement. L’arme n’était pas chargée au moment où elle a été recueillie par l’UES.

Cause du décès

À la lumière de l’autopsie, le médecin légiste a attribué le décès du plaignant à de multiples blessures par balle.

Dispositions législatives pertinentes

Article 34 du Code criminel -- Défense de la personne – emploi ou menace d’emploi de la force

34 (1) N’est pas coupable d’une infraction la personne qui, à la fois :
a) croit, pour des motifs raisonnables, que la force est employée contre elle ou une autre personne ou qu’on menace de l’employer contre elle ou une autre personne
b) commet l’acte constituant l’infraction dans le but de se défendre ou de se protéger -- ou de défendre ou de protéger une autre personne -- contre l’emploi ou la menace d’emploi de la force
c) agit de façon raisonnable dans les circonstances

(2) Pour décider si la personne a agi de façon raisonnable dans les circonstances, le tribunal tient compte des faits pertinents dans la situation personnelle de la personne et celle des autres parties, de même que des faits pertinents de l’acte, ce qui comprend notamment les facteurs suivants :
a) la nature de la force ou de la menace
b) la mesure dans laquelle l’emploi de la force était imminent et l’existence d’autres moyens pour parer à son emploi éventuel
c) le rôle joué par la personne lors de l’incident
d) la question de savoir si les parties en cause ont utilisé ou menacé d’utiliser une arme
e) la taille, l’âge, le sexe et les capacités physiques des parties en cause
f) la nature, la durée et l’historique des rapports entre les parties en cause, notamment tout emploi ou toute menace d’emploi de la force avant l’incident, ainsi que la nature de cette force ou de cette menace;
1. f.1) l’historique des interactions ou communications entre les parties en cause
g) la nature et la proportionnalité de la réaction de la personne à l’emploi ou à la menace d’emploi de la force
h) la question de savoir si la personne a agi en réaction à un emploi ou à une menace d’emploi de la force qu’elle savait légitime

Analyse et décision du directeur

Le 9 septembre 2020, le plaignant est décédé des suites de multiples blessures par balle infligées par un policier de la Police provinciale au cours d’un affrontement à Collingwood. L’agent – l’AI – a été désigné comme agent impliqué aux fins de l’enquête de l’UES. Après avoir examiné les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’AI a commis une infraction criminelle relativement au décès du plaignant.

Aux termes l’article 34 du Code criminel, l’emploi d’une force qui constituerait autrement une infraction est légalement justifié si cette force est utilisée pour se défendre soi-même ou défendre autrui contre une agression réelle ou une menace d’agression, raisonnablement appréhendée, et que la force ainsi employée est elle-même raisonnable. En ce qui concerne le caractère raisonnable de la force, il faut l’évaluer en fonction des facteurs pertinents, notamment en ce qui a trait à des considérations telles que la nature de la force ou de la menace, la mesure dans laquelle l’emploi de la force était imminent et l’existence d’autres moyens pour parer à son emploi éventuel, la question de savoir si les parties en cause ont utilisé ou menacé d’utiliser une arme ainsi que la nature et la proportionnalité de la réaction de la personne à l’emploi ou à la menace d’emploi de la force. À mon avis, la force employée par l’AI se situait dans le cadre des motifs énoncés à l’article 34.

Je reconnais que l’AI a tiré avec sa carabine C8 puisqu’il croyait qu’il était nécessaire de se protéger lui même et de protéger les personnes autour de lui, y compris les autres agents et les civils dans le secteur, d’un risque mortel posé par le plaignant. C’est ce qu’a dit l’agent à l’UES, et les faits le confirment. Le fusil de chasse en la possession du plaignant n’était pas chargé, mais l’agent ne pouvait pas le savoir. En fait, de son point de vue, c’était tout le contraire, car il avait appris par radio, quelques instants avant la fusillade, que le fusil était chargé. Je suis convaincu que l’AI, avec une arme à feu apparemment fonctionnelle pointée dans sa direction, a agi dans le but de se protéger et de protéger les autres d’une menace de mort imminente.

Je suis également convaincu que l’emploi de la force par l’AI était raisonnable. Tout d’abord, l’agent agissait de manière légale au moment où il s’est approché du plaignant et lorsqu’il l’a ensuite abattu. Le devoir principal d’un agent est la protection et la préservation de la vie et l’AI exerçait ses fonctions légitimes lorsqu’il est intervenu sur les lieux à la suite de signalements concernant le plaignant, qui était suicidaire et armé d’un fusil. Par la suite, lorsque le plaignant est sorti de la résidence et a adopté un comportement provocateur, arme à la main, en se dirigeant vers le sud et l’intersection, il représentait un danger clair et réel pour le bien être de l’AI et des autres agents dans le secteur, ainsi que des civils à l’intérieur et autour de leurs domiciles. Par conséquent, l’agent était en droit de suivre le plaignant vers le sud et de lui demander de cesser de bouger comme il le faisait.

Les exigences du moment démontrent le caractère raisonnable des actions de l’AI. L’agent se trouvait à moins de deux ou trois mètres du plaignant au moment où il a fait feu. Tel que mentionné précédemment, le plaignant s’était retourné en direction de l’AI en pointant vers lui ce que l’agent pouvait seulement supposer être un fusil de chasse complètement chargé et fonctionnel. À ce moment, l’AI faisait face à une menace de mort imminente, sans endroit vers où s’échapper et nulle part où se cacher. Dans les circonstances, il est difficile de voir ce que l’agent aurait pu faire d’autre que d’utiliser son arme s’il voulait se protéger.

Le contexte entourant la fusillade est également révélateur. Le plaignant avait l’intention de provoquer ce qu’il espérait être un affrontement mortel avec la police. Il l’avait dit clairement juste avant l’arrivée des agents, lorsqu’il a mentionné vouloir se suicider par policier interposé. L’AI n’était pas au courant de cette information à ce moment; néanmoins, les motivations du plaignant confirment ce qu’a perçu l’AI à ce moment, à savoir que la conduite du plaignant ne lui laissait d’autre choix que de tirer avec son arme. De plus, il est important de noter que l’AI avait déjà fait preuve d’une importante modération. On peut soutenir que, même si le comportement du plaignant avant la fusillade, alors qu’il marchait sur le trottoir puis qu’il a entrepris de marcher vers le sud en direction de la troisième rue, présentait un risque immédiat de mort ou de lésions corporelles graves pour l’AI et les autres, l’agent a d’abord choisi de tenter de l’arrêter en lui parlant, puis en utilisant son arme à impulsions. Ce n’est que parce que ces options n’ont pas permis de neutraliser le plaignant que l’AI a utilisé son arme à feu.

Enfin, je ne peux pas conclure, sur la base d’un jugement raisonnable, que l’AI a agi de façon excessive en ce qui concerne le nombre de coups de feu qu’il a tirés, soit 11 au total. L’agent a expliqué qu’il a tiré jusqu’à ce que le plaignant tombe au sol et ne représente plus une menace. Compte tenu de la rapidité avec laquelle l’AI a tiré et de ce qu’ont révélé les témoins, à savoir que le plaignant est tombé après le dernier coup de feu, j’accepte les déclarations de l’agent telles quelles. À cet égard, puisque le plaignant était debout avec un fusil de chasse dans les mains et qu’il est demeuré ainsi jusqu’au dernier coup de feu, je suis convaincu que les inquiétudes de l’AI concernant la nature de la menace et la nécessité d’utiliser sa carabine C8 sont demeurées raisonnables tout au long de la période pendant laquelle il a tiré.

En conclusion, puisque je suis convaincu, pour les raisons susmentionnées, que les éléments de preuve ne permettent pas de conclure, sur la base d’un jugement raisonnable, que l’AI s’est comporté autrement qu’en toute légalité tout au long de son intervention auprès du plaignant, il n’y a aucune raison de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.


Date : 23 août 2021
Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

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