Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 21-PVI-119

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  •  des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 
En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  •  les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.Le présent rapport porte sur l’enquête menée par l’UES concernant la blessure grave subie par un homme de 17 ans (le « plaignant »).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 12 avril 2021, à 19 h 10, la Police provinciale de l’Ontario (la Police provinciale) a signalé que des agents de son détachement de Hawkesbury avaient tenté de bloquer deux véhicules volés près de la route de comté (RC) 17, à l’est de la municipalité d’Alfred et à l’ouest de la RC 4, tout juste à l’ouest du village de L’Orignal. Les agents n’ont pas réussi à bloquer les véhicules et on leur a dit de cesser l’opération. Les agents de la Police provinciale ont ensuite tenté de stopper les véhicules au moyen d’une herse cloutée, mais cela n’a pas fonctionné, et les deux véhicules suspects ont pris la fuite à une vitesse élevée sur la RC 17, en direction est.

Le conducteur de l’un des véhicules volés a perdu le contrôle de celui-ci à environ 2,4 kilomètres de la herse cloutée, et le véhicule s’est retrouvé renversé dans un fossé avoisinant.

Immédiatement après l’accident, un suspect de sexe masculin est sorti du véhicule, a tenté de fuir et a été arrêté par des agents du Détachement de Hawkesbury.

L’homme a été examiné par des ambulanciers paramédicaux, qui ont jugé qu’il n’était pas blessé. Par mesure de prévention, il a été emmené à l’Hôpital général de Hawkesbury pour subir une tomodensitométrie, laquelle a révélé qu’il avait une fracture à une côte du côté droit.

Le deuxième véhicule volé a fui les lieux et n’a pas été retrouvé.

La Police provinciale a quitté les lieux avant d’aviser l’UES.

L’équipe

Date et heure de l’envoi de l’équipe : 13 avril 2021, à 17 h 7

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux : 14 avril 2021, à 17 h 45

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3
 
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés :0

Personne concernée (« plaignant ») :

Homme de 17 ans; a participé à une entrevue

Le plaignant a participé à une entrevue le 15 avril 2021.


Témoins civils (TC)

TC no 1 N’a pas participé à une entrevue (plus proche parent)
TC no 2 A participé à une entrevue
TC no 3 A participé à une entrevue

Les témoins civils ont participé à des entrevues les 14 et 15 juin 2021.

Agents impliqués (AI)

AI no 1 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue, comme la
loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué. Ses notes ont été 
reçues et examinées.
AI no 2 N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue, comme la
  loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué. Ses notes ont été 
reçues et examinées.


Agents témoins (AT)

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue
AT no 3 A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à des entrevues le 27 avril 2021.


Éléments de preuve

Les lieux

La RC 17 est, en majeure partie, une route asphaltée qui comporte quatre voies : deux en direction ouest et deux en direction est. Elle est située dans un secteur rural, la signalisation y est claire et elle comporte une ligne centrale bien évidente divisant les voies en direction ouest et celles en direction est, ainsi que des accotements meubles délimités par des lignes continues bien visibles. La limite de vitesse affichée est de 90 km/h.

Cet incident a commencé sur la RC 17, juste à l’est de la municipalité d’Alfred, et a pris fin juste à l’ouest du village de L’Orignal, à l’intersection de la RC 17 et de la RC 4.

Il faisait soleil, les routes étaient sèches et il y avait peu de véhicules qui circulaient.

Aucun membre du personnel de l’UES ne s’est rendu sur les lieux de l’incident.

Éléments de preuves médicolégaux

Extraction de données sur les collisions

La Police provinciale a avisé les enquêteurs de l’UES, dans un courriel daté du 23 avril 2021, qu’elle n’avait récupéré aucune donnée sur les collisions du véhicule concerné.

Sommaire des données enregistrées par les systèmes GPS de la Police provinciale le 12 avril 2021

Véhicule de la Police provinciale conduit par l’AI no 2

L’enregistrement de données commence à 9 h 20 min 7 s et prend fin à 9 h 39 min 38 s. Les parties pertinentes commencent à 9 h 23 min 6 s, lorsque l’AI no 2 signale à son centre de communication qu’il suit un véhicule volé qui circule en direction est sur la RC 17, dans le secteur des routes Blue Corner et Peladeau, vers Hawkesbury. Les données du système GPS indiquent que sa vitesse est de 122 km/h à ce moment-là.

Les données du système GPS indiquent que le véhicule ralentit au cours des cinq minutes suivantes et que sa vitesse passe à la limite affichée de 90 km/h, ou en dessous de celle-ci, selon le moment.

À 9 h 27 min 49 s, l’AI no 2 fait savoir qu’il roule à 90 km/h. Les données du système GPS indiquent que la vitesse du véhicule est de 98 km/h à ce moment-là. Puis, ces données montrent que sa vitesse a augmenté pour atteindre 121 km/h au cours des deux minutes suivantes.

À 9 h 29 min 1 s, l’AI no 2 affirme que ses gyrophares sont en marche. Les données du système GPS indiquent que sa vitesse diminue ensuite, passant de 121 km/h à 72 km/h.

À 9 h 29 min 29 s, l’AI no 2 signale que le véhicule fuit les lieux. Les données du système GPS indiquent que la vitesse du véhicule de l’AI no 2 passe de 72 km/h à 143 km/h à 9 h 29 min 50 s.

Le sergent du Centre de communication de la Police provinciale (CCPP) ordonne à l’AI no 2 de cesser sa poursuite à 9 h 30. Les données du système GPS indiquent que la vitesse du véhicule de l’AI no 2 est de 0 km/h à 9 h 30 min 21 s.

À 9 h 32 min 18 s, le CCPP fait savoir que les unités peuvent recommencer à suivre le véhicule en question à des vitesses normales. Les données du système GPS indiquent que le véhicule de l’AI no 2 recommence à circuler et qu’après une minute, il atteint une vitesse de 124 km/h.

À 9 h 34 min 3 s, l’AT no 1 signale par la radio de police que le véhicule Toyota Highlander blanc en fuite a été impliqué dans une collision.

À 9 h 34 min 5 s, les données du système GPS indiquent que la vitesse du véhicule de l’AI no 2 est de 0 km/h. Elle ne change pas jusqu’à la fin de l’extrait de données, à 9 h 39 min 38 s.

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies

Sommaire de l’enregistrement des communications de la police

L’enregistrement dure 18 minutes et 34 secondes. Il n’est pas horodaté. Les heures présentées entre parenthèses sont tirées du rapport du système de répartition assistée par ordinateur et de la chronologie des événements de la Police provinciale, et elles ne correspondent donc pas nécessairement aux heures réelles auxquelles se sont produits les événements en question.


(9 h 22 min 58 s) – AI no 2
[traduction] « Je circule actuellement sur la RC 17 en direction est, vers Hawkesbury, et je suis deux véhicules Toyota. Le premier véhicule que je suis a été signalé comme volé, et je crois que le véhicule qui se trouve devant celui-ci a également été volé. »

(9 h 23 min 16 s)
L’AI no 1 et l’AT no 2 arrivent sur les lieux pour offrir leur aide.

AI no 2
« Un véhicule Toyota blanc, un homme de race noire qui conduit. Le véhicule que je suis en ce moment est un Toyota 4Runner blanc. Je passe près d’Alfred en ce moment. Je roule à 90 km/h. »

(9 h 25 min 38 s) – AT no 3
« Je peux aider moi aussi. »

(9 h 25 min 53 s) – AI no 2
« L’AT no 3 et l’AI no 1 peuvent-ils se placer juste à l’ouest de L’Orignal au cas où les suspects prendraient la fuite? »

AI no 2
« Je vois l’AT no 1 qui arrive derrière moi; si tu peux me rejoindre, nous pouvons tenter de bloquer les véhicules. »

(9 h 26 min 2 s)
« Sergent du CCPP en surveillance. Je comprends que vous avez deux véhicules que vous soupçonnez être volés? »

AI no 2
« C’est confirmé pour l’un des véhicules, mais non pour l’autre, qui se trouve devant. »

Sergent du CCPP
« Je comprends que vous établissez des mesures de rechange. Beau travail tout le monde. Pas de poursuite, mais n’hésitez pas à utiliser toutes les autres mesures que vous jugez appropriées. »

Centre de communication de Smiths Falls
« Nous appliquerons le code 10 3 jusqu’à ce que vous arrêtiez les suspects. »

(9 h 28 min 17 s) – AT no 2
« Nous plaçons une herse cloutée juste à l’ouest de la route de comté 11. Nous nous cachons derrière une grosse affiche qui se trouve dans un fossé. »

(9 h 29 min 1 s) – AI no 2
« Préparez-vous, ils arrivent. Mes gyrophares sont activés – je ralentis, je suis presque arrêté… ils y vont maintenant » (on entend maintenant des sirènes en arrière plan).

(9 h 29 min 29 s) – AI no 2
« OK, Centre de communication, ils ne s’arrêtent pas – ils se dirigent vers l’est, le Highlander se trouve dans les voies en direction ouest; nous circulons à 135 km/h. »

(9 h 30) – Sergent du CCPP
« Comme je l’ai dit plus tôt, pas de poursuite; si vous suivez le véhicule, cessez la poursuite immédiatement, arrêtez-vous sur l’accotement, désactivez vos gyrophares et votre sirène et signalez votre kilométrage. »

(9 h 30 min 7 s) – AI no 2
« 10 4. »

AT no 2
« Ils viennent de passer; ils ont contourné les herses cloutées et ont presque heurté des véhicules qui arrivaient en sens inverse. On les a vus pour la dernière fois circulant en direction est à la hauteur de la RC 11. »

Sergent du CCPP
« Ok tout le monde, restez-là et attendez d’autres instructions. Il y a des agents plus loin qui peuvent essayer d’autres mesures. Allez-y, mais pas de poursuite. »

(Toutes les unités concernées entreprennent de signaler leur kilométrage final, selon la directive donnée.)

AT no 1
« Nous allons seulement circuler lentement vers l’est, monsieur; nous ne suivrons pas les véhicules.

(9 h 30 min 27 s) – AT no 2
« Le Highlander m’a dépassé – une herse cloutée était déployée, mais n’a pas fonctionné. »

(9 h 31) – AT no 1
« Nous venons d’arriver sur la RC 4 et des gens nous font signe de la main – il y a peut-être eu une collision impliquant le Highlander. Nous vous le ferons savoir. »

(9 h 34 min 3 s) – AT no 2
« Oui, un véhicule est entièrement à l’envers; pouvez-vous envoyer une ambulance, s’il vous plaît? »

(9 h 34 min 48 s) – AI no 2
« J’ai un 10 92; un homme est impliqué dans l’accident. Pouvez-vous envoyer une ambulance sur la RC 4 à titre de précaution? »

Unité inconnue
« Oui, le 4Runner blanc a été vu pour la dernière fois circulant en direction est; on ne sait pas s’il a pris la sortie vers la route 34. »

(10 h 5 min 10 s) – AT no 1
« Les ambulanciers paramédicaux disent que l’homme arrêté ne présente pas de blessure grave, qu’il a des coupures et ecchymoses mineures, mais ils le transportent à l’hôpital à titre de précaution. »

Le reste de l’enregistrement concerne des mesures prises pour assurer la sécurité des lieux, des demandes d’envoi de dépanneuses sur les lieux de l’accident, des tentatives de confirmation de l’identité de la personne arrêtée et des demandes de vérification d’adresses liées à l’autre véhicule auprès du Service de police de la Ville de Montréal et de la Sûreté du Québec.

Photo prise au moyen d’un téléphone cellulaire

Une photo du plaignant fuyant les lieux de l’accident en courant prise par le TC no 2 au moyen d’un téléphone cellulaire a été transmise aux enquêteurs de l’UES.

Documents obtenus du service de police

Sur demande, l’UES a obtenu les éléments et documents suivants de la part de la Police provinciale entre le 23 avril 2021 et le 10 mai 2021 :
• enregistrement des communications;
• chronologie des événements;
• données de systèmes GPS (5)
• notes de l’AI no 2;
• notes de l’AT no 3;
• notes de l’AT no 1;
• notes de l’AT no 2;
• notes de l’AI no 1;
• système de répartition assistée par ordinateur – chronologie des événements;
• courriel de la Police provinciale daté du 23 avril 2021 indiquant qu’aucune donnée sur les collisions n’a été récupérée du véhicule concerné;
• rapport d’incident général.

Description de l’incident

Il est possible d’établir clairement les principaux événements qui se sont produits au moyen des éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment une entrevue avec le plaignant; de même, on peut résumer le tout rapidement. Comme la loi les y autorise, les agents impliqués ont choisi de ne pas participer à une entrevue avec l’UES. Ils ont toutefois fourni une copie de leurs notes.

Vers 9 h 20 le 12 avril 2021, l’AI no 2 était à bord de son véhicule dans la municipalité d’Alfred et surveillait la RC 17 en vue de relever toute infraction au Code de la route. Il a vu deux véhicules utilitaires sport (VUS) blancs conduits par des jeunes circulant en direction est et a décidé de les suivre. L’agent a fait une recherche au moyen du numéro d’immatriculation de l’un des véhicules dans les dossiers de la police et a appris qu’on avait signalé le vol de ce véhicule. L’AI no 2 a alors demandé de l’aide par radio et a commencé à poursuivre les VUS dans le but de les arrêter.

Les deux VUS avaient effectivement été volés. Celui dont l’AI no 2 avait confirmé le vol était un Toyota 4Runner. L’autre VUS était un Toyota Highlander. Il était conduit par le plaignant.

L’AI no 1 et l’AT no 1 ont entendu la demande d’aide et se sont rendus, dans des véhicules distincts, vers le lieu de la poursuite, en direction ouest, depuis les installations du Détachement de Hawkesbury de la Police provinciale. Ils ont arrêté leurs véhicules à l’est du dernier emplacement signalé par l’AI no 2 et les ont orientés vers l’est. Lorsque les VUS se sont approchés, suivis du véhicule de l’AI no 2, les agents ont commencé à circuler lentement sur la route.

Le plaignant et le conducteur du 4Runner ont brièvement ralenti derrière les véhicules de l’AT no 1 et de l’AI no 1, avant d’accélérer et de les dépasser par la voie en direction ouest. Les véhicules qui circulaient alors en direction ouest ont été forcés de se placer sur l’accotement pour éviter une collision frontale avec les VUS.

L’AT no 3 et l’AT no 2 avaient également entendu l’appel à l’aide et se sont dirigés vers l’ouest, depuis Hawkesbury, vers le lieu de la poursuite. Par la radio, les agents ont appris que la tentative de bloquer les VUS avait échoué, que les véhicules circulaient toujours vers l’est et que des agents étaient derrière eux. Tout juste à l’ouest de la RC 11, les agents ont arrêté leurs véhicules et ont décidé de déployer des herses cloutées sur les deux voies en direction est. Environ au même moment, un sergent qui surveillait la poursuite depuis le Centre de communication a demandé aux agents de cesser celle-ci.

Le plaignant et le conducteur du 4Runner ont encore une fois dévié dans les voies en direction ouest, cette fois pour éviter les herses cloutées. Ils ont continué à circuler à des vitesses nettement supérieures à la limite de 90 km/h en direction est, sur la RC 17. Lorsqu’ils se sont approchés de l’intersection de la RC 4, les véhicules ont de nouveau dévié dans la voie en direction ouest pour dépasser un semi remorque, avant de revenir dans la voie en direction est derrière un camion à benne, évitant de justesse une collision avec un véhicule circulant en sens inverse. Peu après, ils se sont engagés sur l’accotement de gravier de la voie en direction est pour dépasser le camion à benne, ce qui a soulevé de la poussière et des débris et forcé le conducteur du semi remorque se trouvant derrière eux à s’arrêter sur l’accotement.

Tout juste à l’ouest de l’intersection de la RC 4, le plaignant a perdu le contrôle du Highlander, et le véhicule a fait plusieurs tonneaux avant de s’immobiliser sur le côté conducteur dans le fossé sud de la RC 17. Le plaignant est sorti du véhicule, a traversé la RC 17 et a tenté de fuir les lieux. Il a subi une fracture à une côte lors de la collision.

Une ou deux minutes après l’accident, les premiers véhicules de la Police provinciale qui avaient poursuivi les VUS sont arrivés sur les lieux. Des civils qui se trouvaient sur les lieux ont pointé dans la direction du plaignant, et celui-ci a rapidement été arrêté par les agents, sans incident.

Dispositions législatives pertinentes

Article 320.13, Code criminel – Conduite dangereuse de véhicules à moteur, d’un bateau ou d’un aéronef

320.13 (1) Commet une infraction quiconque conduit un moyen de transport  d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances.

(2) Commet une infraction quiconque conduit un moyen de transport d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, et cause ainsi des lésions corporelles à une autre personne.

(3) Commet une infraction quiconque conduit un moyen de transport d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, et cause ainsi la mort d’une autre personne.
 

Analyse et décision du directeur

Le 12 avril 2021, le plaignant a subi une blessure grave dans une collision de véhicule survenue juste après une brève poursuite engagée par des agents de la Police provinciale. Deux des agents ayant participé à la poursuite – l’AI no 2 et l’AI no 1 – ont été désignés comme agents impliqués aux fins de l’enquête de l’UES. Après avoir examiné les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’un ou l’autre de ces agents a commis une infraction criminelle relativement à la poursuite et à la collision.

L’infraction possible à l’étude est la conduite dangereuse causant des lésions corporelles aux termes du paragraphe 320.13(2) du Code criminel. L’infraction est fondée, en partie, sur une conduite constituant un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans les mêmes circonstances. Dans l’affaire qui nous concerne, la question est de savoir s’il y a eu un manque de diligence dans la manière dont l’AI no 2 et l’AI no 1 sont intervenus auprès du plaignant qui a causé la collision ou qui y a contribué et/ou qui était suffisamment grave pour justifier des sanctions criminelles. À mon avis, ce n’est pas le cas.

L’AI no 2 et l’AI no 1 exerçaient leurs fonctions légitimes lorsqu’ils ont chacun pris des mesures pour tenter d’arrêter le plaignant. Le plaignant conduisait un véhicule volé et les agents avaient des motifs de croire qu’il avait commis une infraction criminelle.

En outre, je suis convaincu que les agents ont tenu dûment compte de la sécurité publique. La décision de tenter de bloquer le véhicule, une tactique selon laquelle des véhicules de police encerclent un véhicule pour qu’il ralentisse graduellement, puis s’arrête, n’était pas déraisonnable dans les circonstances. Aucun élément de preuve n’indique que le plaignant conduisait de façon imprudente avant cet incident, ce qui a pu donner aux agents une bonne raison de croire que cette tactique était sécuritaire; de même, il y avait relativement peu de circulation. Ce n’est qu’après l’échec de la tentative de blocage, alors que les VUS ont dévié dans les voies en sens inverse et ont accéléré pour atteindre des vitesses très excessives, qu’il est devenu évident que le plaignant n’avait pas l’intention de s’arrêter et qu’il était prêt à conduire de façon dangereuse pour échapper aux agents. L’AI no 2 et l’AI no 1 ont accéléré pour poursuivre les VUS, atteignant des vitesses dépassant 140 km/h, mais un agent supérieur qui surveillait la poursuite depuis le Centre de communication leur a rapidement ordonné de s’arrêter. Pendant cette courte poursuite, de 30 à 60 secondes au maximum, il semble qu’aucune tierce partie n’ait été mise en danger par la vitesse des agents. À mon avis, la décision de faire cesser la poursuite était sage, puisque l’infraction en question concernant des biens et qu’il était devenu évident que les conducteurs des VUS conduisaient de manière dangereuse. Malheureusement, même après avoir évité les herses cloutées, alors qu’il était clair aussi que les agents étaient très loin d’eux, les conducteurs des VUS ont continué de circuler de manière dangereuse et à grande vitesse. Le plaignant s’est engagé sur l’accotement de gravier du côté sud de la route et a perdu le contrôle du Highlander, qui a fait des tonneaux; le plaignant a subi une blessure grave dans cet accident. Puisque les agents avaient cessé la poursuite et qu’ils sont donc arrivés sur les lieux de la collision seulement une ou deux minutes après celle-ci, rien n’indique qu’ils auraient causé la collision ou y auraient contribué. De même, aucun élément de preuve n’indique que les agents ont traité le plaignant de manière inappropriée pendant son arrestation et par la suite, après l’incident.

En conclusion, puisqu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’un ou l’autre des agents impliqués a enfreint les limites de diligence prescrites par le droit criminel, il n’y a aucun motif de porter des accusations criminelles dans cette affaire. Le dossier est clos.


Date : 6 août 2021

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.