Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 20-OFI-289

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (« LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :
  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
  • le nom de tout agent impliqué;
  • le nom de tout agent témoin;
  • le nom de tout témoin civil;
  • les renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel lié à la santé de personnes identifiables. 

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Le rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur les blessures graves subies par un homme de 31 ans (plaignant).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 31 octobre 2020, à 15 h 45, le Service de police de Timmins a signalé qu’à 1 h 41, à la même date, des agents avaient été dépêchés en réponse à un appel signalant une introduction par effraction dans une résidence de l’avenue Commercial, à Timmins. Lorsque l’agent témoin (AT) no 2 et l’agent impliqué (AI) sont arrivés sur les lieux, ils ont vu deux hommes monter à bord d’un véhicule conduit par une femme. Le véhicule s’est enfui, mais les agents l’ont intercepté à l’intersection de la rue Rea et de l’avenue Bannerman. Les deux agents sont sortis de leur voiture pour s’occuper des deux hommes. L’un des hommes s’est mis à se battre avec l’AI, et l’AT no 2 est allé lui prêter assistance.

Pendant que l’AT no 2 approchait, l’homme qui se battait avec l’AI a sorti une arme à feu et a tiré deux coups en direction de l’AT no 2. L’AI a alors fait feu sur l’homme et l’a atteint au ventre.

Une ambulance est arrivée et a conduit l’homme à l’Hôpital de Timmins et du district. Il a par la suite été transféré à l’hôpital Horizon Santé-Nord de Sudbury. L’homme en question a été désigné comme le plaignant.

Le deuxième suspect s’est échappé. La Police provinciale de l’Ontario a été appelée à la rescousse pour les recherches visant à retrouver l’inconnu.

La femme a été identifiée comme témoin civil (TC).

Les lieux ont été bouclés.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 5
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 2

Plaignant :

Homme de 31 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés


Témoin civil

TC A participé à une entrevue

Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue



Agent impliqué

AI N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué. Ses notes ont été reçues et examinées.



Éléments de preuve

Les lieux

L’incident est survenu du côté ouest de la rue Rea, juste au nord de l’intersection avec l’avenue Bannerman.

La rue Rea était dans un axe nord-sud, tandis que l’avenue Bannerman était dans un axe est-ouest. Il n’y avait aucune trace sur la route, que ce soit sur la rue Rea ou sur l’avenue Bannerman. Des panneaux d’arrêt obligatoire se trouvaient sur l’avenue Bannerman. Les conditions météorologiques étaient les suivantes : le temps était nuageux et sec, avec une température de 1 ºC. Il y avait de la neige sur le bord des routes revêtues et sur les trottoirs.

Quatre véhicules étaient en cause et ils se trouvaient sur la rue Rea.

Le véhicule no 1 était une Nissan Kicks noire avec quatre portières. Il était stationné le long de la bordure ouest de la route, face vers le sud. Les portières avant du côté conducteur et du côté passager étaient ouvertes, et la glace du côté conducteur était complètement descendue. La glace avant du côté passager était baissée de quelques centimètres.

Le véhicule no 2 était une Dodge Charger noire à quatre portières. Il était pleinement identifié comme une voiture du Service de police de Timmins et était stationné du côté sud de la rue Rea, au nord-est du véhicule no 1.

Le véhicule no 3, une camionnette d’intervention de la police de marque Ford, était noir et était aussi muni de quatre portières. Il était pleinement identifié comme voiture du Service de police de Timmins et était immobilisé sur la rue Rea, au milieu de la route, face vers le nord-ouest, au sud-est du véhicule no 1.

Le véhicule no 4 était une Ford F-150, une camionnette rouge à quatre portières. Personne ne se trouvait à bord et il était stationné le long de la bordure ouest de la rue Rea, face au sud, directement au nord du véhicule no 1.

Plusieurs objets utiles pour l’enquête ont été retrouvés sur le sol dans le secteur, notamment :
• un pistolet noir Ruger sur le trottoir du côté ouest, au sud du véhicule no 1 (pièce no 1);
• la pièce no 2 était une tache rouge, sur le trottoir du côté ouest, juste au nord de la pièce no 1;
• la pièce no 3 était une douille en cuivre sur le trottoir du côté ouest de la rue Rea, juste à l’ouest de la portière arrière du côté passager du véhicule no 1;
• la pièce no 4 était une autre douille en cuivre sur le trottoir du côté ouest de la rue Rea, juste au nord-ouest du coin arrière côté passager du véhicule no 1;
• la pièce no 5 était un blindage de balle logé dans le bas de la portière avant, du côté passager, du véhicule no 2, une voiture du Service de police de Timmins;
• la pièce no 6 était une douille argent de calibre .40 trouvée sur le sol, sur le bord de la roue arrière du côté conducteur du véhicule no 4;
• la pièce no 7 était une douille argent de calibre .40 reposant sur le sol sur le coin arrière du côté passager du véhicule no 2 du Service de police de Timmins.

Divers autres objets se trouvaient sur le sol autour des véhicules nos 1 et 4. Il y avait notamment de l’argent canadien, trois téléphones cellulaires ainsi qu’une paire de menottes, des gants noirs, un chargeur de téléphone cellulaire, deux briquets et des pièces endommagées de calandre provenant de l’avant du véhicule no 4.

Un petit immeuble d’habitation se trouvait sur le coin sud-est de l’intersection de la rue Rea et de l’avenue Bannerman. On a trouvé dans le revêtement de vinyle du mur nord de l’immeuble un trou d’entrée de projectile [fn]1]/fn], qui a été photographié et mesuré.

Des mesures suffisantes pour établir un schéma des lieux ont été prises, et les lieux ont été filmés et photographiés.

Les objets utiles pour l’enquête cités ci-dessus ont été recueillis et un échantillon de la tache rouge sur le trottoir a été prélevé par écouvillonnage.

Le 31 octobre 2020, à 18 h 5, le Service de police de Timmins a libéré les lieux.


Schéma des lieux


Éléments de preuve matériels

Le 31 octobre 2020, à 18 h 20, les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES se sont rendus au poste du Service de police de Timmins. L’arme à feu de l’agent impliqué, un pistolet Glock 22 de quatrième génération, a été recueillie et photographiée. Les deux chargeurs additionnels contenaient chacun quinze balles, alors que celui qui était inséré dans l’arme à feu en contenait treize. Le ceinturon de service de l’agent témoin a été photographié; toutefois, l’équipement avait été préalablement retiré et rangé en lieu sûr. Les seules pièces d’équipement du ceinturon étaient une matraque et un vaporisateur de poivre de Cayenne.

Le 1er novembre 2020, à 9 h, le Service de police de Timmins a remis aux enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES un grand sac scellé devant contenir tous les vêtements du plaignant récupérés à l’hôpital. Deux autres sacs scellés également remis aux enquêteurs contenaient des articles retrouvés après le départ du plaignant de l’hôpital, notamment un masque de protection contre la COVID-19.

Le 2 novembre 2020, à 16 h 40, un enquêteur spécialiste des sciences judiciaires de l’UES s’est présenté à l’hôpital Horizon Santé-Nord de Sudbury, où on lui a remis un projectile sous scellés. Ce projectile aurait été retiré chirurgicalement du plaignant.

Le 13 novembre 2020, à 13 h 24, certains éléments de preuve ont été soumis au Centre des sciences judiciaires aux fins d’analyse.



Figure 1 – Le pistolet Glock 22 de l’AI


Figure 2 – Le pistolet Ruger du plaignant

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou photographiques

Rapport d’enregistrement des caméras internes des voitures de police pour le 31 octobre 2020

Des enregistrements vidéo pour trois voitures du Service de police de Timmins ont été reçus. Ces véhicules avaient été conduits par l’AT no 1, l’AI et l’AT no 2 le 31 octobre 2020 entre 1 h et 2 h. Les caméras internes des voitures de police ont enregistré tous les déplacements de ces véhicules, leurs coordonnées GPS, les données du GPS sur la vitesse ainsi que l’activation des gyrophares, des freins, des sirènes et des microphones, avec la date et l’heure.

Enregistrement vidéo de la voiture de police de l’AI


À 1 h 29 min 7 s, l’AI conduisait une voiture pleinement identifiée du Service de police de Timmins, une Dodge Charger, en direction ouest, sur l’avenue Commercial, en direction de la rue Rea. L’AI a ralenti à l’intersection de la rue Rea avant de tourner soudainement vers le sud sur cette rue.

À 1 h 29 min 44 s, les feux de freinage, puis les phares d’un véhicule [maintenant identifié comme un véhicule Nissan] stationné du côté ouest de la rue Rea, juste au nord de l’avenue Bannerman, se sont allumés. Le véhicule était stationné devant une camionnette Ford F-150 rouge.

À 1 h 30 min 5 s, l’AI a traversé l’avenue Bannerman, a immédiatement effectué un virage en trois temps, puis a roulé sur la rue Rea vers le nord en dépassant la Nissan. Par la suite, il a fait demi-tour et s’est arrêté juste au nord du véhicule Nissan, à côté de la camionnette Ford F-150 rouge. Les gyrophares n’étaient pas activés.

À 1 h 31 min, l’AI est passé devant sa voiture de police pour s’approcher de la portière de la conductrice du véhicule Nissan.

À 1 h 31 min 19 s, les feux de freinage du véhicule Nissan se sont allumés et celui-ci s’est mis à rouler vers le sud. L’AI se trouvait à environ un mètre de la portière du côté conducteur, dont il éclairait la glace à l’aide de sa lampe de poche. Les feux de freinage de la Nissan se sont rallumés quand celle-ci s’est brusquement arrêtée. La glace du côté conducteur s’est ouverte, et l’AI s’est penché vers l’intérieur du véhicule.

À 1 h 31 min 32 s, l’AT no 2 s’est approché sur la rue Rea en direction sud. Il s’est arrêté à côté de la Nissan, à une voiture de distance, avant de faire demi-tour et de positionner son véhicule face au nord, juste au sud de la Nissan. L’AI se trouvait encore à côté de la portière de la voiture, du côté conducteur, et prenait des documents remis par la conductrice. L’AI s’est rendu à la voiture de police de l’AT no 2 pour parler avec celui-ci. L’AI est reparti vers le véhicule Nissan pendant que l’AT no 2 déplaçait son véhicule pour le positionner à 45 degrés par rapport au véhicule Nissan. Ses phares étaient pointés vers celui-ci.

À 1 h 33 min 8 s, l’AT no 2 est sorti de sa voiture de police et s’est dirigé vers le côté passager de la Nissan. L’AI se tenait à trois mètres à l’est du coin arrière du côté conducteur de la Nissan et parlait à sa radio de police. L’AT no 2 a éclairé le siège avant, du côté passager, de la Nissan avec sa lampe de poche, et l’AI s’est approché de la portière du côté conducteur de sa voiture de police. L’AI est ensuite passé devant sa voiture de police et s’est rendu à la portière arrière, du côté passager, du véhicule Nissan avec l’AT no 2.

À 1 h 35 min 35 s, l’AT no 2 a parlé avec le passager à l’avant de la Nissan. Pendant ce temps, l’AI a contourné sa voiture de police, s’est approché de la portière arrière du côté conducteur du véhicule Nissan et a ouvert celle-ci.

À 1 h 35 min 48 s, l’AI a replacé sa lampe de poche dans sa veste, puis a sorti ses menottes.

À 1 h 35 min 53 s, l’AI s’est dirigé vers la portière arrière du côté conducteur, qui était ouverte, et a tendu la main gauche vers le passager de la banquette arrière [maintenant identifié comme le plaignant]. Le pied gauche du plaignant est sorti du véhicule Nissan.

À 1 h 35 min 55 s, un inconnu qui se trouvait sur le siège avant, du côté passager, est sorti de la Nissan. L’AI semblait empêcher le plaignant de sortir de l’arrière du véhicule. On voyait le plaignant tendre la main vers le cadre de la portière. Le passager inconnu sorti par en avant est passé devant le véhicule Nissan, en courant vers l’est, en tenant fermement avec la main gauche sa veste contre sa taille. Il est allé derrière la camionnette de police de l’AT no 2, en direction sud sur la rue Rea, puis en direction est sur l’avenue Bannerman. Le plaignant a lutté avec l’AI et a tenté de sortir du véhicule Nissan pendant que l’AI tentait de l’en empêcher. La main gauche du plaignant se trouvait alors sur la hanche gauche de l’AI.

À 1 h 36 min 2 s, le plaignant et l’AI se trouvaient torse contre torse. Le plaignant serrait la partie supérieure des bras de l’AI. Les deux hommes étaient encore dans le cadre de la portière arrière de la Nissan. L’AT no 2 est accouru en contournant l’avant du véhicule Nissan, tout en signalant à l’AT no 1, à l’aide de sa lampe de poche, de suivre l’inconnu. L’AT no 1 s’est donc dirigé dans sa voiture vers le sud sur la rue Rea. L’AI a continué de lutter avec le plaignant, qui était clairement plus grand que l’AI et de poids égal ou supérieur.

À 1 h 36 min 5 s, l’AT no 2 s’est servi de sa main droite (qui tenait sa lampe de poche) pour donner un coup à la tête et au visage du plaignant. Celui-ci a semblé tenter d’escalader la Nissan pour s’échapper en traversant le toit.

À 1 h 36 min 8 s, le plaignant était sur le cadre de la portière du véhicule et il a tendu le bras droit au-dessus de la portière pour donner un coup sur la tête de l’AT no 2. L’AI a frappé quatre fois le plaignant à l’arrière de la tête avec sa main droite, tout en continuant de tenir les menottes. L’AT no 2 a frappé trois fois le plaignant à la tête avec sa main droite pendant que ce dernier grimpait sur le véhicule.

À 1 h 36 min 18 s, le plaignant a battu en retraite en longeant le véhicule Nissan. Un objet métallique est alors tombé de l’endroit où se trouvait la main droite de l’AI, est rebondi sur la jambe du plaignant et s’est retrouvé sur la route. (Une paire de menottes a plus tard été retrouvée sur le sol près de cet endroit.) L’AI était à la droite du plaignant, et l’AT no 2 se trouvait derrière lui. Le plaignant s’est retourné vers l’AT no 2. Pendant que les trois hommes étaient en train de sortir du champ de la caméra, l’AI semblait sur le point de dégainer son pistolet de service avec sa main droite.

À 1 h 36 min 19 s, le plaignant et l’AT no 2 ont percuté l’avant de la camionnette Ford F 150 rouge, puis l’AT no 2 s’est élancé vers le côté de la voiture de police de l’AI.

À 1 h 36 min 21 s, le plaignant s’est mis à courir en direction sud sur le trottoir ouest et, arrivé au coin arrière du côté passager du véhicule Nissan, il s’est raidi et est tombé au sol face première.

À 1 h 36 min 22 s, l’AT no 2 tendait le bras vers le côté de la voiture du Service de police de Timmins tout en tombant dans sa direction.

À 1 h 36 min 31 s, l’AT no 2 s’est éloigné du côté passager de la voiture de police de l’AI en tenant à deux mains son pistolet pointé sur le plaignant.

À 1 h 36 min 43 s, l’AT no 1, avec ses gyrophares activés, est tourné à droite sur la rue Rea à partir de l’avenue Bannerman. Il s’est arrêté derrière la camionnette de police de l’AT no 2. L’AT no 1 s’est alors rendu du côté passager du véhicule Nissan. L’AT no 1 se trouvait sur le trottoir ouest du côté passager de la camionnette Ford F-150 et tenait son pistolet à deux mains.

À 1 h 37 min 8 s, l’AI tenait son pistolet de service dans sa main droite. Arrivant de derrière le véhicule Nissan, il s’est arrêté devant sa voiture de police et a parlé à la radio de police portative. L’AI a ensuite rengainé son pistolet et s’est approché de l’AT no 1, qui a examiné sa veste à l’aide de sa lampe de poche avant de retourner du côté passager de la Nissan. L’AI a ouvert la portière de la conductrice, a sorti la TC de la Nissan et l’a amenée vers l’arrière de la voiture de police de l’AI. La TC a été menottée et installée sur la banquette arrière de la voiture de police de l’AI.

À 1 h 43 min 50 s, une ambulance est arrivée sur les lieux.

Enregistrement vidéo de la voiture de police de l’AT no 2

À 1 h 31 min 17 s, l’AT no 2 conduisait sa camionnette Ford du Service de police de Timmins, une voiture de police pleinement identifiée, sur la rue Rea Sud, en direction sud. La voiture de police de l’AI était arrêtée à côté d’une camionnette Ford F-150 rouge, et une petite voiture de couleur sombre [maintenant identifiée comme un véhicule Nissan] était stationnée devant la camionnette. Les gyrophares de la voiture de l’AI n’étaient pas allumés. Les phares avant et les feux arrière étaient allumés, et l’AI se trouvait à côté de la portière du côté conducteur de la Nissan. L’AT no 2 a dépassé les véhicules arrêtés avant de faire demi-tour vers la droite à l’intersection de l’avenue Bannerman et de la rue Rea, puis de se diriger vers le nord sur la rue Rea.

À 1 h 32 min 5 s, l’AT no 2 s’est arrêté sur la rue Rea, puis a reculé pour positionner son véhicule parallèlement à la Nissan, à environ six mètres au sud de la voiture de l’AI. L’AT no 2 a reculé, puis s’est repositionné à un angle de 45 degrés face à la Nissan. Les gyrophares de sa voiture et de la voiture de l’AI n’étaient pas activés.

À 1 h 33 min 14 s, l’AT no 2 s’est approché du côté passager du véhicule Nissan et a éclairé la glace de la portière avant, du côté passager, avec sa lampe de poche. Il a ainsi éclairé l’inconnu qui se trouvait à l’intérieur. L’AI se tenait à côté de la portière arrière du côté passager du véhicule Nissan. La conductrice était encore assise dans le véhicule et sa glace était descendue. L’AT no 2 a examiné la banquette arrière du véhicule, et l’inconnu assis à l’avant, du côté passager, a réagi à des paroles de l’AT no 2. Il a levé les deux mains à la hauteur des épaules, paumes vers l’avant, avant de les remettre sur ses cuisses. L’AT no 2 a éclairé la banquette arrière du véhicule, où une troisième personne [maintenant identifiée comme le plaignant] se trouvait.

À 1 h 33 min 34 s, le plaignant a semblé retourner quelque chose sur la banquette arrière pendant que l’AT no 2 regardait. L’AI est passé derrière le véhicule Nissan et a rejoint l’AT no 2 sur le trottoir ouest, derrière la Nissan. Les deux agents ont discuté.

À 1 h 35 min 33 s, l’AT no 2 a tendu la main vers la poignée de la portière du passager, à l’avant, pendant que l’AI contournait l’arrière du véhicule pour ouvrir la portière arrière du côté conducteur. Les deux agents avaient une lampe de poche à la main.

À 1 h 35 min 44 s, l’AI, qui tenait sa lampe de poche dans sa main droite, l’a éteinte et a regardé vers le bas, en direction de sa veste. L’AI, qui était incliné vers l’avant, à partir de la taille, a tendu le bras vers la banquette arrière, puis a semblé lutter avec le plaignant. L’homme sur le siège passager avant est sorti de la Nissan et a fait face à l’AT no 2. Il s’est ensuite lentement tourné vers le sud avant de se mettre à courir en direction sud. Le plaignant a tenté de sortir de l’arrière du véhicule alors que l’AI essayait de le maintenir à l’intérieur. L’AT no 1 a conduit sa voiture du Service de police de Timmins en direction sud sur la rue Rea, à partir de l’avenue Commercial.

À 1 h 36 min 3 s, l’AT no 2 a contourné l’avant de la Nissan pour poursuivre l’inconnu en fuite. Cependant, l’AI a retenu son attention. Le plaignant est sorti de la voiture par la portière arrière du côté conducteur, et l’AT no 2 s’est tourné vers cette portière et, à l’aide de sa lampe de poche, qu’il tenait de la main droite, il a fait signe à l’AT no 1 de suivre l’homme en fuite.

À 1 h 36 min 6 s, l’AT no 2, se servant de sa main droite, a frappé le plaignant à la tête par-dessus la portière arrière du côté conducteur pendant que l’AI continuait de lutter avec le plaignant. Celui-ci était face au véhicule, pendant qu’il se trouvait encore dans le cadre de la portière ouverte, et avait les mains sur le toit de la Nissan. L’AI se trouvait derrière le plaignant et l’AT no 2, à sa gauche, de l’autre côté de la portière. Le plaignant s’est servi de sa main droite pour frapper l’AT no 2 à l’épaule gauche et au cou.

À 1 h 36 min 10 s, le plaignant a mis la main droite dans sa veste pour tenter d’en sortir quelque chose. L’AI a donné trois coups avec la main droite pendant que le plaignant essayait de sortir quelque chose de la poche de sa veste.

À 1 h 36 min 16 s, l’AT no 2 a donné deux ou trois coups rapides en direction du plaignant tout en tenant sa lampe de poche. Le torse du plaignant se trouvait au niveau du toit du véhicule. Le plaignant s’est déplacé vers le nord, en longeant la Nissan, pour échapper aux coups de l’AT no 2, tandis que l’AI se trouvait encore derrière lui. L’AT no 2 a fermé la portière et l’a suivi. Le plaignant était incliné à la hauteur de la taille, vers l’ouest. L’AT no 2 s’est précipité vers le côté gauche du plaignant, et celui-ci s’est tourné vers sa gauche. À ce stade, il faisait face à l’AT no 2 et l’AI était à sa gauche.

À 1 h 36 min 19 s, le plaignant était dos à la camionnette Ford F-150 et avait à la main droite un objet (maintenant identifié comme un pistolet). L’AT no 2 s’est jeté vers lui pendant que l’AI se déplaçait vers le nord en longeant le côté de la camionnette Ford. Des débris sont tombés au sol à partir du devant de la camionnette (on a constaté plus tard que c’était des morceaux d’une calandre défoncée). Le plaignant s’est déplacé vers sa droite, pour passer entre les véhicules et se diriger vers le trottoir du côté ouest. L’AT no 2 faisait face au plaignant et se penchait vers la gauche en tentant d’éviter quelque chose. Par la suite, il a trébuché et est tombé à reculons sur le côté de la voiture de police de l’AI. Sa lampe de poche a été projetée dans les airs avant d’atterrir sur le capot de la camionnette Ford.

À 1 h 36 min 21 s, l’AI s’est arrêté, s’est retourné et a fait feu deux fois sur le plaignant avec son pistolet de service pendant que celui-ci se trouvait sur le trottoir ouest près de l’arrière du véhicule. Au final, le plaignant s’est immobilisé et est tombé au sol face première. Il a roulé vers la droite et a levé les mains pour indiquer qu’il se rendait pendant que l’AT no 2 se dirigeait vers lui en brandissant son pistolet.

À 1 h 37 min 6 s, l’AT no 1 s’est approché et a passé les menottes au plaignant derrière son dos. L’AT no 1 a examiné la veste de l’AI pour voir s’il y avait des dégâts, puis celle de l’AT no 2. L’AI a fait sortir la TC du siège du conducteur du véhicule Nissan, puis l’a installée sur la banquette arrière de sa voiture de police.

Enregistrement vidéo de la voiture de police de l’AT no 1

À 1 h 35 min 52 s, la voiture de police conduite par l’AT no 1 roulait vers le sud sur la rue Rea pendant qu’une Dodge Charger du Service de police de Timmins [maintenant identifiée comme la voiture de police de l’AI] était stationnée du côté ouest de la route. La voiture de police de l’AI avait les phares allumés, mais ses gyrophares n’étaient pas activés. Une camionnette Ford rouge était stationnée à sa droite.

À 1 h 35 min 56 s, une camionnette identifiée du Service de police de Timmins [maintenant identifiée comme la camionnette de police de l’AT no 2] était immobilisée face au nord-ouest. Ses phares étaient allumés, mais pas ses gyrophares. La camionnette de police de l’AT no 2 se trouvait juste au nord de l’avenue Bannerman. Un agent [maintenant identifié comme l’AI] était près de la portière arrière du côté conducteur d’une voiture [maintenant identifiée comme étant de marque Nissan] stationnée devant la camionnette Ford.

À 1 h 36 min 3 s, un inconnu aux vêtements de couleur sombre a couru vers le sud sur la rue Rea, puis vers l’est, sur l’avenue Bannerman, en passant près de l’arrière de la camionnette de l’AT no 2.

À 1 h 36 min 4 s, l’AT no 2 s’est déplacé de l’avant du véhicule Nissan vers la portière arrière, du côté conducteur, qui était ouverte, et avec sa lampe de poche, il a fait signe à l’AT no 1 de suivre l’inconnu, qui s’était sauvé vers l’est sur l’avenue Bannerman.

À 1 h 36 min 13 s, l’AT no 1 roulait en direction est sur l’avenue Bannerman. L’inconnu n’était plus en vue. L’AT no 1 a fait demi-tour pour retourner là où se trouvaient l’AI et l’AT no 2.

À 1 h 36 min 46 s, l’AT no 1 s’est stationné derrière le véhicule de l’AT no 2 et a activé ses gyrophares. L’AI est sorti de derrière le véhicule Nissan et s’est rendu jusqu’au centre de la rue. On l’entendait parler à la radio de police : il indiquait qu’une personne s’était enfuie à pied et il demandait une unité canine.

À 1 h 37 min 36 s, l’AT no 1 s’est approché de l’AI et a vérifié son état avant de retourner du côté passager de la Nissan.

À 1 h 38 min 10 s, l’AI s’est rendu à la portière de la Nissan, du côté conducteur, et a fait sortir la TC. Celle-ci a été menottée, puis installée à l’arrière de la voiture de police de l’AI.

Enregistrement d’une caméra de surveillance d’une résidence de la rue Rea Sud

Les enquêteurs de l’UES ont ratissé le secteur où a eu lieu l’incident, à la recherche de témoins et d’enregistrements de caméras de surveillance. L’enregistrement de la caméra de surveillance d’une résidence de la rue Rea Sud a été obtenu. Il était de piètre qualité, en raison des reflets des phares de voitures. De plus, il n’y avait pas le son.

Le 31 octobre 2020, à 1 h 27 min 33 s, trois personnes ont marché de l’avenue Commercial jusqu’à la rue Rea Sud. Elles ont dépassé une voiture noire avec une plaque d’immatriculation de l’Ontario.

À 1 h 28 min 34 s, trois personnes ont marché rapidement vers le véhicule Nissan noir stationné et sont montées à bord.

À 1 h 29 min 27 s, la conductrice a allumé les phares de la Nissan noire six fois, avant de les éteindre.

À 1 h 29 min 43 s, une voiture du Service de police de Timmins roulait en direction sud sur la rue Rea, au sud de l’avenue Commercial. Les phares de la Nissan noire étaient allumés.

À 1 h 30 min 2 s, une voiture du Service de police de Timmins est tournée sur l’avenue Bannerman et s’est dirigée vers le nord jusqu’à la rue Rea Sud. La voiture de police a dépassé le véhicule Nissan noir avant de faire demi-tour à l’avenue Commercial et de se diriger vers le sud sur la rue Rea Sud. La voiture de police s’est stationnée près de l’arrière de la Nissan noire, du côté passager.

À 1 h 31 min 22 s, une camionnette F-150 du Service de police de Timmins s’est dirigée vers le sud sur la rue Rea Sud et a fait demi-tour sur l’avenue Bannerman. La camionnette s’est stationnée à un angle de 45 degrés par rapport au véhicule Nissan noir, face à celui-ci.

À 1 h 35 min 50 s, une autre voiture du Service de police de Timmins se dirigeant vers le sud sur la rue Rea Sud s’est stationnée près de la première voiture de police.

À 1 h 36 min 16 s, on a pu voir deux éclairs blancs (vraisemblablement des coups de feu) provenant du côté ouest du véhicule Nissan noir stationné.

À 1 h 36 min 41 s, une voiture du Service de police de Timmins se dirigeait vers l’ouest sur l’avenue Bannerman. Elle est ensuite tournée en direction nord sur la rue Rea Sud, avec ses feux clignotants activés. Elle s’est stationnée juste après la camionnette F 150.

À 1 h 39 min 58 s, deux agents du Service de police de Timmins se trouvaient sur le trottoir près du coin de l’avenue Bannerman.

Enregistrements des communications de la police

Appel au 911

À 1 h 25, le 31 octobre 2020, un homme a appelé la police pour signaler que quelqu’un était en train de s’introduire par effraction dans son logement, situé sur l’avenue Commercial. L’homme était seul chez lui. Personne d’autre ne vivait là et les portes étaient verrouillées. Il a indiqué qu’une personne qu’il ne connaissait pas avait lancé une bouteille de bière sur la fenêtre latérale de son logement, ce qui l’avait fracassée. L’homme ne savait pas s’il y avait des armes en cause.

À 1 h 27, des agents sont arrivés sur les lieux. L’homme et le centre de répartition ont alors raccroché.

Enregistrements des communications du Service de police de Timmins

Le 31 octobre 2020, à 1 h 25, le Service de police de Timmins a reçu un appel au 911 pour une introduction par effraction à une résidence de l’avenue Commercial. L’AI a vu quelqu’un s’éloigner de la résidence en courant avant l’appel et a examiné le secteur. Il a commencé à parler avec les occupants d’un véhicule [maintenant identifié comme une Nissan Kicks] qui était stationné sur la rue Rea. La conductrice du véhicule était la TC.

Les agents ont tenté à plusieurs reprises de faire sortir deux hommes de la Nissan. L’AI et l’AT no 2 ont dû lutter pour sortir le plaignant de l’arrière du véhicule.

À 1 h 36 min 24 s, l’AI a crié [Traduction] : « Des coups de feu ont été tirés! Des coups de feu ont été tirés! » Le plaignant avait tiré à deux reprises en direction de l’AI et de l’AT no 2.

À 1 h 37 min 20 s, l’AI a demandé un silence radio parce qu’un suspect s’était sauvé à pied en direction est sur l’avenue Bannerman.

À 1 h 37 min 55 s, une ambulance a été demandée sur les lieux.

À 1 h 38 min 9 s, l’AI a signalé que le plaignant avait été atteint par une balle à l’abdomen. Une description de l’inconnu en fuite a été fournie. Une unité canine et l’établissement d’un périmètre de sécurité ont été demandés. Une ambulance a été appelée sur les lieux.

À 1 h 47 min 19 s, le véhicule Nissan et les lieux avaient été bouclés.

À 1 h 55 min 36 s, le plaignant a été transporté à l’Hôpital de Timmins et du district.

Éléments de preuves médicolégaux

Liste de ce qui a été remis au Centre des sciences judiciaires et résultats

L’examen des armes à feu et des éléments de preuve balistiques remis au Centre des sciences judiciaires a abouti aux conclusions suivantes :

• Deux douilles argent de calibre .40 ayant été récupérées provenaient du pistolet Glock de l’AI.
• Le fragment de blindage de balle logé dans la portière avant du côté passager de la voiture de police ne provenait pas du pistolet Glock de l’AI.
• Il a été impossible de déterminer si le pistolet Glock de l’AI avait ou non tiré la balle endommagée extraite du corps du plaignant.
• Les vêtements, notamment la veste, du plaignant ne comportaient aucun résidu de décharge d’arme à feu; par conséquent, il a été impossible d’effectuer un examen pour estimer la distance du tir.

Éléments obtenus auprès du service de police

Sur demande, l’UES a obtenu et examiné les documents et éléments suivants du Service de police de Timmins :
• les rapports du système de répartition assisté par ordinateur sur les détails de l’événement;
• les enregistrements audio des communications;
• les enregistrements de l’appel au 911;
• le rapport des détails de l’événement;
• le rapport d’incident général;
• le rapport général;
• les enregistrements des caméras internes des voitures de police des agents en cause;
• les notes de l’AT no 2;
• les notes de l’AT no 1;
• les notes de l’AI;
• la liste des agents en cause dans l’incident;
• la procédure relative à l’utilisation de la force;
• la procédure relative à l’arrestation d’une personne;
• la politique relative aux arrestations;
• la politique relative à l’utilisation de la force;
• les rapports d’incident supplémentaires (x5);
• le rapport de formation sur l’utilisation de la force et d’armes à feu;
• l’enregistrement vidéo de la déclaration de l’homme qui a appelé au 911;
• le sommaire de la déclaration du témoin qui a appelé au 911.

Éléments obtenus auprès d’autres sources

L’UES a obtenu et examiné les documents et éléments suivants de sources autres que la police :
• le dossier médical du centre Horizon Santé-Nord de Sudbury;
• le dossier médical de l’Hôpital de Timmins et du district;
• l’enregistrement vidéo d’une caméra d’une résidence de la rue Rea Sud.

Description de l’incident

Les événements en question sont clairs, d’après les éléments de preuve réunis par l’UES, notamment les déclarations du plaignant et de l’AT no 2, les enregistrements vidéo des caméras internes des voitures de police de l’AI et de l’AT no 2. L’AI a refusé de participer à une entrevue de l’UES, comme la loi l’y autorise, mais il a accepté de fournir ses notes.

Vers 1 h 36 le 31 octobre 2020, le plaignant a été atteint au bas du dos d’une balle tirée par l’AI, puis il est tombé vers l’avant sur le trottoir et a roulé sur le dos. L’AT no 1, arrivé sur les lieux peu après les coups de feu, a menotté le plaignant les mains derrière le dos, après quoi l’AT no 2, présent au moment où les coups de feu ont été tirés, a soigné la blessure du plaignant en attendant les ambulanciers.

La série d’événements qui ont mené au coup de feu dont le plaignant a été atteint s’est amorcée quelques minutes avant que les agents soient aient été dépêchés à une résidence de l’avenue Commercial à la suite d’un appel au 911 au sujet d’une introduction par effraction en cours. L’AI, qui se trouvait à proximité de la propriété en question, a été le premier agent arrivé sur les lieux. Il a vu un homme sortir de la résidence en courant et se rendre jusqu’à l’avenue Commercial pour rejoindre deux autres personnes à l’angle de l’avenue Commercial et de la rue Rea Sud. Soupçonnant ces personnes d’avoir quelque chose à voir avec l’introduction par effraction signalée, l’AI les a suivies à bord de sa voiture de police sur la rue Rea Sud et les a vues entrer dans une voiture Nissan Kicks, qui était garée face au sud du côté ouest de la rue Rea Sud, juste au nord de l’avenue Bannerman. Une camionnette rouge était garée derrière.

L’AI a immobilisé sa voiture de police parallèlement à la camionnette, en l’orientant également vers le sud, et est sorti pour parler avec la conductrice – soit la TC –, qui a accepté de lui présenter son permis de conduire et le certificat d’immatriculation du véhicule. L’AI est ensuite allé parler à l’AT no 2, qui venait d’arriver sur les lieux et avait arrêté sa voiture de police au sud du véhicule Nissan, face au nord-ouest et pointant vers l’extrémité avant du véhicule. Les agents ont conclu qu’ils avaient suffisamment d’éléments pour arrêter les personnes à l’intérieur de la Nissan aux fins de l’enquête sur l’introduction par effraction. Ils ont décidé de parler d’abord aux deux hommes, une fois qu’ils seraient sortis du véhicule.

Le plaignant a refusé d’obtempérer lorsque l’AI a ouvert la portière arrière du côté du conducteur de la Nissan et a tenté de le mettre en état d’arrestation. L’agent a tendu le bras pour tenter de saisir le plaignant, ce qui a provoqué une empoignade entre les deux. La lutte s’est poursuivie à l’extérieur du véhicule, et l’agent a alors demandé l’aide de l’AT no 2.

L’AT no 2, qui s’occupait d’un autre homme assis du côté passager à l’avant de la Nissan, a contourné le devant de sa voiture de police en courant et s’est approché de la scène. De derrière la portière arrière ouverte, l’agent a donné un coup de poing sur le côté gauche de la tête du plaignant. Celui-ci a réagi en étirant le bras par-dessus la portière ouverte pour tenter de frapper l’AT no 2 à son tour. Les protagonistes ont continué de se battre, et le plaignant a reçu d’autres coups de poing à la tête de la part de l’AT no 2 et de l’AI. Peu après, la bagarre s’est déplacée vers l’arrière de la Nissan – entre l’arrière du véhicule Nissan et l’avant de la camionnette rouge. C’est à ce moment-là que le plaignant a sorti une arme de poing d’une poche de sa veste.

L’AT no 2 a été le premier à voir l’arme à feu et a crié [Traduction] « Arme à feu! ». L’agent s’est précipité pour se mettre à l’abri entre la camionnette et la voiture de police de l’AI. Au même moment, l’arme à feu du plaignant a été déchargée deux fois, et aucune balle n’a atteint l’agent.

L’AI, qui avait entendu l’AT no 2 signaler la présence d’une arme à feu, a retraité derrière la camionnette et sa voiture de police, dégainé son pistolet et tiré deux coups en direction du plaignant. Ce dernier, qui s’était alors rendu sur le trottoir, est tombé au sol, atteint d’une seule balle.

L’AT no 2 s’est approché du plaignant et a donné un coup de pied sur l’arme de poing, tombée de la main droite du plaignant durant sa chute, afin de la mettre hors de portée de celui-ci.

Les ambulanciers sont arrivés sur les lieux et ont transporté le plaignant à l’hôpital, où il a reçu un diagnostic de fracture de la colonne vertébrale et subi une chirurgie d’extraction de la balle.

Dispositions législatives pertinentes

Article 34 du Code criminel -- Défense -- emploi ou menace d’emploi de la force

34 (1) N’est pas coupable d’une infraction la personne qui, à la fois :
a) croit, pour des motifs raisonnables, que la force est employée contre elle ou une autre personne ou qu’on menace de l’employer contre elle ou une autre personne
b) commet l’acte constituant l’infraction dans le but de se défendre ou de se protéger -- ou de défendre ou de protéger une autre personne -- contre l’emploi ou la menace d’emploi de la force
c) agit de façon raisonnable dans les circonstances

(2) Pour décider si la personne a agi de façon raisonnable dans les circonstances, le tribunal tient compte des faits pertinents dans la situation personnelle de la personne et celle des autres parties, de même que des faits pertinents de l’acte, ce qui comprend notamment les facteurs suivants :
a) la nature de la force ou de la menace
b) la mesure dans laquelle l’emploi de la force était imminent et l’existence d’autres moyens pour parer à son emploi éventuel
c) le rôle joué par la personne lors de l’incident
d) la question de savoir si les parties en cause ont utilisé ou menacé d’utiliser une arme
e) la taille, l’âge, le sexe et les capacités physiques des parties en cause
f) la nature, la durée et l’historique des rapports entre les parties en cause, notamment tout emploi ou toute menace d’emploi de la force avant l’incident, ainsi que la nature de cette force ou de cette menace;
1. f.1) l’historique des interactions ou communications entre les parties en cause
g) la nature et la proportionnalité de la réaction de la personne à l’emploi ou à la menace d’emploi de la force
h) la question de savoir si la personne a agi en réaction à un emploi ou à une menace d’emploi de la force qu’elle savait légitime
3) Le paragraphe (1) ne s’applique pas si une personne emploie ou menace d’employer la force en vue d’accomplir un acte qu’elle a l’obligation ou l’autorisation légale d’accomplir pour l’exécution ou le contrôle d’application de la loi, sauf si l’auteur de l’acte constituant l’infraction croit, pour des motifs raisonnables, qu’elle n’agit pas de façon légitime.

Analyse et décision du directeur

Le 31 octobre 2020, le plaignant a été atteint d’une balle tirée par un agent du Service de police de Timmins et a subi de graves blessures durant l’incident. Cet agent a été identifié comme l’agent impliqué – l’AI – pour les besoins de l’enquête de l’UES. D’après mon évaluation des éléments de preuve, il n’existe pas de motifs raisonnables de croire que l’AI a commis une infraction criminelle ayant un lien avec les coups de feu tirés.

En vertu de l’article 34 du Code criminel, l’usage de la force est légalement justifié pourvu que ce soit pour se défendre ou défendre une autre personne contre une attaque raisonnablement redoutée, à cause d’actes réels ou de menaces, à condition que la force en question soit raisonnable dans les circonstances. L’évaluation du caractère raisonnable doit être fondée sur les circonstances du moment, par exemple : la nature de la force ou de la menace; la mesure dans laquelle l’emploi de la force était imminent et l’existence d’autres moyens pour parer à son emploi éventuel; la question de savoir si les parties en cause ont utilisé ou menacé d’utiliser une arme; et la nature et la proportionnalité de la réaction de la personne à l’emploi ou à la menace d’emploi de la force. Je considère que les éléments de preuve sont insuffisants pour conclure raisonnablement que la force employée par l’AI dépassait les limites prescrites par l’article 34 du Code criminel.

D’emblée, il importe de préciser que l’AI était dans l’exercice légitime de ses fonctions lorsqu’il a confronté le plaignant pour la première fois. Il avait vu l’un des hommes se trouvant à l’intérieur de la Nissan s’enfuir de la résidence où l’introduction par effraction signalée venait de se produire. Dans ce contexte, j’ai la conviction que les soupçons de l’AI selon lesquels les occupants de la Nissan étaient impliqués dans l’introduction par effraction étaient fondés sur des motifs raisonnables, ce qui justifiait la détention du plaignant pour les besoins d’une enquête : R. c. Mann, [2004] 3 R.C.S. 59.

Par la suite, les agents avaient le droit de recourir à la force pour se protéger lorsque le plaignant a résisté à son arrestation et a sorti une arme de poing, et j’estime qu’ils ont agi en respectant les limites de la loi. Au moment où le plaignant a sorti son arme à feu, il était engagé dans une bagarre aussi brève qu’intense avec les agents [fn]2]/fn]. S’il avait la possibilité de l’éviter, il n’allait manifestement pas se rendre aux agents. Dans ce contexte, l’AT no 2 et l’AI ne pouvaient que présumer, et je suis persuadé que c’est ce qu’ils ont fait, que leur vie était en péril imminent lorsque deux coups, dont au moins un dans leur direction, ont été tirés par le plaignant avec une arme à feu. À la vue de l’arme à feu, l’AT no 2 s’est mis à l’abri entre la camionnette et la voiture de police de l’AI, garées derrière la Nissan, et a eu la chance de ne pas être touché par une balle. L’AI, qui a fait de même, a rapidement riposté en tirant deux balles vers le plaignant, dont l’une l’a atteint au bas du dos, le neutralisant rapidement. Au vu du dossier, je ne peux reprocher à l’AI d’avoir réagi à ce qui était de toute évidence une menace pour sa vie en faisant également usage d’une force létale. L’usage d’une force moindre, telle qu’une décharge d’arme à impulsions, avait peu de chances de réussir, car le plaignant portait un manteau d’hiver. Qui plus est, les circonstances ne permettaient pas l’établissement d’un simple périmètre de sécurité à partir d’une position à couvert, étant donné la proximité des parties et la nécessité immédiate de priver le plaignant de sa capacité de décharger son arme à feu, qu’il tenait toujours lorsqu’il a été atteint d’une balle. De même, le fait que le plaignant a été blessé dans le dos ne saurait être invoqué pour remettre en question la justification légale des coups de feu tirés par l’AI. Il ne s’agissait manifestement pas de quelqu’un visiblement plus déterminé à fuir la police qu’à causer des lésions corporelles graves ou la mort. Au contraire, deux balles venaient d’être tirées de l’arme du plaignant lorsque l’AI a déchargé la sienne. Compte tenu de la vitesse à laquelle se déroulaient les événements et du décalage inhérent au temps de réaction, les éléments de preuve ne permettent pas d’établir raisonnablement que le plaignant ne constituait pas un danger réel imminent pour la vie de l’AT no 2 et de l’AI lorsqu’il a été atteint d’une balle.

Pour les raisons exposées ci-dessus, il n’existe pas de motifs raisonnables de croire que l’AI a agi de façon illégale lorsqu’il a fait feu sur le plaignant. Par conséquent, il n’y a pas lieu de porter des accusations au criminel dans cette affaire et le dossier est clos.


Date : 21 juin 2021

Signature électronique

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) On n’a pu déterminer si le trou avait été perforé par une des balles tirées durant l’incident en cause dans le présent dossier. [Retour au texte]
  • 2) J’ai la conviction que la force employée par les agents durant la bagarre était raisonnablement nécessaire en vertu du paragraphe 25(1) du Code criminel. Plus précisément, puisqu’il s’agissait d’un homme déterminé à fuir les agents de police, et dont la résistance s’est intensifiée au point qu’il a sorti une arme à feu après avoir reçu plusieurs coups de poing à la tête donnés par l’AT no 2 et l’AI, les éléments de preuve ne permettent pas d’établir qu’à ce moment-là, les agents ont employé une force excessive. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.