Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 21-TCI-015

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’exécution de la loi qui enquête sur les incidents mettant en cause un agent et impliquant un décès, une blessure grave, la décharge d’une arme à feu contre une personne ou une allégation d’agression sexuelle. Selon la définition de la Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales (Loi sur l’UES), « agents » s’entend des agents de police, des agents spéciaux employés par la Commission des parcs du Niagara et des agents de la paix en vertu de la Loi sur l’Assemblée législative. La compétence de l’UES s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux en Ontario.

En vertu de la Loi sur l’UES, le directeur de l’UES doit établir, d’après les preuves recueillies dans le cadre d’une enquête, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’un agent a commis une infraction criminelle. Si de tels motifs existent, le directeur a le pouvoir de faire porter une accusation criminelle contre cet agent. Par contre, en l’absence de tels motifs, le directeur ne peut pas porter d’accusation. Dans ce cas, un rapport d’enquête est rédigé et rendu public, sauf s’il portait sur des allégations d’agression sexuelle, auquel cas le directeur de l’UES peut consulter la personne concernée et exercer son pouvoir discrétionnaire de ne pas publier le rapport pour protéger la vie privée de la personne concernée.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi de 2019 sur l’Unité des enquêtes spéciales

En vertu de l’article 34, certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment :
  • le nom d’un agent impliqué, d’un agent témoin, d’un témoin civil ou d’une personne concernée, ainsi que tout renseignement permettant d’identifier ces personnes; 
  • des renseignements qui pourraient amener à ce que l’identité d’une personne ayant signalé avoir été agressée sexuellement soit révélée dans le contexte de l’agression sexuelle; 
  • des renseignements qui, de l’avis du directeur de l’UES, peuvent présenter un risque de préjudice grave pour une personne; 
  • des renseignements qui divulguent des techniques ou méthodes d’enquête; 
  • des renseignements dont la diffusion est interdite ou restreinte par la loi; 
  • des renseignements pour lesquels la protection de la vie privée d’une personne obtenue grâce à leur non-publication l’emporte clairement sur l’intérêt public de les publier.

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

En vertu de l’article 14 (article relatif à l’exécution de la loi), certains renseignements peuvent être omis de ce rapport, notamment : 
  •  des renseignements qui révèlent des techniques ou méthodes d’enquête confidentielles utilisées par des organismes chargés de l’exécution de la loi; 
  • des renseignements dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment : 
  •  les noms de personnes, y compris des témoins civils et des agents impliqués et témoins; 
  • des renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête. 

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé

En vertu de cette loi, le présent document ne contient aucun renseignement personnel sur la santé de personnes identifiables.

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’exécution de la loi.

Exercice du mandat

En vertu de l’article 15 de la Loi sur l’UES, l’UES peut enquêter sur la conduite d’agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara ou agents de la paix en vertu de Loi sur l’Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, des blessures graves, une agression sexuelle ou la décharge d’une arme à feu contre une personne.

Une personne subit une « blessure grave » qui relève de la compétence de l’UES si, selon le cas : elle subit une blessure pour laquelle elle est admise à l’hôpital, elle souffre d’une fracture du crâne, d’un membre, d’une côte ou d’une vertèbre, elle souffre de brûlures sur une grande partie du corps, ou elle subit une perte de la vision ou de l’ouïe par suite d’une blessure.

De plus, une « blessure grave » désigne toute autre blessure subie par une personne susceptible d’avoir des répercussions sur la santé ou le confort de cette personne et qui n’est pas de nature passagère ou bénigne.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur les blessures subies par une personne transgenre de 47 ans (le « plaignant ») lors d’une interaction avec la police.

L’enquête

Notification de l’UES
 

Le 12 janvier 2021, vers 15 h 40, le Service de police de Toronto (SPT) a communiqué avec l’UES et donné le rapport qui suit.

Le 11 janvier 2021, des agents de l’Unité des crimes majeurs (UCM) ont arrêté la personne concernée dans le secteur du 1675, avenue Wilson, en vertu d’un mandat d’arrêt pour voies de fait. Elle a été plaquée à terre lors de son arrestation, puis transportée à la 41e division où elle s’est plainte d’une douleur à l’épaule. À 21 h 33, on l’a amenée à l’Hôpital général de Scarborough où on lui a diagnostiqué une fracture à l’omoplate droite et deux côtes fracturées.

À sa sortie de l’hôpital, la personne concernée a été reconduite à la 41e division en attendant une audience de libération sous caution.

L’équipe
 

Date et heure de l’envoi de l’équipe :     12 janvier 2021 à 7 h 37

Date et heure d’arrivée de l’UES sur les lieux :     12 janvier 2021 à 9 h
  
Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés :     3

Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés :     0

Nombre de spécialistes de la reconstitution des collisions assignés :     0

Personne concernée (le « plaignant ») :


Personne transgenre de 47 ans, interrogée le 19 janvier 2021 [1]


Agent impliqué (AI)
 

AI no 1     N’a pas consenti à se soumettre à une entrevue, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué. Ses notes ont été reçues et examinées.

AI no 2     A participé à une entrevue le 18 février 2021, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.


Agents témoins (AT)
 

AT no 1     A participé à une entrevue

AT no 2     A participé à une entrevue

Les agents témoins ont participé à une entrevue le 21 janvier 2021.


Éléments de preuve

Les lieux 
 

Les enquêteurs n’ont pas examiné ni analysé la scène de l’incident.

L’avenue Wilson est orientée est-ouest, avec deux voies de circulation dans chaque direction. Le côté sud de l’avenue Wilson est bordé d’établissements commerciaux, dont l’hôtel Toronto Plaza et, à l’ouest de celui-ci, des commerces du secteur de l’automobile, comme le Beverly Hills Auto Centre et Super Tire and Auto. Les commerces sont séparés de la chaussée par un trottoir de largeur courante et une bande gazonnée. Le côté nord de l’avenue Wilson est bordé d’immeubles d’appartements de faible hauteur. Beverly Hills Drive est orienté vers le sud depuis l’avenue Wilson. L’intersection est contrôlée par des feux de signalisation.

La première image ci-dessous est une photo satellite de l’intersection de l’avenue Wilson et de Beverly Hills Drive (source : Google Maps), avec le nord orienté vers le haut de la page. Cette photo a été prise en 2021 et a été marquée pour montrer la distance entre environ le milieu de l’accès ouest de l’allée de l’hôtel Toronto Plaza et le point médian des jardinières en béton près de Beverly Hills Drive – soit une distance d’environ 100 mètres.

La deuxième photo, extraite de Google Maps, montre les jardinières (telles qu’elles apparaissaient en novembre 2020) sur lesquelles le plaignant est tombé. La vue de la caméra est du nord au sud. L’hôtel Toronto Plaza est à l’extérieur de la photo, sur la gauche. Beverly Hills Drive est à l’extérieur de la photo, sur la droite.

Figure one
Figure 1 - Image satellite Google Maps de l’intersection de l’avenue Wilson et de Beverly Hills Drive

Figure two
Figure 2 - Image Google Maps montrant les jardinières

Éléments de preuve sous forme de vidéos, d’enregistrements audio ou de photographies 
 

Vidéo de la salle d’admission du poste de police

L’UES a demandé 15 janvier 2021 et reçu le 25 janvier une vidéo de la garde du plaignant à la 41e division à compter du 11 janvier 2021. Ce qui suit est un résumé de cette vidéo.

11 janvier 2021

À 20 h 43, un sergent d’état-major et l’AT no 1 sont dans la salle d’admission du poste. L’AT no 1 sort de la pièce et revient, à 21 h 44, avec le plaignant. L’AT no 1 dit au plaignant que la salle est enregistrée en audio et en vidéo. Le plaignant dit que son épaule semble cassée et que ses mains saignent. L’AT no 1 donne au sergent d’état-major un résumé de l’arrestation du plaignant et énumère ses accusations. On pose une série de questions au plaignant. Le plaignant se plaint d’avoir extrêmement mal à l’épaule. Le sergent d’état-major lui demande ce qui s’est passé. Le plaignant répond qu’on l’a plaqué à terre et qu’il a l’impression que c’est cassé, puis, se tournant vers l’AT no 1, lance une injure.

Le sergent d’état-major dit au plaignant qu’on va bientôt lui retirer les menottes et qu’on demandera à des ambulanciers paramédicaux d’évaluer ses blessures. Il dit aussi au plaignant qu’il reconnait qu’il est transgenre et lui demande s’il préfère être examiné par un agent ou une agente. Le plaignant répond que cela lui est égal. Un agent effectue la fouille et saisit le téléphone cellulaire du plaignant. Le plaignant est très mécontent qu’on lui prenne son téléphone et demande qu’on le lui rende.

À 20 h 54, le plaignant est escorté hors de la salle d’admission.

12 janvier 2021

À 2 h 28, le plaignant entre dans la salle d’admission. On lui dit qu’on va le remettre en cellule maintenant qu’il est de retour de l’hôpital. Le plaignant dit qu’il voudrait faire un appel téléphonique parce qu’il vient juste d’avoir [traduction] « ses côtes écrasées et son épaule fracturée ». Il dit aussi que quelqu’un se faisait passer pour un criminel et affirmait qu’il lui devait de l’argent, qu’on l’a « bousculé » et qu’il craignait que les gens qui le bousculaient lui tirent dessus. Il demande de nouveau de passer un appel téléphonique et on lui a dit qu’il le peut le faire. À 2 h 29, le plaignant est escorté hors de la salle d’admission.

À 17 h 54, un agent spécial escorte le plaignant dans la salle d’admission et lui dit qu’on lui a accordé la libération sous caution et qu’ils ont besoin de remplir quelques formalités administratives. On lui dit de nouveau que la salle d’admission est enregistrée en audio et vidéo. Le plaignant signe les documents de libération et un reçu pour la restitution de ses biens, et s’excuse d’avoir donné « du fil à retordre » aux policiers. On lui dit que ça va et qu’on comprend qu’il souffrait.

À 17 h 58, le plaignant sort de l’aire d’admission.
     

Enregistrements des communications

L’UES a demandé les enregistrements des communications au SPT le 14 janvier 2021 et les as reçus le 22 janvier 2021. En voici un résumé :

Le 11 janvier 2021, à 17 h 58, l’AT no 2 annonce que lui et son équipe partent; une discussion s’ensuit au sujet de la division où ils seraient à des fins de notification.

À 17 h 59, l’AT no 2 avise les autres agents qu’il a « contacté » le plaignant et lui a dit qu’ils seraient là à 19 h 30; le plaignant a confirmé qu’il les rencontrerait.

À 18 h, l’AT no 2 avise l’opérateur des communications qu’il se trouve au 1677, avenue Wilson (hôtel Toronto Plaza). L’AT no 1 dit aux communications qu’il fait partie de cette équipe.

À 18 h 38, l’AT no 2 dit à l’équipe qu’une fois tout en place, il enverrait un message et attendrait l’arrivée du plaignant. L’endroit est suffisamment vaste, mais comme il a remarqué une activité liée à la drogue et un véhicule de police sans rapport avec leur mission devant l’hôtel, il dira au plaignant qu’il ne veut pas le rencontrer devant l’hôtel.

À 18 h 47, l’AT no 2 dit qu’il est dans le secteur et demande par radio à l’AT no 1 s’il est là. L’AT no 1 répond qu’il l’a suivi. L’AT no 2 demande ensuite à l’AI no 2 s’il est prêt. L’AI no 2 répond par l’affirmative. L’AT no 2 dit à l’équipe qu’il va envoyer un message au plaignant. Il demande de nouveau aux membres de son équipe s’ils sont en place dans le stationnement arrière. Ils répondent par l’affirmative.

À 18 h 57, l’AT no 2 demande à l’équipe de se rendre au stationnement de Superior Tire où le plaignant devrait arriver dans cinq minutes. À 18 h 58, l’AT no 2 dit que dès qu’il verra le plaignant arriver sur le trottoir, il l’annoncera.

À 18 h 59, l’AT no 2 dit que le plaignant lui a envoyé un message disant qu’il allait à l’arrière de l’hôtel. L’AT no 2 va lui envoyer un message pour lui demander de venir vers eux. L’AT no 2 ajoute que le plaignant viendra forcément le long du trottoir à cause de la clôture.

À 19 h, l’AT no 2 dit à son équipe qu’il est à pied dans le stationnement.

À 19 h 02, quelqu’un demande si c’est le plaignant qu’il a vu marcher sur le trottoir. L’AT no 2 répond qu’il est sûr que c’est lui. Quelques secondes plus tard, l’AT no 2 confirme que c’est bien le plaignant sur le trottoir.

À 19 h 03, l’AT no 1 dit à l’opérateur des communications qu’ils détiennent quelqu’un au coin de l’avenue Wilson et de Beverly Hills Drive, et lui demande d’en aviser la division. Il demande aussi que la division envoie un fourgon de transport de prisonniers.

À 19 h 04, un agent dit qu’il pense qu’on n’a pas besoin de lui et qu’il s’en va pour commencer la paperasse. D’autres agents répondent que ça va.

À 19 h 04, l’opérateur des communications affecte un fourgon de transport de prisonniers à l’appel et dit à l’équipe chargé de l’arrestation que le fourgon viendra peut-être du centre-ville.

À 19 h 08, l’AT no 1 demande à l’opérateur des communications une heure estimée d’arrivée du fourgon; l’opérateur répète qu’il vient du centre-ville.

À 19 h 09, les agents du fourgon de transport annoncent qu’ils sont en route et demandent une adresse. Quatre minutes plus tard, ils disent qu’ils arriveront dans 14 minutes. L’opérateur des communications demande alors aux membres de l’équipe chargée de l’arrestation de confirmer qu’ils ont bien reçu ce message. Comme il n’y a pas de réponse, l’opérateur essaye à plusieurs reprises de les joindre, sans succès. À 19 h 17, quand l’AT no 1 finit par répondre, l’opérateur des communications lui dit que la 31e division essaye de communiquer avec eux.

À 19 h 18, un agent de la 31e division demande à l’AT no 1 l’identité de la personne qu’ils ont placée sous garde. On lui répond et l’unité de la 31e division dit que ce n’est pas la personne qu’ils recherchent.

À 19 h 27, les agents du fourgon de transport arrivent et, sept minutes plus tard, annoncent qu’ils sont en route vers la 41e division avec le plaignant. Ils indiquent leur kilométrage de départ.

À 19 h 35, l’AT no 2 annonce qu’il retourne avec son équipe à la 41e division.

À 20 h 00, le fourgon de transport arrive à la 41e division et est libéré à 20 h 46.

À 21 h 06, la 41e division dit que le plaignant a déclaré avoir très mal à l’épaule et demande qu’on envoie des ambulanciers paramédicaux. Deux minutes plus tard, la salle radio demande qu’une ambulance vienne à l’entrée sécurisée pour véhicules de la 41e division.

À 21 h 17, la 41e division dit à la salle radio que les ambulanciers paramédicaux ont évalué le plaignant et qu’il faut le conduire à l’hôpital. On demande à des agents d’escorter le plaignant. Les agents chargés de l’escorte disent qu’ils accompagnent le plaignant à l’hôpital à 21 h 24. Ils arrivent à l’hôpital à 21 h 41.

Éléments obtenus auprès du service de police 
 

Sur demande, le SPT a remis à l’UES les éléments et documents suivants entre le 14 janvier et le 12 avril 2021 :

  •  Système Intergraph de répartition assistée par ordinateur – rapport de détails d’événement;
  •  Enregistrements des communications;
  •  Vidéo de l’admission au poste de police;
  •  Notes de l’AT no 1;
  •  Notes de l’AI no 1;
  •  Notes de l’AT no 2;
  •  Rapport de blessure;
  •  Rapport général d’incident;
  •  Mandat d’arrêt;
  •  Politique du SPT – Arrestation;
  •  Politique du SPT – Recours à la force;
  •  Politique du SPT – Recours à la force – Annexe A;
  •  Politique du SPT – Recours à la force – Annexe B.

Description de l’incident

Le scénario suivant découle du poids des éléments de preuve recueillis par l’UES, dont des entrevues avec le plaignant, avec l’AI no 2 et avec deux autres agents qui ont participé à l’arrestation. L’AI no 1 n’a pas consenti à participer à une entrevue avec l’UES, comme il en avait le droit. Il a cependant autorisé la communication de ses notes sur l’incident.

Dans l’après-midi du 11 janvier 2021, des agents de l’Unité des crimes majeurs de la 41e division, sous la direction de l’AT no 2, se sont réunis pour planifier l’arrestation du plaignant. Le plaignant faisait l’objet d’un mandat d’arrestation en lien avec une voie de faits qu’il aurait perpétrée en décembre 2020. L’AT no 2 avait des renseignements indiquant que le plaignant résidait près de l’avenue Wilson et de la rue Jane. Se faisant passer pour quelqu’un qui avait de l’argent pour lui, l’AT no 2 a envoyé un texto au plaignant et convenu avec lui de se rencontrer plus tard dans la soirée près de l’hôtel Toronto Plaza, au 1677 avenue Wilson.

En tenue civile et dans des voitures banalisées, l’AT no 2 et son équipe, composée des AT no 1, AI no 1 et AI no 2, se sont dirigés vers l’hôtel. Remarquant une voiture de police garée devant l’hôtel pour une autre affaire, l’AT no 2 a de nouveau contacté le plaignant pour lui demander de le rencontrer dans le stationnement du Super Tire and Auto, à une courte distance à l’ouest de l’hôtel. Le plaignant a accepté et les agents ont garé leurs véhicules à proximité.

Vers 19 h, le plaignant est arrivé à pied, se dirigeant vers l’ouest sur le trottoir sud de l’avenue Wilson. Quand il est parvenu à la hauteur du Super Tire and Auto, l’AI no 2 l’a accosté. Quand l’AI no 2 l’a avisé qu’il était un policier, le plaignant s’est enfui en courant.

Au même moment, l’AI no 1 et l’AI no 2, qui étaient sortis de leurs véhicules garés à proximité, ont rejoint l’AI no 2 à la poursuite du plaignant. En quelques secondes, l’AI no 1, a rattrapé le plaignant, l’a saisi du côté gauche et l’a poussé vers une jardinière de buissons. Le plaignant a basculé par-dessus la jardinière et est tombé par terre.

L’AI no 2 et l’AI no 1 se sont approchés du plaignant et ont tenté de l’arrêter. Le plaignant, à plat ventre sur le sol, a refusé de sortir les bras de sous son torse. L’AI no 1 lui a saisi les pieds et l’AI no 2 a lutté avec lui pour prendre le contrôle de ses bras. L’AI no 2 a finalement réussi à libérer les bras du plaignant, à les placer dans son dos et à les attacher avec les menottes.

Après avoir arrêté le plaignant, les agents l’ont aidé à se relever et à s’assoir sur le rebord d’une des jardinières. Un fourgon de transport de prisonniers est arrivé et a emmené le plaignant à la 41e division, où il a été enregistré et placé en cellule.

Une fois sous garde, le plaignant s’est plaint de douleurs. On l’a conduit en ambulance à l’hôpital où on lui aurait diagnostiqué une fracture de l’omoplate et de la clavicule et des côtes fracturées du côté gauche.

Dispositions législatives pertinentes

Paragraphe 25(1) du Code criminel -- Protection des personnes autorisées

25 (1) Quiconque est, par la loi, obligé ou autorisé à faire quoi que ce soit dans l’application ou l’exécution de la loi :
a) soit à titre de particulier
b) soit à titre d’agent de la paix ou de fonctionnaire public
c) soit pour venir en aide à un agent de la paix ou à un fonctionnaire public
d) soit en raison de ses fonctions

est, s’il agit en s’appuyant sur des motifs raisonnables, fondé à accomplir ce qu’il lui est enjoint ou permis de faire et fondé à employer la force nécessaire pour cette fin.

Analyse et décision du directeur

Le plaignant a été grièvement blessé lors de son arrestation par des agents du SPT le 11 janvier 2021. Deux des agents qui ont procédé à l’arrestation – l’AI no 1 et l’AI no 2 – ont été désignés en tant qu’agents impliqués aux fins de l’enquête de l’UES. Après avoir évalué les éléments de preuve, j’estime qu’il n’y a aucun motif raisonnable de croire que l’un ou l’autre des agents impliqués aient commis une infraction criminelle en lien avec l’arrestation et la blessure du plaignant.

En vertu du paragraphe 25 (1) du Code criminel, les policiers sont exonérés de toute responsabilité criminelle lorsqu’ils ont recours à la force dans l’exécution de leurs fonctions, pour autant que cette force n’excède pas ce qui est raisonnablement nécessaire à l’accomplissement d’un acte qui leur est enjoint ou permis de faire en vertu de la loi. Les agents avaient un mandat pour l’arrestation du plaignant et étaient donc en droit de chercher à le placer sous garde.

Je suis également convaincu que ni l’AI no 1 ni l’AI no 2 n’ont utilisé une force excessive pour procéder à l’arrestation du plaignant. Le plaignant avait prouvé son intention de se soustraire à son arrestation. Dès que les agents l’ont confronté, il s’est enfui en courant vers l’ouest le long des commerces du côté sud de l’avenue Wilson, à l’ouest de l’hôtel Toronto Plaza. Dans les circonstances, les agents avaient le droit de recourir à une certaine force pour stopper la fuite du plaignant. En poussant le plaignant vers l’avant pour le faire tomber, l’AI no 1 semble avoir fait usage d’une force mesurée et proportionnée. Bien que cela ait probablement causé certaines des blessures du plaignant, sinon toutes, la force avec laquelle le plaignant a atterri sur le sol résultait autant de son élan à ce moment-là que de la poussée de l’AI no 1.

Une fois à terre, le plaignant a résisté à son arrestation en refusant de sortir les bras de sous son corps, mais a finalement été menotté par l’AI no 2. Les agents n’ont asséné aucun coup au plaignant. L’AI no 2 a exercé une pression sur le dos du plaignant avec ses bras pour obtenir un effet de levier et tirer parti de toute sa puissance musculaire pour maîtriser les bras du plaignant. Dans ce cas aussi, même s’il n’est pas impossible que la force exercée par l’AI no 2 ait causé les blessures du plaignant, ou y est contribué, je ne peux raisonnablement pas conclure que cette force excédait ce qui était nécessaire pour surmonter la résistance du plaignant et le menotter.

Un élément de preuve suggère que quand le plaignant était à terre, un agent lui a donné un coup de genou. Certaines raisons me portent à croire qu’il serait imprudent et risqué d’accorder du crédit à cet élément de preuve. Néanmoins, même si c’était vrai, je ne suis pas convaincu que la nature et l’étendue de cette prétendue force étaient illégales étant donné que le plaignant résistait à son arrestation et n’avait pas encore été menotté à ce moment-là.

En dernière analyse, comme il n’y a pas suffisamment de preuves pour croire raisonnablement que l’AI no 2 et l’AI no 1 se soient comportés autrement que légalement tout au long de leur interaction avec le plaignant, il n’y a aucune raison de porter des accusations criminelles contre l’un ou l’autre de ces agents. Le dossier est donc clos.


Date : 3 mai 2021

Approuvé par voie électronique par

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Notes

  • 1) La personne concernée s'est identifiée comme une personne transgenre et a demandé qu'on utilise le masculin pour la désigner. [Retour au texte]

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.