Rapport du directeur de l’Unité des enquêtes spéciales - Dossier nº 20-OVI-267

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Mandat de l’UES

L’Unité des enquêtes spéciales (« l’UES » ou « l’Unité ») est un organisme civil d’application de la loi qui mène des enquêtes sur les incidents à l’origine de blessures graves, de décès ou d’allégations d’agressions sexuelles, dans lesquels des agents de police sont en cause. La compétence de l’Unité s’étend à plus de 50 corps de police municipaux, régionaux et provinciaux dans l’ensemble de l’Ontario.

En vertu de la Loi sur les services policiers, le directeur de l’UES doit déterminer, d’après les preuves recueillies dans une enquête, si un agent a commis une infraction criminelle en rapport avec l’incident faisant l’objet de l’enquête. Si, à la suite de l’enquête, il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, le directeur a le pouvoir de déposer un chef d’accusation à l’encontre de l’agent. Subsidiairement, s’il n’y a aucun motif raisonnable de croire qu’une infraction criminelle a été commise, le directeur ne dépose pas d’accusation, mais remet un rapport au procureur général pour l’informer des résultats de l’enquête.

Restrictions concernant la divulgation de renseignements

Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (« LAIPVP »)

En vertu de l’article 14 de la LAIPVP (article relatif à l’application de la loi), certains renseignements peuvent être omis du présent rapport, notamment s’il est raisonnable de s’attendre à ce que leur divulgation ait pour effet, selon le cas :
  • de révéler des techniques et procédés d’enquête confidentiels utilisés par des organismes chargés de l’exécution de la loi;
  • de faire obstacle à une question qui concerne l’exécution de la loi ou à une enquête menée préalablement à une instance judiciaire. 

En vertu de l’article 21 de la LAIPVP (article relatif à la vie privée), le présent rapport ne contient aucun renseignement personnel protégé, notamment :
  • le nom de tout agent impliqué;
  • le nom de tout agent témoin;
  • le nom de tout témoin civil;
  • les renseignements sur le lieu de l’incident; 
  • les déclarations des témoins et les éléments de preuve qui ont été fournis à l’UES à titre confidentiel dans le cadre de l’enquête; 
  • d’autres identifiants susceptibles de révéler des renseignements personnels sur les personnes concernées par l’enquête

Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé (« LPRPS »)

En vertu de la LPRPS, le présent document ne contient aucun renseignement personnel lié à la santé de personnes identifiables. 

Autres instances, processus et enquêtes

Il se peut que certains renseignements aient été omis du présent rapport parce que leur divulgation pourrait compromettre l’intégrité d’autres instances liées au même incident, par exemple des instances pénales, des enquêtes du coroner, d’autres instances publiques ou d’autres enquêtes menées par des organismes d’application de la loi.

Exercice du mandat

La compétence d’enquête de l’Unité se limite aux incidents impliquant la police et qui ont causé un décès ou une blessure grave (y compris une allégation d’agression sexuelle).

On doit englober dans les «â€‰blessures graves » celles qui sont susceptibles d’avoir des répercussions sur la santé ou le bien-être de la victime et dont la nature est plus que passagère ou insignifiante; elles comprennent les blessures graves résultant d’une agression sexuelle. Il y aura, à priori, présomption de «â€‰blessures graves » si la victime est hospitalisée, souffre d’une fracture d’un membre, d’une côte, d’une vertèbre ou du crâne, souffre de brûlures sur une grande partie du corps, a perdu une partie du corps, la vue ou l’ouïe, ou encore si elle allègue qu’elle a été agressée sexuellement. Si un long délai est à prévoir avant l’évaluation de la gravité des blessures, l’Unité devrait en être avisée pour qu’elle puisse surveiller la situation et décider dans quelle mesure elle interviendra.

Ce rapport porte sur l’enquête menée par l’UES sur les blessures subies par une femme de 59 ans (plaignante).

L’enquête

Notification de l’UES

Le 14 octobre 2020, à 10 h 35, le Service de police de Strathroy-Caradoc a signalé ce qui suit.

Le 14 octobre 2020, à 9 h 30, un agent du Service de police de Strathroy-Caradoc a tenté d’arrêter un véhicule pour une infraction au Code de la route. Le véhicule a pris la fuite et l’agent a signalé qu’il avait entrepris une poursuite. L’agent a reçu l’ordre de mettre fin à la poursuite. Peu après, le véhicule en fuite a poursuivi son chemin vers le sud sur Christina Road et est entré en collision avec une voiture à l’intersection de Christina Road et de Longwoods Road. Les occupants du véhicule que l’agent avait poursuivi ont fui à pied. Deux personnes ont été conduites au London Health Sciences Centre à cause de blessures graves. On ne connaissait pas le nom des personnes en cause au moment de la notification.

L’équipe

Nombre d’enquêteurs de l’UES assignés : 3
Nombre d’enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES assignés : 2
Nombre de spécialistes de la reconstitution des collisions assignés : 1

Les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES ont examiné et photographié les lieux, ont pris des mesures à l’aide d’un tachéomètre électronique pour un mappage médicolégal et ont fait un enregistrement vidéo du parcours suivi durant la poursuite, qui était de 1,3 kilomètre. En outre, le spécialiste de la reconstitution des collisions de l’UES a analysé les causes de la collision de véhicule automobile et les événements connexes. La Police provinciale de l’Ontario a établi un rapport de reconstitution de la collision.

Plaignante

Femme de 59 ans; a participé à une entrevue et ses dossiers médicaux ont été obtenus et examinés


Témoins civils

TC no 1 A participé à une entrevue
TC no 2 A participé à une entrevue
TC no 3 A participé à une entrevue
TC no 4 A participé à une entrevue
TC no 5 A participé à une entrevue
TC no 6 A participé à une entrevue
TC no 7 A participé à une entrevue
TC no 8 A participé à une entrevue

Agents témoins

AT no 1 A participé à une entrevue
AT no 2 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées
AT no 3 A participé à une entrevue; notes reçues et examinées


Agent impliqué

AI A participé à une entrevue, mais n’a pas consenti à remettre ses notes, comme la loi l’y autorise en tant qu’agent impliqué.


Éléments de preuve

Les lieux

L’incident est survenu à l’intersection de Christina Road [fn]1[/fn] et de Longwoods Road, à Strathroy Caradoc. Longwoods Road était une route rurale revêtue à deux voies sur laquelle se trouvaient quelques maisons et fermes. Elle était dans un axe nord-est et sud-ouest. De plus, Longwoods Road était une route plane et en ligne droite; il y avait une ligne jaune discontinue qui séparait les voies de circulation et des lignes blanches continues sur le bord de la chaussée. La limite de vitesse affichée était de 90 km/h et la route était en bon état. Il y avait aussi un accotement en gravier de chaque côté ainsi qu’un fossé peu profond.

Christina Road était une route rurale revêtue à deux voies avec de petites collines. Elle était dans un axe nord-ouest et sud-est. Elle croisait Longwoods Road à un angle de 90 degrés, et l’intersection était dotée d’un panneau d’arrêt obligatoire. Une ligne jaune continue séparait les voies de circulation. La limite de vitesse n’était pas affichée, mais elle était présumée être de 80 km/h puisqu’il s’agissait d’une route rurale.

Il y avait des traces de pneu et de légères traces de labourage qui commençaient dans la voie ouest de Longwoods Road et se poursuivaient en direction sud jusqu’au bord de la chaussée, puis dans un champ de maïs. Les traces de pneu menaient à deux véhicules qui se trouvaient dans le champ de maïs au sud de l’intersection.

Une Corolla Toyota à quatre portes de couleur grise avait des dommages importants sur le coin avant droit et à l’avant. Le coussin gonflable latéral et celui du conducteur s’étaient déployés. La voiture avait franchi l’accotement en gravier et le fossé peu profond avant de s’immobiliser environ 25 mètres plus loin dans le champ de maïs.

Une Audi S4 noire à quatre portes avait des dommages sur le coin avant gauche et à l’avant. Le coussin gonflable latéral et celui du conducteur s’étaient déployés. La voiture a également franchi l’accotement en gravier et le fossé peu profond avant de s’immobiliser environ 5 mètres plus loin dans le champ de maïs.

Il était évident qu’une des voitures roulait vers le sud sur Christina Road et que l’autre roulait vers l’ouest sur Longwoods Road lorsqu’elles sont entrées en collision à l’intersection et que les deux voitures ont ensuite dévié vers le sud-ouest pour aboutir dans le champ de maïs.

Une Charger Dodge noire du Service de police de Strathroy-Caradoc était stationnée sur l’accotement, juste au sud-ouest de l’intersection. La voiture arborait les graphismes discrets du service de police. Elle a été identifiée comme la voiture de l’AI. En outre, la voiture était dotée de feux d’urgence derrière la calandre et le pare-brise et ils étaient tous activés. La voiture n’a subi aucun dommage. On a vérifié la sirène et les feux et on a constaté qu’ils fonctionnaient correctement. La voiture était dotée d’un poste de travail mobile Toughbook de Panasonic. Il y avait un système de radar mobile sur le tableau de bord; il semblait être verrouillé et indiquait une vitesse de 139 km/h.


Figure 1 – Les lieux

Figure 1 – Les lieux


Figure 2 – Corolla Toyota

Figure 2 – Corolla Toyota


Figure 3 – Audi S4

Figure 3 – Audi S4


Parcours suivi durant la poursuite


Les enquêteurs spécialistes des sciences judiciaires de l’UES [fn]2[/fn] ont examiné le parcours de la voiture de police en cause à l’aide des données de GPS en relevant les conditions routières (routes rurales étroites, vallonnées et sans accotement) et l’absence de panneaux affichant la limite de vitesse.

La poursuite a commencé au nord-ouest de Christina Road à une vitesse qui respectait la limite établie, d’après les données du GPS de la voiture. Comme il n’y avait pas de panneau affichant la limite de vitesse, c’est la limite par défaut pour une route rurale qui s’appliquait, soit 80 km/h.

La voiture a continué de rouler sur Parkhouse Road sur une certaine distance, puis a fait demi-tour et a tourné à gauche pour retourner sur Christina Road.

La route était droite et en bon état et comportait des marques visibles pour indiquer les voies. Cependant, elle était étroite, vallonnée et dépourvue d’accotement.

La voiture s’est approchée d’Irish Drive, qui était dotée de panneaux d’arrêt obligatoire pour les véhicules circulant sur cette route. Il y avait des entrées de cour à droite et à gauche. Près de l’intersection de Longwoods Road, la vue sur l’intersection, là où la collision est survenue, était obstruée par les collines. Il y avait un panneau annonçant l’arrêt obligatoire à la prochaine intersection. La distance totale entre l’endroit où la voiture a fait demi-tour et le lieu de la collision était de 2,9 kilomètres.

Longwoods Road était une route revêtue à deux voies. La route était droite et plane, et la limite de vitesse affichée était de 90 km/h. Pour les besoins du présent rapport, on dira que la route est sur un axe d’est en ouest. Les voies en direction est et en direction ouest étaient séparées par une ligne jaune centrale discontinue et délimitées par des lignes blanches continues du côté nord et du côté sud. De chaque côté de la chaussée, il y avait un accotement en gravier qui laissait place à un fossé couvert d’herbes. Longwoods Road était la route de transit à l’intersection. La chaussée était sèche et en bon état.

Christina Road était une route revêtue à deux voies. Elle était en ligne droite et suivait une pente descendante graduelle en direction sud, au nord de l’intersection avec Longwoods Road. Comme il n’y avait pas de panneau affichant la limite de vitesse, on a supposé que celle-ci était de 80 km/h. Il y avait une ligne jaune centrale continue qui séparait les voies en direction nord et en direction sud et un accotement étroit en gravier du côté est et du côté ouest de la route. Au nord de l’intersection, sur l’accotement ouest, un panneau annonçait un arrêt obligatoire pour les véhicules circulant vers le sud. À l’intersection avec Longwoods Road, il y avait des panneaux d’arrêt obligatoire sur les coins nord-ouest et sud-est à l’intention des véhicules circulant sur Christina Road. La chaussée était sèche et la visibilité était bonne au moment de la collision.

L’intersection se trouvait dans un secteur rural. Il y avait un champ de maïs sur le coin sud-ouest de l’intersection et un champ sur le coin nord-ouest. Pour les véhicules circulant en direction sud sur Christina Road, la vue était légèrement obstruée vers l’est par une rangée de cèdres située à environ 50 mètres de l’intersection, du côté nord de Longwoods Road. La même rangée d’arbres aurait aussi bloqué légèrement la vue pour les véhicules roulant en direction ouest sur Longwoods Road qui approchaient de Christina Road, au nord de l’intersection. Cependant, à l’intersection même, il n’y avait rien qui empêchait de voir Christina Road, du côté est comme du côté ouest.

Schéma des lieux

Schéma des lieux

Éléments de preuve matériels


Résumé des données du système de localisation automatique de véhicule


Le tableau ci-dessous indique les heures ainsi que l’emplacement ou la direction et la vitesse de la voiture du Service de police de Strathroy-Caradoc de l’AI le 14 octobre 2020. Les points rouges représentent l’intersection de Longwoods Road et de Christina Road. Les points jaunes correspondent à l’emplacement de la voiture de l’AI. La limite de vitesse affichée sur Longwoods Road était de 90 km/h. La limite de vitesse sur Christina Road n’était pas affichée, mais elle était présumée être de 80 km/h.

Chart



Témoignage d’expert


Conclusion du rapport du spécialiste de la reconstitution des collisions de la Police provinciale


La collision s’est produite lorsque le conducteur de l’Audi a omis de s’arrêter au panneau d’arrêt obligatoire et s’est engagé dans l’intersection, où il est entré en collision avec la Toyota. C’est la Toyota qui avait le droit de passage à l’intersection.

Enregistrements des communications de la police


Sommaire des enregistrements des communications


Les enregistrements des communications par radio fournis par le Service de police de Strathroy-Caradoc se résumaient à quatre fichiers .wav du canal opérationnel 1. Les trois premiers fichiers n’ont été d’aucune utilité pour l’enquête.

9 h 34 min 9 s : L’AI a appelé le centre de répartition du Service de police de Strathroy Caradoc.

9 h 34 min 15 s : Le centre de répartition du service de police lui a dit d’y aller.

9 h 34 min 19 s : L’AI a signalé qu’il essayait d’arrêter sur Christina Road une Audi de couleur noire qui se dirigeait vers Longwoods et qu’il devait être considéré comme en cours de poursuite à cause d’une infraction au Code de la route.

9 h 34 min 33 s : Le centre de répartition a dit : « 10-4 ».

9 h 34 min 34 s : L’AT no 1 a ordonné à l’AI de mettre un terme à la poursuite, de se ranger sur le côté et d’indiquer son emplacement et son kilométrage.

9 h 34 min 51 s : L’AI a demandé une ambulance et les pompiers à l’intersection de Longwoods et de Christina à cause d’une collision. [Le son d’une sirène est entendu en arrière-plan durant la conversation.]

9 h 35 min 3 s : Le centre de répartition a demandé à toutes les unités du Service de police de Strathroy Caradoc de se diriger vers le lieu de l’incident.

9 h 36 min 16 s à 9 h 36 min 49 s : L’AI a demandé de faire venir une ambulance et les pompiers pour une extraction. Le conducteur du véhicule poursuivi par l’AI s’est enfui dans un champ de maïs et s’est dirigé vers le sud, et l’AI a retrouvé une personne blessée dans le véhicule touché par la collision.

9 h 37 min 7 s : L’AT no 1 avait l’intention de communiquer avec l’escouade canine de la Police provinciale et voulait que le premier agent sur les lieux se rende directement au lieu de la collision avec l’AI et que l’unité suivante aille au sud de ce lieu, à l’intersection avec Parkhouse, afin de délimiter un périmètre de sécurité.

9 h 39 min 26 s : L’AI a signalé que le conducteur s’était enfui à pied vers le sud, dans un champ de maïs sur Longwoods, et qu’il portait des vêtements noirs.

Éléments obtenus auprès du Service de police

Sur demande, l’UES a obtenu et examiné les éléments et documents suivants du Service de police de Strathroy-Caradoc :
  • le rapport d’incident général modifié;
  • la directive sur les poursuites en vue de l’appréhension d’un suspect;
  • les notes de l’AT no 3;
  • les notes de l’AT no 2;
  • le rapport de reconstitution de la collision de la Police provinciale;
  • le rapport d’incident général initial;
  • la transcription des enregistrements des appels;
  • le rapport sur les excès de vitesse pour la voiture de l’AI;
  • les registres des communications audio;
  • les photos des lieux;
  • les certificats de formation de l’AI.

Éléments obtenus d’autres sources

L’UES a également obtenu et examiné les documents suivants de sources autres que la police :
  • le rapport d’appel d’ambulance et la lettre de divulgation;
  • le dossier médical du London Health Sciences Centre;
  • les détails de l’incident du service d’incendie;
  • les déclarations des témoins du service d’incendie.

Description de l’incident

Le déroulement des événements pertinents ressort de façon évidente des éléments de preuve recueillis par l’UES, notamment les entrevues avec la plaignante, l’AI et plusieurs témoins civils. L’enquête s’est aussi basée sur un examen des données GPS relatives à la vitesse et à la direction du véhicule de l’AI.

Aux alentours de 9 h 30, le 14 octobre 2020, l’AI était sur Parkhouse Drive, près de Christina Road, et surveillait la circulation lorsque son radar a capté une voiture roulant à 139 km/h. L’AI a laissé le véhicule, une Audi, passer devant lui et l’a vue tourner à gauche sur Christina Road sans s’arrêter au panneau d’arrêt obligatoire. L’AI a alors décidé d’arrêter le véhicule pour infractions au Code de la route et, pour ce faire, a fait demi-tour sur Parkhouse Drive, s’est arrêté au panneau d’arrêt, à l’intersection de Christina Road, puis a accéléré en direction sud pour rattraper l’Audi.

Près d’Irish Drive, l’AI a activé ses feux d’urgence et sa sirène et a signalé par radio qu’il était en poursuite. Peu après, l’AT no 1 a ordonné par radio à l’AI de mettre fin à la poursuite.

Après avoir entendu cet ordre, l’AI était sur le point d’arrêter son véhicule lorsqu’il a remarqué, à une certaine distance devant lui, que l’Audi était entrée en collision avec un autre véhicule à l’intersection de Christina Road et de Longwoods Road. Craignant que la collision ait fait des blessés, l’AI s’est rendu à grande vitesse jusqu’à l’intersection.

Lorsque la plaignante, roulant vers l’ouest sur Longwoods Road, s’était engagée dans l’intersection de Christina Road, son véhicule avait été percuté sur le côté par l’Audi, qui ne s’était pas arrêtée au panneau d’arrêt destiné aux véhicules en direction sud. La collision avait projeté les deux véhicules dans un champ de maïs situé au coin sud-ouest de l’intersection.

L’AI est arrivé sur les lieux quelques secondes après la collision, s’est stationné face à l’ouest sur Longwoods Road, à l’ouest de l’intersection, et est sorti de son véhicule pour porter assistance à la plaignante.

Celle-ci était coincée dans son véhicule, une Corolla de Toyota qui avait subi des dommages importants. Grâce à l’aide de pompiers et d’ambulanciers arrivés sur les lieux, la plaignante a été extirpée du véhicule et emmenée à l’hôpital. Elle avait subi de multiples fractures, certaines graves.

Le conducteur de l’Audi a pu sortir du véhicule et fuir la scène. Quelques jours plus tard, la Police provinciale de l’Ontario a arrêté le TC no 8 relativement à l’incident. Le TC no 8, qui a reconnu être le propriétaire de l’Audi, a affirmé que ce n’était pas lui qui conduisait le véhicule au moment de l’incident..

Dispositions législatives pertinentes

L’article 320.13 du Code criminel : Conduite dangereuse causant des lésions corporelles

320.13 (1) Commet une infraction quiconque conduit un moyen de transport  d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances.

(2) Commet une infraction quiconque conduit un moyen de transport d’une façon dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, et cause ainsi des lésions corporelles à une autre personne.

Analyse et décision du directeur

Le 14 octobre 2020, la plaignante a subi de graves blessures dans une collision de véhicule automobile. Comme le véhicule qui a percuté sa voiture était poursuivi par le Service de police de Strathroy-Caradoc juste avant la collision, l’UES a été avisée et a entrepris une enquête. Le conducteur de la voiture de police, soit l’AI, a été identifié comme l’agent impliqué pour les besoins de l’enquête de l’UES. D’après mon évaluation des éléments de preuve, il n’y a pas de motifs raisonnables de croire que l’AI a commis une infraction criminelle en relation avec la collision et les blessures de la plaignante.

La seule infraction potentielle à prendre en considération est celle de conduite dangereuse ayant causé des lésions corporelles interdite par le paragraphe 320.13(2) du Code criminel. La responsabilité relative à une infraction dépend en partie de l’existence d’une conduite représentant un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans la même situation. Ce qu’il faut déterminer dans ce dossier, c’est si la manière dont l’AI s’est conduit et a ainsi contribué à la collision représente de sa part un manque de diligence grave au point de mériter une sanction pénale. À mon avis, ce n’est pas le cas.

L'AI avait tout à fait le droit, conformément à la réglementation régissant les poursuites de la police dans la province, soit le Règlement 266/10, de se mettre à la poursuite de la voiture Audi. L’agent avait détecté avec son radar que la voiture roulait à plus de la limite de vitesse de 90 km/h et il l’avait vue omettre de s’arrêter à un panneau d’arrêt obligatoire. Comme l’AI n’avait pu identifier le conducteur ni la plaque d’immatriculation de l’Audi et que les risques pour la sécurité du public ne semblaient pas très grands à ce moment, il était justifié que l’AI tente d’arrêter le véhicule à cause d’une infraction au Code de la route.

La durée de la poursuite par l’AI et la distance parcourue derrière la voiture Audi ont été relativement courtes, soit pas plus de deux kilomètres et demi et de deux minutes. Il ne fait aucun doute que, pendant ce laps de temps, l’AI a atteint une vitesse très élevée, soit plus de 170 km/h pendant environ 30 secondes. Cela dit, cette vitesse n’est pas vraiment surprenante, vu que l’agent tentait de rattraper un véhicule qui roulait déjà plus vite que la limite de vitesse. En outre, les agents sont exemptés de l’application des limites de vitesse en vertu du paragraphe 128 (13) du Code de la route, à condition d’être dans l’exercice légitime de leurs fonctions et de prendre en considération la sécurité du public. Dans cette affaire, rien n’indique que d’autres automobilistes aient été directement mis en danger par la vitesse de l’AI. De plus, comme des témoins ont indiqué que la voiture de l’AI avait deux ou trois secondes de retard sur l’Audi, juste au sud d’Irish Drive et à environ un kilomètre du lieu de la collision, il ne semble pas que l’agent ait indûment poussé le conducteur de la voiture Audi à accélérer lorsqu’il a approché du lieu de l’impact. En fait, d’après le poids des déclarations faites par les témoins civils, au moins dix secondes se seraient écoulées entre la collision et l’arrivée de la voiture de police. Enfin, il importe de souligner que l’AI a annoncé à la radio au moment opportun qu’il s’engageait dans une poursuite et qu’il a fourni les renseignements requis au centre de communication, ce qui a permis à un supérieur, soit l’AT no 1, d’user de son pouvoir discrétionnaire pour lui ordonner d’interrompre la poursuite, ce qui était une sage décision à mon avis.

Il est très regrettable que la plaignante, qui a eu la malchance de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment, ait subi des blessures graves dans cette affaire. Pour ce qui est de la responsabilité criminelle potentielle de l’AI, je considère néanmoins, compte tenu de ce qui précède, que l’agent n’a ni causé la collision ni agi d’une manière ne respectant pas les normes de diligence prescrites par le droit criminel. Par conséquent, il n’y a aucun motif de déposer des accusations dans cette affaire, et le dossier est donc clos.


Date : 15 mars 2021

Signature électronique

Joseph Martino
Directeur
Unité des enquêtes spéciales

Note:

La version originale anglaise signée du rapport fait autorité. En cas de divergence entre cette version et les versions anglaise ou française en ligne, la version originale anglaise signée du rapport l’emporte.