Communiqué de presse

L’UES conclut l’enquête sur un décès survenu à Toronto

Numéro du dossier: 10-TCD-074   

Mississauga (13 janvier 2011) --- Le directeur de l’Unité des enquêtes spéciales (UES), Ian Scott, a conclu qu’il n’y a aucun motif raisonnable d’accuser aucun agent des Services policiers de Toronto (SPT) d’infraction criminelle liée au décès d’un Torontois survenu au mois de mai l’an dernier.

L’UES a chargé cinq enquêteurs et deux enquêteurs spécialistes en sciences judiciaires d’éclaircir les circonstances entourant cet incident. L’UES a désigné vingt-six agents comme policiers témoins et deux agents comme policiers impliqués. Dix-huit témoins civils ont été interviewés.

Peu après 18 h 30, le 5 mai 2010, deux policiers des SPT se dirigeaient en direction ouest sur l’avenue Steeles, près de la rue Keele, dans une voiture identifiée. Ils ont arrêté un véhicule conduit par Junior Manon, 18 ans, un Torontois coupable d’infraction mineure au Code de la route. Un autre passager se trouvait dans le véhicule en question. Les deux véhicules se sont arrêtés sur l’avenue Steeles W., à l’est de Founders Road, dans le périmètre nord de l’Université York.

Après avoir vérifié le système informatique de la police, l’un des policiers a arrêté M. Manon pour une infraction criminelle, soit la violation des conditions d’une ordonnance de probation, lesquelles interdisaient à M. Manon de conduire tout véhicule. Le policier a tenté de passer les menottes à M. Manon, mais celui-ci s’est dégagé et s’est enfui. Il s’est d’abord réfugié derrière un abribus à proximité, puis il a traversé l’avenue Steeles et s’est dirigé vers un monticule du côté sud-est de l’avenue Steeles et de Founders Road, sur le terrain de l’Université York. Les deux policiers impliqués l’ont pris en chasse. M. Manon a alors traversé Founders Road, tenté sans succès de pénétrer dans un véhicule stationné sur Founders Road, puis a poursuivi sa fuite en direction est, vers le milieu de la voie nord sur Founders Road. Il s’est alors retourné et a fait face aux policiers. Un policier a tenté de l’arrêter, mais M. Manon lui a asséné un coup de poing au bras, puis a continué sa course vers l’est. L’autre policier a essayé de l’appréhender en saisissant sa chemise, mais M. Manon a réussi à se dégager en laissant le policier lui retirer sa chemise. Le premier policier a empoigné M. Manon par la ceinture et tous trois sont tombés au sol, sur une surface gazonnée près du côté est de Founders Road, légèrement au nord du boulevard Ian McDonald.


Une fois au sol, les trois se sont livrés bataille. Plusieurs témoins civils de l’incident ont fait une déposition, ainsi que les deux policiers impliqués.

Le directeur Scott a déclaré : « Il a semblé que M. Manon n’avait pas l’intention d’obéir aux policiers impliqués lui ordonnant de se soumettre à une arrestation et de se laisser menotter derrière le dos. Bien que dans le feu de l’action, les trois personnes impliquées aient pu changer de position, M. Manon était initialement tourné vers l’ouest, la tête tournée vers le sud, un policier se trouvait à l’ouest de M. Manon qui lui faisait face (le « premier policier ») et l’autre (le « deuxième policier ») se trouvait à l’est et derrière M. Manon, qui était tourné vers l’ouest. Le premier policier a déclaré que M. Manon l’avait frappé de plusieurs coups de poing et qu’il avait riposté en frappant M. Manon à plusieurs reprises à la tête et sur la poitrine, du côté droit. Selon deux témoins civils, au moins quelques-uns des coups ont été assénés à M. Manon avec un émetteur-récepteur portatif. Le deuxième policier a tenté de maîtriser M. Manon en lui agrippant la tête et les épaules avec ses bras. Un des bras du policier a pu être placé brièvement autour du cou de M. Manon.

M. Manon a continué de se débattre et l’un des policiers impliqués a tenté plusieurs fois de l’immobiliser en se plaçant sur son tronc supérieur. À un moment donné, M. Manon a essayé de se relever dans un mouvement d’extension des bras, mais le poids des policiers l’en a empêché.

Lorsque les autres policiers sont arrivés, les muscles de M. Manon s’étaient relâchés. Les deux policiers impliqués se sont éloignés pour reprendre leur souffle, neuf autres policiers étant arrivés pour prêter main-forte. Deux d’entre eux ont menotté M. Manon derrière le dos. M. Manon était inconscient et ne réagissait plus; il a été placé en position de récupération, soit retourné sur le côté gauche, l’un de ses genoux placé près de la taille. Un policier a remarqué du sang sur la bouche de M. Manon, ainsi qu’un clignement de ses paupières. Il a tâté son pouls sur le côté gauche du cou, et a constaté qu’il était fort initialement, puis qu’il faiblissait. Un autre policier a senti le pouls de M. Manon en palpant son poignet. D’autres policiers ont entendu un bruit de ronflement ou de respiration bruyante provenant de M. Manon. Cependant, quand les ambulanciers sont arrivés à environ 18 h 50, M. Manon était « sans signes vitaux ». Les ambulanciers ont tenté de le réanimer et l’ont transporté en ambulance au pavillon Finch du Humber River Regional Hospital. Son décès a été constaté à 19 h 42.

Le 25 novembre 2010, l’UES a reçu un rapport de l’autopsie effectuée par le docteur Pollanen, pathologiste judiciaire en chef de la province. Ses conclusions et l’opinion quant à la cause du décès constituent un élément d’information essentiel pour l’établissement de la responsabilité criminelle potentielle des policiers impliqués. Le docteur Pollanen a conclu que la cause du décès était l’asphyxie positionnelle résultant de la bataille et des efforts physiques. Cette conclusion coïncide avec ma compréhension des faits. M. Manon a déployé des efforts physiques considérables avant son arrestation en tentant d’y échapper. Au cours d’un affrontement avec les deux policiers impliqués, après que M. Manon a tombé ou qu’il a été entraîné au sol, une pression a été appliquée sur sa poitrine de sorte que celle-ci a pu être comprimée, ce qui a pu gêner la respiration de M. Manon; cela constitue un indice classique du décès causé par asphyxie positionnelle.

De plus, aucune conclusion médicale ne vient appuyer une autre théorie quant au décès. Plus particulièrement, il n’y a aucune preuve médicale sans équivoque de compression du cou et de blessure externe au cou. Malgré quelques signes d’hémorragie interne au cou, il n’y avait à cet endroit aucune fracture, y compris de l’os hyoïde. Ces conclusions revêtent une grande importance parce que deux témoins civils ont indiqué que l’un des policiers impliqués étranglait M. Manon en lui entourant le cou de son bras. Bien qu’il soit possible que le bras d’un policier impliqué ait effectivement entouré le cou de M. Manon à un moment donné pendant cet affrontement énergique, compte tenu des conclusions médicales, mon opinion est que ce geste, s’il s’est produit, n’a pas constitué un facteur déterminant de la cause du décès. L’enquête indique également que M. Manon était conscient après que le témoin civil ait vu la présumée strangulation. Si une pression avait été appliquée au cou de M. Manon de façon à bloquer considérablement sa respiration, je crois qu’il aurait rapidement perdu connaissance. L’enquête ne corrobore pas cette conclusion.

Bien que sur le plan juridique, la cause du décès sera déterminée par un jury si une enquête criminelle est ordonnée par le Bureau du coroner en chef, aux fins d’évaluation de la responsabilité criminelle potentielle, j’estime que M. Manon est décédé de la manière décrite par le docteur Pollanen, soit par asphyxie positionnelle à la suite d’une bataille et d’efforts physiques.

Pour ce qui est de la responsabilité criminelle, en vertu de l’article 216 du Code de la route, les policiers impliqués avaient l’autorité légitime d’arrêter le véhicule de M. Manon étant donné l’expiration de sa vignette. Ils avaient également l’autorité légitime d’arrêter M. Manon pour violation des conditions de son ordonnance de probation. Enfin, les deux policiers avaient l’autorité d’utiliser la force pour effectuer l’arrestation en vertu de l’article 25 du Code criminel. Compte tenu de l’ampleur de la résistance manifestée par M. Manon et de la conclusion médicale selon laquelle la cause du décès n’était pas liée à une blessure au cou, j’estime que dans les circonstances, la force utilisée pour l’appréhender n’a pas été excessive. Son décès par asphyxie positionnelle à la suite d’efforts physiques et de bataille est tragique, mais les policiers impliqués ne peuvent être tenus criminellement responsables de la conséquence involontaire de ce qui a probablement été une appréhension légitime. »

L'UES est un organisme gouvernemental indépendant qui enquête sur la conduite d'agents (agents de police, agents spéciaux de la Commission des parcs du Niagara et agents de la paix du Service de sécurité de l'Assemblée législative) qui pourrait avoir entraîné un décès, une blessure grave, une agression sexuelle ou la décharge d'une arme à feu contre une personne. Toutes les enquêtes sont menées par des enquêteurs de l'UES qui sont des civils. En vertu de la Loi sur l'Unité des enquêtes spéciales, le directeur de l'UES doit :

  • considérer si un agent a commis une infraction criminelle en lien avec l'incident faisant l'objet de l'enquête;
  • selon le dossier de preuve, faire porter une accusation criminelle contre l'agent, s'il existe des motifs de le faire, ou clôre le dossier sans faire porter d'accusations;
  • rendre compte publiquement des résultats de ses enquêtes.

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